Dictionnaire pratique et historique de la musique/Orgue
Orgue, n. m. Pluriel des 2 g. Les origines de l’orgue sont lointaines. L’antiquité gréco-romaine a possédé des instruments à soufflets dès le ve s. avant J.-C. L’orgue hydraulique construit par Ctésibios d’Alexandrie, sous le règne de Ptolémée vii (170-118 av. J.-C.) et décrit assez obscurément par son disciple Héron, est le premier de son espèce.
La description
plus récente d’un instrument
analogue, rédigée par Vitruve dans le
Ier (?) siècle av. J.-C., et une terre cuite
mutilée du musée de Carthage (iiie siècle)
laissent comprendre que l’orgue hydraulique
se montait sur une boîte à eau
munie de deux pompes à air ; le nombre
de ses tuyaux est incertain, ainsi que la
nature de son clavier. On construisit
des orgues hydrauliques jusque dans
le ixe siècle : à cette époque il en
existait un dans le palais d’Aix-la-Chapelle.
Mais l’orgue à soufflets, qui
devait le remplacer, était en usage à
Byzance. L’orgue tenait une place
exceptionnelle dans l’orchestique instrumentale
des Byzantins. Il n’avait
aucune part dans les cérémonies
liturgiques et n’accompagnait jamais
les voix, ni dans l’église, ni
hors d’elle. Mais il figurait
au premier rang des instruments
employés dans les
fêtes de cour et les cérémonies
officielles. Des orgues
d’or étaient réservées au
service impérial. Des orgues
d’argent résonnaient alternativement
avec les chœurs
pendant les festins d’apparat.
Ces orgues sont mentionnées
pour la dernière
fois peu de temps avant la
chute de Constantinople.
Les jeux étaient de 2 sortes :
jeux à bouche, jeux d’anche.
Le clavier de 15 à 16
notes possédait 4 demi-tons
en plus des deux demi-tons
de l’octave diatonique. Les
orgues importées d’Orient en Occident
ne comportaient pas encore 3
octaves au xe siècle. C’est de là, que
sur la demande, dit-on, de Pépin
le Bref, l’empereur Constantin Copronyme
envoya en France, en 757, par
l’intermédiaire d’une ambassade, un
orgue à soufflet qui fut placé à Compiègne.
L’orgue hydraulique d’Aix-la-Chapelle
avait été construit en 820,
par un prêtre vénitien, pour Louis le
Débonnaire. On a essayé de fixer en
des pays déterminés le centre de fabrication
des premières orgues en Occident.
Au ixe s., le pape Jean viii demande
un orgue et un organiste à un
évêque de Bavière. À la fin du xe s.,
l’abbé Géraud, d’Aurillac, demande un
orgue et un organiste à l’illustre Gerbert,
alors abbé de Bobbio, dans le
Milanais. Au milieu du xe s., un orgue
considérable existait à Winchester.
Mais tous ces textes sont isolés et ne
peuvent servir qu’à constater par des faits épars l’extension des orgues, sans
donner d’autre certitude à l’égard
d’un centre de facture ou de perfectionnement.
Au xiie s., est cité l’orgue
à soufflet de l’abbaye de Fécamp,
avec une partie des tuyaux en cuivre.
Les monastères de l’ordre de Cluny
ont eu des orgues de très bonne heure :
on l’apprend par la critique véhémente
qu’en fit Aelred, au xiie s. La
Sainte-Chapelle du Palais, à Paris,
eut à la fin du xiiie s., un orgue qui
ne servait qu’aux grandes fêtes. À
Notre-Dame, des orgues sont mentionnées
au xive s., comme servant
dans la maîtrise, pour l’enseignement.
En 1221, est mentionnée la construction d’un orgue à la cathédrale de Meaux. Le 1er grand orgue de la cathédrale de Strasbourg fut établi au xiiie s. par Ulrich Engelbert, élève d’Albert le Grand. À la même époque on commença de faire les tuyaux en étain ou en alliage d’étain et de plomb, et on établit les claviers chromatiques. La cathédrale de Rouen possédait au xive siècle des orgues qui furent « rappareillées » en 1382, entièrement reconstruites en 1490 et suiv. Ces orgues au xive s., étaient placées dans le transept nord. Les nouvelles orgues établies vers 1480-1494 occupaient tout le fond du bas de la nef et s’étendaient jusque sur les côtés. En 1518, le chanoine Mésenge fit don d’un orgue placé sur le jubé ; cet orgue fut détruit en 1562 par les protestants. L’emplacement le plus fréquemment choisi pour les orgues d’église est au-dessus du grand portail. Cependant les exceptions sont assez nombreuses. L’orgue de la cathédrale de Murcie (Espagne) est placé devant le chœur de l’église. Il a par conséquent deux façades, l’une de style gothique faisant face au portail, l’autre d’un style composite moderne, regardant l’autel. Cet orgue a été reconstruit par Merklin en 1857. Les orgues des cathédrales de Chartres, Metz, Strasbourg, Perpignan, sont placées sur un côté de la nef. Les orgues de La Chapelle du palais de Versailles, œuvre de Clicquot, mais restaurées au cours du xixe s., sont placées dans le fond de La tribune qui surmonte le chœur, derrière le maître-autel.
Cavaillé-Coll critique l’usage
établi surtout en France d’adosser
l’orgue contre le mur du grand portail.
Cet emplacement est défavorable à
leur sonorité. Il se produit des répercussions
qui engendrent la confusion
des sons et diminuent leur puissance.
L’emplacement sur le jubé à l’entrée
du chœur, est préférable (Saint-Paul
de Londres, abbaye de Westminster,
chapelle de Windsor).
Dates de quelques très anciens buffets d’orgues, encore existants :
Salamanque, cathédrale, vers 1380 ;
Sion (Suisse) Sainte-Catherine, vers 1400 ;
Saragosse, cathédrale, 1413 ;
Saint-Paul, 1420 ;
Palma (Majorque), cathédrale, vers 1420 ;
Amiens, cathédrale, 1429 ;
Alcala de Hénarès, vers 1450 ;
Nordlingen (Bavière), 1466 ;
Dortmund (Hollande), Marienkirche, vers 1480 ;
Perpignan, cathédrale, 1480-1504 ;
Strasbourg, cathédrale vers 1497 ;
Lubeck, Marienkirche, Jacobikirsche, vers 1510
(plusieurs buffets d’orgues en Allemagne depuis 1500) ;
Chartres, cathédrale, 1513 (et en partie de 1475) ;
Tirlemont, Saint-Germain, vers 1520 ;
Alkmaar (Hollande), vers 1520.
Pour l’époque plus récente, v. Buffet.
Les orgues ont été construites de
bonne heure à deux ou trois claviers,
placé côte à côte. On signale des
positifs (voy. ce mot), placés « dans le
dos de l’organiste » au xiiie s., et des
orgues avec claviers superposés au
xve, bien que rarement encore employés,
ainsi que les pédaliers, tout
récents, et ne parlant qu’en tirasses
(voy. ces termes). L’ensemble des
jeux de fonds et de mutation existait
dès lors, mais on ne connaissait guère,
en jeux d’anche, que le chalumeau
et la régale. Au xvie s., on trouve
toute une série de jeux nouveaux.
L’orgue de Saint-Godard, à Rouen,
en 1632, contenait, d’après le devis
établi par J. Titelouze, et publié par
A. Pirro, 18 jeux au grand orgue, 7 au
positif et 3 au clavier de pédales. Les
deux claviers manuels comprenaient
chacun 48 touches, le pédalier 28.
Les jeux étaient : 1. Montre, 16 pieds ;
— 2. Bourdon, 8 pieds ; — 3. Prestant,
4 pieds ; — 4. Doublette, 2 pieds ;
— 5. Flûte, 4 ou 8 pieds ; — 6. Petite
flûte, 2 ou 4 pieds ; — 7. Sifflet, 1 pied ;
— 8. Quinte de flûte, 3 pieds ; — 9. Petite
quinte, 1 pied et demi ; — 10. Fourniture
à 4 rangs à reprise d’octave ;
— 11. Cymbale à 3 rangs à reprise de
quarte ; — 12. Cornet à 5 rangs (du
milieu du clavier seulement) ; — 13.
Trompette, 8 p. ; — 14. Clairon, 4 p. ;
— 15. Régale pour servir de voix humaine ;
— 16. Tremblant ; — 17. Rossignol ;
— 18. Tambour.
Positif : 1. Montre, 8 p. ; — 2.
Prestant, 4 p. ; — 3. Doublette, 2 p. ;
— 4. Quinte de flûte, 3 p. ; — 5. Fourniture
à reprise d’octave ; — 6. Cymbale,
id. ; — 7. Cromorne, 8 p. ;
— (Accouplement du positif avec le grand orgue).
Pédales : 1. Bourdon, 8 p. ; — 2.
Flûte, 4 p. ; — 3. Trompette, 8 p.
L’orgue de Saint-Gervais, à Paris, remontant à la fin du xviie s., restauré et agrandi de 1760 à 1769 par Fr. Henri Clicquot, passa pour le plus bel instrument de son temps. C’est un grand 16 pieds en montre, à 5 claviers et 1 pédalier, comprenant 38 jeux. 6 soufflets correspondent, selon l’usage du temps, chacun à l’un des claviers et au pédalier. L’orgue de Saint-Sulpice, achevé par Clicquot et Dallery en 1781, contenait 52 jeux aux claviers à main et 11 au pédalier, soit 63 en tout. D’après l’Avant-Coureur du 16 mars 1767, aucune église de France ne possédait de jeu d’anches de 32 pieds, lorsque le premier fut posé par Perronard dans l’orgue de la cathédrale de Reims, où l’on trouva qu’il faisait « l’effet le plus noble et le plus majestueux ». Dom Bédos (1765) prévoit la registration à employer dans l’orgue pour l’accompagnement des voix ; cet accompagnement « doit être proportionné à leur volume et à leur éclat ». Le plein jeu pour un chœur bien fourni de voix ; pour une seule voix de récit, faible, un seul petit bourdon, etc. « Une voix qui chante doit toujours dominer ; l’accompagnement n’est que pour l’orner et la soutenir. »
L’usage de l’orgue dans l’église fut longtemps proscrit par la liturgie lyonnaise. Ce fut seulement en 1842 que le cardinal de Bonald, archevêque de Lyon, permit l’installation d’un petit orgue d’accompagnement dans le chœur de la cathédrale, puis l’établissement d’un orgue plus important, qui fut reconstruit par Merklin en 1873-1875 et placé sous un arceau avec un buffet exécuté sur les dessins de Bossan. L’orgue de Saint-Sulpice, à Paris, tel qu’il fut reconstruit par A. Cavaillé-Coll en 1860, demeura longtemps le plus considérable en même temps que le plus parfait des orgues d’église. On y compte 100 jeux, répartis en 5 claviers à mains et 1 clavier de pédales, plus 20 pédales pour les accouplements, appels et transmission de jeux, 126 rangées de tuyaux formant ensemble environ 7 000 tuyaux. Par les jeux de combinaison disposés sur les claviers à mains, un nombre presque illimité de combinaisons est possible. L’orgue de Saint-Eustache, refait par Merklin (1879), compte 4 claviers à mains et 1 clavier de pédales, 72 jeux.
|| En Allemagne, en 1503, on cite
l’église d’Innsbrück qui possédait
« une orghes, les plus belles et les plus
exquises que jamais ie vey. Il n’est
instrument du monde quy ny joue,
car ils sont tous là-dedans compris. »
(Voyages des souverains des Pays-Bas,
i, 310). Mais peu d’années après,
l’usage de l’orgue dans le culte protestant
donna lieu à des controverses
(renouvelées presque en tous pays et
à diverses époques). Zwingli tenait
l’orgue en aversion. Luther, qui aimait,
cultivait et encourageait le
chant, se montrait peu favorable, et
plutôt méfiant à l’égard de l’orgue.
Dans l’esprit de beaucoup de protestants
du xvie s., l’orgue apparaissait
comme de nature catholique.
L’orgue de Zurich fut détruit en
1527. Celui de Poitiers, l’un des plus
beaux de France, dont le buffet était
« tout peint et figuré », fut brisé en 1562, détruit par les huguenots. Quantité
de beaux instruments périrent de
la même façon en Angleterre, à l’époque
du puritanisme. En Allemagne,
les différentes communautés depuis le
xvie s., ont fréquemment varié dans
leur réglementation de l’usage de
l’orgue dans le culte. Cet instrument
fut englobé dans la réaction qui se
produisit après l’époque de floraison de
la musique religieuse protestante et
de la musique d’orgue au temps de
Bach. Une décadence complète se fit
déplorer au xixe s. À notre époque,
une rénovation de l’usage de l’orgue
dans le service religieux protestant en
Allemagne fut entreprise et poussée
activement. Comme dans l’église catholique,
le rôle de l’orgue pour l’accompagnement
du chant, attira depuis
l’origine du culte protestant, l’attention
des musiciens et des autorités
ecclésiastiques, mais il n’y offrait pas
les difficultés inhérentes à la modalité
du plain-chant. Le principe de l’alternance
du chœur avec l’orgue dans le
Magnificat et divers psaumes fut
adopté aussi comme dans l’église catholique.
Les mêmes recommandations,
critiques, etc., à l’égard du choix des
préludes, interludes, postludes, se
trouvent sous la plume des auteurs
des deux religions ; mais le caractère
profane de certains morceaux paraît
encore plus répréhensible dans le
culte catholique, où le dogme de
l’Eucharistie est plus formel. La composition
d’un orgue, en Allemagne, au
xviiie s., différait profondément des
usages français. Les jeux d’anche y
étaient en nombre extrêmement petit.
L’orgue de Weimar, vers 1740, comprenait
au grand-orgue 9 jeux, au positif
8, aux pédales 7, ainsi dénommés :
G. O. 1. Principal, 8 pieds ; — 2. Quintaton,
16 p. ; — 3. Gemshorn, 8 p. ;
— 4. Gedackt, 8 p. ; — 5. Quintatön, 4 p. ;
— 6. Octave, 4 p. ; — 7. Mixture à
6 rangs ; — 8. Cymbale à 3 rangs ;
— 9. Carillon.
Positif : 1. Principal, 8 p. ; — 2. Viola
di gamba, 8 p. ; — 3. Gedackt, 8 p. ;
— 4. Trompete, 8 p. ; — 5. Klein gedackt,
4 p. ; — 6. Octave, 4 p. ; — 7. Waldflöte,
2 p. ; — 8. Sesquialtera.
Pédales : 1. Gross Untersatz, 32
pieds ; — 2. Soubasse, 16 p. ; — 3. Violon-bass,
16 p. ; — 4. Principal-bass,
8. p ; — 5. Posaun-bass, 16 p. ; — 6.
Trompeten-bass, 8 p. ; — 7. Cornett-bass,
4 p. ; = total, 24 jeux.
Il est intéressant de donner la
composition de l’orgue de Saint-Thomas
de Leipzig à l’époque même
de Bach, telle que l’a publiée A. Pirro :
Grand orgue : 1. Principal, 16 p. ;
— 2. Principal, 8 p. ; — 3. Quintatön, 16 ;
— 4. Octave, 4 ; — 5. Quinte, 3 p. ; — 6.
Superoctave, 2 ; — 7. Spielfeife (sorte
de flûte) 8 ; — 8. Sesquialtera double ;
— 9. Mixtur à 6, 8 et 10 rangs.
Récit : 1. Grobgedackt (gros bourdon),
8 ; — 2. Principal, 4 ; — 3. Nachthorn,
4 ; — 4. Nasat, 3 ; — 5. Gemshorn,
2 ; — 6. Cymbel à 3 rangs ;
— 7. Sesquialtera ; — 8. Regal, 8 ;
— 9. Geigen-Regal (viole-régale), 4.
Positif : 1. Principal, 8 ; — 2. Quintatön,
8 ; — 3. Lieblich gedacht, 8 ;
— 4. Kleingedakt, 4 ; — 5. Querflöte
(flûte traversière), 4 ; — 6. Violine,
2 ; — 7. Rauschquinte (double) ;
— 8. Mixtur à 4 rangs ; — 9. Sesquialtera ;
— 10. Spitzflöte, 4 ; — 11.
Schallflöte, 1 ; — 12. Krumhorn, 8 ;
— 13. Trompete. 8.
Pédale : 1. Subbass (de métal), 16 ;
— 2. Psaume, 16 ; — 3. Trompete,
8 ; — 4. Schalmei, 4 ; — 5. Cornet, 2.
Soit 36 jeux.
L’orgue de l’abbaye de Weingarten construit en 1750 par Gabler, fut célèbre par l’ornementation surabondante de son buffet en même temps que pour le nombre et la variété de ses jeux. Il comptait 66 jeux, 4 claviers à main, 2 claviers de pédales, 6,666 tuyaux. Ses jeux de cornet, de fourniture et de cymbale étaient particulièrement nourris. On y trouvait des jeux singuliers, un rossignol, un coucou, un jeu de timbales réellement battues par un automate d’ange surmontant le buffet, un carillon. || Dans l’histoire du jeu d’orgues en Angleterre, on peut distinguer 3 périodes : i, sans pédales, ii, avec pédales, musique notée à 2 portées, iii, avec pédales et musique sur 3 portées. La première période commence à l’origine de l’instrument, c.-à-.-d. au xe s., et se continue jusqu’à la fin du xviiie s. Des orgues sont mentionnées à Winchester en 957, Canterbury, 1114, York, 1419, Saint-Albans, 1450, Magdalen College, Oxford, 1597, etc., tous à un clavier manuel seulement. Les orgues du King’s College, Cambridge, en 1605, ont 2 claviers manuels. En 1642, la Révolution et la domination des puritains marquèrent l’interruption de l’usage des orgues et la destruction de beaucoup d’entre elles. Ce fut une phase de « démence théologique ». Après la Restauration, on reconstruisit des instruments. Smith père établit en 1684 un orgue à 3 claviers manuels dans Temple Church, à Londres. Les facteurs du siècle suivant en firent de semblables, et l’étendue, ou ambitus, de l’instrument, fut portée, au grave, à l’équivalent de celle des orgues à pédales, sans que les mains suffisent à exécuter les contrepoints et les harmonies pleines qu’un clavier de pédales permet de compléter. — 2e période. Le clavier de pédales fit son apparition en Angleterre à la fin du xviiie s. On les appelait « pédales allemandes ». L’abbaye de Westminster, l’église luthérienne allemande dans Savoy et les églises de Saint-Matthieu et de Saint-James, à Londres, passent pour avoir possédé les premières un clavier de pédales. La date exacte reste incertaine. Cette innovation encouragea un progrès dans la technique d’exécution contrepointique. — 3e période. Il y eut des orgues de salles de concert en Angleterre avant l’Allemagne ; (noter qu’à Paris le Concert Spirituel avait un orgue en 1748). L’orgue du Town Hall de Birmingham fut construit par W. Hill, en 1834. Le mécanisme électrique français fut introduit en Angleterre en 1868, en Allemagne en 1884. L’écriture sur 3 portées vint d’Allemagne et fut fort discutée. Le « Royal College » des organistes anglais, fondé en 1864, examine, ratifie, contrôle et guide les candidats aux postes d’organiste.
Hændel ne jouait donc pas sur
un grand orgue à pédalier. Voici le
type d’un instrument anglais de son
temps ; nous choisissons celui de la
cathédrale Saint-Paul de Londres,
construit en 1696 :
Grand orgue : 1-2. open diapason
(montres de 8) ; 3. stopped diapason
(bourdon) ; — 4. Principal, 4 ; — 5.
Holfleut (8) ; — 6. Grosse Douzième
(quinte) ; — 7. Quinzième (doublette) ;
— 8. Petite Douzième ; — 9. Sesquialtra ;
— 10. Mixture ; — 11. Cornet ;
— 12. Trompette.
Choirorgan : 1. Stopped Diapason ;
— 2. Quintadena-Diapason ; — 3.
Principal ; — 4. Holfleut ; — 5. Grosse
Douzième ; — 6. Quinzième ; — 7.
Cymbale ; — 8. Voice humane (sic) ;
— 9. Crumhorne.
Écho : 1. Diapason ; — 2. Principal ;
— 3. Nason ; — 4. Quinte ; — 5. Cornet ;
— 6. Trompette (en demi-jeux seulement,
à partir de la moitié du clavier).
En tout, 27 jeux.
|| La notation de la musique d’orgue a été, au xive s. et au xve, d’abord écrite en tablature (voy. ce mot), mais dès le xvie s., elle est notée comme le reste de la musique : sur deux portées. Elle s’écrit, depuis l’école de Bach, sur 3 portées, dont les deux portées supérieures destinées aux claviers de mains (manuels) sont réunies par une accolade ; la 3e, placée au-dessous contient la partie du pédalier. Lorsque le compositeur ne traite pas la partie de pédales d’une façon indépendante, et ne lui demande qu’un renforcement des basses des claviers manuels, il écrit sur 2 portées seulement, en indiquant par le mot pédale ou l’abréviation ped. les notes à doubler. On en agit de même quand cela ne gêne pas la lecture de la partition. Depuis l’origine de la musique d’orgue, l’adaptation des mélodies liturgiques a formé la base des compositions destinées au service du culte. Les plus anciens livres d’orgue connus contiennent des pièces travaillées sur les thèmes liturgiques, et plus tard des motets vocaux, des pièces sur des thèmes de chansons, tel que celles usitées comme « Noëls ». C’est vers le milieu du xvie s. qu’apparaissent les organistes virtuoses et vraiment grands maîtres. En Italie : Merulo, les Gabrieli, à Venise, puis Frescobaldi, organiste de Saint-Pierre de Rome, sont les grands noms de la belle période de l’orgue en ce pays. En Angleterre, on cite à la fin du xvie s., John Bull, W. Byrd et Peter Philipps qui doivent s’exiler en Belgique ; au xviiie s., Hændel à lui seul soutient la renommée de toute une époque. En Espagne, Antoine de Cabezon, mort en 1566, fut peut-être le premier des grands organistes, et semble avoir donné le modèle de diverses formes ; citons encore Aguilera de Heredia, au siècle suivant. Aux Pays-Bas, Sweclinck († 1621) fut à Amsterdam, le chef de toute une école célèbre. Peter Cornet, à la même époque, illustrait Bruxelles. En France, une pléiade de maîtres a brillé dans la musique d’orgue. A. Guilmant a publié les œuvres de la plupart d’entre eux : Titelouze († 1633) ; Roberday (c. 1660) ; Gigault († 1707) ; Le Bègue (1702) ; Boyvin († 1706) ; F. Couperin, dit de Crouilly († 1701 ?) ; Dandrieu († 1740) ; d’Aquin († 1772) pour ne nommer que les principaux. Citons encore Nivers (éd., 1665), Gilles Julien († 1695), et, à la fin du xviiie s., Balbastre, Charpentier, Séjan. En Allemagne et en Autriche, Froberger, Pachelbel, marquent le xviie s. ; les Bach, Eberlin, Krebs, continuent la lignée ; Buxtehude, le maître de J. S. Bach, était danois ; Georges Muffat, élève de Lulli, alsacien. Toutes les formes de la musique d’orgue ou applicable à l’orgue et toutes les manières de traiter les thèmes liturgiques ont été portées à leur perfection par J.-S. Bach, qui reste le plus grand des organistes de tous les temps et de tous les pays. La fin du xviiie s., et une grande partie du xixe constituèrent une période de décadence de la musique d’orgue. Il faut citer, parmi ceux qui maintinrent le drapeau classique et tentèrent de remonter le courant : le Français Boély (1785-1858), enfin le Belge Lemmens (1823-1881), l’Anglais W. Best (1826-1897). Puis apparaît une nouvelle et féconde école française : César Franck ; A. Guilmant (1837-1910), qui fut élève de Lemmens avec Widor (né en 1845), et Gigout (né en 1844). À l’heure actuelle, les noms de Mahaut, A. Marty, Louis Vierne, J. Bonnet, Marcel Dupré, Tournemire, marquent le sommet de la musique d’orgue en notre pays. L’étranger n’a guère pu leur opposer que l’Allemand Max Reger (1873-1917).
Les orgues modernes les plus considérables jusqu’en 1912, étaient : Sydney (hôtel de ville), 5 claviers. 128 jeux construit par Hill and Son, de Londres ; Riga (cathédrale), 5 claviers, 124 j., Hill and Son, de Londres ; Saint-Sulpice à Paris, 5 claviers, 118 j., Cavaillé-Coll ; Albert Hall, Londres, 4 claviers, 114 j., Willis (Londres) ; cathédrale protestante de Berlin, 113 j., W. Sauer (Francfort) ; N.-D. de Paris, 5 claviers, 110 j., Cavaillé-Coll.
L’orgue de Sydney, réputé alors le plus grand du monde, a coûté 16 000 l. st. (400 000 fr.), chaque clavier à main a 61 touches, le pédalier 30. Il y a 8 800 tuyaux et cloches. La soufflerie est manœuvrée par une machine à gaz de la force de 8 chevaux. Le plus grand tuyau du jeu de contre-trombone (en bois) a 64 pieds de hauteur. Mais, depuis vinrent les orgues de Liverpool, de Hambourg, commencées en 1912. L’orgue de Liverpool, construit par H. Willis et fils, de Londres, est placé au centre de l’église cathédrale anglicane, très vaste, et divisé en 2, de chaque côté du chœur, dans la 1re travée à l’angle du transept, en présentant une double façade sur chacune de ces deux ailes. L’orgue contient 168 jeux réels et 47 tirasses de combinaison (en tout 215 boutons), 10 567 tuyaux, 5 claviers manuels de 67 touches de ut à ut, un pédalier de 32 notes. Système électro-pneumatique, 7 soufflets séparés. Il n’y a pas de 64 pieds, jugé inaudibles ; les facteurs y ont suppléé par la double quinte de 21 pieds 1/3 dont la résonance harmonique donne en sons résultats l’équivalent du 64 pieds. (Voy. Son.) L’orgue de Hambourg, achevé en 1914 par Walker, de Ludwigsbourg (Würtermberg), compte 163 jeux, 12 173 tuyaux, répartis en 5 claviers manuels, et 1 pédalier. Les basses principales, à la pédale, sont de 32 pieds. L’électricité remplace la traction mécanique.
Enfin sont venus les orgues gigantesques du Monument des Nations, à Breslau, et celles de la Public Ledger, à Philadelphie, qui semblent un défi jeté au bon sens, et dont le fonctionnement, pas plus que l’effet artistique, ne sont satisfaisants. L’orgue de Breslau, terminé en 1913, comprend 5 claviers manuels, un pédalier ; le clavier d’écho est placé à 80 mètres du buffet principal, gouverné par des transmissions électriques. 187 jeux sont commandés par 203 registres, plus 156 boutons de combinaison, 26 accouplements, 30 pédales de combinaisons diverses. Cet orgue n’a aucune façade rappelant les buffets, on n’y voit rien que des tuyaux en montre, serrés les uns contre les autres.
Celui de Philadelphie, terminé en
1917, a 283 jeux. Parmi ses claviers, il
y a un clavier spécial de jeux « à archet »,
comprenant 24 gambes, etc. Les
jeux correspondant aux divers claviers
sont placés en différents endroits du
monument. L’orgue lui-même simule
une haute colonnade avec galerie, le
tout surmonté d’un dôme : aucun
tuyau n’est apparent, au contraire de
l’instrument précédent.
(Voy. aussi les mots : Buffet,
Clavier, Électricité, Jeux et les noms
de jeux, Pression, Pédale et Pédalier,
Pied, Positif, Soufflet, Tubulaire, et les
autres termes cités ici.)