Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle/Étonné

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ÉTONNÉ, p. On dit : Ce fer est étonné, cette pierre est étonnée ; ce qui signifie que ce fer a subi un choc, une épreuve qui, n’ayant pas causé une rupture immédiate, ont cependant prédisposé le métal à se rompre facilement ; que la pierre a de même été désagrégée par une action physique, ou fêlée par un choc, et qu’elle se trouve aussi dans de mauvaises conditions de résistance. Un forgeron maladroit peut étonner son fer s’il lui donne un coup de marteau à faux lorsqu’il commence à se refroidir ; un tailleur de pierre peu soigneux étonne son bloc en le taillant, si, par exemple, il fait un évidement sans prendre le temps d’enlever la pierre peu à peu. Il étonne les parements en employant la boucharde, c’est-à-dire qu’il les prédispose à se décomposer plus facilement sous l’action des agents atmosphériques. Les architectes du moyen âge, qui n’étaient pas avares d’évidements, avaient le soin de les profiler de façon à ce que le tailleur de pierre ne fût pas entraîné à étonner la pierre. Ainsi, par exemple, les sections horizontales des piles composées de faisceaux de colonnettes, celles des arcs moulurés portent toujours, dans les angles rentrants, des gorges ou des filets plats qui arrêtent l’outil assez à temps pour l’empêcher d’étonner la pierre. Si nous profilons une pile d’après le tracé A, fig. 1, il est certain que pour obtenir les aiguités B, le tailleur de pierre étonnera son bloc ; mais si nous traçons la section C, en réservant des filets plats D dans ces angles rentrants, nous éviterons ce grand inconvénient ; la pierre, quoique évidée, conservera son nerf (voy. Profil ).