Épître à Marie d’Orléans
O louée Conception,
Envoiée sà jus des cieulx ;
Du noble Lys digne syon ;
Don de Jhésus très précieux,
Marie, nom très gracieux,
Font de pitié, source de grace,
La joye, confort de mes yeulx,
Qui nostre paix batist et brasse !
La paix, c’est assavoir, des riches,
Des povres le substantement,
Le rebours des felons et chiches,
Très necessaire enfantement,
Conceu, porté honnestement,
Hors le pechié originel,
Que dire je puis sainctement
Souverain bien, Dieu éternel !
Nom recouvré, joye de peuple,
Confort des bons, de maulx retraicte ;
Du doux Seigneur première et seule
Fille, de son cler sang extraicte,
Du dextre costé Clovis traicte,
Glorieuse ymage en tous fais,
Ou hault ciel créée et pourtaicte,
Pour esjouyr et donner paix !
En l’amour et crainte de Dieu,
Es nobles flancs Cesar conceue ;
Des petis et grans, en tout lieu,
A très grande joye receue ;
De l’amour Dieu traicte, tissue,
Pour les discordez ralier,
Et aux encloz donner yssue,
Leurs lians et fers deslier.
Aucunes gens, qui bien peu sentent,
Nourriz en simplesse et confiz,
Contre le vouloir Dieu attentent,
Par ignorance desconfiz,
Désirans que feussiez ung filz ;
Mais qu’ainsy soit, ainsi m’aist Dieux,
Je croy que ce soit grans proufiz ;
Raison : Dieu fait tout pour le mieulx.
Du Psalmiste je prens les dictz :
Delectasti me, Domine,
In factura sua ! Je diz :
« Noble enfant, de bonne heure né,
A toute doulceur destiné,
Manna du Ciel, celeste don,
De tous bienfais le guerdonné,
Et de nos maulx le vray pardon ! »