Dictionnaire des proverbes (Quitard)/fortune
fortune. — Faire fortune.
« C’est une si belle phrase et qui dit une si bonne chose qu’elle est d’un usage universel. On la connaît dans toutes les langues : elle plaît aux étrangers et aux barbares ; elle règne à la cour et à la ville ; elle a percé les cloîtres et franchi les murs des abbayes de l’un et de l’autre sexe : il n’y a point de lieux sacrés où elle n’ait pénétré, point de désert ni de solitude où elle soit inconnue. » (La Bruyère.)
Bien danse à qui la fortune chante.
Proverbe qu’on applique à une personne qui voit tout lui succéder à souhait, et qui doit moins les avantages qu’elle obtient à une habile conduite qu’à l’aveugle faveur de la fortune.
Chacun a dans sa vie un souris de la fortune.
Semel in omni vitâ cuique arridet fortuna. — Proverbe du moyen-âge que le cardinal Impériali avait sans doute présent à l’esprit lorsqu’il disait ces paroles citées par Montesquieu : « Il n’y a point d’homme que la fortune ne vienne visiter une fois dans sa vie ; mais lorsqu’elle ne le trouve pas prêt à la recevoir, elle entre par la porte et sort par la fenêtre. » Heureux celui qui sait profiter de cet instant avant lequel la fortune ne lui sourit point encore, et après lequel elle ne lui sourit plus !
Grande fortune, grande servitude.
Magna fortuna, magna servitus. — Celui qui possède une grande fortune est obligé d’exercer beaucoup de surveillance et de se livrer à une foule de soins qui ne lui laissent aucun repos, de sorte que, dans cette occupation continuelle, il semble moins être le maître que l’esclave de ses richesses ; et presque toujours il devient tel réellement.
Être affligé d’une grande fortune.
C’est être fort riche. Il y a peu d’expressions plus philosophiques et plus vraies que celle-ci, quoiqu’elle semble énoncer un paradoxe. En effet, les prestiges d’une grande fortune n’ont qu’une courte durée et les jouissances qu’elle donne sont promptement suivies de la satiété ; car, lorsqu’on peut avoir tout ce qu’on désire, on finit bien vite par ne plus rien désirer. Alors, il ne reste plus au possesseur blasé que les inconvénients, les embarras et les inquiétudes inséparables des richesses trop abondantes ; et cet état malheureux ne fait qu’empirer, s’il n’a pas la sagesse d’y remédier en pratiquant la bienfaisance. Les richesses sans la vertu, dit Sapho, sont des hôtesses trop fâcheuses.