Esprit des lois (1777)/D11/3

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Troisieme objection.


L’auteur a dit, que la création, qui paroît être un acte arbitraire, suppose des regles aussi invariables, que la fatalité des athées. De ces termes, le critique conclut que l’auteur admet la fatalité des athées.


Réponse.


Un moment auparavant, il a détruit cette fatalité par ces paroles : Ceux qui ont dit qu’une fatalité aveugle gouverne l’univers, ont dit une grande absurdité : car quelles plus grande absurdité, qu’une fatalité aveugle qui a produit des êtres intelligens ? De plus, dans le passage qu’on censure, on ne peut faire parler l’auteur que de ce dont il parle. Il ne parle point des causes, & il ne compare point les causes ; mais il parle des effets, & il compare les effets. Tout l’article, celui qui le précede & celui qui le suit, font voir qu’il n’est question ici que des regles du mouvement, que l’auteur dit avoir été établies par Dieu : elles sont invariables, ces regles, & toute la physique le dit avec lui ; elles sont invariables, parce que Dieu a voulu qu’elles fussent telles, & qu’il a voulu conserver le monde. Il n’en dit ni plus ni moins.

Je dirai toujours que le critique n’entend jamais le sens des choses, & ne s’attache qu’aux paroles. Quand l’auteur a dit que la création, qui paroissoit être un acte arbitraire, supposoit des regles aussi invariables que la fatalité des athées ; on n’a pas pu l’entendre, comme s’il disoit que la création fût un acte nécessaire comme la fatalité des athées, puisqu’il a déjà combattu cette fatalité. De plus : les deux membres d’une comparaison doivent se rapporter ; ainsi il faut absolument que la phrase veuille dire : la création, qui paroît d’abord devoir produire des regles de mouvement variables, en a d’aussi invariables que la fatalité des athées. Le critique, encore une fois, n’a vu & ne voit que les mots.