Dictionnaire historique et critique/11e éd., 1820/Abbot 1

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ABBOT [a] (Georges), archevêque de Cantorbéri, et auteur de plusieurs livres (A), était fils d’un tondeur de draps, et naquit à Guildford, dans le comte de Surrey, l’an 1562. Il fit ses études à Oxford, et y devint, en 1597, principal du collége de l’université. Deux ans après, on lui donna le doyenné de Winchester, qu’il garda jusqu’en l’an 1609. Il succéda à Thomas Morton au doyenné de Glocester. Jusque-là, son élévation n’avait été ni fort éclatante ni fort prompte : mais dans la suite elle fit de très-grands progrès en fort peu de temps. Il obtint l’évêché de Lichtfield le 3 de décembre 1609, l’évêché de Londres au mois de février 1610, et l’archevêché de Cantorbéri au mois de mars suivant[b]. Son érudition, et le talent qu’il avait de bien prêcher, contribuèrent moins à ces grands sauts de sa fortune que la faveur du comte de Dunbar, dont il avait été chapelain. Sa conduite ne plut pas à tout le monde. On trouvait étrange qu’il eût plus de considération, chez lui, pour son secrétaire que pour ses chapelains ; et qu’il fit, hors de sa maison, plus d’honneur aux gens du monde qu’aux gens d’église. On crut que n’ayant jamais passé par les bénéfices subalternes à charge d’âmes, je veux dire que, n’ayant jamais essayé les difficultés qui se trouvent dans la direction d’une paroisse, il était par-là devenu moins propre à user d’indulgence envers les ministres. La sévérité qu’il avait pour eux, et sa connivence sur la propagation des non-conformistes, étaient deux choses qui faisaient parler contre lui. La dernière a été cause qu’un auteur moderne a dit que, si Laud avait succédé à Brancroft, et que le projet de conformité n’eût pas souffert l’interruption qu’il souffrit sous Abbot, il n’y a point de doute qu’on n’eût fait cesser le schisme dans l’Angleterre[c]. Abbot devint désagréable au roi Jacques pour avoir été contraire au dessein que ce prince avait formé de marier le prince de Galles avec l’infante d’Espagne. Les ennemis de l’archevêque, s’étant aperçus de cela, crurent avoir trouvé une occasion favorable de le perdre parce qu’ils espérèrent de surprendre la religion du roi Jacques, en alléguant la sainteté des anciens canons. Pour mieux entendre ceci, il faut savoir qu’Abbot avait tué par mégarde le concierge du parc de Bramzel, qui appartenait à milord Zouch. L’évêque de Lincoln qui était garde des sceaux, fit entendre à milord Buckingham que l’archevêque de Cantorbéri était déchu ipso facto de sa dignité, par le meurtre qu’il avait commis. Il allégua les lois d’Angleterre, et la sévérité de l’ancienne discipline. Il fit craindre que les papistes ne tirassent avantage de ce qu’on laisserait exercer les fonctions d’archevêque et de primat du royaume à un homme qui avait les mains teintes de sang. En un mot, il fit si bien, qu’on expédia une commission à quelques évêques et à quelques autres seigneurs, pour examiner le fait. L’issue n’en fut point agréable aux ennemis de Georges Abbot ; car on jugea qu’il n’était point devenu irrégulier par ce meurtre involontaire. Ceci se passa en 1621[* 1]. Six ans après, il s’éleva contre lui une nouvelle tempête qui le renversa. Il ne s’en faut pas étonner : le favori [d] lui voulait du mal, et ne pouvait digérer que de certaines personnes qui lui étaient odieuses fussent trop souvent à la table de l’archevêque, l’une des meilleures de ce temps-là. Le prétexte dont on se servit fut que ce prélat refusa son approbation à un sermon du docteur Sibthorp sur l’obéissance apostolique, encore que le roi lui eût commandé de l’approuver. Alors on le suspendit de toutes les fonctions de la primatie, et on les fit exercer par quelques prélats, et entre autres par Guillaume Laud, qui depuis fut son successeur[e]. Abbot se retira dans le lieu de sa naissance, et puis au château de Croyden, où il mourut le 4 d’août 1633. On voit son tombeau avec divers ornemens et avec diverses inscriptions, dans l’église de Guildford. Il fonda un hôpital bien renté dans cette ville. Il y a un autre Georges Abbot (B), qui a publié en anglais une Paraphrase sur Job ; de courtes Notes sur les Psaumes ; Vindiciæ Sabbati[f]. Il vivait en 1640[* 2].

  1. * Joly, d’après Niceron, remarque que des lettres de pardon données le 21 novembre 1621 sont antérieures et non postérieures à la protestation, qui est de 1623.
  2. * Chauſſepié a fait, dans son Dictionnaire, quelques additions à cet article.
  1. Il y en a qui disent Abbat.
  2. Ex Athenis Oxoniensibus, vol. I.
  3. Ex Fulveri libro. cui titulus, Worthies of England.
  4. Le duc de Buckingham.
  5. Tiré des Historical Collections de Jean Rushworth, tom. I, où l’on voit un long mémoire de Georges Abbot sur les procédures de sa suspension.
  6. Athenæ Oxonienses, tom. I.

(A) Et auteur de plusieurs livres. ] Les principaux sont : Quæstiones sex theologicæ totidem prælectionibus disputatæ imprimées à Oxford, en 1598. Doctor Hill’s Reasons for Papistry, unmasked ; c’est-à-dire, les Raisons du docteur Hill[1] pour Les Papistes, démasquées, à Oxford, en 1604. Des Sermons sur le prophète Jonas. L’Histoire du massacre de la Valteline. Une Géographie, dont la neuvième édition, qui n’a pas été la dernière, est de l’an 1607. Ces trois derniers ouvrages sont en anglais ; comme aussi le traité de la Visibilité perpétuelle de la vraie église, imprimé à Londres en 1624, auquel il n’a point mis son nom.

(B) Un autre Georges Abbot. ] C’est à quoi n’a pas pris garde le sieur Henninges Witte, dans son Diarium biographicum, où il donne à l’archevêque de Cantorbéri les ouvrages de cet autre Georges : les Paraphrases sur Job et sur les Psaumes, et les Vindiciæ Sabbati. Il lui donne aussi un Traité contre les Évêques, et un autre contre les Brownistes. Ce serait une chose bien rare que le primat d’Angleterre eût écrit contre les évêques.

  1. C’était un homme qui avait embrassé la religion romaine.
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