Dictionnaire de théologie catholique/VERSIONS DE LA BIBLE I. Versions anciennes de l'Ancien Testament.
VERSIONS DE LA BIBLE.—
Il ne saurait
être question, dans ce Dictionnaire, de traiter de
manière technique le problème si compliqué des
diverses versions de la Bible. Il y faudrait, d’ailleurs,
la compétence de plusieurs spécialistes. Les lecteurs
sont donc renvoyés d’office soit aux manuels, soit
aux encyclopédies bibliques. Mais le théologien même
ne saurait ignorer l’essentiel de ces questions complexes.
La Révélation et l’enseignement ecclésiastique
nous apprennent que les divers livres de la
Bible sont inspirés ; ils ne le sont, de toute évidence,
que dans leur état primitif, tels qu’ils sont sortis de
la plume des hagiographes. De cette première rédaction,
longue est la route à parcourir jusqu’à ce que
l’on arrive aux diverses recensions plus ou moins
fixées qui ont la prétention de reproduire aujourd’hui
tellement quellement le texte original. En quelque
langue qu’ait été rédigé celui-ci, hébreu, araméen,
grec, quelle est la correspondance entre la toute
première édition du texte et ce que nous lisons dans
les recueils plus ou moins officiels des Livres saints ?
A cette restitution, toujours plus ou moins conjecturale,
du texte primitif l’étude des versions anciennes
de la Bible apporte de précieux secours.
A un autre point de vue, l’étude des versions scripturaires est indispensable au théologien. Parole de Dieu, l’Écriture sainte a été destinée, par son divin auteur, à se répandre, à être lue. L’Écriture n’est pas un recueil d’enseignement ésotérique, destiné seulement à un petit groupe d’initiés. Quelle que soit l’importance, que nul parmi les catholiques ne cherche
à contester, de l’enseignement oral dans la transmission de la vérité révélée, la lecture de la parole de Dieu est indispensable aux croyants considérés dans leur ensemble. L'étude des versions bibliques anciennes montre que, dès la plus haute antiquité, les autorités gardiennes du dépôt script uraire ont pris soin que celui-ci fût accessible, en dépit de la question de langue, à tous ceux qui en avaient besoin. Et, pour ce qui est d'époques plus rapprochées de nous, il est intéressant, pour le théologien, de constater ce qui a été fait pour mettre la parole de Dieu, avec les précautions convenables, à la portée du grand nombre.
A cause de la diversité des problèmes soulevés, il y a intérêt à séparer l'étude des versions anciennes de la Bible et celle des traductions récentes, et pour ce qui est des premières à distinguer les versions de l’Ancien Testament et celles du Nouveau. — I. Versions anciennes de l’Ancien Testament. II. Versions anciennes du Nouveau Testament (col. 2725). III. Versions médiévales et modernes de la Bible (col. 2728).
I. Versions anciennes de l’Ancien Testament. — Il convient de les étudier dans l’ordre de leur apparition. On mettra donc en tout premier lieu la version grecque, dite des Septante, et les versions apparentées ; les versions araméennes ; enfin les versions qui dérivent plus ou moins directement des Septante.
I. LA VERSION GRECQUE DES SEPTANTE.
SOUS le
nom de version des Septante, on désigne, de temps immémorial, la plus ancienne version grecque connue de l’Ancien Testament. Cette traduction faite bien avant l'ère chrétienne pour les besoins des juifs alexandrins a été reçue et jusqu'à un certain point canonisée par l'Église : clic est encore aujourd’hui la traduction officielle des chrétiens de langue grecque. Traduite à son tour en différentes langues, elle est à la base de la plupart des anciennes versions de la Bible. Celles même qui n’en sont pas immédiatement dérivées n’ont pas laissé d’en subir l’influence. Cette antique traduction est donc un des canaux les plus importants par lesquels s’est répandue la parole écrite de Dieu.
1° Orif/ine. — L’origine cle cette version est mal connue ; à défaut de données certaines, la légende a travaillé énergiquement sur ce point. Souvent admise comme vérité historique, la légende a largement contribué à consacrer l’autorité de la version.
1. La légende.
Son point de départ se trouve dans la Lettre d’Aristée. Texte dans l'édition de Wendland, Leipzig, 1900, ou dans H.-B. Swete, An introduction to the Old Testament in areek, Cambridge, 1900, p. 499574 ; traduction allemande dans É. Kautzsch, Apokryfihrn und Pseudepigraphen des A. T., t. ii, p. 131, Cette lettre est censée écrite par Aristée, un
fonctionnaire du roi d’Egypte, Ptolémée II Philadelphe (283-247), à son frère Philocrate, qui, tout païen qu’il soit, comme Aristée d’ailleurs, s’intéresse aux choses juives. Aristée lui raconte les faveurs accordées aux Juifs par le roi, puis comment à la requête.le I)e mé I ri us do Phalère. directeur de la bibliothèque d’Alexandrie, Ptolémée a envoyé à Jérusalem nue mission demander une traduction grecque des Livres saints d’Israël. Aristée a fait partie de cette mission et peut donc rapporter ses impressions sur le culte israélite ; il a même recueilli de la bouche du grand prêtre de précieux éclaircissements ^ur l’interprétation allégorique de i.-i Loi. Quoi qu’il en soit, le pontife rassemble soixante-douze savants juifs, six par tribu, qui sont envoyés à Alexandrie avec un magnifique exemplaire de la Torah, qu’ils devront traduire. Somptueusement reçus par Pto lémée, ils sont installés dans l'île de Pbaroi OÙ
partageant le travail et mettant au besoin leurs lumières en commun, ils terminent en soixantedouze jours la traduction de la Torah. Le nom de Septante, sous lequel la traduction grecque est désignée depuis fort longtemps rappelle et le nombre des traducteurs et le nombre des jours qui furent employés au travail.
Cette narration paraît connue de Philon, Vita Mosis, ii, 5, et de Josèphe Ant. jud., XII, ii, qui ont lu vraisemblablement la lettre d’Aristée ; elle est admise par un bon nombre de Pères : S. Irénée, Cont. hser., III, xxi, 2, P. G., t. vii, col. 948 ; Clément d’Alexandrie, Strom., i, 22, t. viii, col. 892 ; Cyrille de Jérusalem, Catech., iv, 34, t. xxxiii, col. 497 ; Tertullien, Apol., xviii, P. L., t. i (1844), col. 379 ; S. Hilaire, In Psalm. //, 3, t. ix, col. 263 ; S. Augustin, à diverses reprises : De doctr. christ., II, xv, 22, t. xxxiv, col. 44 ; De civ. Dei, XVIII, xlii, t. xli, col. 602 ; S. Jérôme, qui a lu certainement la lettre d’Aristée, Præf. in Pentat., t. xxviii, col. 150. Aux données primitives s’ajoutèrent plus tard des embellissements : les soixante-douze traducteurs, enfermés séparément chacun (ou deux à deux) dans une cellule auraient réalisé exactement la même traduction. Pseudo-Justin, Orat. ad Grsec, 13, P. G., t. vi, col. 265 sq. avait vu de ses yeux les restes des cellules où avaient travaillé les interprètes et cette fable a trouvé créance chez plusieurs des Pères que nous venons de citer. Augustin lui-même s’y est laissé prendre, encore qu’il ne repousse pas l’idée d’un travail fait en commun. Voir la citation du De doctr. christ. Jérôme, par contre, proteste bruyamment contre ce « mensonge », en se réclamant de la lettre d’Aristée. Loc. cil. Cette petite histoire n’est pas sans importance, nous le dirons plus loin.
2. Critique. L’origine vraie des Septante. — La Lettre d’Aristée ne mérite aucune créance ; elle fait partie de cet ensemble considérable de littérature apocryphe mise en circulation dans un but de propagande par les Juifs alexandrins. Cf. art. Judaïsme, t. viii, col. 1591 sq. C’est l’avis unanime des critiques, encore que les auteurs diffèrent sensiblement sur la date de composition de la fameuse lettre. Entre les opinions extrêmes, celle de Schurer, p, >r exemple, qui la daterait de 200 avant J.-C, et celle de Willrich qui y trouve des allusions à Hérode, à Auguste, à Tibère et la mettrait donc après 33 de l'ère chrétienne, il y a toute une gamme d’hypothèses intermédiaires. Inutile de nous y arrêter, comme aussi de rechercher si Aristobule a connu cette lettre. La date de ce dernier est difficile à fixer et soulève de nouveaux problèmes.
En fait, la traduction en grec de la Torah doit son existence non point à l’intérêt porté par un roi d’Egypte aux choses juives, ni même au désir d’enrichir la bibliothèque d’Alexandrie, mais aux besoins de la Diaspora juive des pays hellénisés. Très nombreuse, très puissante, la communauté israélite d’Alexandrie, qui avait peu à peu oublié l’hébreu, lui-même tombé en désuétude en Palestine, avait besoin, tant pour le service synagogal, que pour les usages religieux et scientifiques des particuliers, d’une traduction grecque des saints Livres. Quand et comment prirent naissance les premiers essais, il est difficile de le dire. Peut-être la traduction du Pentateuque fut-elle déjà entreprise sous Ptolémée Philadelphe (283-217) ; en tout cas, elle existait j la qu du hte siècle, puisque l’historien juif Démétrius. auteur d’une Histoire des mis de la Judée (llspi TÛV 'IouSotlq : ^-/T.Jidiv), dont quelques fragments ont survécu, paraît bien l’avoir utilisée. Or. Démétrius semble avoir véCU sous Ptolémée IV (222205). Selon toute vraisemblance, des essais de tra 2703
- VERSIONS##
VERSIONS. LES SEPTANTE, CONTEN !
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(ludion surgirent d’abord en diverses communautés,
nous aurions dans le texte des Septante le rassemblement et la révision de ces traductions partielles. Une version de la Torah s’imposait en toute première ligne ; peu à peu s’y adjoignirent les traductions des autres livres. Ce travail d’adjonction dura longtemps : si, comme il est vraisemblable, le livre de Daniel ne prit sa forme actuelle, dans le texte original, qu’à l’époque machabéenne, sa traduction en grec ne peut guère être antérieure à la seconde moitié du 11e siècle. Il y a donc plusieurs générations entre les parties les plus anciennes et les plus récentes des Septante. On peut montrer que les traductions plus récentes dépendent de parties plus anciennement traduites. Quand le petit-fils du Siracide, qui vint en Egypte l’an 132, traduisit la collection de proverbes de son grand-père, que nous appelons l’Ecclésiastique, la traduction de tous les écrits (proto-)canoniques paraît bien avoir déjà été terminée ; cf. le Prologue de l’Ecclésiastique. En fait, un autre historien juif, Eupolémos, dans son llepi tûv èv’IouSaîa [îacnXécov, qui est sans doute du milieu du n p siècle, pouvait déjà se servir de la traduction des Paralipomènes ; Aristée (ne pas confondre avec Pseudo-Aristée), quelque temps après, utilisait pour l’histoire de Job la narration des Septante. Cf. Eusèbe, Prœpar. evang., ix, 25, P. G., t. xxi, col. 728. En résumé, la traduction des livres du canon palestinien s’échelonne sur une durée d’environ un siècle et demi. Plus tard des compléments importants furent ajoutés à cette version.
2° Contenu de la Bible des Septante.
Nous n’avons
pas à revenir ici sur la question du Canon de l’Ancien Testament. Voir t. ii, col. 1569 sq., et spécialement col. 1752. Rappelons seulement que, si les frontières du canon palestinien furent arrêtées de très bonne heure, celles du canon alexandrin demeurèrent toujours incertaines. Parmi les Juifs hellénisés, on n’éprouva jamais aucune répugnance soit à compléter par des additions diverses les livres reconnus dans la mère patrie, soit même à ajouter des livres nouveaux. De la sorte, la Bible grecque dépasse notablement en ampleur la Bible hébraïque ; elle dépasse même, de ce point de vue, notre Bible officielle latine, car un certain nombre des textes qui s’y lisent en grec n’ont pas pénétré dans la Vulgate. Il n’est pas inutile de dresser ici le catalogue des pièces qui figurent dans les éditions complètes des Septante. Les problèmes théologiques que soulèvent ces additions, plus ou moins intégralement reçues dans le texte latin officiel, ont été traités à l’art. Canon.
1. Compléments ajoutés aux livres protocanoniques.
— a) La question des livres d’Hsdras-Néhémie. — Ce groupe d’écrits se présente très différemment dans la Bible hébraïque (suivie par la Vulgate hiéronymienne ) et dans la Bible grecque. Dans cette dernière, le I er Esdras correspond à notre III Esdras (rejeté en appendice dans les éditions ordinaires de la Vulgate) ; le IIe Esdras correspond, pour la première partie (c. i-x) à notre I er Esdras, pour la seconde partie (xi-xxm) à notre IIe Esdras (= Néhémie). Il n’y a rien qui corresponde en grec à notre IVe. Esdras (rejeté en appendice comme non canonique dans la Vulgate). Ainsi le I er Esdras de la Bible grecque est-il un « apocryphe », où l’auteur a voulu faire une histoire du temple depuis les derniers moments du culte ancien jusqu’à la reconstruction d’après l’exil et au rétablissement du culte divin. Les matériaux employés se retrouvent, sauf une exception, en d’autres livres du canon palestinien : c. i = II Par., xxxv-xxxvi ; c. ii, 1-14 = Esdr., i, 1-11 ; c. ii, 16-31 = Esdr., iv, 7-24 ; c. v, 7-70 = Esdr., ii, 11v, 5 ; c. vi, 1-ix, 36 = Esdr., v, 1-x, 44 ; c. ix, 37 55 = Neh., vii, 37 fc-vm, 13a. Reste une partie originale, c. iii, 1-v, 6, qui n’a de correspondance nulle part et qui raconte la manière dont Zorobabel fut mis en évidence à la cour de Darius. La composition de ce livre soulève ainsi un certain nombre de problèmes, les uns d’ordre littéraire, les autres d’ordre théologique. Ils ont été touchés sommairement ici, art. Esdras, t. v, col. 524 sq.
b) Les parties deutérocanoniques d’Esther. — À sa traduction d’Esther faite sur l’hébreu, Jérôme a ajouté en appendice la version latine de plusieurs morceaux qui n’étaient pas dans l’hébreu et qui étaient passés du grec dans la vieille latine : songe de Mardochée ; .prière de celui-ci et d’Esther : double édit d’Assuérus, l’un contraire aux juifs, l’autre en leur faveur. Ces divers morceaux figurent dans la Bible grecque à leur place normale. Avant notre c. i, le songe de Mardochée ( = Vulg. hier., xi, 2-12, xii, 1-6) ; au c. iii, entre v. 13 et v. 14. s’intercale le premier édit d’Assuérus (Artaxerxès) (= Vulg., xiii, 1-7) ; après iv, 17, la prière de Mardochée (Vulg., xiii, 8-18) ; celle d’Esther (Vulg., xiv, 1-19). le récit de la démarche d’Esther auprès du roi (Vulg., xv, 1-19) ; après vii, 12, le second édit du roi en faveur des Juifs (Vulg., xvi, 1-24). Ainsi l’ensemble de la narration se présente d’une manière beaucoup plus satisfaisante que dans notre Vulgate latine, où Jérôme, avec-un dédain à peine dissimulé, a entassé en appendice tout ce qui ne figurait pas dans l’hébreu.
c) Les parties deutérocanoniques de Daniel. — Dans le texte original de Daniel, le grec a introduit : la prière d’Azarias, iii, 24-45, le cantique des trois enfants dans la fournaise, iii, 52-90 ; il donne en appendice et, sous un titre spécial, les deux narrations de Suzanne, et de la manière dont Daniel triompha de Bel et du Dragon. La Vulgate hiéronymienne a conservé cette disposition.
d) La prière de Manassé. — Les Paralipomènes, II Par., xxxiii, 12 sq., 18 sq., dans le texte original, faisaient mention du repentir et de la prière du roi Manassé. Un auteur grec a composé la prière en question, qui s’est introduite dans quelques manuscrits de la Bible grecque. Mais elle ne figure pas, d’ordinaire, dans le texte des Paralipomènes ; elle est renvoyée dans le recueil des toSat (voir ci-dessous). Ainsi dans Sweete, t. iii, p. 824. Notre Vulgate la donne en appendice. Le texte grec figure dans les Constitutions apostoliques, II, xxii, P. G., t. i, col. 648 sq. On a conjecturé que c’est de là que cette pièce était passée dans la Bible grecque.
2. Livres ajoutés à ceux du canon palestinien. — En dehors de ces pièces rapportées qui se sont introduites, plus ou moins tôt, dans la Bible grecque, des livres entiers y ont été ajoutés à ceux qui figuraient dans le canon palestinien.
a) Baruch. - - En appendice aux prophéties de Jérémie, figure dans les Septante un livre attribué à Baruch, qui se divise assez naturellement en trois parties : après l’introduction i, 1-14, une première division : i, 15-ur, 8 ; puis iii, 9-iv, 4 ; enfin iv. 5v, 9. Ces trois parties peuvent difficilement provenir d’un même auteur ; la première paraît bien supposer un original hébreu ; la grécité des deux dernières, nettement séparées d’ailleurs, ne permet guère de penser pour elles à un point de départ sémitique.
b) La lettre de Jérémie. — Elle figure, dans notre Vulgate comme le c. vi de Baruch. Dans la Bible grecque, elle est séparée de Baruch par les Lamentations. La grécité ferait penser d’abord que le grec est l’original ; l’on a fait valoir, néanmoins, en faveur d’un original sémitique la précision avec laquelle est décrit le culte des idoles tel qu’il se pratiquait en Babylonie, 2 705
V E R S 1 N S. L E S S E P T A N T E. V A L E l’R
2706
c) Tobie. — Dans sa recension la plus authentique, le texte donne l’impression de provenir d’un original sémitique. Pour ce qui est des problèmes que soulèvent les rapports de la narration avec le Livre d’Ahicar, voir l’art. Tobie.
d).Judith. — Est certainement la traduction grecque d’un original hébreu qui s’est perdu ; Jérôme a eu entre les mains un texte chaldaïque qui diffère assez notablement du texte grec actuel.
e) La Sagesse de Sirach (Ecclésiastique). — La préface nous renseigne sur l’origine du livre, qui a été composé en Palestine et en hébreu et a été traduit par le petit-fils de l’auteur, venu en Egypte la 38e année du roi Évergète (il ne peut s’agir que de Ptolémée VII Physcon, dont le règne débute en 170), et donc eu 132. La traduction est postérieure de plusieurs années à l’arrivée en Egypte du traducteur. On sait qu’une partie importante du texte hébreu a été récemment retrouvée. Pour le détail, voir l’art. Ecclésiastique, t. iy, col. 2028 sq.
I) La Sagesse de Salomon. — Il ne saurait faire de doute que cette éloquente réfutation de l’idolâtrie ait été composée originairement en grec, encore que l’on ne puisse absolument négliger l’hypothèse de F. l-’ocke, signalée ici, art. Sagesse, t. xiv, col. 714 : la première partie, i-v aurait pour base un recueil hébraïque de proverbes, repensés, retouchés, remaniés par l’auteur de la deuxième partie, vi-xix, qui serait ainsi l’auteur de tout l’ensemble.
g) Les quatre livres des Machabées. — Comme on l’a « lit à l’art. Machabées, t. ix, col. 1479, la Bible grecque contient non pas deux livres des Machabées, comme notre Vulgate, mais bien quatre. Les deux premiers correspondent à ceux de notre liible latine. Le IIIe est cité dans quelques descriptions des Livres saints, cf. art. cite, col. 1485, et figure dans un certain nombre de mss. des Septante (dans VAlexandrinus par exemple, mais non dans le Vaticunus, ni le Sinaiticus). Le titre s’explique par le fait qu’il y est question, comme dans les deux premiers, d’une persécution des Juifs et de leur salut miraculeux ; mais ce n’est plus la Palestine, (’est l’Egypte, qui est le théâtre des événements. La langue grecque, d’une rhétorique ampoulée, est certainement l’original. Le IVe livre qui figure dans VAlexandrinus et le Sinaiticus n’est pas une composition historique mais une « diatribe » philosophique sur ce thème : la piété rend l’homme maître de ses liassions, ocyToàcaTTOTÔç êaxiv TÔv roxÔûv '> z’jozèr t ç "KoyiayAç. Le livre ne justifie son titre que parce qu’il cherche ses exemples dans l’histoire des Machabées (le vieillard Eléazar, les sept frères martyrs et leur mère). Dans Eusèbe, II. /, ’., III, x, 6, P. G., t. xx, col. 2 11. A. et dans Jérôme, Dr vir. ill.. l 3. cet ouvrage qui est appelé simplement I [epl aûfoxpà-ropoç Aoyiojxoû est attribué a Josèphe, et cette donnée se retrouve dans divers manuscrits bibliques ; elle est fausse,
d’ailleurs. Mais, en tout état de cause, l’ouvrage est « lu début dn ie siècle de l’ère chrétienne.
h) Lis iln huit psaumes de Salomon. Ils snnl
signalés dans plusieurs descriptions bibliques parmi les ivnXey6(AEvo de l’Ancien Testament ; cꝟ. 0. von Gebhardt, MV/y.v. £oXou, ôvxo< ;. Die Psalmen Salomos mm ertten Mal mit der Benùtzung der Athoshandtchriflen und dis Codei Casanatensts herausgegeben, Leipzig, 1895, dans Texte und Unten., t. xiii, fasc. 2. Dans VAlexandrinus ils figuraient, comme le montre la table qui est en tête dn mi., après le Nouveau Testament, avec les deux épîtres de Clemenl. Il est possible qu’ils aient été copiés dans le Smailii us sm les six feuillets qui ont disparu entre la lettre de l’scudo
Bamabé et Hermas. Les huit mss. qui les contiennent,
voirSuele. The O. I. in griikA. III, p. XVI, remontent
à un archétype où les psaumes susdits étaient placés entre la Sagesse de Salomon et l’Ecclésiastique. Il suit de là que cet écrit a été quelque temps admis dans l’Ancien Testament. La Vulgate ne le contient pas. C’est la prière angoissée d’un Israélite fidèle qui, témoin de la prise de Jérusalem, demande au Seigneur la restauration de la ville sainte. Il ne peut guère s’agir que de la conquête de Pompée, et le recueil a dû prendre naissance peu après la mort ce celui-ci (48 av. J.-C). L’original devait être en hébreu ; il a complètement disparu. Cf. ici art. Judaïsme, t. viii, col. 1589. Il faut distinguer de ces psaumes les Odes de Salomon. Ces dernières, conservées en syriaque et en copte, ont dû être originairement composées en grec ; elles n’ont jamais fait partie de la Bible grecque.
i) Les cantiques. -- Plusieurs des grands manuscrits grecs donnent en appendice le recueil des cantiques qui figurent à leur place normale dans les Livres saints : les deux cantiques de Moïse (Ex., xv, 1-19 ; Deut., xxxii, 1-23), celui d’Anna (I Reg., ii, 1-10), les deux d’Isaïe (Is., v, 1-9 ; xxvi, 9-10), la prière de Jouas (Jon., ii, 3-10), celle d’Habacuc (Hab., iii, 2-19), celle d’Ézéchias (ls., xxxviii, 10-20), celle de Manassé (ci-dessus, col. 2704), celle d’Azarias et des trois enfants dans la fournaise (Dan., iii, 26-45 ; 52-88), enfin les trois cantiques du Nouveau Testament : Magnificat, Xunc dimittis et Benedictus.
3. Ordre des Livres suints dans lu Bible grecque. — La disposition des Livres sacrés dans la liible grecque est différente de celle de la Bible hébraïque et de notre Vulgate. Il n’est pas sans intérêt de la signaler. En tête le Pentateuque : réveaiç vcôcrp-ou, "1 H, oSoç. Aeuei.Ti.KOv, ’Ap10u.oi, AeuTepovô(jLiov, puis les livres historiques postérieurs ; ’Iyjooûç ut’oç NaÛY] (Josué) ; Kpi-yJ. (Juges), ’PoùÔ, A’Ii’F’A’BauLXsiœv, A’B’I lapaXei.7ro(aév<ov, A’ILE’"KaSpaç (cf. ci-dessus, col. 2703) ; ensuite nos livres poétiques et sapientiaux : M’ocXu.oi (numérotation divergente de celle de l’hébreu), [Iapoi[iiai (Proverbes), ’ExxXTjciàaTrçç, r Aa|i’x (Cantique), ’UÔ6, Zocpta £aXc !)(A<ùVOÇ (Sagesse). —091a tL, ziçy.y (Ecclésiastique) ; cet ensemble assez homogène est complété par’Eo0Tr)p, ’IouSeiO, TwoeiT, puis vient la série des prophètes : d’abord les douze petits, dans l’ordre suivant : ’Qerrje, ' [id>c. Meix<xtotç, ’IwrjX, ’OêSeia^ (Abdias), ’Itovâç, Xocv’j ; ;., ’A(16axoiijx (Habacuc), Eotpovlaç, "Ayyocioç, Za^aplaç, MaXaxtaç, cl les quatre grands : ’Hcalaç, ’Iepeuiaç (avec une capitulation très différente de celle de l’hébreu et de la Vulgate), a Jérémie sont annexés Bapotix, cf. ci-dessus, col. 2704, les BpTjvoi (Lamentations) et l"Ema-<)~> ; r l’lepe(i.£o>j, ’IeÇsxiifjX (Ézéchiel), AavirjX avec ses deux appendices : Xo’jrî-tvva et Hr/ v.y ApàxcùV. Le recueil se termine par A’Iif’A' Maxxoc6at<ov ; mais différents mss. contiennent encore les ^aXu.ol ZoXo(xojvtoç et quelquefois le Livre d’Hénoch, enfin le recueil des cant iques.
3° Valeur de lu version des Septante. 1. Au point de vin-philologique. La première qualité d’une version, C’est sa fidélité, les Septante rendent ils exactement le texte hébreu ? Aux premiers temps de l’humanisme, constatant les écarts très fréquents entre le grec et l’hébreu qu’ils lisaient, les hébraïsants se firent les échos des critiques que Jérôme [l’avait pas ménagées à la recension grecque. Sur bien des points, elle différait du lexte original, d’où la
tentation de rejeter ses leçons pour adopter sans plus
le sens fourni par l’hébreu. Cet état d’esprit a duré longtemps ; mais on a fini par se rendre compte qu’il ne fallait pas en tout et pour tout donner la préférence au texte hébreu SUI le texte grec. I. hébreu que nous lisons aujourd’hui est un texte lixe deti
nitlvement par la Massore a une date de beaucoup 708
postérieure à celle de la traduction des Septante. Cette dernière, en dépit de l’inhabileté de certains de ses auteurs, peut donc représenter un texte hébreu plus ancien et meilleur que le texte massorétique. Ce sont des cas d’espèce, à résoudre chacun pour son compte. On comprend dès lors l’intérêt que présente la reconstitution du texte primitif des Septante et les très nombreuses études, systématiquement dirigées, auxquelles il donne lieu depuis les dernières années du xixe siècle. C’est seulement quand ces travaux auront apporté tous leurs résultats, que l’on poura entreprendre une comparaison utile entre le texte hébreu et celui des Septante. La restitution de leur texte primitif se heurte, d’ailleurs, à de sérieuses difficultés, comme nous le verrons plus loin.
Quoi qu’il en soit de cette remarque générale, il est incontestable que les diverses parties de l’Ancien Testament ont été plus ou moins heureusement traduites. Ce serait la version du Pentateuque qui serait la plus réussie ; celle du Psautier est de beaucoup la plus défectueuse, le ou les traducteurs ont souvent mal compris leur texte et ont calqué systématiquement leur grec sur les mots hébreux, sans tenir le moindre compte de nuances importantes, qu’une connaissance même élémentaire de la syntaxe hébraïque aurait dû leur faire entendre. À rendre toujours et en toute hypothèse le temps perfectif de l’hébreu par l’aoriste et l’imperfectif par le futur, ils ont abouti a des contre-sens multipliés, voire à de véritables non-sens. Le malheur a voulu que ces défauts s’accentuassent encore dans le décalque latin de ce livre 1
On s’est demandé quels étaient les caractères de la langue des Septante. À ce sujet, les jugements ont été très divers. Longtemps on a parlé de langue judéo-grecque ou de grec biblique, comme s’il s’agissait là d’une sorte de dialecte spécial. L’étude du grec hellénistique, tel que nous le révèlent et les écrivains de l’époque et aussi les inscriptions, papyrus, ostraka, etc., a montré que la Bible des Septante est simplement un des monuments, et l’un des plus considérables, de la Kowyj, c’est-à-dire de ce grec courant que les conquêtes d’Alexandre avaient répandu dans toute l’Asie antérieure, en Syrie et en Egypte. Bien des particularités du vocabulaire, de la morphologie, de la syntaxe ne sont ni spécifiquement juives, ni proprement bibliques, mais appartiennent simplement à la dite Kotvrj. On ne saurait néanmoins négliger l’influence de l’original hébreu. Le souci de serrer le texte primitif, plus encore que le manque de connaissances linguistiques des traducteurs, a amené ce tour général sémitique particulièrement sensible dans certains livres historiques. Que l’on compare à ce point de vue le I er livre des Machabées, décalque d’un original sémitique, avec le IIe, abrégé d’un ouvrage composé en grec, et l’on se rendra compte que le premier n’est pas grec, tandis que l’autre l’est parfaitement.
2. Au point de vue thêoloqique.
En dépit de ses défauts, la traduction des Septante eut dès l’abord un très grand succès. Ne parlons pas seulement des milieux hellénisés de la Diaspora juive, où elle devint très vite le texte officiel, utilisé en particulier dans le culte de la Synagogue. Les chrétiens, dès le début, la reçurent des Juifs ; comme elle avait servi aux réunions synagogales, elle servit aussi aux réunions ecclésiastiques. En quoi d’ailleurs les communautés primitives ne faisaient que suivre l’exemple des apôtres. C’est le texte des Septante que citent le plus ordinairement saint Paul et les évangélistes, y compris saint Matthieu, en dépit de ses origines sémitiques. Cet usage constituait une sorte de cano nisation tacite du texte grec et devait lui valoir une révérence spéciale.
De là à considérer la Bible grecque comme participant aux privilèges du texte original, tout spécialement à celui de l’inspiration (et de l’inerrance qui en découlait), il n’y avait qu’un pas. La polémique avec les Juifs le fit aisément franchir. Ceux-ci, nous le voyons bien dans le Dialogue de Justin avec Tryphon, contestaient fréquemment l’interprétation que donnaient des textes prophétiques de l’Ancien Testament leurs adversaires chrétiens. Ils prétendaient que les oracles qui passaient pour si lumineux’aux yeux de ceux-ci ne se lisaient pas, du moins avec une égale clarté, dans leur Bible à eux. La réponse péremptoire consistait à dire que, si les textes hébraïques ne parlaient plus comme le grec, c’est qu’ils avaient été altérés plus ou moins volontairement. Le grec, au contraire, rendait au mieux le sens primitif, antérieur aux maquillages des rabbins ; aussi bien une intervention spéciale de la Providence avait mis les traducteurs à l’abri de toute erreur. De cette intervention, on trouva d’assez bonne heure la preuve dans la légende des cellules, où les traducteurs enfermés séparément, ou même deux par deux, avaient réalisé une version parfaitement identique.
Quoi qu’on ait prétendu, cette légende est en étroit rapport avec l’idée que la traduction des Septante avait été faite sous l’inspiration particulière de Dieu, tout au moins avec une assistance très spéciale. Voir les textes cités col. 2702. Tout au moins les divers auteurs qui affirment l’autorité des Septante constatent-ils l’étroit accord entre les traductions réalisées, quoi qu’il en soit des conditions matérielles où le travail a été effectué. Si Tertullien et saint Hilaire sont un peu réticents, Augustin est clair à souhait. Il se demande, dans le De docirina christiana, de quel texte de l’Écriture il faut partir. Après avoir prôné VItala, il reconnaît qu’il faut en corriger le latin par les traductions grecques. Il y en a plusieurs ; la plus autorisée pour l’Ancien Testament est celle des Septante, qui jam per omnes peritiores Ecclesias lania prwsentia sancti Spirilus inlerprelati esse dicuntur ut os unum tôt hominum fuerit. Ainsi dans les diverses Églises on est d’accord pour dire que leur travail s’est fait sous une influence du Saint-Esprit et que, dans le fait, tous ces hommes n’ont eu qu’une seule bouche. « Et si, comme on le rapporte et comme le disent beaucoup de gens tout à fait dignes de foi, ils ont fait leur travail enfermés séparément chacun dans une cellule et que, comparaison faite, il ne s’est rien trouvé dans leur texte qui différât ou pour les mots ou pour l’ordre même des mots, qui donc pourrait comparer une autre autorité à celle-ci, à plus forte raison la préférer ? Augustin se rend compte d’ailleurs que l’histoire des cellules n’est pas admise par tous et il avance prudemment une seconde hypothèse : celle d’un travail fait en commun : « S’ils ont conféré ensemble pour réaliser cette uniformité de traduction en délibérant, dans ce cas même (qui est un pis-aller aux yeux d’Augustin), il ne faut pas, il ne convient pas qu’un seul homme, quelle que soit son habileté (serait-ce Jérôme qui serait visé ?), se mêle d’amender ce en quoi sont convenus tant de vieillards et si doctes. » Mais, quand il y a une différence entre l’hébreu, certainement inspiré et le grec (inspiré lui aussi), que conclure ? Augustin répond avec assurance : « Il faut céder, je pense, à l’arrangement divin, qui a été réalisé par eux et suivant lequel les livres que les Juifs, soit religion, soit envie, dérobaient aux autres peuples, devaient être livrés, par l’intermédiaire de Ptolémée, bien avant la venue du Sauveur, aux gentils qui, un jour, croiraient en lui.
Il se peut donc que les traducteurs aient interprété (leur texte) de la façon que jugeait convenable à ces gentils l’Esprit-Saint qui les poussait et qui les a fait s’exprimer tous de la même manière, qui eos agebat et qui unum os omnibus fecerat. » En d’autres termes, si le sens de l’hébreu et celui du grec ne concordent pas, lequel faut-il adopter ? L’un et l’autre, répond Augustin ; l’un et l’autre, en effet, a été inspiré par l’Esprit-Saint. De doclr. christ., II, xv, 22, P. L., t. xxxiv, col. 46. Même idée, presque dans les mêmes termes, dans le De civilate Dei, XVIII, lui, t. xli, col. 603 : Augustin sait qu’il existe d’autres versions grecques, mais il serait téméraire de les préférer à celle des Septante ; il rappelle aussi la tentative faite par Jérôme de faire passer directement les Écritures de l’hébreu en latin. Mais, continue-t-il, « bien que les Juifs reconnaissent la valeur exceptionnelle de son travail et prétendent que la traduction des Septante est fautive en bien des points, les Églises chrétiennes estiment, que nul traducteur ne peut être préféré à l’autorité de tous ces hommes, choisis pour ce grand œuvre par le grand-prêtre Éléazar. Car, supposé même que ne fût pas apparu en eux un Esprit unique — et sans hésitation un Esprit divin — et s’ils avaient arrêté d’un commun accord les termes de leur traduction, nul traducteur isolé ne devrait leur être préféré. Mais, puisqu’une si grande preuve de l’assistance divine s’est manifestée en eux, il faut bien reconnaître que quiconque, en dehors d’eux, est un traducteur véridique de l’hébreu, en quelque langue que ce soit, devra être d’accord avec les Septante, ou, s’il ne l’est pas, il y a là une mystérieuse et prophétique profondeur. Car le même Esprit qui était dans les prophètes, quand ils prononcèrent leurs oracles (en hébreu), était aussi dans les Septante quand ceux-ci les ont traduits. Avec son autorité divine, l’Esprit a pu faire dire autre chose par le traducteur que ce qu’avait dit le prophète et, dans ce cas, l’un et l’autre sens est également inspiré, ou (il a pu) le lui faire dire autrement, en sorte que, les mots étanl changés, le sens demeurât le même, il a pu faire omettre par le traducteur ou lui faire ajouter telle ou telle chose, pour bien montrer par là que, dans son travail, ce n’était pas la servilité qui était réclamée du traducteur, mais qu’il devait se soumettre à la puissance divine qui remplissait son esprit et le dirigeait. Comme il est facile de le voir, Augustin, dans ce passage, se déclare tout net en faveur de la réalité du « miracle des cellules et il en tire, sans hésiter, toutes les conséquences.
On sait que les deux ouvrages eu question, le De doclrina rhristiana et la Cité de Dieu ont été parmi les plus répandus de saint Augustin. Il n’est donc pas étonnant qu’ils aient imposé à la chrétienté occidentale l’opinion tant soit peu paradoxale de l’évêque d’Hippone. Si, d’ailleurs, on avait accepté cette manière de voir dans toute sa rigueur, jamais la traduction hiéronymienne n’aurait pu pénétrer dans l’Église latine et finalement s’y imposer, comme elle l’a fait. La lecture de certains textes de Jérôme a compensé ce qu’il y avait de trop absolu dans la
pensée d’Augustin. L’entreprise du solitaire de Bethléem avait suscité bien des protestations ; celui-ci
j répondit avec sa verve ordinaire ; plusieurs de ses
répliques ; e lient dans les préfaces qu’il a mises en tête des divers livres de l’Ancien Testament et qui sont [lassées dans bien des manuscrits et des éditions de la Vulgate. Voir la préface (les Paralipnnièncs, où
il revendique le droit de faire ce qu’ont fait avant lui
les auteurs des diverses recensions des Seplanle et d’ouvrir à son tour les portes des soixante dix cellules -. Si tgttur aliU Ucuit non lenere quod ttmel
susceperanl ( Sepluaginta), et post sepluaginta cetlulas, quæ vulgo sine auctore jaclantur, singulas cellulas uperuere, hocque in Ecclesia legitur quod Septuaginta nescierunt, cur me non suscipiant Laiini mei ? P. L., t. xxviii, col. 1325 AB. Voir aussi la préface du Pentateuque déjà citée, ibid., col. 150-151 : Nescio quis primus auctor sepluaginta cellulas Alexandriæ mendacio suo exstruxerit, quibus divisi eadem scriptilarent. .. : sed in una basilica congregatos contulisse scribunt ( Arisleas et Josephus), non prophetasse. Aliud est enim vatem, aliud esse inlerprelem. Ibi Spiritus venlura prædicil : hic crudilio et verborum copia ea quæ intelligil transfert. Affirmer cette inspiration du texte des Septante, c’est opposer l’Esprit à l’Esprit. Les apôtres, en effet, sous l’inspiration divine ont cité, parfois d’après le texte hébreu, des prophéties qui n’ont pas la même précision dans les Septante ou que l’on n’y trouve pas, par exemple, dans Matth., ii, 15 et 23 ; Joa., xix, 37 et vii, 38 ; I Cor., ii, 9. Imaginerons-nous que ces omissions ou ce camouflage des Septante auraient été inspirés par le même Esprit : aul aliter de eisdem libris per Septuaginta interprètes, aliter per aposlolos Spiritus sanctus testimonial texuit, ut quod illi lacuerunt, In scriplum esse mentiti sint. Voir aussi Epist., i.vn, 11, t. xxii, col. 577.
De la comparaison des textes augustiniens avec les textes hiéronymiens s’est ainsi formée dans l’Église latine une opinion moyenne : elle n’oserait pas équiparer absolument « l’inspiration des Septante » avec celle des auteurs primitifs des Livres saints, mais elle ne veut pas voir non plus dans l’œuvre des Septante une traduction ordinaire. C’est quelque chose de ce genre que l’on trouverait dans les polémistes antiprotestants des xvie et xviie siècles, ainsi Bellarmin, De verbo Dei, t. II, c. vi ; Baronius, Ann. eccles., an. 231 toute l’année, et bien d’autres. Sixte-Quint s’en fait l’écho quand il écrit dans la préface de l’édition officielle des Septante : Constat interprètes. .. Spirilu Sancto plenos sacra Biblia interpretatos esse. Nul ne songera à prendre pour une affirmation dogmatique ces mots du pape, pas plus que l’on ne prendra pour une défense impérative l’interdiction que fait le même pape de rien changer au texte grec qu’il vient de publier : prohibentes ne quis de hac nova gru-ca edilione uudeat in posterum ael addendo vel demendo quicquam immature. Du moins pouvons-nous dire que ces mots de Sixte-Quint expriment en clair cette approbation tacite de l’Église à l’endroit des Septante qui s’est manifestée dès les premiers siècles. Somme toute, ils tendent à mettre sur le même pied que notre Vulgate latine l’antique traduction grecque. La question reste toutefois de savoir quel est au juste le texte primitif de la célèbre version. Or, cette question ne peut être élucidée qu’après étude d’autres traductions grecques qui peuvent avoir « contaminé » les Septante.
II. VERSIONS GRECQUES PLUS OV MOINS APJ’A-RBNTÊBS AVi SEPTANTE. -- Quand l’Église chrétienne eut fait sienne la traduction des Septante et en eut tiré des arguments contre le judaïsme, l’immense crédit dont avait joui la primitive Bible grecque dans la Diaspora juive commença à décliner. On s’a per çut d’autre part des divergences notables que présen tait le grec par rapport au texte officiel de l’Ancien testament, tel que le travail des rabbins commençait à l’élablir. D’où l’éclosion, au cours du il'e siècle de notre ère, de plusieurs versions grecques nouvelles, dues à des initiatives privées plus ou moins heureuses. Ces versions nous sont niai connues et c’est surtout
aux Hexapln d’Origène, von : ici t. xi, col. i 195, que
nous devons les fragments qui en subsistent.
[renée connaissait déjà deux de ces traductions nouvelles. Il fait allusion a la manière dont elles ren 27 1 ]
- VERSIONS##
VERSIONS. TRAVAUX CRITIQUES SUR LES SEPTANTE
2 7 12
daient le passage d’Is., vii, 14, où les Septante avaient lu : « Voici qu’une vierge, rocpGévoç, concevra et enfantera » ; Théodotion d’Éphèse et Aquila du l’ont, tous deux prosélytes juifs, traduisaient : « Voici que la jeune femme, q veâviç, concevra et enfantera. » C’était énerver la fameuse prophétie relative à la conception virginale du Sauveur et, comme dit Irénée, « le signe de la vierge ». Cont. hær., III, xxi, 1, conservé en grec par Eusèbe, H. E., V, vin, 10.
1° Aquila (Voir ici t. i, col. 1725-1728). — Originaire de Sinope, dans le Pont, païen d’origine, il serait passé au christianisme à Jérusalem ; mais, ayant eu, à cause de certaines de ses opinions, maille à partir avec les autorités ecclésiastiques, il se serait fait prosélyte juif. Il vivait à l’époque d’Hadrien, avec lequel d’ailleurs il aurait été apparenté. On est mal renseigné sur la traduction qu’il entreprit des Livres saints ; il n’en subsiste que des fragments fournis d’un côté par les restes des Hexaples, de l’autre par des citations patristiques. Jérôme, qui pouvait lire dans les Hexaples sa version tout entière, qualifie Aquila « un traducteur diligent », cf. EpisL, xxxvi, ad Damasum, P. L., t. xxii, col. 457 : Aquila qui non contentiosius, ut quidam putant, sed studiosius verbum inlerpretatur ad verbum ; Epist., xxviii, ad Marcellam, 2, ibid., col. 433 : Aquila qui verborum hebrœorum diligenlissimus explicator est. Il ne laisse pas de lui reprocher sa servilité, cf. Epist., lvii, ad Pammachium, de optimo génère interpretandi, 11, ibid., col. 578. C’est ce dernier passage qui nous apprend qu’Aquila rendait la particule H X de l’hébreu, indiquant le régime direct, par le aùv grec avec l’accusatif : « Dieu créa aùv tov oùpxvôv xal aùv tyjv yyjv », disait-il, traduisant Gen., i, 1. À tout prendre, Jérôme l’estimerait plutôt et ne lui reprocherait certainement pas, comme Irénée, d’avoir falsifié les textes, ou tout au moins d’avoir atténué la portée des passages messianiques.
2° Théodotion.
Au dire d’Irénée, ci-dessus, il
était originaire d’Éphèse et prosélyte juif. Épiphane en fait un marcionite originaire du Font et passé au judaïsme. De mens, et pond., 17, P. G., t. xliii, col. 264. Jérôme est loin d’être précis : Ayant expliqué que les Églises grecques lisent Daniel non dans les Septante, mais dans Théodotion, il ajoute : qui utique post adventum Christi incredulus fuit, licet eum quidam dicanl ebionitam, qui altero génère judœus est. Comment, in Dan., prie}., P. L., t. xxv, col. 493.
On connaît beaucoup mieux la traduction de Théodotion que celle d’Aquila. D’abord la version de Daniel, comme nous venons de l’entendre de Jérôme, a supplanté, de bonne heure, dans l’usage ecclésiastique, celle des Septante. C’est elle par exemple qui se lit dans le Vaticanus, l’Alexandrinus, et tous les mss. importants de l’Ancien Testament, à l’exception du Chisianus (texte des LXX). D’autre part, il se trouve que, dans Jérémie, les Septante ont omis beaucoup de passages qui figurent dans le texte massorétique. Or, dans un ms., le Marchalianus ( = Vat. græc., 2125), ces passages omis sont donnés dans les marges sous le sigle 0’= Théodotion. C’est le cas, par exemple, de Jer., x, 6-10 ; xvii, 1-5 a ; xxix (xxxvi), 16-20 ; xxxiii (xl), 14-26 ; xxxix (xlvi), 413. Il est donc possible de caractériser assez exactement l’œuvre de Théodotion : elle serait plutôt une révision des Septante, qu’une traduction indépendante. Jérôme l’avait déjà remarqué. Cꝟ. 7/î Eccle., ii, 2, P. L., t. xxiii, col. 1024. Mais Théodotion a vraisemblablement utilisé aussi et revisé une traduction plus ancienne, car il se trouve que Josèphe, le Nouveau-Testament et les plus anciens écrivains chrétiens, quand ils citent Daniel, se rapprochent davan tage du texte de Théodotion que de celui des Septante.
Si Irénée a déjà connu le travail de Théodotion, il est bien difficile de placer celui-ci sous Commode (180-192), comme on l’a fait souvent.
3° Symmaque.
Tout est confusion dans les rares
données que l’on a sur lui : Fusèbe cite les trois traducteurs de l’Ancien Testament dans l’ordre Aquila, Symmaque et Théodotion. H. E., VI, xvi, à deux reprises. Il ajoute, ibid., XVII, que Symmaque était ébionite et qu’il circulait encore à son époque des « mémoires » de cet auteur où, prenant son point d’appui dans l’évangile de Matthieu, il s’efforçait de prouver cette hérésie. Épiphane le fait antérieur à Théodotion : c’était un Samaritain passé au judaïsme, De mens, et pond., 15, P. G., t. xi.ui, col. 261, qui aurait fait sa traduction au temps de Sévère (entendons Marc-Aurèle). Les quelques bribes qui subsistent de son œuvre montrent qu’il visait à une grécité correcte sans ser.vilisme, ce que dit également Jérôme : Symmachus qui non solel verborum xaxoÇi}Xûxv, sed intelligeniiæ ordinem sequi. In Amos, i, 11, P. L., t. xxv, col. 1019 ; cf. In Is., i, 1, t. xxiv, col. 21. Il paraît avoir connu les travaux antérieurs des Septante, d’Aquila, et de Théodotion. Résumant son impression sur ces divers traducteurs, Jérôme, ailleurs, s’exprime ainsi : Aquila et Symmachus et Théodotion… diversum pêne opus in eodem opère prodiderunt : alio nilenle verbum de verbo exprimere, alio sensum potius sequi, tertio non multum a veleribus discrepante. Inlerpret. Chronicse Eusebii, præf., t. xxvii, col. 36.
4° Autres traductions utilisées par Origène.
Outre
les traductions précédentes, Origène utilisa pour son travail critique sur les Septante, d’autres versions anonymes. On est mal renseigné sur ces textes qu’Eusèbe désigne simplement comme la 5e, la 6e et la 7e version. H. E., VI, xvi. Rufln, dans sa traduction de ce passage, a donné au texte d’Eusèbe une précision qu’il n’a pas : In Psallerio autem et aliis nonnullis interserit aliqua etiam de céleris istis editionibus, quas, quoniam s.ine nomine auctorum reppererat, sexlam et septimam editionem nominavit. Jérôme ne fait guère que transcrire Eusèbe : Prælerea (en outre des quatre traductions connues) quintam et sextam et septimam editionem, quas etiam nos de ejus bibliotheca habemus miro labore reperit et cum cœteris editionibus comparavit. De vir. ill., n. 54, P. L., t. xxiii, col. 665. On s’est demandé si ces versions s’étendaient à tout l’ensemble de l’Ancien Testament. Il est vraisemblable qu’il n’en était rien et que c’était simplement pour certains livres en certains passages que les Hexaples se complétaient par une 5e, une 6e ou une 7e traduction, ou seulement par l’une d’elles. On a relevé quelques fragments de la 5e dans les petits prophètes, les Rois, le Psautier, Job, les Proverbes, le Cantique ; de la 6e dans les mêmes livres et dans l’Exode ; de la 7e dans les livres poétiques. Les fragments conservés montrent que les auteurs visaient moins à la littéralité de l’expression qu’à son élégance. La traduction donnée d’Habacuc m, 13, par la 6e prouve que l’auteur était chrétien : è^YJXOsç toG acoaoci tov Xxôv aou Six’Iyjooûv tov ypiotov aou. Faut-il étendre cette conclusion aux autres ?
/II. TUA VAUX CRITIQUES SUR LES SEPTANTE. — La traduction des Septante doit sa conservation à l’Église. Dès le iie siècle de l’ère chrétienne, la Synagogue s’en était désintéressée et avait cherché à la remplacer. Les Septante, au contraire, couramment utilisés par les chrétiens était indéfiniment copiés et recopiés. C’était une cause d’altération et le besoin se fit sentir bientôt de remédier à la diversité des textes. Les grammairiens profanes d’Alexandrie avaient posé, depuis longtemps déjà, surtout à propos des 7 1 4
poèmes homériques, les questions de critique textuelle. Un jour ou l’autre les mêmes problèmes allaient se poser pour le texte grec de la Bible. Par ailleurs, la polémique avec les Juifs attirait de plus en plus l’attention dans les milieux chrétiens instruits sur les différences, vraies ou prétendues, que présentait le texte grec avec l’original hébreu. C’est à ces deux ordres de préoccupations que répondent les grands travaux d’Origène et de ceux qui lui ont succédé.
1° Les H exaptes d’Origène (Voir art. Opigènk, t. xi, col. 1495-1496). — On a expliqué, à cet article, ce qu’était la gigantesque entreprise d’Origène. Si elle avait survécu, elle permettrait d’avoir une idée très exacte de ce qu’était au iiie siècle le texte hébreu (très voisin du texte massorétique) et des rapports qu’il entretenait avec les Septante. Malheureusement l’énormité du travail de transcription a fait reculer les copistes et le manuscrit original ayant disparu, c’est uniquement sur des bribes que nous pouvons juger de l’œuvre primitive.
Sur six colonnes, Origène avait fait disposer :
1. Le texte hébreu en caractères hébraïques. —
2. Le même texte transcrit en lettres grecques. —
3. La version d’Aquila.
4. Symmaque. — 5. Les Septante. -- (>. Théodotion. — À divers endroits s’ajoutaient une, deux ou trois autres colonnes, reproduisant les versions anonymes dont il a été question ci-dessus. La partie capitale était la colonne des Septante, dont le texte était muni des signes critiques employés par les grammairiens alexandrins : l’obèle —, indiquant les passages à supprimer, l’astérisque * ceux que l’on rétablissait ; deux points (métobèle) indiquaient l’endroit où s’arrêtait l’influence du signe précédent. Soit un passage, de quelque ampleur qu’il fût, mot ou phrase, qui était dans l’hébreu et ne se trouvait pas dans les Septante, il était rétabli dans le grec de la 5e colonne, d’après une des versions grecques, généralement celle de Théodotion, et précédé d’un astérisque. Soit au contraire un passage des Septante qui n’avait pas de correspondant dans l’hébreu, il était signalé par un obèle ; et dans le texte massorétique les mots en question étaient replacés, munis de l’astérisque. Enfin, si les Septante donnaient une traduction qui s’écartait de l’hébreu, cette traduction était marquée de l’obèle et la leçon correspondante dans le texte massorétique était signalée par l’astérisque. En dehors de cela, des notes marginales expliquaient soil les noms hébreux, soit les phrases obscures ; elles étaient empruntées à des textes qui étaient désignés comme à’E6paôoç (une traduction grecque provenant d’un juif inconnu), ’> X’jpoc (peuti in une version grecque dérivée d’un texte syriaque ?), -’, Sa|iOCpeiTix6v (une traduction grecque du Targutn samaritain !).
L’intention d’Origène étal ! excellente et la méthode a la rigueur acceptable, en ce sens que la ">’colonne (Septante) donnait à première vue une idée exacte des rapports entre la Bible grecque officielle et le texte hébreu tel qu’il se présentait a l’époque, Origène supposant d’ailleurs, tout a fait gratuitement,
que le texte massorétique était identique au texte
hébreu sur lequel avaient travaillé les Septante. Mais le résultat final a été de fournir des Septante un texte composite qui différait considérablement
du texte grec original. À bien des reprises, on recopia
(elle.V colonne toute seule, et elle n’avait guère
de sens que replacée au milieu des autres dont elle
dait surtout on la recopia sans les signes
critiques ou avec les signes critiques négligemment
placés. De la sorte des leçons étrangères aux Septante et provenant des aidres versions pénel ici eut
dans le texte. Ce que fournissaient de telles copies de la 5 1’colonne, c’était un texte qui ne s’apparentait que de très loin à l’œuvre primitive des traducteurs alexandrins. Si l’on veut rétablir la recension des Septante dont se servait Origène, il est nécessaire de dégager le texte « hexaplaire » de toutes les variantes et de toutes les additions qui s’y sont introduites. Pour compliquée qu’elle soit, la tâche n’est pas absolument impossible. Quelques mss. grecs, spécialement le Colberto-Sarravianus (Leide, Voss. Gr. 98) et le Marchalianus (Vatic. gr. 2 125) ont conservé à beaucoup d’endroits les signes critiques ; il en est de même de la traduction syriaque, fort littérale, de Paul de Telia, dite syro-hexaplaire (ci-dessous, col. 2720). Cette dernière rendra pour l’établissement du texte des Septante utilisé par Origène les plus grands services.
2° Les diverses recensions des Septante.
À la tin
du ive siècle, Jérôme faisait déjà remarquer qu’à son époque circulaient en Orient trois recensions bien distinctes du texte des Septante : Alexandrin et Mguptus in Septuuyinta suis Hesychium laudat auctorem ; Conslunlinopolis usque Antiochiam Luciani marlyris exemplaria probat ; mediæ inler lias proinnciæ pala’siinos codices legunl, quos ab Origène elaboralos Eusebius et l’amphilus vulgaverunl, tolusque orbis hue inler se trifaria varielate compugnat. In libr. Paralip., præf., P.L., t. xxviii, col. 1324 sq. Ainsi, en Egypte, dominait une recension ayant pour auteur un certain Hésychius, en Asie Mineure la recension du martyr saint Lucien, en Syrie et en Palestine, une autre qui remontait à Eusèbe et à Pamphile.
1. La recension palestinienne de Pamphile et d’Eusebe. — C’est celle-là même que nous avons appelée le texte hexaplaire, reproduisant avec ses signes critiques la 5° colonne d’Origène (ci-dessus).
2. La recension d’Hésychius.
Elle est mal connue ; son auteur l’est plus mal encore. S’agit-il de l’évêque égyptien martyrisé avec beaucoup d’autres en 312, Eusèbe, II. JE ?., VIII, xiii, 7 ? On ne saurait le dire. Il est à présumer que cette recension a pénétré dans les versions coptes et qu’on pourrait la restituer aussi en étudiant les citations scripturaircs des écrivains originaires d’Egypte et spécialement des Alexandrins. Il est vraisemblable qu’elle est représentée, plus ou moins pure, dans le Vaticanus et les mss. apparentés. Sur ses rapports avec la version éthiopienne, voir ci-dessous, col. 2721.
3. La recension lucianique.
Elle a pour auteur le martyr saint Lucien d’Antioche ; cf. ici, t. ix, col. 1027, où sont données les caractéristiques principales de son texte. Les travaux de P. de l.agarde ont permis à celui-ci de reconstituer la première partie, Genèse à Esther, de la recension lucianique. On peut donc juger avec exactitude l’œuvre de Lucien. Celui-ci partait d’un texte de base assez différent du texte commun, bien que souvent d’accord avec le Vaticanus contre les autres témoins, il le corrigeait à l’aide de l’hébreu, qu’il lisail d’ailleurs dans un texte assez différent du texte massorétique, il comblait les lacunes du grec à l’aide des anciennes versions el surtout de Théodotion. Mais le dernier mot n’est pas dit sur le texte susdit. Le fait que des leçons g lucianiques i se retrouvent dans la vieille latine, dans l’hilon et.losèphe, pose la question de savoir si Lucien n’utilisait pas une recension beaucoup plus ancienne que lui.
/ i. ÉDITIONS ACTUELLES t/BS SEPTANTE. Comme on vient de le voir, il est difficile, à l’heure présente, de se représenter l’étal primitif de la version grecque alexandrine. Un travail s’Impose à l’endroit de ce texte, analogue à celui qui est actuellement en court pour restitue ! le texte latin de la Bible tel qu’il est VERSIONS AHAMEENNES DE L’A T.
2 7 1 6
sorti de la plume de saint Jérôme. Mais le travail est plus complexe puisqu’il faut remonter à un texte qui a six ou sept siècles de plus. Il est à l’heure présente entrepris de deux côtés à la fois ; en Allemagne par l’Académie de Gœttingue (Gôttinger Gesellschaft der Wissenschaften) dont le programme est donné dans le Bericht iiber dus Sepluagintaunlcrnehmen, dans les Nachrichten de la dite société, 1909, p. 129138 ; en Angleterre, par les syndics de l’University Press de Cambridge. Mais il avance lentement.
En attendant que l’on puisse lire toute la Bible grecque dans un texte vraiment critique, il faut se contenter des approximations fournies par les éditions actuelles. Celles-ci se répartissent en quatre classes, d’après les premières éditions du xvie siècle auxquelles elles se rattachent.
La première en date est celle qui figure dans la Polyglotte d’Alcala, publiée par les soins du cardinal Ximénès, 1514-1517. Elle repose sur des mss. qui ne sont pas de tout premier ordre et fournissent la recension lucianique. Son texte est passé, plus ou moins retouché, dans les Polyglottes de Plantin (Anvers, 1569-1572), de Vatable (Heidelberg, 1587), de Michel Le Jay (Paris, 1645).
La seconde est l’édition de la Bible grecque, publiée par les Aide, à Venise, 1518 ; d’où le nom d’édition Aldine ; elle donnerait la recension d’Hésychius ; d’elle sont dérivées plusieurs éditions de la première moitié du xvie siècle (Strasbourg, 1526 ; Bâle, 1545 ; Bàle, 1550). Elle a été reproduite à plusieurs reprises au xvi c et au xviie siècle.
Beaucoup plus importante est l’édition sixtine, publiée à Borne en 1586, par les soins du pape Sixte-Quint, qui prit une part considérable à l’entreprise. Cf. Sixte-Quint, t. xiv, col. 2233. L’édition représente l’édition Aldine, mais améliorée par l’excellent ms. qu’est le Vaticanus ; à la fin de chaque chapitre, choix de variantes tirées des mss. des Pères et des anciennes versions. L’année suivante, Flaminius Nobilius donnait du grec une traduction latine avec un nouveau choix de variantes. C’est l’édition sixtine qui est reproduite dans la Polyglotte de Walton (Londres, 1657), texte grec et traduction latine, avec de nouvelles variantes empruntées à des mss. ignorés de la sixtine et spécialement à Y Alexandrinus ; elle l’est également par les nombreuses éditions du xviie au xixe siècle. Même la grande édition de Holmes et Pearson (Oxford, 1798-1827), qui renferme des trésors d’érudition et a utilisé près de 300 mss., peut être considérée comme en dépendance de la sixtine.
Si le Vaticanus sert de base à la sixtine et à toutes ses dérivées, l’attention avait été néanmoins attirée sur la valeur de V Alexandrinus venu en Angleterre au début du xviie siècle. Ce magnifique ms. a servi de point de départ à la grande édition de Grabe-Lee-Wigan, qui parut à Oxford de 1707-1720 et fut plusieurs fois reproduite dans des éditions plus manuelles.
La plus commode et aussi la plus courante des éditions contemporaines est celle, toute provisoire, de H.-B. Sweete : The Old Testament in greek, according to the Septuagint, Cambridge, 3 vol., 18871894 ; 2e éd., 1895-1899 ; 3e éd., 1901 sq. Sans chercher à reconstruire un texte critique, elle donne purement et simplement le texte d’un ms. essentiel, en principe le Vaticanus, relayé, là où il est lacuneux, par V Alexandrinus, le Sinaiticus ou d’autres. Au bas des pages sont données les variantes des manuscrits importants autres que celui utilisé dans le texte ; d’autres leçons sont rejetées dans des appendices à la fin de chaque volume. L’édition est destinée à servir de base à la grande édition critique de Cambridge (entreprise par A.-E. Brook et N. Mac Lean),
qui a commencé de paraître En 1906. En Allemagne A. Balill’s a donné Die Genesis, Stuttgard, 1926, qui contient une introduction à l’histoire du texte des Septante ; puis ibid., 1935 : Septuaginta. Velus Testamentum græce juxta LXX interprètes. Courante aussi l’édition donnée par la Sainte Bible polyglotte de F. Vigoureux, Paris, 1898 et sq. Un excellent exemple du travail de comparaison qui s’impose est fourni par E. Nestlé und J. Danse, Dus Buch Jeremia griechisch und hebraïsch, Stuttgart, 1934.
On ne peut donner ici un aperçu, même sommaire, des très nombreux mss. du texte grec de la Bible. Le travail essentiel sur ce point est A. Bahlfs, Verzeichnis der griechischen Handschriften des Allen Testaments, Berlin, 1914 (dans les Milteilungen des Septuaginlaunlernehmens de l’Académie de Gœttingue = Nachrichten de ladite compagnie, phil.-hist. Klasse, 1914, Beiheft). Plusieurs des grands mss. ont été reproduits soit photographiquement soit en facsimilés. C’est le cas du Vaticanus (= B), qui l’a été deux fois, en 1890 et en 1905-1907 ; de V Alexandrinus (= A), publié à Londres, 1879-1883, et dont on a recommencé une édition en plus petit format en 1915 ; du Sinaiticus, dont la publication est commencée ; d’autres encore. Sur chacun de ces mss. on se renseignera dans le Dictionn. de la Bible qui consacre un article à chaque ms. important.
V. VERSIONS ARAMÉENNES DE L’ANCIEN TESTA-MENT. — Dès le ve siècle avant J.-C, l’hébreu classique, tout en demeurant la langue sacrée et celle des docteurs, cessa d’être parlé couramment, même en Palestine. Il fut supplanté par l’araméen ou langue chaldaïque, la langue des vainqueurs. Cette langue se diversifia d’ailleurs en différents dialectes ; l’araméen ne se parlait pas de la même manière en Judée, en Galilée et à Babylone. Quand la lecture des Livres saints devint la partie essentielle de l’office synagogal, on continua bien à lire publiquement le texte hébraïque, mais il fut nécessaire d’en donner à l’usage du peuple une explication en langue vulgaire, un peu comme, dans nos offices, nous lisons l’évangile en français après l’avoir chanté en latin. Ces traductions, d’abord improvisées, se fixèrent, assez tardivement, par l’écriture ; elles devinrent les Targums. Par ailleurs, dans une communauté juive schismatique devait prendre naissance une adaptation de la Torah, c’est le Pentateuque samaritain.
1° Les Targums.
Un certain nombre de ces targums
sont venus jusqu’à nous et ont été publiés, quelques-uns dès le xve siècle. Mais, en lisant les textes ainsi imprimés, il faut bien se rendre compte qu’ils sont loin de posséder la valeur d’une édition critique ; ce qu’on lit, c’est la reproduction telle quelle, et souvent fautive, d’un ms. pris au hasard. Aujourd’hui que de très nombreux mss. des Targums sont connus, un travail d’édition s’imposerait sur ces textes, travail qui est à peine commencé, pour ne pas dire à peine soupçonné. L T n tel travail ne serait pas inutile, les Targums ont, en effet, une réelle importance ; rédigés à une date où s’imposait déjà le texte massorétique, ils ont moins d’importance pour la fixation du texte primitif que pour son explication : ils nous renseignent sur l’état de l’exégèse rabbinique à l’époque de leur composition. Il est intéressant, par exemple, de savoir quels textes bibliques étaient ordinairement considérés comme messianiques et de quelle manière était compris ce messianisme.
1. Targums du Pentateuque.
Le plus ancien est désigné d’ordinaire sous le vocable de Targum d’Onkélos, encore que l’on soit bien en peine de mettre sous ce nom un personnage concret. Bédigé en dialecte judéen, il est assez difficile à dater ; on a parlé du
ne siècle de notre ère, mais il est possible qu’il n’ait été mis par écrit qu’au ive siècle. C’est, en tout état de cause, le plus ancien représentant de l’exégèse juive. Il évite avec soin les anthropomorphismes quand il est question de Dieu ; remplaçant le nom de Jahvé par des équivalents comme Memra, Schekina ; employant, quand il s’agit d’une action divine, des termes moins choquants que ceux de l’original, atténuant par ailleurs ce que certaines expressions relatives aux patriarches pouvaient avoir d’inconvenant, par exemple dans Gen., xii, 13 ; xxvii, 13. A côté de ce Targum d’Onkélos, il y a sur le Pentateuque plusieurs targums dits de Jérusalem, plus ou moins bien conservés et dont la dépendance à l’égard du précédent est manifeste. Le plus important est celui que l’on appelle du Pseudo-Jonathan, d’ailleurs tardif, — il serait postérieur au vine siècle de notre ère — et fortement influencé par les spéculations talmudiques. Il n’est pas sans intérêt pour l’étude des croyances juives, surtout en ce qui concerne l’eschatologie et l’angélologie.
2. Targum des Prophètes antérieurs et postérieurs. — Ce targum est attribué par la tradition rabbinique à Jonathan, fils d’Uzziel, qu’elle rattache à l’école de Hillel. En tout cas, ce Jonathan ne saurait être le rédacteur du targum qui porte son nom et qui paraît en dépendance du Targum d’Onkélos. La rédaction actuelle est donc assez tardive. Ce targum tourne volontiers à la paraphrase surtout quand il s’agit des prophètes proprement dits. Les conceptions messianiques de l’auteur méritent d’être étudiées : il est remarquable qu’il reconnaisse dans le chapilre d’Isaïe relatif au « serviteur de Jahvé », Is., lii, 13liii, 13, le Messie souffrant, victime expiatoire.
3. Targums des Hagiographes.
Il y en a plusieurs remontant à des auteurs différents et qui donnent l’impression d’être des travaux d’ordre tout à fait privé. Ils sont d’ailleurs tardifs et ne paraissent pas antérieurs au VIIe siècle de notre ère. Le Targum sur les Proverbes serait même un remaniement de la Peschitta syriaque. Voir ci-dessous. Quelques-unes de ces productions ne peuvent même plus être appelées des traductions ; elles tournent nettement au commentaire hagaddique.
2° Le Pentateuquc samaritain.
Au temps de
Notre-Seigneur les Samaritains formaient une communauté schismatique, entièrement séparée des Juifs, bien qu’Us se reconnussent eux-mêmes comme descendants de Jacob. Cf. Joa., iv, 12. Ils avaient leur temple à eux sur le mont Garizim, leur hiérarchie religieuse, leurs institutions propres, encore qu’ils prétendissent suivre à la lettre les prescriptions de la Torah. La plus vive antipathie régnait entre eux et les Juifs. Cf. Joa., IV, ’. » ; Luc, ix, 52 scj. On a beaucoup discuté sur l’origine de ce groupement. Longtemps on a voulu voir (huis les Samaritains les descendants des populations allogènes installées, après la destruction du royaume d’Israël en 722, par les conquérants assyriens, pour combler les vides faits par la grande déportation des Israélites. IV Reg., xvii. 2 1.> : i. 4L Ces populations auraient finalement adopté le culte de Jahvé, en concurrence d’ailleurs avec leurs pratiques païennes. I.a religion samaritaine serait donc un syncrétisme du jahvisme Israélite avee le paganisme assyro-babylonien. En réalité, il n’est est rien : le monothéisme des Samaritains, dès ipie l’histoire nous fait entrer en contact eux, était aussi intransigeant que celui des Judéens. Le jahvisme des Samaritains est en COnti miation directe avec la religion qui, antérieurement a la ruine de 722, dominait dans le royaume du Nord. Même après les déportations en Assyrie, il demeura dans le pays des lideles de Jahvé. Avec le temps,
leur religion s’épura, comme, au même temps, se purifiaient dans l’épreuve les sentiments de leurs compatriotes du royaume du Sud. Mais l’antagonisme qui avait amené au xe siècle le schisme des dix tribus persista au Ve siècle entre Israélites du Nord et Judéens du Sud. Quand la petite communauté juive, rentrée à Jérusalem, prit de plus en plus l’allure d’une Église et d’une Église très fermée et très peu perméable, quand elle entendit soumettre à sa domination spirituelle tous les enfants d’Israël, il était inévitable que la séparation religieuse se consommât entre les Samaritains et les Juifs. La construction sur le Garizim d’un temple rival de celui de Jérusalem fut le signe de la révolte définitive des gens du Nord contre ceux du Sud. Il semble bien que cette construction ait été contemporaine de l’expédition d’Alexandre en Syrie en 332.
A cette date, la communauté samaritaine possédait, sans doute depuis quelque temps, une recension à son usage de la Torah mosaïque, c’est ce que l’on appelle le Pentateuque samaritain, sur lequel les études relatives aux origines du Pentateuque ont attiré, de nos jours, un regain d’attention, encore qu’il fût connu en Europe depuis le xviie siècle. Comme ce recueil mosaïque est une réplique assez exacte de la Torah hébraïque, on conçoit l’intérêt qu’il y aurait à déterminer de façon précise la date de son introduction dans la communauté samaritaine. Si cette introduction était antérieure à la déportation des Jérosolymites en 586, on voit quel argument s’en tirerait contre les hypothèses qui font du Pentateuque, dans son état actuel, une compilation plus ou moins postérieure au retour de Babylone. Si même l’arrivée du Pentateuque en Samarie était contemporaine de Néhémie (dont le deuxième séjour à Jérusalem est de 432), les hypothèses seraient mises en échec qui attribuent à nombre d’additions du Pentateuque une origine notablement plus tardive. Quoi qu’il en soit, c’est avec des intentions plus ou moins « apologétiques » qu’a été étudiée la question du Pentateuque samaritain. Il ne semble pas qu’elle ait fait grand progrès et il reste toujours impossible de dire à quelle date remonte l’introduction en Samarie de la Loi mosaïque.
Le Pentateuque samaritain, dont il existe des copies relativement anciennes — aucune d’ailleurs n’ayant l’antiquité fabuleuse dont on a parlé — est, somme toute, une recension hébraïque de la Torah, différant du texte massorélique surtout par l’écriture. Au lieu de l’écriture carrée qui paraît s’être élaborée parmi les Juifs au temps de la captivité de Babylone. est employée la vieille écriture hébraïque en usage avant le vi p siècle, et qui s’était conservée même alors que se constituait l’autre écriture. A étudier de près les caractères dits samaritains, on s’aperçoit que cinq lettres seulement, D, H, ii, 2Î, "1, représentent le type archaïque ; toutes les autres sont déjà touchées par les procédés de transformation qui ont donné naissance à l’écriture carrée et l’on ne se trompera guère en voyant dans les caractères du Pentateuque samaritain l’écriture qui, même après la captivité, était encore en usage dans une partie de la Palestine » (E. Kautzsch. art. Samaritaner, dans Prot. Realencycl., t. xvii, p. 132).
Retenons que la langue du Pentateuque samaritain est l’hébreu, qui est resté la langue sacrée des schismatiques. Son texte, antérieur de plusieurs siècles à la Massore. est assez différent du texte hébraïque actuel : quelque six mille variantes. Parmi celles-ci. il en est quelques unes de tendancieuses, la
plus Célèbre est (die de Dent.. XXVII, 1, OÙ le mont II. bal est transformé en mont (iarizim. On sait aussi 2 719
YK USIONS FILLES DES SEPTANTE
2720
que les années des patriarches, Gen., v et xi, sont données d’une manière différente de celle du texte massorétique et de celle des Septante ; de môme encore la donnée chronologique sur la durée du séjour en Egypte des enfants d’Israël, Ex., xii, 40. C’est ce qui explique l’écart considérable entre la chronologie du samaritain et celle du texte massorétique. Mais, en définitive, le Pentateuque samaritain ne se présente que comme une recension très corrompue et parfois falsifiée du texte juif. Plusieurs critiques
— et l’hypothèse a été reprise par Kohn au xixe siècle — se sont demandé si le texte en question n’était pas à la base de la traduction alexandrine dite des Septante, celle-ci ayant été faite en utilisant une version déjà existante du samaritain en grec. Ce n’est guère vraisemblable.
De même qu’en Judée, la langue hébraïque avait été supplantée par l’araméen, pour l’usage courant, de même les Samaritains usaient-ils, depuis les derniers siècles avant l’ère chrétienne et jusqu’au premier siècle de la conquête arabe, d’un dialecte araméen occidental, que l’on désigne sous le nom de samaritain. En fait cet idiome se distinguait à peine de l’araméen palestinien, tel que nous le font connaître les targums et certaines parties du Talmud. C’est en cette langue que fut faite, la traduction qui porte le nom de targum samaritain et qui figure par exemple, dans la Polyglotte de Walton, au-dessous du Pentateuque samaritain. Les recherches de Kohn ont montré le peu d’autorité de ce texte, qui apparaît comme un conglomérat de traductions disparates et d’âge divers, tout rempli d’hébraïsmes, voire d’arabismes et d’interpolations de tout genre. La traduction primitive elle-même, dont il ne reste en définitive que des fragments, était plus que médiocre, d’une littéralité excessive, l’œuvre d’un personnage qui savait mal l’hébreu. C’est dire le peu de crédit qu’il faut reconnaître au targum samaritain. — Quand l’arabe fut devenu l’idiome courant des Samaritains, une traduction du Pentateuque en cette langue fut faite vers le xie -xii c siècle de notre ère. En définitive, l’étude de la littérature samaritaine n’apporte que peu de secours à la reconstitution du texte primitif de la Loi.
VI. Lies VERS ONS F LLES DE LA VERSION ALEXAN-DRINE DES SEPTANTE. — Devenue en quelque sorte la Bible officielle de l’Église chrétienne, la traduction des Septante fut portée successivement dans les diverses régions, soit de l’Empire romain, soit étrangères à celui-ci, où pénétra le christianisme. Dans les pays autres que ceux de langue grecque, le besoin se fit rapidement sentir de traductions appropriées. Ces traductions ne se préoccupèrent pas, d’ordinaire, de remonter au texte original hébreu.
1° Versions latines.
Voir ci-dessous l’art. Vul
GATE.
2° Versions syriaques. - Il y en a plusieurs, nettement différenciées ; la plus ancienne, dite la Peschitta, remonte à l’hébreu, les autres se donnent elles-mêmes comme des adaptations de la Bible grecque.
1. La Peschitta.
Tout est obscurité dans ses origines et le sens même du mot employé pour la désigner est lui-même sujet à contestation. Il semble (lue ce vocable, qui ne paraît d’ailleurs qu’au xe siècle, corresponde à notre mot « vulgate » ; la version « ordinaire », « courante », non point la « littérale » par opposition à des traductions paraphrastiques ou allégorisantes. Il n’y a rien à retenir des légendes mises en circulation par Gabriel Sionita, voir ici t. xiv, col. 2169, qui publia le premier au complet la Peschitta dans la Polyglotte de Paris (1029-1654). À l’en croire, une partie de cette version aurait été faite au temps
de Salomon, à l’usage du roi de Tyr, Hiraml Quant au reste de l’Ancien Testament et au Nouveau, il aurait été traduit à l’époque d’Abgar d’Édesse (contemporain de Notre-Seigneur). Tout cela est de la fable. Ce n’est pas une raison pour tomber dans l’excès inverse et pour mettre la Bible syriaque en dépendance, même pour la partie néo-testamentaire, de la Bible latine à une époque relativement récente. Tout montre que la Peschitta est ancienne : nombreux mss. très anciens, accord des syriens occidentaux et orientaux, des nestoriens et des jacobites. Mais l’Ancien Testament ne saurait être antérieur à l’ère chrétienne. En fait, la Peschitta fut dès l’abord à l’usage des chrétiens, non des juifs. Mais, comme beaucoup des chrétiens de langue syriaque étaient d’origine juive, il n’y a pas à s’étonner des traces d’interprétation juive que l’on y rencontre. La traduction s’est faite d’après un texte hébreu très voisin du texte massorétique, influencée d’ailleurs par les versions araméennes, mais aussi par certaines recensions des Septante. Du fait qu’elle partait de l’hébreu, la Peschitta suivait le canon palestinien ; il y manquait même des livres de celui-ci, ainsi les Paralipomènes qui ne furent traduits qu’assez tard ; ils ont fait défaut longtemps au canon des nestoriens. La délimitation du canon syrien est d’ailleurs toujours demeurée un peu flottante, la numérotation et le rangement des livres assez différents de ce que l’on trouve d’habitude. Les deutérocanoniques toutefois finirent par y pénétrer ; au ive siècle, Aphraate et saint Éphrem les utilisaient. Les manuscrits qui les contiennent s’appellent « catholiques » ou « pandectes », ainsi le célèbre Ambrosianus où, des livres de la Bible grecque, il ne manque que le I er Esdras (du grec, c’est-à-dire notre III Esdr.), Tobie et la prière de Manassé, et qui contient encore l’Apocalypse de Baruch, le IVe livre d’Esdras, et, sous le titre de IVe et Ve des Machabées, l’histoire de Samuna et le Ve livre du De bello judaico de Josèphe ( !). La traduction fournie par la Peschitta est d’ordinaire fidèle, bien qu’il y ait d’assez grandes différences entre les livres : le Pentateuque suit étroitement le texte hébreu et s’inspire de l’exégèse juive ; au contraire, Isaïe et les petits prophètes ont subi l’influence des Septante, de même que le Psautier. L’Ecclésiastique, chose à noter, est traduit de l’hébreu et non du grec.
2. La Syro-Hexaplaire.
Il s’est produit dans les Églises de langue syriaque un phénomène inverse de celui qui s’est passé dans l’Occident latin. Celui-ci, après avoir utilisé pendant plusieurs siècles une ou plusieurs traductions dépendant directement du grec, a finalement adopté la version hiéronymienne reposant sur l’hébreu. Dans les Églises orientales, la Peschitta, au contraire, s’est vue, sinon supplantée, du moins concurrencée par des versions directes de la Bible grecque.
En 616, Paul, évêque de Telia, à la demande du patriarche monophysite d’Antioche, exécuta une traduction de l’Ancien Testament, faite directement sur le grec. Il lisait ce dernier dans une copie très soigneusement faite de la 5e colonne des Hexaples et il prit soin d’en transcrire les signes critiques ; au texte hexaplaire il ajoutait des leçons d’Aquila, Synimaque et Théodotion. Comme ce travail de Paul a été transcrit en d’assez nombreux mss., c’est pour nous un des plus précieux moyens de reconstituer le texte origénien des Septante. Cf. ci-dessus, col. 2713. Il est représenté » au mieux par le Codex syro-hexaplaris Ambrosianus (Milan. C, 313 inL) dont le premier volume a malheureusement disparu, le 2e volume contenant les Psaumes, Job, les Proverbes, l’Ecclésiaste, le Cantique, la Sagesse, l’Ecclésiastique et tous 2 72 1
VERSIONS DIVERSES ANTIQUES
2 722
les Prophètes ; une reproduction photographique en a été donnée par A. Ceriani, en 1874 : Monumenta sacra et profana, t. vii.
3. Autres versions syriaques.
Au dire de Barhelmeus et d’Ebecljésu, le patriarche nestorien Aba I er (540-552) aurait traduit du grec l’Ancien et le Nouveau Testament. Absolument rien ne s’est conservé de cette traduction, si tant est qu’elle ait existé.
Au début du vie siècle, en 508, l’évêque de Mabboug, Philoxène (dit aussi Xénaïa), fit exécuter, par son chorévêque Polycarpe, une traduction de l’Écriture à partir du grec. Cf ici art. Philoxène, t.xii, col. 1516. Quels livres comprenait cette traduction, on en discute encore. Certainement le Nouveau Testament, mais certainement aussi le Psautier ; on a cru retrouver aussi des fragments d’Isaïe. Cette version « philoxénienne » a été revisée un siècle plus tard (en 610) et collât ionnée à Alexandrie par Thomas de Harkel ou d’Héraclée, devenu, lui aussi, évêque de Mabboug, sur des mss. que l’on pense avoir retrouvés. Le dernier mot n’est pas dit sur le rapport entre cette « harcléenne » et la « philoxénienne ». Cette question intéresse d’ailleurs surtout’a critique textuelle néo-testamentaire. Voir ci-dessous, col. 2726.
Deux siècles après la traduction de la philoxénienne, Jacques d’Édesse († 708), cf. ici, t. viii, col. 286, procura à ses coreligionnaires monophysites une révision très soignée de la Bible syriaque en se fondant sur les Septante et en fournissant des références aux autres traductions grecques. Il reste peu de choses de ce beau travail dont on peut juger par un ms. de Paris, donnant un Pentateuque lacuneux et Daniel, un ms. de Londres donnant les I et II Reg., III Reg. jusqu’à ii, 11, et des fragments d’Isaïe.
Plus importante que ces versions, qui sont malheureusement assez mal connues, est la traduction syriaque dénommée la Si/ro-palestinienne ou encore la hiérosolymitaine, qui a finalement été connue en Europe par le Cod. valic. 1 1 ( 19), décrit par les Assémani en 1758 dans leur catalogue de la Yalicane, t. tb, p. 70-103 ; le ms. en question a été publié à Vérone en 1861-1864. Cette recension qui s’étendait aux deux’Testaments se rencontre en outre dans beaucoup de livres liturgiques, surtout dans les lectlonnaires, c’est ce qui explique comment cette version est surtout connue par de menus fragments. Sa date est très diversement fixée, quelques critiques la faisant <u ix c siècle, d’autres la remontant jusqu’au v*. Sa langue paraît plus vulgaire que celle des traductions précédentes ; les mots grecs y sont nombreux ; elle s’attache de très près au texte grec.
3° Versions coptes.
En Egypte, le christianisme fut d’abord de langue grecque, mais, dès qu’il pénétra d ; ins la masse indigène, il dut parler le copte et mettre la Bible en cette langue à la disposition des fidèles. Plusieurs dialectes, d’ailleurs, se parlaient en Egypte : bohaïrique au Nord, sahidique (ou thébain ) au Sud, sans compter les dialectes du l’aïoum et de la Moyenne-Egypte. Or, il y eut, dans ces divers dialectes, des traductions plus ou moins com piétés de la Bible et cela de très bonne heure, dès le m", peut-être déjà dès le ile siècle. Ces versions ont’I. râites sur le grec des Septante, dont elles reflètent l’étal avant la recension d’Oiigènc. Pour autant que l’on en puisse juger, car le classement et surtout la publication, du moins pour l’Ancien Testament, sont
encore rudimentaires, le texte qui leur servait de I’i l étail très voisin de celui du Vaticanus.
1° Version éthiopienne. Depuis longtemps,
l’Eglise éthiopienne est en possession d’une version
en langue geez de la Bible entière. Ancien et Non
veau Testament, qui est la seule autorisée dans l’usage ecclésiastique et continue à maintenir son ancien prestige, même depuis que l’éthiopien est devenu une langue morte. Les origines de cette version sont obscures ; qu’elle remonte à saint Frumence, le premier apôtre de l’Ethiopie, c’est ce qu’il est impossible de démontrer ; qu’elle ait été faite sur l’arabe, c’est ce qu’il est encore plus difficile d’admettre, car la traduction de l’Ancien Testament suit très exactement le texte des Septante. Les travaux d’Aug. Dillmann qui a commencé la publication critique de cette version en 1853-1855 -- la mort a interrompu son œuvre en 1894 — ont montré que la version éthiopienne est très fidèle, rendant d’ordinaire mot pour mot le texte grec, très lisible néanmoins, excellente dans l’ensemble, encore que tous les livres n’aient pas été également bien traduits. La date de cette version est encore sujette à discussion. De ce que le christianisme a pénétré en Ethiopie dès la première moitié du ive siècle, on ne saurait conclure que la traduction ait été réalisée d’aussi bonne heure, il s’est écoulé un laps de temps assez considérable entre le moment où l’Évangile a été annoncé et celui où le pays a été suffisamment christianisé pour que fût nécessaire une Bible éthiopienne. Ce n’est pas une raison, d’ailleurs, pour reculer, comme le voulut un instant P.-O. de Lagarde, la traduction éthiopienne jusqu’au xiv re siècle, et pour la faire dériver de l’arabe ou du copte. On maintient donc que ladite version dérive des Septante et, comme les rapports religieux de l’Ethiopie ont été surtout étroits avec Alexandrie, on a admis, un peu à priori, que la recension utilisée avait été la recension hésychienne ; on pensait même pouvoir se servir de la traduction éthiopienne pour une reconstitution aisée de cette édition des Septante. Il a fallu en rabattre. Le christianisme n’est pas venu en Ethiopie exclusivement de l’Egypte ; les vrainéens ont eu part eux aussi à l’évangélisation. Il ne serait pas du tout invraisemblable que des docteurs araméens ou leurs disciples aient eu quelque part à la constitution de la Bible éthiopienne.
5° Versions arménienne et géorgienne, — On sait de quelle obscurité sont entourées les origines chrétiennes de l’Arménie et de sa littérature. Il est certain que, dans l’Arménie proprement dite, passée depuis 387 dans la mouvance de l’empire sassanide. les nouveaux maîtres témoignèrent de leur hostilité à la langue grecque et favorisèrent, au contraire, la propagation du syriaque. Les communications étaient difficiles avec Constantinople, beaucoup plus aisées avec les pays de langue araméenne. Il n’y aurait donc rien d’étonnant que la traduction des Livres saints ait été exécutée d’abord sur le syriaque. En fait, pourtant, la version arménienne actuelle part du grec. Dans la première moitié du ive siècle, on arriva à se procurer en Arménie des exemplaires de la Bible grecque et c’est sur cette Bible que les traducteurs arméniens exécutèrent leur version. La connaissance qu’ils avaient du grec était néanmoins assez élémentaire et ils révisèrent leur travail en recourant au syriaque qui leur était plus familier. Plus tard, diverses révisions, très soigneusement exécutées, ont donné à la vulgate arménienne sou caractère de perfection. Ceci était terminé vers le début du viir siècle. Ainsi la traduction arménienne de l’Ancien Testament dérive des Septante et plus par ticulièrement de la recension hexaplaire dont les plus anciens mss. ont conservé, au moins en partie,
les signes critiques. Quant à savoir si les variantes qui se rencontrent dans ces mêmes mss. proviennent de l’influence de traductions anciennes inspirées du
syriaque ou du fait que plusieurs textes grecs étaient
à la disposition du traducteur, elle n’est pas élucidée.
On ne peut guère séparer de la version arménienne la géorgienne, que la tradition rattache, elle aussi, à Mesrob, le fondateur de la littérature arménienne. Cette version vient-elle du grec directement ou par l’intermédiaire de l’arménien ? Les critiques après avoir penché pour la première hypothèse adoptent plus volontiers la seconde, qui explique mieux un certain nombre de contre-sens et d’erreurs. Ces défauts furent d’ailleurs ultérieurement éliminés par des réviseurs travaillant sur un texte grec. En tout état de cause, la version géorgienne serait un témoin des plus importants du texte hexaplaire.
6° Versions arabes.
Elles sont très nombreuses,
mais n’ont qu’une importance restreinte pour la critique biblique et l’exégèse ; à peu d’exceptions près, en effet, elles dérivent du grec, du latin, du copte, du samaritain, du syriaque. Elles mériteraient d’ailleurs plus d’intérêt de la part des linguistes, d’une part et surtout des historiens, car chrétiens, juifs, samaritains, musulmans y ont travaillé, ces derniers dans une intention de polémique contre les autres « fidèles du livre ». Rien n’est connu de versions antérieures à l’Islam ; Mahomet ne savait que par ouï-dire les faits et les enseignements de l’Ancien et du Nouveau Testament. À en croire les historiens arabes, il y aurait eu néanmoins une traduction de la Torah et des Prophètes (sans compter le Nouveau Testament) dès la fin du viie siècle de notre ère ; on n’en a rien retrouvé. On se demande aussi d’où proviennent d’assez abondantes citations de l’Ancien et du Nouveau Testament utilisées par des polémistes ou des théologiens musulmans des siècles suivants. Mais un jour vint où l’arabe fut la langue courante des nombreux chrétiens passés sous la domination musulmane. À leur usage, la Bible dut être traduite, comme aussi à l’usage des Juifs, nombreux dans tous les pays conquis. D’où la multiplicité des traductions, surtout partielles, mais quelques-unes aussi complètes, de la Bible. Les unes partirent de l’hébreu, et cela jusqu’au xviie siècle ; d’autres du texte samaritain, comme celle d’Abou-Saïd au xi c siècle ; d’autres du copte (dans certains mss. l’arabe figurant à côté du copte) ; d’autres du latin, telle l’édition de la Bible en arabe et latin fournie par la S. C. de la Propagande en 1671 ; d’autres du syriaque ; d’autres enfin du grec. C’est donc tout un monde que ce domaine des versions arabes de la Bible.
7° Version gothique.
On a dit à l’article Ulfila,
ci-dessus, col. 2048, le rôle considérable que joua cet évêque arianisant dans la conversion au christianisme arien des Goths et par là de nombreux peuples germaniques. Il est certain qu’UIfila créa l’écriture gothique dans le dessein de donner à son peuple les Livres saints dans leur langue et qu’il traduisit en goth une partie importante de la Bible. Quels livres ? Il est très difficile de le dire pour ce qui est de l’Ancien Testament (nous sommes bien mieux renseignés pour le Nouveau). Il n’en reste, en effet, que des débris : Gen., v, 3-30 ; II Esdr., xv, 13-16 ; xvi, 14-xvii, 8 ; xvii, 13-45 (d’après les Septante = Neh., v, 13-16 ; vi, 14-vn, 3 ; vii, 13-45), découverts en 1817 par A. Mai, dans le ms. G. 82 sup. de l’Ambrosienne. C’en est assez néanmoins pour montrer que la Bible gothique — on pouvait d’ailleurs s’y attendre — suit la recension lucianique des Septante. Voir le texte dans P. L., t. xviii. Nous n’avons pas à étudier ici les traductions de la Bible en haut-allemand.
8° Version slavonne.
Elle remonte au milieu du
ix c siècle, étant due à l’activité des deux apôtres des Slaves, Constantin (Cyrille) et Méthode. Avant de
partir pour l’a Moravie, où ils devaient arriver en 864, il semble bien qu’ils avaient préparé une traduction en langue slave tout au moins des péricopes bibliques utilisées dans la liturgie. Ce dut être dans le dialecte qui se parlait à Thessalonique et aux environs, patrie des deux frères, et donc dans cette langue vieille-bulgare qui est aux origines de la langue ecclésiastique slave (slavon). En dépit de la tradition qui fait de Cyrille l’inventeur de l’alphabet dit aujourd’hui encore « cyrillique », cette traduction fut sans doute rédigée dans l’écriture glagolitique, utilisée jusqu’à nos jours dans les livres liturgiques Slovènes, et qui est de la minuscule grecque très déformée. Quant à savoir quels livres de la Bible furent ainsi traduits, il faut se défier de la tradition rapportée par la légende dite pannonienne de saint Méthode, suivant laquelle celui-ci aurait traduit l’ensemble des livres de l’Ancien et du Nouveau Testament. En fait on ne connaît point avant le xve siècle de recueils slaves contenant toute la Bible. Il est beaucoup plus raisonnable d’admettre, avec la légende de Cyrille, qu’avant le départ pour la Moravie Constantin avait traduit, en dehors du Psautier, les passages du Nouveau Testament (évangiles, actes, épîtres), peut-être même quelques-uns de l’Ancien, employés dans les offices. Les labeurs d’un apostolat, qui fut d’ailleurs très court en ce qui concerne Constantin, ne permirent guère à celui-ci de pousser bien avant son œuvre de traducteur. L’épiscopat de Méthode (| 885) fut bien traversé ; mais l’évêque a pu, aux dernières années de sa vie, trouver le temps de faire quelques traductions des livres bibliques. Tout cela s’est complété lentement au cours des siècles. Les mss. nombreux de la version slavonne ne sont jamais complets, avant les dernières années du xve siècle. À cette époque, l’archevêque de Novgorod, Gennade, réussit à se procurer les traductions slavonnes déjà existantes et exécuta lui-même les traductions qui manquaient — en partie d’après la Vulgate latine (qui lui fournit I et II Parai., i, II et III Esdr., Tob., Jud., Sapient., I et II Mach., Esth., x-xvi, Jer., i-xxv, xlvi-i.i) ; il rangea aussi les livres d’après la Vulgate. Le reste de sa Bible est emprunté aux traductions slavonnes préexistantes, repose donc sur le texte des Septante, mais provient aussi de versions d’âge et d’origine divers. Cette Bible de Gennade a servi, non sans des retouches de divers ordres, à l’impression de la première Bible slavonne, parue à Ostrog, en 1581, laquelle fut, à son tour, le point de départ des éditions ultérieures, plus ou moins officielles, de la Bible slavonne.
Il serait vain de tenter une bibliographie, même sommaire ; on trouvera, pour chacune des questions touchées ici, les indications utiles soit dans les manuels plus ou moins développés d’introduction à l’étude de la Bible, soit dans les encyclopédies bibliques : F. Vigouroux, Dictionnaire de la Bible avec son Supplément ; Hastings, A Dictionary o/ the Bible ; Cheyne, Encyelopiedia biblica ; Singer, A Jewish Encyclopœdia. — Nous avons surtout utilisé l’art. Bibeluberseteungen, dans la Protest. Realencyelopàdie. t. nr, 1897, p. 1-170, dû principalement à F.berh. Nestlé (avec quelques collaborateurs pour des questions de détail), à compléter par l’art, de même titre du supplément : t. xxiv, 1913, p. 206-227.
Pour ce qui est des Septante une bibliographie plus récente dans W. Christ-YV. Schmid-O. Stâhlin, Geschichte der griechischen Literatur, 6e éd., Munich, 1920, t. ii, p. 542-576 ; l’ouvrage capital reste H. B. Sweete, An introduction to the OUI Testament in greek, Cambridge, 19(10, 2° éd. 1902 (révisée par R. R. Ottley en 1914).
Nous indiquerons sommairement pour chaque version l’édition la plus courante ou la plus accessible.
Septante. — Voir ci-dessus col. 2714. — Les rares fragments des versions d’Aquila, Symmaque et Théodotion (en dehors de Daniel) sont rassemblés dans les éditions 2 72 5
VERSIONS DU NOUVEAU TESTAMENT
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des Hexaples : B. Montfaucon, Hexaplorum Origenis quee supersunt, Paris, 1713, reproduit dans P. G., t. xv et xvi, et mieux dans F. Field, Origenis Hexaplorum quiv supersunt sive velernm inlerpretum grs-corum in loiuin Vêtus Testamentum fragmenta, 2 vol., Oxford, 187.") ; sur les découvertes plus récentes, en particulier celles de Mercati, l’essentiel dans Christ, loc. cit., p. 550.
Versions araméennes et Targums. — Le texte des Targums se trouve, avec une traduction latine très fidèle, dans les quatre grandes Polyglottes. Nous avons vu celle de Walton.
Le Pentateuque samaritain, avec sa traduction (targiun samaritain) a été imprimé d’abord par.1. Morin dans la Polyglotte de Paris, d’où il est passé dans la Polyglotte de Londres (Walton).
Versions syriaques. — Il faut consulter sur elles les manuels de la littérature syriaque, tels Bubens-Duval et surtout A. Baumstarck, Gesehichte der syrisclien Literatur ; les éditions imprimées sont recensées aussi dans Nestlé, Litleratura syriaca, Berlin, 1888. Cf. L. Hæfeli, Die Peschitta des A. T. mit Rùcksicht anf ihre textkritische Bearbeitimg und Herausgabe, Munster-in-W., 1920. Il n’y a d’édition d’ensemble de la Bible syriaque que celle des dominicains de Mossoul, 1887-1891, 3 vol. ; on cite également l’édit. de l’A. T. de la Société biblique de Londres, 1823. Voir aussi V. E. Barnes, The Peshitta Psalter according to the west syrian text, Cambridge 1901.
Versions coptes. — Pour l’Ancien Testament, il n’y a pas encore d’édition d’ensemble dans aucun des dialectes ; mais il a été publié nombre de textes séparés, voir K. Nestlé, art. cit., p. 85-87.
Version éthiopienne. — On a signalé dans le texte l’édition de Dillmann qui n’est pas encore complétée.
Version arménienne. — Édition du méchitariste .1. dolirab, Venise, 1805, qui a une vraie valeur critique.
Versions arabes. — On a signalé dans le texte l’édition arabo-latine de la Propagande, publiée en 1691, rééditée à Londres en 1822, 1831.
Version gothique. — II n’y a pour l’Ancien Testament que des fragments informes ; cf. P. L., t. xviii, col. 803 sq.
Version stavonne. — Voir le texte, col. 2723.