Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/BOURGOGNE (Louis, duc DE), dauphin de France, petit-fils de Louis XIV, fils aîné du grand dauphin, père de Louis XV

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Administration du grand dictionnaire universel (2, part. 3p. 1131).

BOURGOGNE (Louis, duc de), dauphin de France, petit-fils de Louis XIV, fils aîné du grand dauphin, père de Louis XV, né en 1682, mort en 1712. Plein d’esprit et de pénétration, ce prince était né dur, opiniâtre, orgueilleux et d’humeur violente. Confié aux soins de Fénelon, Fleury et Beauvilliers, il se transforma d’une manière extraordinaire et devint, au témoignage de Saint-Simon et des contemporains, un modèle de vertu, de patience, de douceur et de piété. Plein de déférence envers ses précepteurs, il entra dans leurs projets de réformes aristocratiques et constitutionnelles tout à la fois (v. Fénelon). « Il se proposait, dit Saint-Simon, de partager le royaume en un certain nombre de parties égales, autant qu’il se pourrait, pour les richesses ; de faire administrer chacune par ses états ; de les simplifier tous extrêmement pour en bannir la cohue et le désordre, et, d’un extrait aussi fort simplifié de tous ces états des provinces, former quelquefois des états généraux du royaume. » C’est pour le duc de Bourgogne que Fénelon avait composé son Télémaque. Lorsque les querelles du quiétisme amenèrent la disgrâce et l’exil de l’archevêque de Cambrai, le jeune prince, qui lui portait une vive affection, se jeta, mais en vain, aux pieds de Louis XIV pour obtenir que son précepteur lui fût conservé. En 1697, le duc de Bourgogne épousa Adélaïde de Savoie, princesse qui devint, par sa grâce et par son esprit, l’enchantement de la cour du vieux roi. Il l’aima tendrement et constamment, bien que celle-ci, si l’on en croit Saint-Simon, n’ait pas donné des preuves d’une fidélité constante. Louis XIV donna à son petit-fils le commandement de l’armée de Flandre en 1702 et le nomma, l’année suivante, généralissime de l’armée d’Allemagne. Mis en 1708, avec le même titre, à la tête des armées de Flandre, après les défaites d’Hochstaedt et de Turin, le jeune prince se trouva en présence de Marlborough et du prince Eugène. Bien qu’il eût près de lui le duc de Vendôme, le duc de Bourgogne ne commit que des fautes et n’essuya que des revers. Sa timide circonspection amena la défaite d’Oudenarde et la prise de Lille. Il quitta l’armée pour n’y plus revenir, et retourna à la cour. Un de ses menins, Gamache, faisant allusion à l’excessive dévotion et aux pratiques minutieuses auxquelles ce prince se livrait, lui dit ces paroles connues: « Je ne sais si vous aurez le royaume du ciel ; mais, pour celui de la terre, le prince Eugène et Marlborough s’y prennent mieux que vous. » Devenu dauphin à la mort de son père (1711), il fut appelé dans les conseils par Louis XIV, s’instruisit sur l’état du royaume, vit les maux et chercha les remèdes pour les appliquer quand il serait sur le trône. « Un roi est fait pour ses sujets, et non les sujets pour le roi, » dit-il un jour à Marly devant Louis XIV, qui professait la maxime diamétralement opposée. Cette parole, inspirée par Fénelon, donne une idée du caractère et des tendances du duc de Bourgogne. Il était l’espoir de tout un parti à la cour, lorsqu’il mourut, subitement enlevé par une rougeole pourprée, moins d’un an après la mort de son père et six jours après celle de sa femme, Marie-Adélaïde. Un de ses fils mourut également trois semaines plus tard et de la même maladie. On soupçonna, mais sans doute à tort, le duc d’Orléans de n’avoir pas été étranger à ces catastrophes multipliées.