Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/MARIE TUDOR, reine d’Angleterre, fille de Henri VIII et de Catherine d’Aragon

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Administration du grand dictionnaire universel (10, part. 4p. 1194-1195).

à vue et dont on instruisit le procès. « On ne vit bientôt dans Londres que des potences et des échafauds, » dit le P. Griffet, un des apologistes de Marie la Sanglante.

Le 25 juillet de la même année, la reine épousait à Winchester Philippe d’Espagne, et faisait quelques jours après avec lui son entrée solennelle à Londres, au milieu d’un silence glacial. Ayant vécu jusque-là dans le célibat, Marie, qui avait trente-huit ans, se prit d’une vive passion pour son jeune époux et se montra d’une extrême jalousie, au point de ne pouvoir dissimuler sa colère lorsqu’il adressait à une femme quelques paroles flatteuses.

L’acte le plus important qui suivit de près ce mariage fut la réconciliation officielle de l’Angleterre avec la cour de Rome. Marie avait été secondée dans la réalisation de ce projet, formé depuis longtemps par elle, par l’empereur Charles-Quint et par Philippe. Quant aux formalités et aux stipulations de cette réconciliation, elles furent l’œuvre du cardinal Pole, légat du pape en cette occasion. Elles furent aussi l’occasion de quelques amnisties conseillées par Philippe, et qui rendirent à la liberté plusieurs centaines de prisonniers politiques ; mais ce fut bientôt le Parlement qui réagit contre ce système de douceur et rendit des ordonnances sévères contre les protestants. Il alla si loin dans cette voie que les évêques catholiques eux-mêmes s’en émurent et durent le modérer. Le Parlement, par cette vile complaisance aux désirs de Marie Tudor, espérait se faire pardonner de n’avoir pas consenti au couronnement de Philippe ; il n’y réussit pas et fut dissous le 16 janvier 1555.

La volonté formelle de Marie Tudor de rétablir la religion romaine dans toute l’Angleterre, malgré l’engagement pris par elle en montant sur le trône, son mariage avec un prince fanatique et cruel, lui firent commettre un nombre considérable d’atrocités. Pendant quatre années, du 4 février 1555 au 10 novembre 1558, l’Angleterre subit une épouvantable terreur religieuse, et, d’après la tradition populaire, sous le règne de Marie Tudor il y eut plus de sang versé par la hache du bourreau que par le fer des soldats. Les plus illustres têtes furent immolées à sa folie religieuse. Le fouet, la prison, les amendes, surtout les bûchers, furent les moyens que la reine fanatique employa pour jeter l’épouvante dans tout le royaume. Une femme condamnée au feu pour crime d’hérésie accoucha sur le bûcher ; le magistrat présent au supplice prit l’enfant et le jeta vivant dans les flammes ; le jury acquitta un jour un prévenu ; cet acquittement déplut à la reine et tous lès jurés furent jetés en prison.

Au milieu de la stupeur générale, on fit courir le bruit de la grossesse de la reine ; elle—même y croyait quand elle s’aperçut qu’elle avait simplement un commencement d’hydropisie ; elle tomba dans une profonde tristesse. Ce chagrin s’accrut bientôt de celui que lui causa le départ de son mari qui, averti de l’abdication prochaine de Charles-Quint, jugea à propos de retourner en Espagne pour y attendre cet événement. Il y avait à peine un an qu’ils étaient mariés, et Philippe était loin de quitter l’Angleterre et sa femme avec regret (sept. 1555).

Bientôt après, en 1556, une nouvelle conspiration s’organisa, dans laquelle se trouvait mêlé le nom d’Élisabeth. Cette conspiration avorta comme la première, et comme elle ne servit qu’à accroître le nombre des supplices. L’un des actes les plus reprochés à ce règne fut la condamnation, suivie d’exécution, du vénérable archevêque de Cantorbéry, Crammer, homme de bien que l’on a appelé non sans raison le Mélanchthon de l’Angleterre. La haine de Marie Tudor contre lui avait une cause cependant, une cause doublement juste aux yeux de la vindicative princesse : Crammer avait été l’un des agents de la rupture du mariage de Catherine d’Aragon avec Henri VIII, et de la séparation de l’Angleterre avec le saint-siége. Il mourut courageusement sur le bûcher, où il fut suivi par deux femmes, un prêtre, un gentilhomme et trois artisans, dont le crime était de ne pas assister aux offices du culte catholique romain.

L’histoire elle-même, par dégoût, est forcée de détourner ses regards du triste et sanglant spectacle de l’Angleterre dominée par ce Néron femelle, dont le fanatisme épuisait le royaume, l’écrasait d’impôts et le couvrait de bûchers, de potences et d’échafauds. « Sa personne, dit Hume, était dignement assortie à son caractère : entêtée, superstitieuse, violente, cruelle, maligne, vindicative, tyrannique, tous ses penchants et toutes ses actions portaient l’empreinte de son mauvais esprit. Au milieu de tous les vices qui composaient la trempe de son âme, à peine peut-on trouver quelque vertu, si ce n’est la sincérité. »

En 1557, son mari, devenu roi d’Espagne sous le nom de Philippe II, fit un voyage en Angleterre et la détermina sans peine à déclarer la guerre à la France. Cette guerre impolitique hâta la conclusion du mariage de Marie Stuart, reine d’Écosse, avec le dauphin François, fils de Henri II, et « en moins de trois semaines, dit le P. Fabre, les Anglais perdirent tout ce qu’ils avaient conservé en France de leurs anciennes conquêtes. » Calais leur fut enlevé par le duc de Guise, ce qui fut pour Marie Tudor un coup mortel. « Que l’on m’ouvre le cœur, dit-elle en apprenant cette nouvelle, on y trouvera Calais. »

Cotte humiliation, jointe à l’abandon de son époux, au mépris, à la haine dont elle se sentait environnée, détermina chez elle une maladie de langueur qui en peu de temps la conduisit au tombeau. Elle expira dans la cinquième année de son règne, et les prêtres catholiques seuls la regrettèrent ; l’histoire maudit sa mémoire.

Comme elle n’avait pas d’enfants, sa mort ouvrit l’accès du trône à la jeune princesse Élisabeth, qui allait être une des plus grandes gloires de l’Angleterre.

Marie Tudor, drame en trois journées, en prose, de Victor Hugo (théâtre de la Porte-Saint-Martin, 6 novembre 1833). Ce drame émouvant, plein de situations neuves et écrit d’un style vigoureux, est peu conforme à l’histoire ; le cadre seul appartient à la réalité, ce qui a permis à V. Hugo toujours poète, même en prose, de faire le plus effrayant tableau des discordes civiles en Angleterre. Marie la Catholique, Marie la Sanglante a un amant, un lâche favori italien, Fabiano Fabiani ; cette monstruosité suffirait pour faire voir que V. Hugo n’a pas voulu nous donner une Marie Tudor historique ; tout son drame est basé là-dessus. Les seigneurs, en un langage virulent, font entre eux le procès du favori, qui s’est enrichi des dépouilles de toute l’Angleterre, qui s’est fait donner un tas de vicomtés et de pairies, s’appelle maintenant lord Clambrassil et vient de recevoir l’ordre de la Jarretière. Ils cherchent par quel moyen ils pourraient le renverser, et maître Simon Renard, l’adroit envoyé du roi d’Espagne Philippe II, la seule physionomie qui soit esquissée conformément aux données historiques, fait bon profit de leur conversation. Il veut marier la reine d’Angleterre au roi son maître et se prépare à jouer dans les intrigues qu’il prévoit un rôle prépondérant.

Fabiano prépare lui-même sa ruine ; il a une maîtresse pour laquelle il délaisse Marie Tudor, une fille du peuple, élevée par l’ouvrier ciseleur Gilbert, qui se propose de l’épouser et qui la croit toujours pure. Mais Jane, enfant abandonnée qu’il a recueillie une nuit qu’on se tuait dans les rues de Londres, ne répond à son amour que par de la reconnaissance. Elle aime ce galant seigneur, si bien vêtu, aux paroles si recherchées, qui un jour, est venu faire ciseler par Gilbert un pommeau d’épée et a trouvé la jeune fille tout à fait à son goût. Fabiano a son plan du reste, car il sait qui est la jeune fille : c’est l’héritière des Talbot, dont la reine lui a donné les domaines confisqués ; et il se réserve ainsi soit d’annuler l’héritière en la déshonorant, soit au pis aller de la prendre pour femme, en cas de revers de fortune, pour conserver les biens. Ce plan ingénieux, qu’il croit être seul à connaître, un vieux juif qu’il rencontre en sortant de la maison de Gilbert le lui raconte absolument comme s’il lisait à livre ouvert dans sa conscience : « … Vous êtes le favori de la reine, mylord. La reine vous a donné la Jarretière, le comté, la seigneurie. Choses creuses que tout cela. La Jarretière, c’est un chiffon ; le comté, c’est un mot ; la seigneurie, c’est le droit d’avoir la tête tranchée. Il vous fallait mieux. Il vous fallait, my lord, de bonnes terres, de bons bailliages, de bons châteaux et de bons revenus en bonnes livres sterling. Or, le roi Henri VIII avait confisqué les biens de lord Talbot, décapité il y a seize ans. Vous vous êtes fait donner par la reine Marie les biens de lord Talbot. Mais, pour que la donation fût valable, il fallait que lord Talbot fût mort sans postérité… Vous étiez assez tranquille de ce côté. Lord Talbot n’avait jamais eu qu’une fille, qui avait disparu de son berceau à l’époque de l’exécution de son père, et que toute l’Angleterre croyait morte. Mais vos espions ont découvert dernièrement que dans la nuit où lord Talbot et son parti furent exterminés par Henri VIII, un enfant avait été mystérieusement déposé chez un ouvrier ciseleur du pont de Londres, et qu’il était probable que cet enfant, élevé sous le nom de Jane, était Jane Talbot, la petite fille disparue. Les preuves écrites manquaient, il est vrai, mais tous les jours on pouvait les retrouver. L’incident était fâcheux. Se voir peut-être forcé un jour de rendre à une petite fille Shrewsbury, Woxford qui est une belle ville, et le magnifique comté de Waterford ! C’est dur. Comment faire ? Vous avez cherché un moyen de détruire et d’annuler la jeune fille. Un honnête homme l’eût fait empoisonner ou assassiner. Vous avez mieux fait, vous l’avez déshonorée… Un autre eût pris la vie à la jeune fille, vous lui avez pris l’honneur, et par conséquent l’avenir. » Et le juif, qui, au bout du compte, se soucie beaucoup plus de l’argent que de la morale, propose à Fabiano de lui vendre, pour une somme assez ronde, tous les papiers concernant la filiation de Jane. Comme il les a sur lui, Fabiano trouve plus expéditif de tuer le juif, et, le poignard sur la gorge, il force Gilbert, qui vient à passer, à jeter avec lui le cadavre dans la Tamise. Mais au retour de l’expédition, comme il se propose d’entrer chez Jane, et qu’il montre à Gilbert la clef que lui a donnée sa maîtresse, le pauvre diable tombe du haut de toutes ses illusions ; il voit que Jane est perdue pour lui. Le juif avait réussi à jeter les papiers loin de lui et c’est Gilbert qui les a ramassés ; il apprend ainsi que Jane est l’héritière des Talbot, mais il lui faut avant-tout se venger de Fabiano. 11 va servir d’instrument entre les mains de Simon Renard et des seigneurs coalisés. Marie Tudor, avertie par eux des trahisons de son favori, veut faire tomber sa tête ; elle n’aurait pas besoin de prétexte, mais elle veut une condamnation en règle. On imagine alors de faire commettre à Gilbert une tentative d’assassinat sur la reine, et il dénonce Fabiano comme son complice. L’aventurier est condamné ; cependant Marie hésite à le faire exécuter ; après beaucoup de tergiversations, elle se décide à lui fournir les moyens de s’évader, et comme son exécution a été annoncée au peuple qui s’en réjouit, qu’il faut donner satisfaction à cette attente prolongée des masses qui vont s’insurger, c’est Gilbert qui, couvert du voile noir des parricides, sera décapité à sa place. D’un autre côté, Jane et les seigneurs favorisent l’évasion de Gilbert, et tout le pathétique du troisième acte gît dans l’incertitude où sont les principaux personnages et le public lui-même sur la personnalité de l’homme qui va être conduit au supplice. Le fond de la scène s’ouvre et, en présence de Marie et de Jane, toutes deux anxieuses, le cortège funèbre défile : le condamné parait, mais il est impossible de savoir si c’est Gilbert ou Fabiano. La reine, qui se fie à sa toute-puissance et croit que ses ordres ont été exécutés, essaye de consoler Jane : « Ris donc, Jane, s’écrie-t-elle, rions toutes deux. Oh ! c’est charmant ! Jane ! tu trembles pour Fabiano, sois tranquille ! et ris avec moi, te dis-je ! Jane ! l’homme qu’ils ont, l’homme qui va mourir, l’homme qu’ils prennent pour Fabiano, ce n’est pas Fabiano, c’est l’autre, tu sais bien, un ouvrier, cet homme, ce Gilbert… ; on l’a mis à la place de Fabiano sous le voile noir. C’est une exécution de nuit. Le peuple n’y verra rien. »

Et Jane, qui croyait Gilbert évadé de la Tour et sauvé, sauvé par elle, après avoir pardonné ; Jane qui attendait, impatiente, que le peuple n’entourât plus la prison, tombe anéantie et crie grâce. Il lui reste un doute pourtant, elle ne croit pas que celui qui va mourir soit Gilbert. C’est à la reine de trembler maintenant ; elle sait que Simon Renard, la noblesse et le peuple, tout conspire contre elle, que tous demandaient la mort de Fabiano, et elle craint à son tour une substitution. Elle veut donner l’ordre de suspendre le supplice ; mais la grosse cloche de la Tour de Londres s’arrête et l’on entend un coup de canon dans le lointain ; il annonce que le condamné monte sur l’échafaud ; un second coup de canon succède au premier, c’est que le condamné s’agenouille ; un troisième coup se fait entendre ; il n’y en a plus qu’un de vivant…, et c’est Gilbert. « Qui a osé ?… s’écrie la reine. — Moi, lui répond Simon Renard ; j’ai sauvé la reine et l’Angleterre. »

Ce drame haletant n’est pas à l’abri de tout reproche, et il a subi de la part de Gustave Planche d’assez rudes critiques qui ne sont pas toutes imméritées. La plus sérieuse qu’on puisse lui adresser, c’est que la vérité historique y est trop dédaignée, que la Marie Tudor de fantaisie est absolument étrangère à celle des chroniqueurs, et, comme forme, que la déclamation et l’emphase y sont plus marquées que dans toute autre œuvre dramatique de V. Hugo. Mais abstraction faite de ces défauts, qui sont capitaux il est vrai, c’est encore une œuvre éminente et dont les bonnes parties sont dignes du maître.


MARIE-BÉATRIX-ÉLÉONORE D’ESTE, reine d’Angleterre, née en 1658, morte à Saint-Germain-en-Laye en 1718. Elle était fille du duc de Modène Alphonse IV et de Marie-Laure Mancini, nièce du cardinal Mazarin. À l’âge de quinze ans, elle épousa à Londres le duc d’York, frère cadet du roi Charles II (1673), gagna par sa beauté, par son esprit, par la pureté de ses mœurs, l’affection et l’estime de son mari, et, lorsque celui-ci fut devenu roi sous le nom de Jacques II, elle usa de toute son influence pour le pousser à restaurer la religion catholique. Après avoir eu quatre enfants morts en bas âge, elle venait d’avoir un fils qui reçut le titre de prince de Galles, lorsque le prince d’Orange débarqua en Angleterre pour détrôner Jacques II (1688). À cette nouvelle, le roi confia sa femme et son fils au duc de Lauzun, alors à Londres, et le chargea de les conduire en France. Louis XIV accueillit avec de grands honneurs la reine déchue, lui fit une pension de 600,000 livres et l’installa au château de Saint-Germain, où elle termina sa vie, après avoir été témoin des efforts impuissants faits par son fils pour ressaisir la couronne d’Angleterre.


MARIE, reine d’Angleterre, fille de Jacques II et de sa première femme, Anne Hyde. née en 1662, morte en 1695. Elle épousa à quinze ans, en 1677, son cousin le prince d’Orange (depuis Guillaume III), malgré la répugnance que son père éprouvait pour ce mariage. La jeune et belle princesse suivit en Hollande son mari, qui, malgré son caractère froid et taciturne, lui inspira une vive passion, et dont elle sut, au bout d’un certain temps, se faire tendrement aimer. Guillaume avait craint que sa femme, appelée à régner un jour sur l’Angleterre, ne lui réservât dans le gouvernement une place secondaire. Mais à peine Marie avait-elle entrevu ces craintes, qu’elle s’était empressée de rassurer Guillaume. « Je vous jure, lui dit-elle, que vous serez toujours le maître ; je ne vous demande qu’une chose en retour, c’est que, de même que j’observerai le précepte qui commande à la femme d’obéir à son mari, de même vous suivrez celui qui ordonne au mari d’aimer sa femme. » À partir de ce moment, l’union la plus parfaite régna entre les deux époux, et le dévouement que Marie montra à Guillaume fut tel qu’elle n’hésita point a oublier ses devoirs de fille pour seconder la politique de son mari lorsque, en 1688, il renversa Jacques II du trône. Conformément à ses désirs, le Parlement décida que Guillaume et Marie seraient roi et reine d’Angleterre, que la couronne leur appartiendrait en commun pendant leur vie et serait réversible au dernier survivant ; mais que, pendant sa vie, Guillaume dirigerait seul le pouvoir (1689). En entrant dans le palais d’où son père venait d’être chassé, Marie témoigna une joie qui devint le sujet d’une foule de satires grossières et qui l’abaissa dans l’estime publique. Pendant que Guillaume réprimait la révolte d’Irlande (1690), elle fut chargée du soin du gouvernement, déploya une grande fermeté contre les menées des catholiques et rompit avec sa sœur Anne qui, entièrement dirigée par Marlborough, devenait plus qu’un embarras pour le nouveau gouvernement. En 1695, elle mourut de la petite vérole, et sa mort causa la plus vive douleur au roi Guillaume qui, pour perpétuer sa mémoire, fit construire à Greenwich l’hôtel des marins invalides, dont Marie avait conçu le projet.


MARIE DE LORRAINE, reine d’Écosse, fille de Claude, duc de Guise, née en 1515, morte en 1560. Devenue veuve, à vingt ans, de Louis II d’Orléans (1535), elle se remaria avec Jacques V, roi d’Écosse (1538), qui la rendit mère de Marie Stuart. En 1542, elle devint veuve et fut nommée régente. Dominée par les Guises, ses frères, elle persécuta les partisans de la Réforme, promulgua, à l’instigation de Nicolas de Pellevé, évêque d’Amiens, son principal conseiller, l’édit de 1559 contre les protestants, et souleva le peuple par cette mesure. Dépouillée de la régence, sur la proposition du fameux Knox, dans une assemblée de pairs et de barons (1559), elle appela à son secours des troupes de France et mourut à Édimbourg au moment où une armée anglaise, envoyée par Élisabeth, venait défendre les protestants et mettre le siège devant cette ville.


MARIE STUART, reine de France, puis reine d’Écosse, fille de Jacques V, roi d’Écosse, et de Marie de Guise, née à Linlithgow le 8 décembre 1542, morte décapitée à Fotheringay le 8 février 1587. « On aura beau dire tout ce qu’on voudra, maint noble cœur prendra parti pour Marie Stuart, même quand tout ce qu’on a dit d’elle serait vrai. » Ces paroles de Walter Scott, dans l’Abbé, résument assez bien le sentiment public resté toujours favorable à la victime d’Élisabeth, malgré la lumière que la critique moderne a portée sur ses machinations et sur ses crimes. Le 14 décembre 1542, Jacques V succombait à la douleur que venait de lui faire éprouver la honteuse déroute de Fala, déroute causée par l’abandon des seigneurs écossais qui, en haine de la royauté, avaient tourné bride devant une poignée d’Anglais. Huit jours auparavant, il avait appris que la reine, Marie de Guise, venait de lui donner une fille, et, plein de pressentiments funestes sur l’avenir de cette couronne d’Écosse qu’une petite-fille de Robert Bruce avait apportée dans la maison des Stuarts, il s’était écrié : « Par fille elle est venue, par fille elle s’en ira. » Aussitôt Jacques V enseveli, Knox et Wishart rendirent plus factieuses leurs prédications et Henri VIII, voulant profiter des troubles inséparables d’une minorité, reprit ses anciens projets de conquête. Sa mort, survenue en 1547, apporta à l’Écosse un moment de répit, mais Édouard VI reprit son œuvre, et les Écossais, vaincus à Pinkey, allaient subir la loi du plus fort, lorsque le régent, comte d’Arran, invoqua la protection de la France ; la flotte française tint les Anglais en respect et, pour cimenter l’union des deux couronnes, le mariage de Marie Stuart avec le fils aîné de Henri II, François, fut décidé (1548). La jeune princesse n’avait pas dix ans et le dauphin était encore plus jeune. Amenée aussitôt en France, elle fut conduite au château de Saint-Germain, résidence habituelle de la cour, où le roi la fit élever comme sa propre fille. Elle avait de plus, dans ses oncles de Guise, des alliés naturels tout-puissants. À quinze ans, elle commençait à être douée de cette puissance de séduction qui fit le charme et le malheur de sa vie. Pendant que sa mère soutenait une lutte énergique contre la féodalité écossaise et s’emparait de la régence, dont elle compromettait l’autorité par une trop grande condescendance pour ses alliés français, Marie Stuart commençait à briller à la cour de Henri II. La mort du roi et l’avènement du dauphin, sous le nom de François II, la placèrent, pour un an, sur le trône de France. « Elle était, dit M. Mignet, grande et belle. Ses yeux respiraient l’esprit et resplendissaient d’éclat. Elle avait les mains les mieux tournées du monde, sa voix était douce,