Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Ormond (jacques butler, duc d’) 1610

La bibliothèque libre.
Administration du grand dictionnaire universel (11, part. 4p. 1487).


ORMOND (Jacques Butler, due d’), homme d’État anglais, né à Londres en 1610, mort en 1683. Il appartenait à une ancienne famille irlandaise qui descendait, dit-on, des ducs de Normandie. Tout jeune encore, il perdit son père, fut élevé sous les yeux d’Abbot, archevêque de Canterbury, parut à la cour avec le titre de vicomte de Thurles, épousa, en 1629, sa cousine Elisabeth t’reston, et devint, en 1632, comte d’Ormond et pair d’Irlande par suite de la mort de son grand-père. Il vivait dans les terres qu’il possédait en Irlande, lorsque éclata dans co pays la rébellion de 1G40. Charles le qui avait entendu parler de

!a fermeté et des hautes capacités du jeune

comte, le nomma alors lieutenant général et le mit à la tète d’un corps de 3,000 hommes pour comprimer les efforts des rebelles. D’Ormond, avec des forces aussi faibles, battit néanmoins les insurgés h. Naas, près de Bublin, à Kilrush, à Ross, et reçut des remereîments publics du Long Parlement et du roi, qui lui donna le titre de marquis. En 1643, il remporta une nouvelle victoire sur le général Preston, mais ne recevant point de secours, contrarié dans ses opérations par le vice-roi, par les lords juges du royaume, ayant d’un autre côté, en face do lui, un ennemi dont lo nombre croissait sans cesse, il se vit réduit, cette même année, à signer un armistice, qui fut mal accueilli du gouvernement. Néanmoins, Charles Ier, reconnaissant que le marquis d’Ormond avait cédé à une impérieuse nécessité, le nomma vice-roi d’Irlande en remplacement de Leicester (1044). Pendant trois ans, avec une inébranlable énergie, il soutint une lutte opiniâtre contre la rébellion et s’efforça de retenir l’Irlande dans l’obéissance, tout en montrant au milieu des fureurs des factions uno modération inaltérable. Mais lorsque le roi vaincu eut été conduit prisonnier à Hampton-Court, voyant l’impossibilité de résister plus longtemps, il résigna ses fonctions entre les mains des commissaires du Parlement, alla rendr^compte de sa conduite à Charles Ier et, ne se trouvant plus en sûreté, alla chercher un refuge en Fiance (1G47).

Il était depuis un an à peino dans ce pays lorsque, à l’appel des royalistes, il retourna en Irlande et rejoignit O’Neil. La nouvelle de l’exécution du roi (30 janvier 1649), le refus que fit le prince de Galles de venir se mettre à la tête de ses partisans n’empêchèrent point le marquis d’Ormond de faire proclamer co dernier roi sous le nom de Charles II et de marcher sur Bublin pour s’en emparer. Mais l’arrivée de Cromwell et la défection d’O’Neil firent échouer cette entreprise et il dut retourner en France (1650). Il rejoignit alors Charles II, devint son plus sago conseiller, remplit dans son intérêt plusieurs missions secrètes et revint avec lui en Angleterre à l’époque de la restauration (1660).

Nommé duc, grand maître de la maison du roi, comblé d’honneurs de tout genre, d’Ormond fut appelé, en 1662, à la vice-royauïé d’Irlande, pour rétablir la tranquillité dans ce pays. Il s’acquitta de cette tâche avec sa sagesse et sa fermeté habituelles et s’attacha à développer la prospérité industrielle et commerciale de l’île. Malgré ses services, 13uckingham, irrité de l’attachement qu’il montrait à Clarendon, lui fit ôter sa vice-royauté en 1669. Cette même année, il fut nommé chancelier de l’université d’Oxford. L’année suivante, se trouvant h. Londres, il faillit périr dans un guet-apens odieux que lui dressa le colonel Blood, qu’il avait fait emprisonner en Irlande pour avoir voulu s’emparer du château de Bublin. Blood, soutenu par Buckingham, ne fut point inquiété, et Charles II pria d’Ormond d’oublier l’insulte qu’il avait reçue. « Puisque le roi peut pardonner à Blood d’avoir tenté de lui arracher la couronne, lui répondit le duo, jo puis à mon tour lui pardonner aisément d’avoir attenté à ma vie, et j’obéirai aux désirs de Sa Majesté sans m’informer de ses motifs. • Depuis sept ans, il était complètement tombé en disgrâce, lorsque, par l’intervention du duc d’York, d’Ormond fut de nouveau nommé vice-roi d’Irlande (1076). À l’avènement de Jacques II, il fut remplacé dans son gouvernement par Talbot et passa les dernières années de sa vie éloigné de la cour. Homme d’État éminent, général habile, administrateur intégre et éclairé, éloquent, instruit, il se montra attaché à la royauté sans jamais descendre au rôle de courtisan, fit entendre au roi des conseils sévères chaque fois qu’il lui parut agir contre les intérêts du pays, ne ménagea ni les maitresses, ni les favoris, su lit estimer des républicains qu’il combattait et mérita par l’élévation de son caractère le surnom da Grand Ormouil, que lui donnèrent ses compatriotes.