Fleurs de rêve/Soupirs d’automne

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)
Boehme et Anderer (p. 20-21).




SOUPIRS D’AUTOMNE



I

Syrie, sur les bords du Nil,
Où soupire la poésie,
Mon cœur sent un cruel exil
Loin de ta secrète magie…
Et je songe à tes doux printemps,
À ces heures pleines de charmes
Qui ne connurent point de larmes
Mais qui n’ont pas duré longtemps.

Et, dans ma mémoire confuse,
Je revois de ton beau Liban
Le tableau si cher à la Muse
Et son azur chaste et charmant ;
Les Cèdres dont les hautes cimes
Se balançant frôlent le ciel
Du bout de leur bec vert de miel
Comme y voulant tracer des rimes…


Liban je rêve à tes étés,
À tes jardins peuplés de roses,
Aux appels de cœur, entêtés,
Murmurés par tes fleurs écloses ;
À ces besoins naïfs d’enfant,
D’amour, d’abandon, d’espérance,
De candeur et d’insouciance,
De rencontrer le bien souvent.

II

J’étais en pension, je n’avais pas quinze ans,
L’aspect seul d’un cours d’eau m’emportait dans les nues,
Mon âme frémissait… Et depuis deux printemps,
Grisant frisson, tu continues !

III

Ainsi que le soleil la pluie a ses attraits,
Bien plus que le bonheur la peine a des délices :
Les tremblements les plus doux et les plus secrets
Nous proviennent du sacrifice !

IV

Autant que le printemps fleuri
Automne si rêveur, je t’aime !
J’aime ton zéphir attendri,
Tes soirs et tes tristesses même…
J’aime ouïr les derniers accents
D’une antique lyre brisée,
Vague écho, noire mélopée
Qui n’a plus que des sons mourants…