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Dictionnaire de théologie catholique/VIOLATION

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Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant, Eugène Mangenot, Émile AmannLetouzey et Ané (Tome 15.2 : TRINITÉ - ZWINGLIANISMEp. 772-778).
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VIOLATION
I. Le mot et la chose.
II. Les divers cas de violation.

I. Le mot et la chose.

Entendu au sens le plus général, le mot violation (en latin violatio ou lœsio) s’entend de tout acte qui va à rencontre d’un droit, d’une règle, d’une loi : c’est ainsi qu’on parle vulgairement de violation de domicile, du droit d’asile ; le Code canonique a défini le délit : violatio legis… cui annexa sif sanctio canonica…, can. 2195. Mais parce que le droit ou la loi sont considérés comme ayant un caractère sacré, l’appellation évolua rapidement vers le sens de souillure, profanation d’un objet religieux ou sacré (on disait aussi pollutio, profanatio, exsecratio. ..) ; c’est ainsi qu’on parle de violation d’une église, d’un tombeau, d’un secret.

Le langage juridique, tant ecclésiastique que civil, est plus précis. Dans le droit romain cependant, le terme violation n’avait pas de signification spéciale en dehors de celle de transgression d’une loi. Ce que nous appelons en français « violation de dépôt » (cf. Code pénal, art. 408, 253-255), n’était en droit romain qu’une variété du furtum, le furtum mus. Cf. Dig., 1. XVL tit. m ; Cod, JusL, t. IV, tit. xxiv. L’ancien droit canonique ne parlait guère de violation qu’à propos d’églises souillées par des actes honteux ou criminels. Cf. Grat., III a pars, dist. I, c. 19. Mais on disait plus communément pollutio, lbid., c. 20 ; Décrétâtes, t. III, tit. xl, c. 10. Cf. Wemz, Jus Decretalium, t. iii, n. 442 ; Many. De loris et lemp. sacris, n. 30. Cependant, Boniface YIII employait les deux expressions comme synonymes, I. III, tit. xxi, in VI". Dans la constitution Apostolinr Srrfis (1800). n. 19, 20. il est question de violation de clôture » des religieux et des moniales.

Le Code pénal français prévoit la répression de la « violation de domicile ». art. 114. 184, et de la violation de sépulture ». art. 360. S’il s’agit des divers « secrets » (d’État, de fabrique ou professionnel), il emploie le mot i révélation ». art. 80. 378, )I8.

Le Code canonique parle de violatio ou lirsio pour marquer la transgression de la loi. eau. 2195. 2196, 2198. Les termes violart’, violatio (cf. Index analyticoalphabétlque ) sont réservés pour désigner soit les délits de profanation des enlises, can. 1 172-1 177, 2329, des cimetières, can. 1207. ou des cadavres, can. 2328, soit l’entrée dans la clôture des religieux ou des moniales, eau. 2312. soit la divulgation du secret sacramentel, can. 230’. ».

Dans le langage courant, les moralistes et les canonistes parlent encore de violation des » libelles.

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religieuses (qu’il s’agisse du libre exercice de la juridiction du Saint-Siège, des élections canoniques ou de la confession des religieuses), du secret du Conclave, de la loi de la résidence ou autres obligations du curé, des obligations de la vie commune en religion, des archives de la curie diocésaine, des censures, du droit d’asile, etc.

Nous examinerons ces différents cas, pour autant qu’ils font l’objet de lois ou de sanctions dans le droit actuel de l’Église.

Pour la violation du secret naturel, nous renvoyons à l’art. Secret, t. xiv, col. 1756 sq. ; pour les cimetières, à l’art. Sépulture, t. xiv, col. 1894. Nous compléterons ce qui est dit du Secret sacramentel au mot Confession, t. iii, col. 972-974, en indiquant la législation nouvelle introduite par le Code.

II. Cas particuliers de violation.

1° Lieux sacrés. — C’est le terme de violatio qui a été techniquement consacré par le Code pour désigner la pollution ou souillure juridique que font subir aux églises ou cimetières certains actes énumérés au can. 1172. On peut encore, en souvenir de l’ancien droit, utiliser le terme de pollutio (cf. Wernz-Vidal, Jus canonicum, t. iv, n. 366 ; Clayes-Simenon, Manuale juris can., t. iii, n. 17), mais il faut bannir du langage canonique et théologique le mot « profanation », qui est au moins ambigu et, d’après l’étymologie, indiquerait plutôt une exécration, c’est-à-dire une perte de bénédiction ou de consécration, ce qui n’est pas le cas.

1. Causes de violation d’une église.

Elles ont varié au cours des âges. D’après une décrétale attribuée par Gratien au pape Hygin (n c siècle), le lieu saint était pollué par l’homicide ou l’adultère. Grat., 1 1 I a pars, dist. I, c. 19. On y ajouta, à partir du concile de Nicée, l’efjusio seminis humani, que l’on retrouve dans la plupart des documents canoniques (Grat., 3 a pars, dist. I, c. xx ; Décrétâtes, t. III, tit. xl, c. 10 ; t. III, tit. xxi, in VI"), et qui ne fut supprimée que par le Code. L’ « effusion du sang humain » figure également dans le 14e canon du synode de Salzbourg de 1281. Cf. Hefele-Leclercq, Hist. des conc, t. vi, p. 276. Le Code actuel l’a maintenue parmi les causes de violation, can. 1172.

Les actes « violateurs » constituent au point de vue théologique un sacrilège local. Voir Sacrilège, t. xiv, col. 699-701. Ils sont les mêmes pour la violation d’un cimetière que pour celle d’une église. Mais, à la différence de l’ancien droit, la violation de l’un n’entraîne plus la violation de l’autre, même si église et cimetière sont contigus. Can. 1172.

Les actes en question : délit d’homicide, effusion injuste et notable de sang humain, affectation de l’église ou du cimetière à des usages impies ou inconvenants, sépulture d’un infidèle ou d’un excommunié après sentence déclaratoire ou condamnatoire doivent être certains, notoires (de droit ou de fait, au sens du can. 2197) et accomplis à l’intérieur de l’église, non sous les voûtes, sous le porche, à la sacristie, ou dans une crypte qui n’aurait qu’une entrée extérieure.

Les canonistes font remarquer très justement que le Code, à la différence du droit ancien, ne parle plus simplement d’homicide, mais de délit d’homicide, lequel se distingue du suicide ; mais ce dernier crime pourra être cause de violation s’il est accompli avec abondante effusion de sang. Au contraire, une exécution capitale ne constitue pas un délit d’homicide.

L’affectation (addicta) à des usages inconvenants suppose des actes répétés ou du moins une certaine durée (un ou deux jours). Le fait de tenir une simple réunion politique dans le lieu sacré ne le viole pas.

Jadis la sépulture à’acatholiques était considéré comme produisant les mêmes effets que la sépulture d’infidèles. C’était le sens d’une réponse de la S. C. des

Rites, en date du 23 avril 1785. On y ordonne de réconcilier des églises dans lesquelles ont été ensevelis des juifs et des protestants, eo quod ex tumulalione acatholicorum pollutse fuerint. Decr. auth., n. 3344. Aujourd’hui, le texte du Code est clair : il ne s’agit que d’infidèles au sens strict, c’est-à-dire de nonbaptisés ; et, comme nous sommes in re odiosa, on ne comprendra sous ce titre ni les enfants de parents chrétiens, morts sans baptême, ni les catéchumènes ; c’était déjà l’interprétation donnée avant le Code. Gasparri, Tract, can. de SS. Euchar., n. 253. Cf. M. Conte a Coronata, De locis et temp. sacris, n. 28.

En revanche, ce n’est plus seulement la sépulture d’un excommunié vilandus qui viole une église, mais encore celle de tout excommunié après sentence (déclaratoire ou condamnatoire). Par sépulture, il faut entendre Vinhumation du cadavre dans le lieu saint, et non pas seulement les funérailles, au sens du can. 1204.

L’ancien droit canonique équiparait à la violation des églises celle des oratoires publics solennellement bénits. Cf. Gasparri, De SS. Euchar., n. 247 ; Wernz, Jus Décrétai., t. iii, n. 455. À cause des termes du can. 1191, § 1, nous pensons que cette interprétation peut être admise aujourd’hui encore, bien que la matière soit « odieuse » et que le texte du Code ne soit pas formel, cf. can. 6, 4°. Mais on ne saurait pousser l’assimilation jusqu’aux oratoires semi-publics, tels que sont les oratoires des religieuses, même solennellement bénits. Cf. Génicot-Salsmans, Casus conscientise, 7° éd., 1938, cas. 752, p. 523.

On ne saurait non plus parler de violation proprement dite à propos des autels. Le Code est muet à leur propos et les actes de violation prévus pour les églises ne sauraient leur être appliqués ; d’autre part, aucun rite n’est prévu pour leur réconciliation. On pourrait, à la rigueur, parler de violation « indirecte » en ce sens que les autels fixes, qui se trouvent dans une église violée, ne peuvent être utilisés pour le culte divin avant que l’église n’ait été réconciliée. Mais l’autel n’est pas affecté directement, de sorte que, s’il était possible de transférer l’autel hors de l’église (sans en dissocier les parties), on pourrait y célébrer les saints mystères. L’autel ne peut donc être affecté que par l’exécration, laquelle ne serait réparée que par une nouvelle consécration.

2. Effets de la violation.

C’est, pour les églises (et oratoires publics), l’interdiction d’y célébrer les offices divins, d’y administrer les sacrements et d’y faire les funérailles. Can. 1173. Cette prohibition est grave de sa nature (nefas). Cependant, si une raison sérieuse ou une urgente nécessité obligeait à célébrer la messe de suite, avant toute réconciliation (p. ex. pour administrer le viatique ou permettre aux fidèles de satisfaire au précepte dominical), l’évêque, et même le recteur de l’église si l’on ne peut atteindre l’évêque, pourraient autoriser cette célébration. Cf. Gasparri, De SS. Euchar., n. 243 ; Wernz, Jus Décret., t. ii, n. 443. Ces cas d’urgence seront moins facilement réalisés actuellement, attendu que la procédure de réconciliation est moins compliquée dans le droit nouveau. Si la violation se produisait au cours des offices divins (entendus au sens du can. 2256), on devrait les interrompre de suite. Pour la messe, le prêtre devra se retirer immédiatement s’il n’a pas encore entamé le canon ou s’il a déjà achevé la communion ; dans le cas où le canon serait commencé, il poursuivrait le sacrifice jusqu’à la communion. Can. 1173, § 2.

3. Réconciliation.

La violation d’une église (d’un oratoire public ou d’un cimetière) se répare par la réconciliation. Celle-ci est un ensemble de rites sacrés destinés à purifier le lieu sacré de la souillure juri

dique, afin de le rendre à sa destination primitive.

II y a obligation de réconcilier le plus tôt possible une église violée ; les rites à observer sont décrits dans le Pontifical s’il s’agit d’une église consacrée, dans le Rituel si l’église est simplement bénite. Can. 1174. S’il y a un doute (de droit ou de fait) sur la violation, la réconciliation n’est plus nécessaire ; elle peut être faite et il est convenable de la faire ad cautelam, Wernz-Vidal, Jus canon., t. iv, n. 367. Cf. S. C. Rit., 3 mars 1821, février 1847. On notera que le seul fait de la célébration de la messe ne constitue pas un rite de réconciliation et ne suffît pas à rendre l’église à l’exercice légitime du culte divin. S. C. Rit., 19 août 1634.

Une église bénite peut être réconciliée par son recteur ou par tout prêtre agissant du consentement au moins présumé de celui-ci. Cf. Rit. rom., tit. viii, c. xxviii. Si l’église est consacrée, la fonction est réservée à l’Ordinaire du lieu ou au supérieur majeur des religieux, selon que l’église est séculière ou régulière ; l’un et l’autre, d’après le droit du Code, peuvent déléguer pour cet offîce un simple prêtre (qui devra se servir du Pontifical). Can. 1176 et 1156. Lorsque, dans un cas d « grave et urgente nécessité, le recteur de l’église a procédé lui-même à la réconciliation, parce qu’il n’a pu atteindre l’évêque, il devra, après coup, avertir celui-ci, mais seulement ad liceitatem. Can. 1176, § 3.

La réconciliation se fait par l’aspersion d’eau bénite ordinaire, si l’église n’a reçu que la bénédiction ; si l’église est consacrée, avec une eau spéciale bénite à cet effet selon le rite du Pontifical ; le prêtre, qui réconcilie l’église en cas de nécessité, peut faire cette bénédiction spéciale. Can. 1177.

Lorsque la violation de l’église résulte de l’inhumation d’un excommunié ou d’un infidèle, il faudra, avant la réconciliation, enlever préalablement le cadavre, si la chose est possible sans grave inconvénient. Quand cet inconvénient existe, il n’y a plus obligation de procéder à l’exhumation. Can. 1175. Il en serait de même, si l’on avait dû procéder d’urgence à la réconciliation, alors que l’exhumation ne pouvait se faire avant plusieurs jours. Cf. M. Conte a C.oronata, Instit. juris can., t. ii, n. 749.

La violation d’une église ou d’un cimetière par les actes spécifiés au can. 1172 constitue non seulement un péché (sacrilège local), mais encore un délit en regard du droit canonique. Les auteurs doivent être frappés par l’Ordinaire d’un interdit ab ingressu teelesiæ et d’autres peines convenables. Can. 2329. L’Ordinaire peut en outre les punir en tant que sacrilèges. Can. 2325.

Violation de cadavres et de tombeaux.

1. Chez

tous les peuples, les corps des défunts et leur sépulcre ont été regardés comme une chose religieuse et sacrée. Aussi ont-ils été protégés parles lois, tant civiles qu’ecclésiastiques, contre les injures ou les attentats.

Le droit romain punissait de lourdes peines la violation de sépulcre : Rei sepulrmriim violatorum, si COTpora rxtraxerint vel ossa eruerint. humilinres quidem fortunée stunmo supplicia adftciunhw ; honestiores in Insulam deporlantur : alias autan relegantur aui in metallum damnantur. Cf. Dig., 1. XL VII, tit.xii, fr. 11. Les coupables étaient en outre frappés d’Infamie, Dig., ibid., fr. 1 ; Cod. Just.. I. IX, tit. xix.

Le droit canonique hérita des mêmes préoccupations, et la violation de sépulcre est considérée comme un délit par les Pères grecs du iv siècle et par le

IV concile de Tolède (633). Gratien range, parmi

les personnes frappées d’infamie par le droit, les

upulcrorum violatores, causa VI, q. i. c. 17. Pour

mettre fin à l’horrible coutume de dépecer les cada vres, afin de transporter plus facilement lis osse ments dans des tombeaux éloignés, Roniface VIII (1299) interdit cette pratique barbare sous peine d’excommunication latse sententiæ réservée au Saint-Siège. Exlrav. com., t. III, tit. vi, c. 1.

La plupart des codes civils modernes prévoient des peines sévères contre les violateurs de cadavres ou de tombeaux. Cf. Code pénal français, art. 360 ; Code pénal italien, art. 410-413 ; Code autrichien, § 306 ; germanique, § 168.

2. Le Code canonique actuel frappe d’une infamie de droit encourue ipso facto les violateurs de cadavres ou de sépulcres qui exécutent leur forfait ad furtum vel ad alium malum ftnem. Ils doivent être en outre punis d’un interdit personnel et, si le coupable est un clerc, il devra être déposé. Can. 2328. L’excommunication prévue par la constitution Apostoliæ Sedis contre ceux qui dérobaient sans autorisation des reliques dans les catacombes n’a pas été maintenue par le Code.

Le can. 2328 ne parle pas des « cendres » des défunts (provenant de l’incinération, ou représentées par la poussière fruit de la décomposition) ; il n’est pas douteux cependant qu’elles ne soient également protégées par la loi de 1’Kglise, car elles ont le même caractère sacré. (Le Code pénal italien les mentionne expressément, art. 410.) Cf. M. Conte a Coronata, Instit. juris can., t. iv, n. 1914. Rien que le Code canonique range l’attentat contre les morts ou les tombeaux parmi les délits contra religionem, il n’y a pas à faire de distinction entre cadavres ou sépulcres de baptisés et ceux de non baptisés en ce qui concerne la violation : l’Église protège un droit naturel. Cf. Ciprotti, dans Apollinaris, t. vin (1935), p. 388-389.

En dehors des cas expressément prévus ou permis par la loi (dissections ou autopsies à des fins chirurgicales ou judiciaires, exhumations), l’intention mauvaise (finis malus) sera facilement présumée chez le violateur : tout acte « illicite » en cette matière sera réputé délit, pourvu qu’il constitue une injure réelle et non pas seulement verbale. Rien que les canonistes ne donnent pas de définition de la violation de cadavre (il serait insuffisant de parler de « mauvais traitement » ou de « procédé indigne » ), il doit s’agir d’actes qui atteignent le corps lui-même ou ce qui le touche immédiatement (vêtements, anneau, bandelettes, suaire…). Non seulement la mutilation du cadavre, mais encore l’enlèvement, la détention, le détroussement (total ou partiel), les actes de nécrophilie, la percussion ou lacération, les injures graves et réelles (crachats, souillures) constituent le délit de violation au sens canonique. Par « cadavre », il faut entendre tout corps humain privé de vie (même celui d’un enfant mort -né) à quelque stade de décomposition qu’il soit arrivé, ou une « pari notable » de ce corps, c’est-à-dire celle qui recrée le mieux l’image du corps entier, p. ex. : la tête, le tronc, les jambes, le squelette, mais non les cheveux, les pieds, les mains, les yeux, les oreilles, ni les parties d’un corps vivant, comme un membre amputé. Cf. Ciprotti. dans Apollinaris, t. vin (1935). p. 388.

Par sépulcre ou tombeau, il faut entendre le lien où est déposé hic et nunc un cadavre destiné à être enseveli (il importe peu quc la sépulture soit provisoire ou définitive). Le cercueil ou l’urne funéraire ne sont pas des tombeaux. La violation est réalisée lorsque le sépulcre est ouvert indûment, quand quelqu’un y pénètre illégitimement ou bouleverse sans raison son contenu. Le seul fait d’endommager ou de souiller l’extérieur (monument, inscription), de briser la croix ou de remuer la terre environnante ne semble pas constituer une violation.

3° Violation de clôture. -- Il s’agit de Clôture papale, soit de moniales, SOil de réguliers à vœux solennels.

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1. Clôture des moniales.

On sait que la clôture des moniales a été introduite par la coutume. Elle fut cependant l’objet d’une réglementation de la part de nombreux synodes ou conciles. Le 33e can. du IIIe conc. de Carthage (397) décréta que les vierges consacrées à Dieu devaient demeurer dans leurs maisons, veiller les unes sur les autres et ne pas sortir au hasard. Au vie siècle, les conciles d’Agde (506), can. 28, d’Épaone (517), can. 38, réglèrent leurs rapports avec les monastères d’hommes. Cf. Mansi, Conc., t. viii, col. 329, 564. Les conciles d’Orléans (549), can. 19, et de Lyon (583), can. 3, mentionnent l’existence de monastères de moniales soumises à la clôture perpétuelle. Mansi, ibid., t. ix, col. 133, 942. Voir aussi concile in Trullo (693), can. 46 et 47. Ce fut Boniface VIII qui imposa aux moniales la première loi générale réglant avec précision l’entrée et la sortie des monastères, t. III, tit. xvi, c. 1, in VI. Le concile de Trente confirma les dispositions prises par Boniface, en y ajoutant comme sanction l’excommunication latee sententiæ. En dépit de cette législation, les papes eurent souvent à intervenir pour mettre des bornes à l’incroyable indulgence des évêques qui, sous divers prétextes, accordaient des autorisations qui aboutissaient à tourner la loi. Citons en particulier Pie V, 20 mai 1566, 1 « février 1570 ; Grégoire XIII, 13 juin 1575, 25 décembre 1581 ; Grégoire XV, 5 février 1622 ; Alexandre VII, 20 octobre 1664. Voir les textes dans Gasparri, Fontes, t. i, n. 112, 133, 147, 148, 199, 240. La constitution Apostolicæ Sedis (1869), n. 19, frappait les violateurs de la clôture des moniales d’une excommunication latæ sententiæ réservée au Saint-Siège.

2. Clôture des religieux.

L’institution de la clôture pour les religieux remonte au viie siècle. Si saint Basile avait autorisé l’existence de monastères doubles, il avait édicté des règles très strictes au sujet des relations entre moines et moniales. Cf. P. G., t. xxi, col. 993 et 1155. Ces règles furent rappelées par le 20e can. du IIe conc. de Nicée (787), cf. Grat., caus. XVIII, q. ii, c. 21, et bientôt les monastères doubles furent totalement interdits. Grat., ibid., c. 22, 23. II n’y eut cependant aucune législation générale jusqu’au xvi c siècle. La multiplicité des abus décida Pie V à retirer toutes les permissions accordées antérieurement aux femmes de pénétrer dans les monastères d’hommes ; il prononça l’excommunication réservée au pape contre les femmes qui enfreindraient la défense, en même temps que la privation d’office contre les supérieurs qui autoriseraient leur entrée, 24 octobre 1566. Cf. Gasparri, Fontes, t. i, n. 115. Grégoire XIII, 13 juin 1575, et Benoît XIV, 3 janvier 1742, durent encore intervenir pour supprimer les permissions abusives et confirmer les peines antérieurement portées. Gasparri, Fontes, t. i, n. 147, 322. La constitution Apostolicæ Sedis, n. 20, maintint l’excommunication réservée au pape.

3. Formes du délit.

Selon le droit du Code, le délit peut revêtir une triple forme :

a) Violation de la clôture des moniales. — Il s’agit de clôture passive, c’est-à-dire relative à l’entrée des étrangers dans le monastère. Le can. 488, 7°, a défini ce qu’il faut entendre par moniales. Cependant, la Commission d’interprétation a déclaré que, dans les territoires où en vertu d’un induit apostolique (France et Belgique) les vœux ne sont pas solennels, il n’y a pas, pour les moniales, de clôture papale, 1 er mars 1921, Acta ap. Sedis, t. xiii, p. 178 ; sont seuls exceptés les monastères qui ont demandé au Saint-Siège l’autorisation d’émettre de vrais vœux solennels, avec obligation de la clôture pontificale. S. C. Belig., 23 juin 1923, Acta ap. Sedis, t. xv, p. 358.

La clôture « matérielle » du monastère comprend, outre la maison habitée par la communauté, les jardins et vergers réservés aux religieuses. Sont en dehors de la clôture : l’église ouverte au public (à laquelle les moniales ne peuvent accéder sans induit du Saint-Siège), la sacristie, si elle est contiguë à l’église, l’hôtellerie et le parloir, can. 597, § 2. Cf. Instruct. de la S. C. Relia., 6 février 1924 ; Acta ap. Sed., t. xvi, p. 96.

A l’encontre des violateurs de la clôture des moniales le can. 2342, 1°, a établi les pénalités suivantes : les personnes (quels que soient leur rang, leur condition ou leur sexe) qui entrent dans le monastère sans une permission légitime sont frappées ipso facto d’une excommunication simplement réservée au Saint-Siège. Il en est de même de ceux qui admettent ou introduisent ces personnes. Si le coupable est un clerc, il devra en outre être suspendu pour un temps à fixer par l’Ordinaire suivant la gravité de la faute.

L’autorisation de pénétrer dans la clôture papale est à demander au Saint-Siège (S. C. Belig.). Le can. 600 et l’Instruction du 6 février 1924 ont déterminé les personnes qui jouissent de cette autorisation de façon permanente. Ce sont : l’Ordinaire et le supérieur régulier, ou les visiteurs par eux délégués, mais seulement pour la visite du monastère et à condition de se faire accompagner d’un clerc ou d’un religieux d’âge mûr ; le confesseur ou son remplaçant, pour administrer les sacrements aux infirmes et assister les mourants ; les chefs d’État en exercice et leurs épouses avec leur suite, ainsi que les cardinaux. C’est à la supérieure de permettre l’entrée du monastère aux médecins, chirurgiens et autres personnes dont les services sont indispensables, après s’être munie d’une permission, au moins habituelle, de l’Ordinaire du lieu.

On notera que, dans la constitution Apostolicæ Sedis (1869), les violateurs de clôture étaient frappés d’excommunication quel que fût leur âge (cujuscumque œtatis) ; cette clause a été supprimée dans le texte du Code, attendu que les impubères n’encourent pas les peines latæ sententiæ. Can. 2230.

b) Violation de la clôture des réguliers. — Cette seconde forme de délit a pour auteurs les femmes qui pénètrent à l’intérieur de la clôture des monastères d’hommes ; et tous ceux, supérieurs ou autres, qui introduisent ou admettent des femmes (quel que soit leur âge) dans cette même clôture. La peine est l’excommunication simplement réservée au souverain pontife ; en outre, si le coupable qui introduit ou admet ces femmes est un religieux, il devra être privé de son office, s’il en a un, ainsi que de la voix active et passive. Can. 2342, 2°.

On notera que le Code a ajouté cette fois la clause cujuscumque œtatis (à propos des femmes introduites ou admises), laquelle ne figurait pas dans la constitution Apostolicæ Sedis de 1869 ; on la trouvait jadis dans la constitution Regularem vitam d’Eugène IV, 30 juin 1439. C’est dire que le délit (et la peine) frappent les supérieurs ou autres qui introduisent ou admettent même des fillettes impubères ou au-dessous de sept ans. Cf. Theodori, dans Apollinaris, t. v (1932), p. 108.

c) Sortie illégitime des moniales. — Cette dernière forme de violation est réalisée lorsque des religieuses, tenues à la clôture papale, franchissent cette clôture sans autorisation régulière, contrairement aux prescriptions du can. 601. Elles sont frappées ipso facto d’une excommunication simplement réservée au Saint-Siège. Can. 2342, 3°. La peine ne serait pas encourue par des moniales qui, sorties légitimement, tarderaient à rentrer ou ne rentreraient pas.

Violation des censures.

C’est un délit qui peut

se réaliser de plusieurs manières, et que le Code sanctionne de peines prévues aux can. 2338-2340.

1. Une excommunication latæ sententise, simplement réservée au Saint-Siège, frappe : a) ceux qui auraient la présomption d’absoudre, sans les pouvoirs nécessaires, d’une excommunication speciali vel specialissimo modo Sedi ctp. reservata, can. 2338, § 1 ; — b) ceux qui accordent aide ou faveur à l’excommunié vitandus dans le délit qui lui a valu l’excommunication ; — c) les clercs qui sciemment et spontanément communiquent avec lui in diuinis et l’admettent aux offices divins. Can. 2338, § 2.

2. Sont frappés ipso facto d’un interdit ab ingressu ecclesiæ ceux qui sciemment célèbrent ou font célébrer les offices divins dans des lieux interdits, ou admettent des clercs excommuniés, interdits, suspens (après sentence déclaratoire ou condamnât oire), à célébrer les offices divins prohibés par la censure encourue. Can. 2338, § 3.

3. Ceux qui osent donner des ordres ou exercer une contrainte pour faire donner la sépulture ecclésiastique à des infidèles, apostats, hérétiques, schismatiques, ou autres excommuniés ou interdits (à rencontre des prescriptions du can. 1240), encourent ipso facto une excommunication non réservée. Et ceux qui spontanément leur accordent la sépulture ecclésiastique encourent un interdit ab ingressu ecclesiæ, réservé à l’Ordinaire. Can. 2339.

4. On notera enfin que les clercs qui exercent les fonctions d’un ordre sacré, alors qu’ils en sont empêchés par une peine canonique médicinale ou vindicative, personnelle ou locale, encourent une irrégularité ex delicto. Can. 985, 7°.

Violation des privilèges cléricaux.

Ces privilèges

sont au nombre de quatre d’après le droit actuel : privilège du « canon » (can. 119), du for (can. 120), de l’exemption (can. 121), de la compétence (can. 122). Seule la violation des deux premiers a été sanctionnée de pénalités.

1. Privilège du « canon ». — Il protège les clercs (et aussi les religieux des deux sexes, profès et novices, can. 014, ainsi que les membres de sociétés vivant en commun sans vœux, can. 080) contre toute injure réelle. Les violateurs « se souillent du délit de sacrilège », dit le can. 1 19. Voir Sacrilèoe, t. xiv, col. 095.

Dès le ix c siècle, le droit de l’Église inflige des pénitences sévères à ceux qui osent maltraiter les clercs ; frapper ou mettre à mort un évêque était puni de l’excommunication. Gral., caus. VII, q. iv, c. 21. 22, 23, 24. Au xiie siècle, les sévices contre les clercs l’étant multipliés par suite des excitations des hérétiques (en particulier Arnaud de Brescia), les conciles de Clermont (1130) et de Reims (1131), puis le IIe concile général du Latran (1 139) et son 15e canon, Si guis suadente diabolo, devenu célèbre (il donna le nom au privilège), décrétèrent l’excommunication latæ sententise contre tous ceux qui frapperaient un clerc. La constitution Apostolicæ Sedis (1809), n. 5 et 15, établissait deux degrés d’excommunication selon la dignité dis personnes atteintes.

Le Code distingue quatre degrés dans le délit et reprend la formule consacrée par l’ancien droit violentas manus infeceril ; c’est dire que les injures verbales ne suffisent pas à faire encourir les peines itatuéea au eau. 2343.

a) Si la violence atteint le souverain pontife, le coupable encourt une excommunication très spécialement réservée et devient par le fait même vitandus, en même temps qu’il est frappé d’une infamie « le droit ; s’il est clerc, il devra être dégradé. — b) Si le 1 1 une : it teint un cardinal ou un légat du Saint-Siège. l’excommunication est réservée tpeelalt modo, l’infamie de droit est encourue et le délinquant doit être privé de tout bénéfice, office, dignité, pension ou charge, qu’il pourrait avoir dans l’Église, c) I.a

PICT. DB THBOL. CA f Moi même excommunication spécialement réservée (mais non les autres peines) atteint le coupable qui fait violence à un patriarche, archevêque, ou évêque même titulaire. — d) Enfin, pour les personnes inférieures protégées par le privilège du « canon », la violation est frappée d’une excommunication latte sententise réservée à l’Ordinaire, sans préjudice d’autres peines que celui-ci pourra infliger au coupable s’il le juge opportun.

2. Privilège du for.

Reconnu, avec certaines limitations, par les empereurs chrétiens, puis attaqué par les représentants du pouvoir civil, ce privilège a été revendiqué par l’Église dès le ive siècle. Il a pour but de soustraire les clercs et autres personnes qui leur sont assimilées à la juridiction civile, même dans les causes temporelles les concernant. Les premières menaces de sanctions contre les violateurs furent portées au concile de Chalcédoine (451), can. 9. Cf. Grat., caus. XL q. i, c. 40. Le IIIe conc. de Tolède (589), can. 13, décrète que l’excommunication frappera les clercs qui citeront d’autres clercs devant les juges civils. Cf. Grat., caus. XI, q. i, c. 42 (sous le titre d’un concile de Milève). La même peine est portée par le concile de Paris (015) contre les juges qui porteraient sentence contre des clercs sans autorisation pontificale. Décrétâtes, t. II, tit. ii, c. 2. Au xiie siècle, Alexandre III au IIe conc. du Latran (1 179) porta une loi générale frappant d’excommunication ferendæ les laïcs qui contraindraient les personnes d’Église à se présenter à leur tribunal, can. 14. Martin V, 1 er février 1428, décréta que l’excommunication serait latæ sententiæ, et il ajouta la suspense et l’interdit contre les personnes morales coupables du même délit. Constit. Ad reprimendas, cf. Gasparri, Fontes, t. i, n. 40. La constitution Apostolicæ Sedis (1809) établit une excommunication speciali modo réservée au pape, encourue ipso facto par tous ceux qui, directement ou indirectement, contraindraient les juges laïcs à faire comparaître devant leur tribunal des personnes jouissant du privilège du for, n. 7.

Bien que le droit coutumier ait pratiquement aboli ce privilège dans beaucoup de nations (Allemagne, Belgique, Hollande, France, sauf peut-être en ce qui concerne les évoques), le Code a maintenu le principe et l’a sanctionné d’une échelle de peines proportionnées à la dignité des personnes protégées. Sont assimilés aux clercs les religieux des deux sexes (can. 011) et les personnes vivant en commun sans vœux (can. 080). La levée de l’immunité est faite par le Saint-Siège, s’il s’agit de cardinaux. légats, évêques même titulaires, abbés ou prélats nullius, supérieurs majeurs des instituts de droit pontifical, et officiers majeurs de la Curie romaine ; pour les personnes inférieures, l’autorisation sera demandée à l’Ordinaire du lieu où doit se dérouler le procès.

Les peines contre les violateurs sont : l’excommunication latæ sententiæ spécialement réservée au Saint-Siège, si l’on met en cause des cardinaux, des légats du pape, « les olliciers majeurs de la Curie romaine dans des affaires qui ressortissent à leur charge, ou même son propre Ordinaire. S’il s’agit d’un autre évêque, même titulaire, d’un abbé ou prélat nullius, ou d’un supérieur majeur d’institut de droit pontifical, l’excommunication est réservée simpliciter au souverain pontife. Pour les autres personnes, si le délin quant est un clerc, il est frappé ipso facto d’une suspense réservée à l’Ordinaire ; un laïc devra être frappé par son propre Ordinaire d’une peine propor tionnée à la gravité de la faute. Can. 2311. On notera que les religieux (des deux sexes), bien que jouissant eux mêmes du privilège du for, n’encourront pas la suspense prévue ci-dessus, en citant un clerc ou un autre privilégié devant un tribunal civil, s’ils n’ont

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VIOLATION

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pas en fait reçu la tonsure, car alors ils ne sont pas des clercs au sens strict. Cf. Capello, De censuris, n. 530 ; M. Conte a Coronata, Inslit. juris can., t. iv, n. 1970.

Le Saint-Siège lui-même a souvent fait abandon du privilège du for dans les concordats conclus au cours du xixe siècle. Cf. Mercatti, Raccolta di concordai, p. 631, 737, 741, 824. Dans le concordat italien de 1929, l’article 8 oblige simplement le procureur du roi à avertir l’évêque de la citation d’un ecclésiastique ou d’un religieux devant un tribunal pénal, et’de lui transmettre la décision concernant l’instruction ainsi que la sentence finale. Aucune mention n’est faite du privilège du for tel qu’il est défini par le Code. Les auteurs en concluent qu’il est pratiquement abrogé en Italie. Ainsi Roberti, dans Apollinaris, t. iii, 1930, p. 330. Cf. M. Conte a Coronata, Instit. juris can., t. iv, n. 1973.

Violation de secret.

En ce qui concerne le

secret naturel, voir Secret, t. xiv, col. 1756 sq.

La loi positive de l’Église impose d’autres secrets, dont l’obligation, fondée le plus souvent sur le droit naturel, est ordinairement sanctionnée de peines canoniques plus ou moins rigoureuses.

1. Le Code exige que toutes les personnes qui interviennent dans un procès de béatification (y compris l’Ordinaire) prêtent serment de garder le secret jusqu’à la publication des actes, can. 2037, et cela, sub poena perjurii et excommunicationis laine sententiæ, a qua nonnisi a summo pontiftce, excluso etiam majori popnilentiario, prseterquam in morlis articulo absolvi possint. Cf. Santarelli, Codex pro postulatoribus, Rome, 1923, p. 139. Les témoins émettent un serment semblable, avec menace de la même peine. Cf. M. Conte a Coronata, Institut, juris can., t. iii, n. 1522.

Dans les procès ordinaires, les juges et les ministres du tribunal collégial sont toujours tenus à un secret inviolable au sujet de la discussion et du vote intervenu pour la sentence définitive. Can. 1623, § 2. De plus, dans tout jugement criminel, et même dans un tribunal contentieux, si la révélation de quelque acte du procès devait causer un préjudice aux parties, les membres du tribunal sont tenus au secret professionnel. Can. 1623, § 1. Tous ceux qui quges ou auxiliaires du tribunal) auraient l’audace de violer ce secret ou de communiquer à qui que ce soit des pièces secrètes devraient être frappés d’une amende pécuniaire et d’autres peines pouvant aller jusqu’à la privation d’office, à moins que des statuts particuliers n’imposent des peines plus graves. Can. 1625, § 2, 3.

2. Le secret le plus strict, dans le droit ecclésiastique (en dehors du sigillum sacramentale), est celui « du Saint-Office », tel qu’il est défini par les décrétâtes de Clément XI, 1 er décembre 1709, et de Clément XIII, 1er février 1759. Sa violation constitue un délit dont le pape se réserve l’absolution. On peut lui assimiler, quant à la rigueur et aux conséquences, le secret de la Consistoriale, spécialement en matière de nominations épiscopales. Cf. Normæ spéciales, c. 7, art. 2, 4.

3. Les violateurs du secret du conclave, tel qu’il est défini par la constitution Vacante Sede du 25 décembre 1904, n. 51, 52, 53, 69 (réformée et mise à jour par la constitution Vacantis apostolicæ Sedis du 8 décembre 1945 ; Acta ap. Sedis, t. xxxviii (1946), p. 66-99), encourent ipso facto une excommunication réservée au souverain pontife en personne.

4. Selon le droit du Code, la violation directe et téméraire (prœsumpserit) du secret ou « sceau sacramentel » par le confesseur fait encourir ipso facto à ce dernier une excommunication très spécialement réservée au Saint-Siège. Can. 2369, § 1. Cette peine a été étendue à toute l’Église orientale par décret du

Saint-Office du 21 juillet 1934. Acta ap. Sedis, t. xxvi, 1934, p. 550.

Avant le Code, aucune peine latie sententiæ ne frappait le confesseur prévaricateur. Voir Confession (Science acquise en), t. iii, col. 974.

L’obligation de garder le secret, qui est de droit divin, lie non seulement le prêtre, mais encore l’interprète et toutes les personnes qui ont connaissance de l’accusation. Can. 889, § 2. L’excommunication latte sententiie n’atteint cependant que le confesseur qui viole consciemment et directement le sigillum. La violation est directe lorsque sont révélés à la fois et le péché accusé (ou entendu) en confession, et la personne qui s’est confessée. La violation n’est qu’indirecte quand, sans rien révéler de façon ouverte, le dépositaire du secret se comporte de telle manière qu’à ses paroles ou à ses gestes les témoins peuvent arriver à connaître le péché accusé et à deviner le pénitent qui l’a commis ; ou encore, lorsque le confesseur se sert de la science acquise en confession et cause par là de la peine au pénitent. Le confesseur (et lui seul) qui viole indirectement le sigillum sacramentale devra être suspens de la célébration de la messe et de l’audition des confessions, ou même, si la gravité du délit le comporte, être déclaré inhabile à confesser ; il sera en outre privé de tous les bénéfices, dignités, pensions qu’il possède, de la voix active et passive, déclaré inhabile à jouir de ces divers droits, et même, dans les cas les plus graves, soumis à la dégradation. Can. 2369 et 2368, § 1. Toutes ces peines ne sont que ferendæ sententiæ.

Quant à l’interprète, can. 889, § 2. et aux autres personnes liées par le sceau sacramentel, si quelqu’une osait violer témérairement ce sceau, elle devrait être frappée, selon la gravité du délit, d’une peine salutaire qui pourrait aller jusqu’à l’excommunication. Can. 2369, § 2.

Violation du droit d’asile.

Ce droit que l’on

rencontre chez les Hébreux, les Grecs, et surtout chez les Romains, fut reconnu aux églises par les empereurs chrétiens. Au Moyen Age, il fut étendu aux monastères et aux demeures curiales ; mais, par crainte d’abus, on exclut du privilège certains crimes plus atroces. À mesure que l’organisation du droit criminel rendit moins apparente l’utilité du droit d’asile, les gouvernements civils en vinrent peu à peu à le méconnaître.

L’Église maintint cependant le principe, et la constitution Apostolicæ Sedis (1869) frappait les vio-. lateurs d’une excommunication latæ sententiæ, réservée au souverain pontife. Bien que le privilège fût tombé en désuétude dans beaucoup de régions et que des textes concordataires récents lui eussent enlevé une grande partie de son efficacité pratique, le Code a cru devoir conserver le droit d’asile comme un des aspects de l’immunité des lieux sacrés ; mais il l’a restreint dans de justes limites. « L’église (et par là il semble que l’on puisse entendre aussi, comme dans l’ancienne législation, la sacristie et le clocher) jouit du droit d’asile, de sorte que les coupables qui s’y réfugient ne peuvent en être extraits, sauf urgente nécessité, sans le consentement de l’Ordinaire ou du moins du recteur de l’église. » Can. 1179. C’est à peu près le maximum de ce qui a des chances d’être reconnu par l’autorité civile aujourd’hui. Il ne s’agit nullement de soustraire un coupable à l’exercice de la justice et à un châtiment mérité, mais de le protéger contre une exécution parfois sommaire. Le droit, qui est d’institution positive, cédera devant la nécessité, et rien n’empêche que le consentement du supérieur ecclésiastique soit donné de façon générale, sous réserve que le culte divin ne sera pas troublé et que la décence de la maison de Dieu sera sauvegardée.

Dans les cas normaux et en dehors de toute urgence ou nécessité, la violation du droit d’asile, là où il existe encore, pourrait être considérée comme un sacrilège, et punie comme telle de peines fercndæ sententiæ, à infliger par l’Ordinaire.

8° Violation des obligations de la vie commune par les religieux. — Ces obligations consistent, en particulier, dans l’observation exacte des trois vœux de religion, dans la soumission à la règle, la recherche de la perfection, la fidélité à la clôture ou à la résidence.

Tous les religieux, y compris les supérieurs, qui « violent en matière notable la loi de la vie commune telle qu’elle est établie par les constitutions, doivent être l’objet d’un grave avertissement (monition canonique au sens des can. 2307 et 2309) ; s’ils ne s’amendent pas, ils seront punis même de la privation de la voix active et passive, et, s’il s’agit de supérieurs, même de leur office. Can. 2389.

9° Violation de la résidence’et autres obligations curiales. — 1. La loi ecclésiastique de la résidence affecte non seulement les curés (can. 465) et les chanoines astreints à l’office choral (can. 418-419), mais encore les cardinaux (avec des adoucissements pour ceux qui gouvernent un diocèse hors de Rome et de la région suburbicaire, can. 238), les évêques (can. 338), les supérieurs religieux (can. 508), les vicaires et préfets apostoliques (can. 301), le vicaire capitulaire (can. 440), les vicaires paroissiaux (can. 471-476), le vicaire forain (can. 448) et, dans une certaine mesure, même les simples clercs (can. 143).

La violation de la résidence est frappée des peines suivantes : « Quiconque, dit le can. 2381, ayant obtenu un office, bénéfice ou dignité avec obligation de la résidence, s’absente illégitimement : 1° est privé ipso facto de tous les fruits de son office ou bénéfice durant la durée de cette absence ; il devra les remettre à l’Ordinaire, qui les distribuera à l’église, à un lieu pieux ou aux pauvres. — 2° De plus, il sera privé de son office, bénéfice ou dignité selon la procédure fixée aux can. 2168-2175. Voir Procès ecclésiastiques, t. xiii, col. 644. On se souviendra que ces pénalités ne s’appliquent pas aux cardinaux, que le Code exempte de toute loi pénale, can. 2227, § 2, et que les évêques, en cas de procès contentieux, ne pourront être jugés que par les tribunaux du Saint-Siège. Can. 1555, § 2. D’autre part, la simple résidence matérielle (même si elle n’est pas jormalis et laboriosa) suffit pour échapper aux pénalités.

2. Les devoirs et obligations curiaux dont l’omission ou la violation constituent un délit sont les suivants : administration des sacrements, assistance des malades, instruction des enfants et du peuple chrétien, prédication les dimanches et jours de fête, garde de l’église paroissiale, de la sainte réserve et des saintes huiles. Can. 2382. Toute « négligence grave » en ces matières ou seulement l’une d’elles obligera l’Ordinaire à une intervention pour punir le coupable. La procédure à suivre sera la suivante : d’abord monition canonique, puis réprimande avec pénalités convenables ; enfin privation des fruits du bénéfice et retrait d’emploi. Can. 2182-2185.

10° Violation des libertés » canoniques. — 1. Une de ces libertés, indispensable à l’Église pour l’accomplissement de sa mission, est l’absence d’entraves dans ses communications avec l’univers catholique. Cette liberté peut être violée de quatre manières, aux termes du can. 2333 : a) par le recours au pouvoir civil pour empêcher les lettres ou actes provenant du Saint-Siège ou de ses légats (a latrre, nonces, délégués apostoliques) d’arriver à destination ; b) par une opposition directe ou indirecte à la promulgation ou à l’exécution de ces mêmes lettres mi actes ; c) par un dommage corporel grave infligé aux destinataires de

ces lettres ; — d) ou enfin par des menaces destinées à épouvanter les destinataires, porteurs ou exécuteurs des mandats apostoliques. La peine prévue contre les diverses catégories de violateurs est une excommunication latse sententiæ spécialement réservée au Saint-Siège.

La même peine frappe, can. 2334, ceux qui font des lois, décrets et ordonnances, contre la liberté ou les droits de l’Église, ou ceux qui empêchent directement l’exercice de la juridiction ecclésiastique (du for interne ou externe), en recourant à cet effet à un pouvoir civil quel qu’il soit.

2. L T ne autre liberté, hautement revendiquée par l’Église, est celle des élections canoniques (principalement de celles prévues aux can. 160 sq.). Cette liberté peut être violée par quiconque y met obstacle directement ou indirectement, ou, après l’élection, moleste à ce propos soit les électeurs soit l’élu. Les violateurs doivent être punis en proportion de la gravité du délit, dit le canon 2390.

Il est surtout interdit aux laïcs et aux représentants du pouvoir séculier de s’immiscer illégitimement dans une élection réservée à un collège de clercs ou de religieux, et de contrarier ainsi la liberté de cette élection. Les électeurs, qui auront sollicité ou admis spontanément cette intrusion, sont privés ipso facto du droit d’élire pour cette fois. L’élu, qui aurait sciemment consenti à son élection faite dans ces conditions, devient ipso facto inhabile à obtenir la charge ou le bénéfice en question. Can. 2390, § 2.

3. Enfin l’Église veille avec un soin jaloux à la liberté de conscience des religieuses en matière de confession. Les canons 521, 522, 523, déterminent avec précision les droits des religieuses et les devoirs des supérieures à ce sujet.

La supérieure, par un abus de pouvoir, viole la liberté de la confession dans les trois cas suivants : a) Si, à la demande, formulée par une religieuse, d’un confesseur supplémentaire (adjoint) ou extraordinaire, au sens du can. 521, § 1, 2, la supérieure s’informait par elle-même ou par d’autres, directement ou indirectement, du motif de cette demande, s’y opposait en paroles ou en actes, ou même simplement manifestait de quelque manière son mécontentement. Can. 521, § 3. — b) Si la supérieure empêchait une religieuse d’aller trouver un confesseur occasionnel (can. 522) ad su.t conscienliee tranquillitatem, ou même si elle se contentait d’enquêter, fût-ce directement, au sujet de l’usage de ce privilège, ou encore si elle prétendait se faire rendre des comptes sur ce point. r) Enfin, si la supérieure, directe ment ou indirectement, empêchait une religieuse gravement malade de faire appeler un prêtre approuvé pour la confession des femmes et lui ôtait la liberté de se confesser à ce prêtre aussi souvent qu’elle le désire, tant que son état demeure grave. Can. 523.

La supérieure violant ainsi la liberté de conscience garantie par le Code à ses religieuses doit recevoir de l’Ordinaire une monition canonique ; en cas de récidive, elle sera privée de sa charge par le même Ordinaire, qui doit immédiatement en avertir la S. C. des Religieux, can. 2414.

A. Bride.