Français, reprenez le pouvoir !/Partie 1/Chapitre 4

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La dérive oligarchique de la Ve République – un système où quelques-uns décident de tout selon leur caprice – n’est plus à démontrer. Elle explique pour une part le dégoût des Français pour l’action publique. Quatre maux se renforcent mutuellement: la propension à confondre, pour celui qui l’exerce, le pouvoir présidentiel et le pouvoir personnel; la résurgence concomitante du régime des partis; l’impuissance du Parlement; l’emprise des intérêts privés.

Le peuple tient, dans nos institutions de la Ve République, une place plus importante qu’il n’en a jamais eu: dans leur exercice normal, aucune décision fondamentale ne peut se prendre sans lui. C’est tout le sens de l’élection du Président au suffrage universel direct et de la pratique référendaire, remise en vigueur depuis 1958. La plus haute fonction de l’État en France tire un prestige parti­culier, par rapport à la plupart des autres chefs d’État, de sa légitimation directe par le peuple. Mais les grands pouvoirs impartis au président de la République ne se concevaient pas, selon le général de Gaulle, sans un grand esprit de responsabilité.

Or progressivement, avec Valéry Giscard d’Estaing, François Mitterrand et Jacques Chirac, l’appétit du pouvoir l’a emporté sur l’éthique de responsabilité. Méfiance à l’égard du référendum, finasserie au sommet pour ne pas tenir compte des avertissements électoraux, acceptation de la cohabitation; peu à peu, le lien entre le président de la République et les Français s’est distendu. Pis encore, les derniers titulaires de la fonction ont complètement dénaturé l’esprit des institutions en confondant position institutionnelle et pouvoir personnel. Ils se sont crus au-dessus de tout alors que leur devoir suprême les obligeait, premiers entre tous, à être exemplaires.

Le général de Gaulle n’a jamais été naïf et la ruse a été d’ailleurs aussi l’une de ses armes pour gouverner, mais toujours au service de la France. Il n’a jamais abusé de sa situation pour se servir lui-même et sa droiture comme son intégrité, allant jusqu’à payer ses repas privés comme son électricité à l’Élysée, forçaient le respect de tous. À l’inverse, les règnes de François Mitterrand et de Jacques Chirac (il faut bien les appeler ainsi) ont décrédibilisé la fonction et affaibli les institutions. Ils faisaient croire, et c’est là le plus grave, que le pouvoir était sale et corrompu, contribuant ainsi au rejet de toute action politique.

Le régime des partis, chassé par la porte en 1958, rentré par la fenêtre quelques décennies plus tard, est également responsable de cette dérive. Le scrutin majoritaire à deux tours, le système de financement de la vie publique qui rend quasiment impossible l’émergence de nouvelles formations, la tentation du parti unique, à droite comme à gauche, ainsi que l’instauration du quinquennat, ont contribué à resserrer le cercle du pouvoir.

Le second mandat présidentiel chiraquien restera dans les annales comme celui d’un immense gâchis. D’un côté, la maîtrise de tous les pouvoirs (exécutif, Assemblée nationale, Sénat, principales villes, une majorité de régions et de départements), de l’autre l’incapacité à savoir quoi en faire! « Gagner oui, mais pour quoi faire? » Tel était le titre que j’avais donné aux cahiers programmatiques de « Debout la République » peu avant l’élection présidentielle de 2002. Quatre ans plus tard, cette question demeure sans réponse…

Reste donc l’appétit de pouvoir. Appétit qui vient en mangeant puisque, dès 2002, il en a fallu toujours plus pour combler ceux qui étaient en charge des affaires de la France.

Au lieu de s’appuyer intelligemment sur deux formations politiques (l’UDF et le RPR), vint cette fausse bonne idée de créer l’UMP. Jérôme Monod, conseiller du Président, se retrouva à la manœuvre, lui qui ne s’est jamais fait élire nulle part et n’avait de surcroît jamais vu un Français « de tous les jours » depuis trente ans!