Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/abaque s. m. (supplément)

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Administration du grand dictionnaire universel (16, part. 1p. 9).

* ABAQUE s. m. — Encycl. Archit. L’abaque joue un grand rôle dans les monuments du moyen âge. Il est généralement biseauté dans les chapiteaux de l’époque romane primitive et affecte en projection horizontale la forme carrée, suivant le lit inférieur du sommier de l’arc qu’il supporte. Dans les constructions du xiie siècle, ou le trouve souvent décoré d’ornements et de moulures simples, surtout dans l’Ile-de-France, la Normandie, la Champagne, la Bourgogne et les provinces méridionales. Son plan reste encore carré pendant la première moitié du xiiie siècle, mais il ne porte plus pour décoration que des profils qui débordent toujours les feuillages et les ornements du chapiteau. Vers le milieu du xiiie siècle, lorsque les arcs sont refouillés de moulures accentuées qui présentent en coupe des saillies comprises dans des polygones, ces formes nouvelles sont inscrites dans les abaques, et les feuillages des chapiteaux débordent la saillie des tailloirs, comme on le remarque dans l’église de Semur-en-Auxois et dans la cathédrale de Nevers.

Dans les édifices de la Normandie, on rencontre souvent des abaques circulaires ; ils commencent à apparaître vers le milieu du xiiie siècle, à la cathédrale de Coutances, à Bayeux, à Eu, au Mont-Saint-Michel. Vers la fin du même siècle, ce membre d’architecture perdit de son importance et disparut à peu près complètement pendant le xve siècle, pour renaître au commencement du xvie.

Pendant toute la période romane et la première moitié du xiiie siècle, les abaques ne forment pas un tout avec les chapiteaux ; ils sont tirés d’une autre assise de pierre ; mais, depuis le milieu de ce même siècle jusqu’à la Renaissance, ils sont pris le plus souvent dans l’assise même du chapiteau.

« Le rapport, dit M. Viollet-le-Duc, auquel nous empruntons les éléments de cet article (Dictionnaire raisonné de l’architecture française du xi}e au xvie siècle), le rapport entre la hauteur du profil de l’abaque et le chapiteau, entre la saillie et le galbe de ses moulures et la disposition des feuillages ou ornements, est fort important à observer ; car ces rapports et le caractère de ces moulures se modifient, non-seulement suivant les progrès de l’architecture du moyen âge, mais aussi selon la place qu’occupent les chapiteaux. Au xiiie siècle, principalement, les abaques sont plus ou moins épais et leurs profils sont plus ou moins compliqués, suivant que les chapiteaux sont placés plus ou moins près du sol. Dans les parties élevées des édifices, les abaques sont très-épais, largement profilés, tandis que dans les parties basses ils sont plus minces et finement moulurés. »