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Droits des personnes préposées près des écoles populaires

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CHAPITRE V

DROITS DES PERSONNES PRÉPOSÉES PRÈS DES ÉCOLES POPULAIRES

On dit dans l’article 47 que les curateurs n’ont pas le droit de porter le bicorne et l’épée. (Je n’omets pas un seul article, et le lecteur, en suivant le projet, peut se convaincre de l’exactitude de mes citations.)

Les articles 48, 49, 50, 51, 54, définissent la situation matérielle des instituteurs.

Cette situation est brillante, et il faut avouer que, le projet mis à exécution, sous ce rapport, nous dépasserons d’un coup l’Europe.

L’instituteur de village recevra cent cinquante roubles par an, il sera logé et chauffé, ce qui représente environ cinquante roubles. En outre, il recevra en grains ou farine (c’est prévu dans le projet afin de laisser plus de liberté à la commune) deux pouds (trente-deux kilogrammes) par mois, ce qui fait, selon nos prix, douze roubles par an, et, en plus, une demi-déciatine de bon terrain pour le potager, ce qui fera encore dix roubles. Au total 222 roubles. (Tout cela au compte de la commune qui, d’après le calcul précité, pourra à peine grouper dans une école vingt élèves. En outre la commune paie cinquante roubles au maître d’instruction religieuse, cinquante roubles pour les fournitures scolaires, vingt-cinq roubles pour le capital de réserve de la province ; elle construit et fait réparer l’école, loue un gardien pour l’école, ce qui fait encore au moins quatre-vingts roubles, en tout 427 roubles de la part de la commune.)

L’article 50 dit que la commune a le droit de louer une institutrice.

Le maître qui aura enseigné pendant vingt ans recevra les deux tiers de son salaire et, en outre, sera affranchi des impôts et du service militaire, ce qui incombera de nouveau à la commune, à raison de dix roubles par an. La situation de l’instituteur est, en effet, brillante, mais je me permets de douter qu’elle serait aussi brillante si la commune elle-même le récompensait selon son mérite ou si les auteurs du projet étaient forcés de chercher des ressources ailleurs. Les droits laissés aux maîtres par les articles 52, 56, 57 : le droit d’être regardé comme fonctionnaire d’État, le droit de recevoir la médaille d’Alexandre appendue à un ruban, le droit d’être adjoint de l’inspecteur des écoles, s’ils n’incombent pas à la commune, en revanche, n’auront pas, je suppose, pour l’instituteur, l’attrait qu’auraient pour eux les droits pécuniaires mis à la charge de la commune. La question de l’augmentation des traitements des instituteurs de villages occupe fortement, depuis longtemps déjà, les gouvernements européens, et elle ne reçoit une solution que pas à pas. Chez nous cette question est résolue d’un coup par quelques lignes du projet : cette simplicité elle-même, et la légèreté de la solution me paraissent suspectes ! Involontairement je me pose la question : pourquoi fixe-t-on cent cinquante roubles et non 178 roubles 16 kopeks et 1/3 ? Pour cette dernière somme nous sommes convaincus d’avoir des maîtres encore meilleurs. Et pourquoi ne pas fixer 178 roubles quand la somme où nous puisons se trouve en notre pouvoir absolu sans aucun contrôle ? Pourquoi faut-il donner une demi-déciatine de bonne terre à potager et non 8 déciatines 2/3 ? Le supplément de l’article dit : les prêtres qui remplissent en même temps les fonctions de professeur d’instruction religieuse et les autres, ne jouissent du traitement complet que pour les fonctions d’instituteur ; pour celles de professeur d’instruction religieuse, ils ne recevront que la moitié. Il est probable que tous ces chiffres ont été pesés attentivement puisqu’on supprime si soigneusement les vingt-cinq roubles du professeur d’instruction religieuse. Ces chiffres sont définis, sans doute, d’après des données positives. Ces données, nécessairement, doivent être connues, elles doivent l’être d’autant plus que, d’après les données recueillies par plusieurs d’entre nous, par leurs expériences personnelles, l’impôt scolaire infligé aux communes est démesurément élevé, impossible à payer, que pas une seule commune ne consentira à en payer la cinquième partie, et, qu’en Russie, il n’y a pas une centième partie des maîtres qui mérite un tel salaire.