Dictionnaire historique et critique/11e éd., 1820/Doni

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DONI [* 1] (Antoine-François), a vécu au XVIe. siècle. Il était de Florence, et il publia beaucoup de livres italiens (A) qui le firent passer pour un bel esprit. Il fit paraître d’abord un caractère de médisance satirique, mais en cela il suivait moins son inclination que la complaisance pour les prières d’un de ses amis. Il laissa insérer dans ses ouvrages quelques lettres qu’il n’avait point composées, ce qui lui fit bien du tort ; car les auteurs de ces lettres se vantèrent peu après d’avoir composé tout ce qui avait paru sous le nom de Doni. Il remédia à ces avanies, en faisant une nouvelle édition de ses ouvrages sous une meilleure forme, et avec les bons conseils de l’académie des Peregrini. Il supprima les éloges qu’il avait donnés à des personnes indignes de cet honneur, et il loua d’autres gens qu’il avait blâmés à tort. Il mourut à Venise au mois de septembre 1574 [a]. Il s’y était établi vers la fin de l’an 1543, à l’âge d’environ trente-cinq ans [b]. Il fut de l’académie dont j’ai parlé : le surnom de Bizzarro qu’il y avait pris lui convenait admirablement ; car c’était un homme qui, non-seulement dans ses poésies, mais aussi dans sa prose, se faisait des routes fort singulières. Ses inventions et ses concetti étaient des saillies assez étranges, et il cherchait à se distinguer en surprenant les lecteurs par des fictions un peu trop outrées. Il était d’une très-bonne famille (B).

  1. * Ginguené a consacré, dans la Biographie universelle, un curieux article à Doni, qui, souvent réduit à vivre de ses messes, était très-empressé à dédier ses ouvrages aux gens riches dont il espérait de bonnes récompenses : S’il était trompé dans son attente, il ne rougissait pas d’adresser le même livre à un Mécène plus généreux.
  1. Tiré du Ghilini, Teatro d’Huomini letterati, parte I, pag. 20.
  2. Voyez la page 224 de ses Inferni.

(A) Il publia beaucoup de livres italiens. ] Voici la liste que le Ghilini a donnée [1]. Quattro libri di Medaglie : le Novelle ; tre Invettive, che hanno questi titoli, il Baleno, la Saetta, e il Tuono ; tre Dialoghi separatamente stampati, cioè della Fortuna ed Infelicità di Cesare, della Musica, e del Dissegno ; la Libraria, divisa in due part ; un Trattato dell’ Huomo in tutte le forme, per comparazioni ; allà qual’opera diede titolo di Microcosmo ; l’Eternità della patria, in cinque libri spiegata ; una Comedia intitolata lo Stufaiuolo ; i Marmi, ne’ quali s’introducono più persone a discorrere ; i Mondi ; gl’ Inferni ; la Zucca ; la Filosofia morale ; il Cancelliere ; le Prose antiche di Dante ; la Guerra navale trà la sacra Lega e gl’ Infedeli, in versi heroici narrata ; le Stanze alla villanesca ; e le Lettere.

Disons quelque chose touchant quelques-uns de ces livres-là, et commençons par celui qui a pour titre gl’ Inferni. C’est un in-quarto de 224 pages. imprimé à Venise nell’ Academia : Peregrina, per Francisco Marcolini, l’an 1553. L’auteur était alors à Venise depuis plus de cinq ans [2], et se proposait d’y passer tout le reste de ses jours. Il y a sept enfers dans cet ouvrage : Inferno de gli Scolari e de’ Pedanti : Inferno de’ mal Maritati, e de gli Amanti. Inferno de’ ricchi Avari, e de’ Poveri liberali. Inferno delle Puttane, e de’ Ruffiani. Inferno de’ Dottori ignoranti, Artisti, e Legisti. Inferno de’ Poeti e Compositori. Inferno de’ Soldati e Capitani poltroni etc. Ce n’est là que la première partie de gli Inferni del Doni. Je ne sais point s’il donna la suite.

Il avait déjà publié un autre ouvrage dont le titre, que je vais copier tout entier, peut seul nous faire connaître la méthode de cet homme. I Marmi del Doni academico Peregrino. Cioè ragionamenti introdotti à farsi da varie conditioni d’huomini, à luoghi di honesto piacere in Firenze : ripieno di discorsi in varie scienze e discipline, motti arguti, istorie varie, proverbj antichi e moderni, sentenze morali, accidenti e novelette morali ; diviso in quattro libri. Opera giovevole à persone d’ogni stato per il corregimento de’ costumi, e per ogni professione d’huomini. Je n’ai point la première édition de ce livre, qui est celle de Venise 1552 ; mais j’ai celle de l’an 1609, in Venetia, presso Gio. Battista Bertoni, in-4o.

Voici le titre d’un autre livre, qu’il fit imprimer au même lien, appresso Fran. Rampazetto, l’an 1565, in-8o. : La Zucca del Doni Fiorentino, divisa in cinque libri di gran valore, sotto titolo di poca consideratione.

Le Ghilini observe que la Libraria du Doni est divisée en deux parties ; mais M. Teissier en parle autrement. La Libraria, dit-il [3], divisa in tre trattati : nel primo sono scritti li autori volgari, con cento e più discorsi sopra di quelli : nel secondo, sono dati in luce tutti i libri che l’autore ha veduti a penna, il nome de componitori dell’ opere, i titoli, etc., le materie : nel terzo, si legge l’inventione dell’ academie, insieme con i sopranomi, à motti, le imprese, e l’opere fatte da tutti li academici. In Vinegia appresso Gabriel Giolito de’ Ferrari, 1557, in-12, et ibidem apud Aliobellum Salicatum, 1580, in-12.

(B) Il était d’une très-bonne famille. ] J’ai lu une lettre qui fut écrite de Como par Benedetto Volpe, dans laquelle on remarque qu’il était arrière-petit-fils de Salvino Doni, contemporain du Dante et bon poëte. Io non ho già la poesia per heredità, come voi, che sete figliuolo d’un nipote de Salvino Doni, che fu compagno di Guitton Saluti Messer Cino, e Dante, Franceschin nostro, e tutta quella schiera [4]. Le Doni répondit qu’ilvétait issu d’un homme qui avait apporté de Rome le présent d’armoiries que l’on faisait aux Florentins ; que la postérité de cet homme subsista dans Florence jusqu’au temps de Farinata de gli Uberti ; qu’en ce temps-là, un Francesco Doni, qui était du parti des Gibelins, aima mieux sortir de Florence, que de consentir qu’elle fût démantelée [5]. Il épousa une femme qui était de Fiésole : de ce mariage sont sorties plusieurs familles établies à Pistoie, en Hongrie, et au royaume de Naples. Salvin Doni était issu de celui-là. Il fit un sonnet auquel Dante répondit, et qui se trouve imprimé dans un recueil d’anciennes pièces [6]. Le Dictionnaire de Moréri fait mention des branches de cette famille qui se sont établies en France.

Vous noterez que tous les Doni ne sont point nobles ; il y en a qui sont issus d’un facteur qui prit le nom de son maître. Evvi un’ altra parte de’ Doni, che son nati d’un fattore, il quale faceva le facende loro, come ne sono molti nella città di Firenze, i quali usurpano spesso la robba ed i nomi delle case nobili, dove hanno fatto la fattoria molto tempo ; cosa molto infame e vituperosa [7]... vi saprò dire quali son i Doni nobili discesi dalla vera casa, e quali sono i plebei venuti per via di fattorie [8].

  1. Ghilini, Teatro, part. I, pag. 20.
  2. Voyez la page 224 de ses Inferni.
  3. Teissier, in Catalogo Autorum, etc., pag. 22, edit. Genev., 1686.
  4. La Zucca del Doni, folio 312 verso.
  5. Leandre Alberti, Descritt. di tutta l’Italia, folio m. 44 verso, narre autrement le fait, et sans rien dire de ce Doni.
  6. Tiré d’une lettre du Doni imprimée à la fin de sa Zucca, folio 314.
  7. Le Doni, folio 314 verso de la Zucca.
  8. Là même, folio 315.

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