Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Marguerite Lindsay, roman du poëte écossais Allan Cuningham

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Administration du grand dictionnaire universel (10, part. 4p. 1172).

Marguerite Lindsay, roman du poëte écossais Allan Cuningham (1825). M. de Barante n’a pas dédaigné de faire une préface pour cette œuvre d’un simple tailleur de pierre qui sentit ses instincts poétiques se développer au milieu de ses travaux manuels, et dont les chansons puis les romans devinrent vite populaires. La préface est une excellente notice biographique, qui nous initie aux inspirations toutes spontanées d’un ouvrier heureusement doué ; le roman en lui-même est un des tableaux les mieux tracés des mœurs de la classe pauvre, à laquelle Allan Cuningham appartenait. L’héroïne est la fille d’un ouvrier imprimeur qui habite Édimbourg. Le travail du père suffit amplement pour entretenir sa femme Alice et ses enfants, Marguerite, Esther qui est aveugle, et Mariou, une pauvre idiote. Seul, son fils Laurent, le marin, n’est pas à sa charge. Ce ménage était un modèle, lorsque tout à coup le père se met à négliger son travail et sa famille ; il prend une maîtresse, s’érige en réformateur politique et religieux. De ce moment datent les malheurs des Lindsay et les épreuves de Marguerite. Grâce à son dévouement, son mari sort de prison ; mais il délaisse les siens pour suivre sa maîtresse. Privée de ressources, la pauvre famille est obligée d’abandonner la maison où s’étaient écoulés tant de jours paisibles. Marguerite ouvre une école, mais elle ne peut réussir à la faire prospérer. Elle se réfugie dans une famille riche qu’elle est obligée de fuir, le fils de la maison s’étant épris sérieusement d’elle. Un vieil oncle avare et impie l’abrite à son tour ; elle le réconcilie avec le ciel et le change si totalement, qu’il l’institue son héritière. Voilà Marguerite devenue riche ; mais le malheur ne se lasse pas de la poursuivre : son mari est mort, et elle épouse en secondes noces un jeune et brillant cavalier ; quelques jours après l’union, elle apprend qu’il est déjà marié et père de famille, de la bouche même d’Anna Blantyre, sa première femme. Ludovic Oswald, voyant son infamie découverte, s’enfuit, et Marguerite adoucit les derniers moments d’Anna, minée par la misère. Elle sert de mère au fils de sa rivale. Tant de dévouement mérite une récompense : Marguerite retrouve son second mari corrigé et repentant, et elle, qui avait si bien rempli ses devoirs envers ses parents, devient à son tour l’objet de la plus tendre affection de ses enfants.

Ce roman, reproduit dans notre langue par une plume exercée, est plein de l’intérêt qu’éveillent des situations naturelles, rendues plus touchantes par le charme du style, par la vérité des sentiments, par la peinture réelle des scènes de la vie intime.