Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/ROBERT D’ANJOU, dit le Sage ou le Bon, roi de Naples

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Administration du grand dictionnaire universel (13, part. 4p. 1250).

ROBERT D’ANJOU, dit le Sage ou le Bon, roi de Naples, né vers 1275, mort en 1343. Troisième fils de Charles II le Boiteux, il ne paraissait point appelé à monter sur le trône ; mais il sut gagner la protection du pape Clément V et supplanter son neveu Charobert, dont les droits étaient cependant mieux établis que les siens. Ce prince, dénué de l’esprit militaire, mais habile dans les négociations, actif et adroit, devint en quelque sorte l’arbitre de l’Italie. Avec la faveur de la cour de Rome, il eut, dès le commencement de son règne, la seigneurie d’un grand nombre de villes du Piémont et le vicariat de Ferrare et de la Romagne ; les villes guelfes de Toscane s’allièrent à lui ; Gênes l’appela contre les Gibelins lombards (1318) et l’Italie presque entière se prépara, sous sa direction, à résister à l’empereur d’Allemagne, Henri VII ; cette lutte se prolongea longtemps après la mort de ce dernier, sous son successeur Louis de Bavière. Mais le caractère de Robert influa sur cette guerre, qui se poursuivit sans qu’une grande bataille fût livrée. Toute la politique du roi de Naples consistait à susciter des ennemis au souverain allemand sans jamais compromettre ses forces dans une action décisive, à préserver habilement ses États de la guerre, tandis qu’il la maintenait allumée dans tout le reste de l’Italie. Il essaya, à deux reprises, de conquérir la Sicile (1314 et 1325) ; mais, autant il montrait d’adresse diplomatique dans ses négociations, autant il était malheureux dans ses expéditions militaires, et ses deux tentatives demeurèrent sans résultat. Dans sa première expédition en Sicile, il entreprit en personne de faire le siège de Trapani ; mais, après avoir perdu la moitié de son armée et trente galères, dépensé des sommes énormes, il dut battre en retraite. Dans la seconde, il donna le commandement à son fils Charles, duc de Calabre, qui ravagea les campagnes et dut se retirer sans avoir obtenu aucun avantage réel. Pendant quelques années, il habita Avignon, auprès du pape Jean XXII, qu’il avait fait élire et qui devint sa créature. Il retourna en Italie en 1324. Quatre ans plus tard, il vit mourir son fils unique, le duc de Calabre, et en éprouva une vive affliction, car il voyait s’évanouir tous les projets ambitieux qu’il avait formés pour sa race. « Bientôt, dit Sismondi, son administration parut se ressentir de son découragement. Sacrifiant l’ambition à l’avarice, il mécontenta les officiers et les soldats en retenant leur paye, et il perdit, par cette épargne imprudente, plusieurs des villes qu’il possédait en Piémont. Dans le royaume de Naples, il ne contenait plus d’une main ferme la turbulence de ses sujets, et des guerres civiles, excitées par les querelles de sa noblesse, désolaient les provinces. » En 1333, il fit épouser à sa petite-fille Jeanne, qui devait lui succéder, André, fils de Charobert, roi de Hongrie, le neveu qu’il avait dépossédé. Ce prince était éclairé et se montra le protecteur des lettres ; Pétrarque et Boccace s’honorèrent de son amitié. Lui-même composa des écrits en latin et en italien ; ses poésies toscanes ont été publiées par Ubaldinï (Rome, 1642).