Fragments d’histoire/08
LE COLLÈGE SAINT-VICTOR
Beaucoup désignent encore la partie du Boulevard qui passe derrière le Presbytère et la Gendarmerie par ces mots « derrière collège » et cette expression a été reproduite dans un plan officiel qui mentionne « le Boulevard du Collège[1] ».
Le projet du même Boulevard a figuré dans un plan du 27 avril 1815[2].
Il est intéressant d’évoquer ici un grand souvenir : il s’agit du collège Saint-Victor et de son fondateur.
« Il n’y a dans les colonies françaises aucune école pour les garçons », lit-on dans un document officiel de 1765[3] où se trouvent des idées générales présentées à l’arrivée à la Martinique du Gouverneur Général Comte d’Ennery.
C’est pour remédier à cette situation que le collège Saint-Victor a été créé, le 7 juillet 1768, pour les jeunes gens parle Conseil supérieur de la colonie sous l’impulsion d’un homme dont le nom doit être rappelé et honoré à la Martinique qui attache, avec raison, un si grand prix à l’enseignement, le Père Charles François de Coutances, fondateur aussi un pensionnat de jeunes filles.
Nommé supérieur général des Capucins aux Îles le 30 avril 1753, il y est resté jusqu’à sa mort, en 1790 ; il a donc été 37 ans sur la brèche.
L’école qu’il a fondée a été autorisée par un arrêt du Conseil souverain du 9 mai 1765. La première pierre fut posée le 4 janvier 1766 par le Gouverneur général d’Ennery et le Président Peynier. Elle s’appela « Collège Saint-Victor » du prénom du chef de la colonie et le principal a été M. Barberet et MM. Le Jeune et Prévoteau étaient chargés de la conduite des élèves.
En 1777, le Collège lut confié aux frères des écoles chrétiennes. Deux de ces religieux, les frères Aquilien (Léger Barboché) et Piat de Jésus, (Philibert Leroy) ont été alors envoyés à la Martinique par le Ministre. D’autres les suivirent et l’école se releva. Une subvention annuelle de 6.000 livres devait lui être servie par la caisse des affranchissements. De son côté aussi, la Guadeloupe devait contribuer aux dépenses de l’école et verser la somme de 5.000 livres par an à prendre sur les droits de cabaret[4].
« Le seul Établissement utile pour la colonie depuis sa fondation a été fait aux dépens et par les soins d’un religieux capucin qui ne possède rien et qui, même par son institution, ne peut rien avoir en propre[5] ».
Le Père Charles-François fut plus généreux encore : pour assurer le fonctionnement du Collège il lui fit don de deux habitations situées aux Anses-d’Arlet[5].
Rien ne rappelle à Fort-de-France son nom qui pourrait être donné à la ruelle qui est entre la Gendarmerie et le Presbytère, sur le terrain même où il a si longtemps vécu et travaillé pour la Martinique et notamment pour l’Enseignement. Cette ruelle n’a pas de désignation.
Le collège a été fermé en 1793.
Mais où se trouvait exactement cet établissement dont il existe un plan détaillé de 1781[6] ?
Un auteur a pensé que ce serait à peu près à la place du Presbytère actuel[7]. Le fait, qu’il n’allègue pas, du reste, qu’en creusant le sol pour poser les fondations de la salle paroissiale, on aurait trouvé un pavé ancien qui serait peut-être un reste de l’établissement, n’est pas une preuve.
Mais des plans de 1783, de 1784 et de 1807, du 1er mai 1826 et du 1er décembre 1847 permettent de dire que le Collège a occupé le terrain borné en partie par les rues de la République et Perrinon y compris celui où est actuellement la Mairie[8].
Un de ces documents est péremptoire, c’est celui du 1er mai 1826, il a pour titre « Plan et élévation de l’ancien collège Saint-Victor, maintenant hospice de charité, au Fort Royal ». Comme la Mairie a remplacé l’hospice, c’est bien le terrain de la Mairie qui est l’emplacement du collège.
- ↑ Plan Grimaud de janvier 1909
- ↑ Arch. minis. Col. no 507.
- ↑ Archives ministère des colonies no 237.
- ↑ Dépêche ministérielle du maréchal de Castries du 3 juillet 1784. Code de la Martinique, tome 3, p. 589.
- ↑ a et b Annales du conseil souverain, tome 2, pages 240 et suivantes.
- ↑ Arch. min col. Atlas Antilles Vol. 1.
- ↑ Histoire de la paroisse de Fort-de-France, par le P. Janin.
- ↑ Arch. min. col. no 379, 380, 407, 486, 680, et 1130.