Dictionnaire portatif de cuisine, d’office, et de distillation/CHOCOLAT

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inconnu
Lottin le Jeune (p. 160-165).
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CHOCOLAT : pâte séche, d’un goût agréable, dont nous devons l’invention aux Américains, mais que nous avons enrichie du mêlange de plusieurs ingrédiens aromatiques, comme la vanille, la cannelle. La base de cette pâte est le cacao, dont l’amande se broie avec le sucre en poudre. Nous ne croyons pas devoir donner le procédé de cette fabrique, qui exige un travail assez considérable, entraînant un attirail qui n’est pas à la portée des offices du plus grand nombre des maisons. Ce qu’on peut faire de mieux dans le choix du chocolat, c’est d’en prendre à l’essai, des différentes sortes, jusqu’à ce qu’on ait trouvé celui qu’on veut, & s’en faire faire de pareil.

On se sert du chocolat, de plusieurs manieres. On le mange en nature ; on en fait différentes boissons, en le délayant dans quelques dissolvans, soit l’eau commune, soit le lait de vache. Quelques personnes y joignent des jaunes d’œufs, pour le rendre plus mousseux & plus nourrissant. D’autres le font avec les émulsions des quatre semences froides ; d’autres, avec une décoction de chicorée. Il paroît assez inutile de donner ici la façon de préparer cette boisson, & de la faire mousser avec le moulinet ; cela est d’un usage trop commun pour en parler.

Chocolat à l’Angloise. Il se fait comme le chocolat à l’ordinaire, si ce n’est qu’on fouette bien un blanc d’œuf, & qu’après en avoir ôté la premiere mousse, on y met fondre du chocolat, & on le finit à l’ordinaire. On prétend que le chocolat fait de la veille, est meilleur que celui qu’on fait du jour. Ceux qui sont dans l’habitude d’en prendre tous les jours, en laissent un peu pour servir de levain.

Chocolat au lait. Il se fait comme celui à l’eau, si ce n’est qu’on délaie le chocolat dans du lait qui doit être bon, & qu’il ne faut pas le laisser monter par-dessus la chocolatiere.

Chocolat. (Beignets de) Faites deux tasses de chocolat très-fort ; délayez-y de la farine avec des jaunes d’œufs ; mettez-y de la moëlle de bœuf fondue & passée au tamis, de la crême, du sucre, fort peu de sel. Faites cuire & réduire le tout, de sorte qu’il soit épais, & l’étendez ensuite sur un plat, fariné dessous & dessus. Quand cette pâte sera froide, coupez-la en filets que vous tremperez dans une pâte à frire. Faites frire à grand feu ; & servez chaudement ces beignets saupoudrés de sucre fin.

Chocolat. (Biscuits de) Battez quatre jaunes d’œufs frais, avec deux onces de chocolat rapé, & mettez-y une demi-livre de sucre en poudre. Ajoûtez à ce mêlange huit blancs d’œufs fouettés en neige, & trois onces de fine fleur de farine. Votre pâte étant faite, mettez-la dans les moules de papier ; saupoudrez de sucre, & faites cuire à feu doux.

Chocolat (Biscuits de) manqués. Faites la pâte comme celle des précédens. Dressez vos biscuits en long, & minces ; mettez au four à une chaleur très-douce ; levez-les de dessus le papier, & les faites sécher à l’étuve.

Chocolat. (Cannelons de) Mettez réduire cinq tasses de chocolat avec une pinte de bonne crême. Le tout suffisamment réduit, travaillez à la salbotiere ; & votre cannelon étant pris, trempez votre moule à l’eau tiéde, pour détacher au moment où vous devez servir.

Chocolat. (Conserve de) Pour une demi-livre de sucre cuit à la petite plume, délayez une once de chocolat rapé, & dressez dans les moules ; & dans cette proportion, pour une plus grande quantité.

Chocolat. (Crême de) Il faut mette sur un demi-septier de crême une chopine de lait, le jaune de deux œufs frais, & trois onces de sucre ; détrempez le tout ensemble, faites-le bouillir, & consommer d’un quart, en le tournant avec une spatule. Ensuite vous y mettrez du bon chocolat rapé, autant qu’il faut, pour qu’elle en ait le goût & la couleur ; après quoi, vous lui donnerez cinq ou six bouillons ; vous la passerez par un tamis ; & vous la dresserez, pour la servir froide.

Chocolat (Crême de) au bain-marie. Délayez une once de chocolat rapé avec quatre jaunes d’œufs & un peu de lait ; ajoûtez-y une chopine de crême, & un demi-septier de lait. Mêlez bien le tout de sucre à discrétion ; faites bouillir de l’eau dans une casserole ; mettez dessus le plat où vous aurez dressé votre crême ; de sorte que le fond du plat trempe dans l’eau bouillante ; recouvrez-le d’un autre plat, & ne l’ôtez que quand la crême sera prise.

Chocolat. (Crême veloutée au) Prenez six tablettes de chocolat ; coupez-les bien minces ; pour trois demi-septiers de crême & un demi-septier de lait, que vous mettez dans une casserole avec une écorce de citron verd, cannelle en bâton, & coriandre. Faites réduire aux deux tiers, & y mettez votre chocolat ; faites faire quelques bouillons. Retirez ; passez dans une serviette mouillée. Quand elle sera une peu plus que tiéde, délayez-y comme un pois de pressure, & faites-la prendre sur de la cendre chaude. On peut la servir froide, si l’on veut.

Chocolat. (Diablotins de) Formez des boulettes de chocolat rapé avec de bonne huile ; faites-les de la grosseur d’un gros grain de verjus. Dressez ces boulettes sur du papier ; secouez ce papier, pour les applatir : piquez-les de cannelas, & fermez-les par-dessus de nompareille blanche ; & faites-les sécher à l’étuve.

Chocolat. (Dragées de) Délayez du chocolat réduit en poudre fine, avec de la gomme adraganth dissoute ; mêlez le tout au mortier jusqu’à ce que cela soit en pâte maniable. Roulez cette pâte sur une table saupoudrée de sucre fin. Abbatez avec le rouleau en abaisse mince ; coupez en petits morceaux de la grosseur d’un pois, & arrondissez-les. Faites sécher à l’étuve ; & étant secs, couvrez de sucre, & lissez à la maniere des dragées ordinaires.

Chocolat. (Eau de) On ne se sert point du chocolat en nature pour cette liqueur, mais du cacao & de la vanille rôtis à point. Faites distiller à l’alambic, à feu ordinaire ; pour six pintes de cette liqueur, il faut deux onces de cacao, un gros de vanille, trois pintes & demie d’eau-de-vie ; & pour le syrop, deux pintes & demie d’eau, & livre & demie de sucre ; en distillant, ne tirez point de phlegmes.

Chocolat en olives. Délayez une tablette de chocolat en poudre avec du sucre fin, & trois blancs d’œufs : formez-en une pâte maniable ; roulez cette pâte sur une table saupoudrée de sucre fin ; coupez cette pâte en morceaux, & les formez en olives ; faites-les cuire à feu doux, sur des feuilles de fer-blanc.

Chocolat. (Fromage de) Délayez six onces de chocolat en poudre, avec un peu d’eau ; mettez-y cinq jaunes d’œufs frais, trois quarterons de sucre, une pinte de crême ; faites lier le tout sur le feu, sans bouillir ; mettez dans le moule à fromage, après l’avoir travaillé dans la salbotiere, pour le faire prendre en glace, avant de le former, & le finissez en le remettant à la glace.

Chocolat. (Gaufre de) Mêlez parties égales de chocolat en poudre, fine fleur de farine, & mettez autant de sucre pesant, que vous aurez de chocolat & de farine ; délayez le tout avec de la crême double, pour en faire une pâte liquide, mais d’une consistance suffisante pour prendre au gaufrier. Que votre fer soit chaud, & le frotez, de tems en tems, d’huile fine legérement, pour que les gaufres ne s’attachent pas.

Chocolat. (Glace de) Faites bouillir une demi-livre de chocolat avec une pinte de crême, quatre jaunes d’œufs, & beaucoup de sucre ; & finissez comme pour les cannelons de chocolat. (Voyez Cannelons de chocolat.)

Chocolat. (Massepains de) Pilez des amandes desséchées, avec moitié pesant de sucre cuit à la grande plume ; mettez-y ensuite du chocolat rapé & passé au tamis ; délayez le tout avec des blancs d’œufs ; & abbatez avec le rouleur sur une table, avec du sucre en poudre : faites-en une pâte maniable, dont vous formerez une abaisse que vous couperez en morceaux, de telle forme & grandeur que vous jugerez à propos : dressez ces massepains sur du papier, & mettez cuire au four à une chaleur douce ; lorsqu’ils auront pris couleur, glacez-les pour les finir.

Chocolat. (Mousse de) Délayez du chocolat avec un peu d’eau ; ajoûtez-y des jaunes d’œufs & beaucoup de sucre, avec de la crême : faites lier le tout sur le feu, mais sans bouillir ; laissez refroidir ensuite, & fouettez : si ce mêlange ne mousse point assez, ajoûtez-y quelques blancs d’œufs ; & lorsque votre mousse sera faite, servez-la dans de grands gobelets faits exprès ; mettez un gobelet dessus la glace, & par-dessus, le couvercle de la cave, avec d’autre glace, pour tenir votre mousse fraîche jusqu’à ce qu’on serve.

Chocolat. (Pastillage de) Passez au tamis deux onces de chocolat rapé ; mettez-y une livre de sucre en poudre, & une once de gomme adraganth dissoute : faites du tout une pâte maniable, de laquelle vous formerez vos pastilles, de telle forme & grandeur que vous jugerez à propos.

Observation médecinale.

Le chocolat est un aliment nourrissant, fortifiant, stomachique, plus ou moins échauffant, aromatique & agréable, à proportion de la quantité de vanille, & des autres substances échauffantes qu’on y a fait entrer. Il convient principalement aux personnes qui ont l’estomac froid, paresseux, qui sont sujettes aux glaires, à la pituite, au dévoiement, aux indigestions, aux migraines : il est contraire à celles qui sont échauffées, sujettes à l’altération, aux ardeurs d’estomac & d’entrailles, à l’insomnie. Le chocolat dit de santé, que l’on nomme ainsi, parce qu’il contient moins d’ingrédiens échauffans, est aussi moins nuisibles aux dernieres personnes, & moins utile aux premieres. En général, l’usage habituel du chocolat nuit à la jeunesse, & est utile aux vieillards & même aux adultes qui menent une vie sédentaire : accommodé au lait, il échauffe & irrite moins ; mais il est plus pesant, & se digere lentement.