Histoire de Servian/Chapitre12

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CHAPITRE XII



La population de Servian
pendant la guerre de 100 ans


La diminution des feux

Quelques années après la guerre des Albigeois, Servian s’était relevé de ses ruines. L’établissement de la commune, le partage des biens seigneuriaux et leur mise en valeur avaient ramené la prospérité dans le pays. Mais bientôt la guerre avec l’Angleterre s’était déclarée. Dès lors, les invasions anglaises dans le Languedoc apportent l’insécurité. D’autre part, les grandes compagnies traversent le pays et le troublent. Pour remédier à ces maux, les impôts s’accroissent, les populations affolées s’enfuient sur les terres libres.

Pendant la guerre de 100 ans, la population du Languedoc fut très réduite. En 1362, elle comptait, dans les trois sénéchaussées, 46.000 feux. Au dénombrement de 1366, elle ne fut plus que de 22.400 feux. (Bull. archéol. de Béziers, T. 7, p. 15). Cependant les habitants de Servian remplirent leur devoir ; pour payer la rançon du roi Jean, la Sénéchaussée de Carcassonne s’impose pour le dixième de son revenu. Dans l’assemblée de 1360, la viguerie de Béziers figure à sa place et Servian y est représenté par André d’Albiguis.

Les impôts croissants avaient alarmé les populations. Déjà le 1er juillet 1347, les consuls de Servian avaient adressé une requête à Jean de Folleville, chevalier du roi, pour exposer leur misère (la réduction des feux à cause de la mortalité, des guerres et des pestes, font que les habitants ne peuvent supporter ni payer les charges, aussi la plus grande partie est convenue de laisser le lieu de Servian rendu inhabitable, à cause de la mortalité ; un grand nombre d’hommes sont dans l’indigence). C’était la période des pestes signalées dans l’histoire. Ces considérations arrivèrent-elles jusqu’au roi ? on peut le déduire d’un parchemin. On sait que Charles V avait étendu l’impôt du fouage dans le Languedoc à 6 livres pour les villes, 2 pour les campagnes. Servian avait fait les remontrances. Le consul Jourdan affirme que le 7 décembre 1379, Servian a été exempté de la taille vu la restriction des feux. Il dut fournir ses preuves. Cependant une ordonnance de Charles VII du 9 juin 1393 n’en tint pas compte (mandons à tous nos sujets d’obéir) ; mais, en 1395, le même roi veut (que le tiers du droit et profit du sel vendu en gabelle dans le Languedoc soit rebattu, impositions pour denrées et marchandises une fois payées, ne le seront que toutes commissions données par nous, cesseront). Servian profita de ce dégrèvement. Ceci nous permettra de supputer le nombre d’habitants à cette époque.

L’impôt est calculé sur le nombre de feux dans chaque commune. Or, une enquête de 1397, conservée dans nos Archives, relate ainsi le nombre de feux :

Dans le lieu
de Servian
36 feux
d’Abeilhan
14
de Pouzolles
4
de Gabian
7

Une autre pièce un peu postérieure réduit encore ce nombre. Or, on peut approximativement compter 10 personnes par feu : le père et la mère, deux grands-parents, un ou deux oncles ou tantes célibataires vivant dans la maison, une moyenne de quatre enfants. Il y aurait eu à Servian, à cette époque, 360 habitants soumis à l’impôt. On peut doubler ce chiffre en comptant les pauvres, les travailleurs exempts d’impôts, ce qui donne une moyenne de 700 habitants, chiffre très vraisemblable, car le Castrum seul était habité, les quartiers bas et les Barris n’ayant été construits qu’au XVe siècle, comme l’atteste l’architecture Renaissance des vieilles maisons qui ont survécu au vandalisme des restaurateurs modernes, et les quelques dates marquées sur certaines maisons : ainsi la maison Aiguesvives, aux Barris, porte la date de 1631.

D’après un vidimus du patentier de 1418, sous le Consulat d’Amelly, l’impôt s’élevait à 85 livres d’argent et à 108 settiers de bon blé, mais les habitants réclamaient toujours. D’ailleurs, les mêmes raisons de diminution de la population subsistaient.

En 1443, le roi Charles VII veut que son peuple soit régi suivant le droit es comptes. En 1550, le 6 juin, les commissaires députés par le roi au sujet des emprunts en la généralité du Languedoc portent les impôts suivants ;

Pour la cession de la garrigue, à charge de payer :

425 livres tournois en argent ;
108 settiers de froment pur, pendant 10 ans.

(Mais durant les derniers temps de guerre, de souffrances, de pestes nous avons admis de modérer cette redevance). Parchemin de 1570.

Enfin, Henri IV, Le 29 avril 1594, réduit pour quinze ans l’albergue de Servian à 108 settiers de froment ;

85 livres d’argent (à cause des familles ruinées par la guerre, diminuées par la mortalité).

Nous pouvons établir l’assiette des impôts, puisque nous possédons le Compois.