Dictionnaire des proverbes (Quitard)/graisser

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graisser. — Graisser la patte à quelqu’un.

Le gagner en lui fesant un cadeau ou lui donnant de l’argent. La Mésangère a prétendu que le mot patte désignait ici un pied de chevreuil ou autre bête fauve, suspendu à un cordon de porte, et il s’est fondé sur l’expression plus récente graisser le marteau, c’est-à-dire, donner la pièce au portier d’une maison dont on veut se faciliter l’entrée. Mais ce mot doit s’entendre de la main de l’homme qui se laisse corrompre par un présent. Dans le temps où l’on payait la dîme carnibus porcinis (des chairs de porc). Graisser la patte s’employait littéralement pour exprimer l’action d’un redevancier qui remettait, de la main à la main, au commissaire-dîmeur quelque portion de la denrée soumise au droit, dans la vue de capter sa bienveillance ou d’apprivoiser sa rigidité[1]. Les solliciteurs donnaient aussi du lard aux personnes qu’ils voulaient intéresser en leur faveur. Le lard était au moyen-âge un mets fort estimé et il jouissait de tous les priviléges dont les poulardes du Mans et les dindes truffées sont aujourd’hui en possession.

  1. Ce droit, qu’un vieil auteur a nommé suille, du latin latin, date d’une époque reculée. Il fut accordé aux églises dès l’an 530, par édit de Clotaire Ier. Ce fut pour le percevoir plus commodément que le chapitre de Paris fit tenir la foire des jambons dans le parvis de Notre-Dame, le mardi de la semaine sainte.