Ennéades (trad. Bouillet)/VI/Livre 7/Notes

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Les Ennéades de Plotin,
Traduction de M. N. Bouillet
Ennéade VI, livre vii :
De la multitude des Idées. — Du Bien | Notes


LIVRE SEPTIÈME.
DE LA MULTITUDE DES IDÉES. DU BIEN.

Ce livre est le trente-huitième dans l’ordre chronologique.

Les paragraphes 32, 37, 41, 42, ont été traduits par M.  Barthélemy Saint-Hilaire : De l’École d’Alexandrie, p. 281-289.

Dans ce livre, Plotin s’est proposé de résoudre toutes les questions que soulève la doctrine de Platon sur les idées et de montrer en même temps quel est le lien qui rattache les idées elles-mêmes au Bien absolu[1]. Les dialogues où il a le plus puisé sont le Timée (Voy. p. 407, 400, 414, 429, 431, 433, 462, notes), le Philèbe[2] (p. 457, 466-467), le Phèdre (p. 428, 452, 470), la République (p. 442, 460, 464, 477, 482, 484, 487, 489), le Banquet (p. 451, 460, 467-470, 473, 477-478), l’Alcibiade (p. 420).

Mais Plotin ne s’est pas borné à commenter servilement la doctrine du maître. Il s’est appliqué à la mettre à l’abri des objections d’Aristote en la complétant et en la réformant à l’aide des emprunts qu’il a faits à l’auteur même de la Métaphysique. Il ne s’est pas seulement inspiré du système de ce philosophe ; il a reproduit même quelques-unes de ses formules les plus importantes, ainsi que nous l’avons indiqué dans les notes (p. 410-412, 416-420[3]). — Quant à la théorie d’Aristote sur le bien, Plotin la combat le plus souvent (p. 447-450). Cependant la gradation qu’il établit entre les biens est conforme à la marche que suit Aristote dans le livre XII de sa Métaphysique pour s’élever progressivement au premier principe, au souverain Bien (p. 458) ; mais, pour notre auteur, le souverain Bien est supérieur à l’Intelligence même (p. 479-481).

On retrouve dans le morceau suivant d’Ibn-Gébirol le principe important développé ci-dessus par Plotin (p. 410-415) que, dans le monde intelligible, chaque essence ou idée contient sa raison d’être :

« Les substances simples n’ont pas de pourquoi en dehors de leur essence ; mais elles ont un pourquoi qui est identique avec leur essence : car elles sont simples et unes. C’est pourquoi on dit de la matière première, de la forme première, et en général de toutes les substances simples, que leur être n’a pas de cause, si ce n’est le Très-Haut, qui les a créées… Je dirai que l’être, depuis son extrémité supérieure jusqu’à son extrémité inférieure, occupe quatre degrés différents qui sont le que, le quoi, le comment et le pourquoi. Le degré supérieur est le que qui n’a ni quoi, ni comment, ni pourquoi, et c’est l’un véritable, le Très-Haut ; au-dessous est le quoi qui n’a ni comment ni pourquoi, comme l’Intellect ; au-dessous est le quoi qui a le comment et le pourquoi, comme la nature et ce qui naît. » (Ibn-Gébirol, Source de la vie, liv. V ; trad. de M. Munk, Mélanges de philosophie juive et arabe, p. 111.)

Ce livre de Plotin a été longuement cité par Jean Philopon (Voy. p. 410, note) et par Nicéphore Grégoras (Voy. p. 481, note).

Michel Psellus, dans la compilation intitulée Διδασϰαλία παντοδαπή (Didaskalia pantodapê) (§ 27), cite en ces termes les paragraphes 3-6 (p. 414-423) : « Pour Plotin, il y a trois hommes : l’homme intellectuel, qui est un ; l’homme rationnel, qui est doué de trois facultés, l’homme sensitif, qui est multiple et composé de plusieurs principes. Nous sommes le principe qui raisonne et contemple : car nous et l’âme, nous ne faisons qu’une seule et même chose. »

Le P. Thomassin a exposé quelques-unes des idées fondamentales de ce livre dans ses Dogmata theologica, comme on peut le voir par les notes (p. 452-453, 470, 472).


  1. Voy. ci-dessus le résumé de la doctrine de Plotin sur les idées, p. 575-576.
  2. On peut rapprocher de l’interprétation que Plotin donne de la théorie exposée par Platon dans le Philèbe le passage suivant d’Olympiodore : « Qui a raison, de Porphyre qui préfère la vie de l’intelligence, ou de Jamblique qui préfère la vie mélangée [le mélange de la vie intellectuelle et de la vie sensible] ? Ils ne sont pas au fond en désaccord. Car Porphyre entend par intelligence l’intelligence parfaite, et par plaisir le plaisir irrationnel. Jamblique au contraire entend par plaisir le plaisir conforme à l’intelligence et par intelligence la simple faculté de connaître. C’est là la pensée de Platon. De cette manière Porphyre veut bien de la vie mélangée (car c’est la vie spéculative), qui jouit d’elle-même et des choses qui lui sont supérieures, mais surtout de ses opérations qui s’accomplissent sans obstacle. Il appelle cette vie intellectuelle à cause de son caractère dominant. » (Commentaire du Philèbe, p. 239 ; dans le Philèbe de Platon publié par Stallbaum.)
  3. Voy. aussi sur ce point le passage de M.  Ravaisson que nous avons cité dans notre t. I, p. 321, note 2.