Histoire de l’Asie centrale/Khorassan, Tibet, Kachmir

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Traduction par Charles Schefer.
Ernest Leroux (p. 231-252).


KHORASSAN, TIBET, KACHMIR




DÉNOMBREMENT DES VILLES DU KHORASSAN

Une partie du Khorassan se trouve placée sous la domination du souverain des Afghans. Nous allons citer les villes qui sont sous sa dépendance a partir de l’Inde : Kâboul, Ghaznin, Kelâti Ghildjaï, Qandahâr, Kochnichin, Zemin Daver, Bout Bâmian, Balkh, Qoundouz, Khoutlan, Badakhchan. Ce dernier pays est soumis à un gouverneur particulier qui porte le titre de Châhi Badakhchan (roi de Badakhchan) ; il renferme environ trente mille familles et il y a, dans les limites de son territoire, des villes, des bourgs et des tribus nomades. Les paysans de Badakhchan sont dans la plus profonde misère. Quand on apporte de Boukhara, de Kâboul ou de Balkh des présents consistant en vêtements on en armes, au châh de Badakhchan, celui-ci fait en échange un cadeau de paysans Choughnany, qui portent aussi le nom de Kafir Siahpouch (infidèles vêtus de noir).

Les marchands les conduisent à Boukhara, la chaîne au cou et les mains liées. Ils spnt vendus dans cette ville. Quelques-uns parviennent à s’enfuir et retournent à Badakhchan ; les autres recouvrent leur liberté, après avoir embrassé l’islamisme par les soins des étudiants de Badakhchan. Il y a dans les districts qui dépendent de Badakhchan une population que l’on appelle Choughnany appartenant au rite chiite. Le territoire de Choughnan est situé au nord de Badakhchan sur la frontière de la province de Khoqand[1] ; à l’est de Badakhchan se trouve la province de Tchitrar[2], dont les habitants sont infidèles et celle de Dervaz dont les habitants sont musulmans[3] ; cette dernière contrée est couverte de montagnes ; au delà se trouve le pays des Kafir Siahpouch, qui vivent dans de hautes montagnes et sont indépendants.

À l’est se trouvent le Tibet et le Kachmir. Le Tibet est divisé en sept provinces dont trois reconnaissent l’autorité du Kachmir, les quatre autres sont indépendantes et sont placées sous l’autorité d’un prince qui prend le titre de radjah. Tous les habitants du Tibet suivent, comme les Qalmaq, la religion de Bouddha[4] ; on trouve cependant parmi eux des adorateurs du feu. Il y a, au Tibet, peu de blé et d’autres céréales. Les habitants sont pauvres et misérables ; on y trouve de la farine d’orge et d’avoine. Les Tibétains vendent leurs filles vierges pour une somme de dix piastres ; on les emmène et on les convertit à l’islamisme sans qu’ils y apportent aucun obstacle. Pour se rendre du grand Tibet à Kachmir, il faut quinze journées de marche. Lorsque les négociants achètent des châles, ils font des ballots d’environ trente-cinq châles, et des porteurs, qu’on loue à cet effet, les transportent sur leurs épaules à travers le Tibet pendant quinze journées de marche.

La route est si escarpée, si montueuse, que les chevaux et les mulets ne peuvent la franchir. Tous les fardeaux sont portés à dos d’homme. Si un négociant veut voyager, il loue deux porteurs ; ces porteurs se mettent sur l’épaule un petit coussin ; le marchand se place à califourchon, un pied pendant d’un côté, l’autre pied pendant du côté du dos, et il voyage ainsi sans fatigue. Les deux porteurs se relayent et transportent le négociant ; la route qui conduit à Djemou passe à travers de hautes montagnes ; elle est très-difficile ; de Djemou on se rend dans l’Inde. Quant à la route qui traverse le grand Tibet, elle peut être parcourue à cheval et les marchands la franchissent ainsi ; les caravanes se rendent du Tibet à la ville de Yarkend, qui est sous la dépendance de la Chine : elles parcourent cette distance en quarante étapes à travers une contrée où l’on ne rencontre ni ville, ni habitation. Le bois et les fourrages y font défaut, mais on y trouve de l’eau ; c’est un pays couvert de montagnes noires et arides ; il n’y a sur la route ni voleurs ni brigands. Les gens qui vont du Tibet à Yarkend et ceux qui viennent de Yarkend au Tibet emportent avec eux pour quarante jours de vivres, du pain, de la graisse et de la viande. On voit dans le désert des corbeaux noirs, qui se précipitent sur les chevaux tombés de fatigue et leur crèvent les yeux ; on y rencontre aussi des loups qui se jettent sur les hommes isolés et les dévorent. Les corbeaux, dont nous venons de parler, se réunissent en bandes pour fondre sur les individus qui succombent à la fatigue ; ils les aveuglent d’abord et les dévorent ensuite. Cette route est extrêmement difficile et pénible. Il s’élève aussi du sol des vapeurs chaudes semblables à celles du simoun. Quand une personne marche lentement, ces vapeurs lui montent au cerveau et lui causent une indisposition semblable à celle que l’on ressent en mer à bord d’un navire ; quelquefois on en meurt. Pour se préserver de leur influence, on se met une gousse d’ail dans le nez, ou bien on boit de l’eau dans laquelle on a exprimé le jus d’un citron et fait infuser de l’ail. Ces vapeurs délétères font périr beaucoup de chevaux.

Quand un marchand veut transporter dix charges de marchandises, il doit se pourvoir de vingt chevaux pour porter, en outre, l’orge, le pain et les autres provisions ; il arrive quelquefois que tous les chevaux viennent à périr ; alors, on empile les ballots les uns sur les autres et on les couvre d’une natte ou d’un feutre, sur lesquels on entasse des pierres. Si le marchand se rend du Tibet à Yarkend, et s’il se trouve plus rapproché de cette ville, il abandonne ses marchandises, et, avec ses compagnons de route, il va à Yarkend pour y acheter des chevaux ; il revient et charge ses ballots. Si le marchand qui se rend de Yarkend au Tibet voit mourir ses montures, il examine quel est l’endroit le plus rapproché pour s’y rendre et en ramener des chevaux. Les ballots peuvent rester exposés dans le désert pendant plusieurs années sans éprouver le moindre dommage.

On trouve dans ces montagnes un bœuf qu’on appelle qouthas[5] ; il a une large queue semblable à celle du renard et dont les poils sont aussi longs que des cheveux de femme ; on s’en sert dans le Turkestan pour les attacher au haut des toughs. On trouve ces bœufs en grand nombre tout le long de la route ; au Tibet, ils sont à l’état domestique et on les emploie au transport des fardeaux ; ils rendent le même service que les buffles ; la viande et le lait de ces animaux ont un goût très-agréable. Moi, qui ai écrit ces pages, le pauvre Mir Abdoul Kérim de Boukhara, je suis allé deux fois dans la province de Kachmir ; j’ai fait une première fois ce voyage à l’âge de seize ans. Je passai par Hérât, Qandahâr, Kâboul, Pichâver, Mouzaffer Abâd, pour arriver à Kachmir. Mon retour s’effectua par la même route. Une seconde fois je suis allé de Boukhara en Russie ; je suis parti ensuite de Simipoulad qui est sur la frontière russe et je me suis dirigé sur Kachmir en passant par Ilèh, Aqsou, Kachgar, Yarkend et le Tibet ; je revins par le même chemin en l’année 1224[6]. Sur la route du Tibet je trouvai un jeune qouthas endormi ; je le tuai d’un coup de pistolet. Sa chair était délicieuse. Les gens qui vont acheter dans le Tibet, le tibit, c’est-à-dire le poil de chèvre qui sert à faire les châles, en rapportent aussi la racine de djidvar[7].


DESCRIPTION DU TIBET[8].

Le Tibet est un pays montagneux situé entre la Chine et l’Hindoustan ; il s’étend sur une grande longueur et sur une grande largeur. ; ses montagnes s’élèvent jusqu’au ciel ; ses routes sont aussi pénibles à franchir que le cœur des avares est difficile à émouvoir. Il faut trois mois pour parcourir le Tibet. La capitale se nomme Lambèh, c’est la ville des Qalmaq et la résidence des Lamas[9]. Quelques personnes prétendent que le tombeau du peintre Many se trouve dans cette ville[10]. La ville de Lambèh est placée sous l’autorité de l’empereur de la Chine. Dans les montagnes du Tibet, on trouve une population nomade et vivant sous la tente dans le désert ; ces gens élèvent une grande quantité de brebis et de chèvres. Les chèvres du Tibet sont de grande taille et leur poil est aussi fourni que celui des moutons de ce pays-ci[11]. Pendant le mois de Tirèh Mah[12], les bergers recueillent dans le désert et dans les montagnes la racine de djidvar. On apporte aussi du Tibet le mamiran et la rhubarbe[13]. Il y a dans le Tibet une classe de la population qui se réunit en groupes comme les gens qui achètent les moutons en Turquie ; ils parcourent les montagnes et achètent le poil de chèvre en quantités qui varient d’une demi-ocque à dix ocques[14] ; ils achètent aussi des boucs. Ils mettent le poil de chèvre dans des sacs du poids de dix ocques qu’ils attachent sur le dos de ces animaux ; ils font leurs achats de tous côtés et ils parviennent à réunir mille chèvres dans l’espace de deux mois.

KACHMIR

Fabrication des châles de Kachmir[15]. — Les métiers sur lesquels on fabrique les châles ne ressemblent pas à ceux sur lesquels on tisse les étoffes de coton et de soie. Dans une maison, on travaille sur quatre métiers ; l’endroit du châle est placé en bas et l’envers en haut ; trois personnes travaillent au châle à palmes et au châle à bouquets ; le maître travaille avec deux apprentis à ses côtés ; un apprenti ne peut passer maître qu’après trois ans d’apprentissage. Un ouvrier reçoit pour sa paye journalière dix paras de Constantinople et les apprentis cinq paras. Quand on veut avoir promptement un châle, on le fait tisser sur quatre métiers, en quatre morceaux que l’on coud ensuite ensemble ; il faut huit mois ou un an pour faire un châle d’une seule pièce ; on fabrique vite les châles carrés, ensuite on y coud la bordure. Il y a dans le Kachmir quarante mille métiers à châles qui produisent chaque année quatre-vingt mille châles. Le gouvernement perçoit sur chaque châle un impôt de dix piastres : après qu’il a été plié et cousu, on perçoit encore une taxe de quatre piastres. Après la mise en ballots, le gouvernement perçoit encore du marchand une taxe de quatre piastres par châle ; les impôts prélevés sur les châles et sur le riz rapportent chaque année cent laks de roupies, qui font dix millions, et, en argent de Constantinople, vingt mille bourses. Les ducats sont la monnaie d’or qui a cours dans le Kachmir. C’est un fait reconnu que les gouverneurs de Kachmir se révoltent tous les trois ans contre le roi de Kâboul. Les richesses qu’ils acquièrent leur inspirent des sentiments d’orgueil et d’indépendance. Le monde entier est tributaire du Kachmir : l’argent y afflue de la Chine, de l’Inde et des autres contrées.

La distance qui sépare Kâboul de Kachmir est de vingt-cinq étapes. Kachmir peut véritablement rivaliser avec le paradis. Les souverains de l’Inde de la race de Timour Gouregan, principalement Ekber Châh, se rendaient de Djihan Abâd à Kachmir pour y passer le printemps ; l’air de cette contrée est parfumé comme le musc et les plaisirs que l’on y goûte sont semblables à ceux du paradis[16].

Auprès de la ville se trouve le Dal, lac d’eau douce aussi large que le Bosphore entre Topkhanèh et Scutari ; les rives de ce lac sont couvertes de maisons et de jardins ; on y voit danser et jouer des kentcheny, danseuses à la face ronde comme la lune et au visage resplendissant comme le soleil. Ces danses sont parfaitement licites. Sur le bord de ce lac se trouve une montagne au sommet de laquelle Ekber Châh a construit un château nommé Nagnagar. L’imagination est frappée par la beauté de sa construction. Au-dessus de la porte du château se trouve une inscription dont une partie a été détruite ; cependant, on peut en distinguer quelques lignes et voici les vers que j’y ai lus :

« Le roi juste et équitable a donné l’ordre de construire le château de Nagnagar ; il envoya de son trésor dix kourours et il y employa deux cents artistes indiens, tous d’une habileté reconnue. Personne ici n’est demeuré inactif, et tout le monde a reçu du Trésor en monnaie d’or le prix de son travail. Châh Ekber est le premier des souverains du monde : que son rang soit exalté ! Dieu est le plus grand[17] ! »

On dépensa pour cette construction onze millions de pièces d’argent de l’Inde, sans compter les salaires et les gratifications accordées à deux cents sculpteurs sur pierre et aux autres artistes qui étaient des employés de la couronne. Cette somme représente en argent de Constantinople vingt-cinq millions, soit cinquante mille bourses. Maintenant, le château est ruiné.

Après Ekber Châh, la couronne échut à son fils Selim Châh, puis à Khourrem Châh, fils de Selim Châh. Il reçut de son père le surnom de Châh Djihan ; c’est lui qui construisit la ville de Châhdjihan Abâd. Voici sa généalogie :

Châh Djihan fils de Selim Châh, fils d’Ekber Châh, fils de Houmaïoun Mehemmed Châh, fils de Baber Châh, fils d’Omer Cheikh, fils de Sultan Abou Saïd Behadir, fils de Sultan Mehemmed, fils d’Emiran Châh, fils de Timour Gouregan, fils de Mehemmed Thourghay[18]. C’est sous le règne de ces princes que l’Hindoustan fût vraiment prospère et florissant. Delhi fut d’abord la capitale, puis Châh Djihan Abâd.

Un poète de l’Inde a composé les vers suivants pour fixer la date de la mort d’Ekber Châh :

Vers. « Ekber Châh, ce prince au rang élevé, cette mer de générosité, est parti de ce bas monde et le tambour de l’espérance de ses bienfaits est resté orphelin. J’ai demandé à mon cœur s’il me serait permis d’inscrire sur le feuillet du siècle la date de sa mort. Il m’a répondu : Prends courage et prononce, en les accompagnant de tes vœux, les paroles suivantes : Le Châhzadèh Selim a succédé à Ekber Châh. »

Un poète d’Isfahan a composé plus tard sur le même sujet les vers suivants :

Vers. « Ekber Châh, la gloire de l’Empire et de la religion, a, par l’effet de la faveur céleste, planté sa tente sur le firmament. Le poisson de sa vie a saisi l’hameçon de la mort et son règne a duré plus de cinquante ans. J’ai demandé quelle était l’année de sa mort et la date a été fixée par ces mots : Ekber Châh est mort[19]. »

Le règne de ce prince vit fleurir un grand nombre de poètes. Les princes, ses descendants, sont aujourd’hui fort nombreux. Ils résident à Djihan Abâd, mais ils sont sous la surveillance des Anglais qui leur fournissent une pension pour subvenir à leurs besoins journaliers.

Districts du Khorassan. Revenons maintenant au dénombrement des districts du Khorassan : Khoulm, le Ghardjistan, Fariâb, Chibreghan, Meïmenèh, Endkhou, les cantons de Firouz Kouh, du Ghour et de Taïmen, des Hezarèh, de Tayourèh, Ferâh, Derèhi Qalèh Gâh, Keddèh, le Seïstan, le Zaboulistan, le Qouhistan, Khabis, Bemm, Nermachir, Isfezâr, Hérât, Badghis, Merv, Koussan, Khaf, Bakherz, Rouz Abâd, etc.

Les districts du Khorassan qui sont aujourd’hui (1233-1818) sous l’autorité de Feth Aly Châh Qadjar sont ceux de Mouhavvelat, Tourbet, Tirchiz, Goun Abâd, Tcherakhs, Bemroud, Qayn, Sèh Qalèh, Thabèsi Sina, Thabèsi Kileki, Djani, Nichâpour, Mechhedi Thous, Sebzvâr, Kouhmich, Kerman, Tchinaran, Keltan, Qoutcham, Besmam, Chehroud, Veramin, Ester Abâd, Kelâti Nadir Châh, Nessa, Abiverd, Chadbakh, Demghan, Tchèhtchèh, les districts du Kurdistan, Semnan, etc.

La ville de Khoulm relève aujourd’hui de Balkh ; elle est gouvernée par Qilidj Aly Khan Uzbek ; elle a sous sa dépendance de gros bourgs et des villages, et sa prospérité s’accroît de jour en jour (1233-1818).

La ville de Koulab est située entre Balkh et Hissar au nord du Djihoun ; les villes de Hissari Kelan et de Hissari Khourd se trouvent entre Koulab et la province de Boukhara ; elles ont pour gouverneur Saïd Bek, de la tribu uzbek des Yuz.

Cheheri Sebz est entourée de montagnes de trois côtés. Cette ville est située à la distance de trois journées de marche de Boukhara ; elle est désignée dans les chroniques sous le nom de Kech. C’est dans un faubourg de cette ville appelé aujourd’hui Mevloud Khanèh que naquit l’Émir Timour Gouregan[20]. Cette ville est entourée de villages, de bourgs, de jardins et de champs cultivés ; on ne peut s’en emparer de vive force, car, lorsque la guerre éclate, tous les paysans et tous les habitants se mettent sur pied pour combattre. Ils peuvent se réunir au nombre de six mille et sont très-bons soldats ; ils ne sortent pas en rase campagne, ils défendent le château que l’on ne peut battre avec du canon et qui est hors de la portée de fusil ; on ne peut pas non plus l’investir. Les habitants sont hospitaliers et ils accueillent favorablement les étrangers. De Qarchi à Cheheri Sebz, il y a deux étapes.

Il y a, à l’endroit où naquit Timour Gouregan, au pied d’une montagne, une grotte qui a l’apparence d’une cellule de derviche. Un individu, couvert d’un froc en haillons, s’y établit et s’y livra à la prière et aux actes de dévotion. Au bout de cinq ou six ans, il réunit autour de lui des disciples. Le gouverneur de Cheheri Sebz, informé de ce fait, alla luibfaire visite. Le cheikh lui dit : « Restez paisiblement chez vous sans vous préoccuper de quoique ce soit : pour moi, je trouverai le moyen de conquérir Boukhara et ce qui pourra m’arriver de malheureux ne rejaillira ni sur vous ni sur la ville que vous gouvernez. » Le gouverneur de Cheheri Sebz le laissa tranquille et se garda de l’inquiéter. Le cheikh acquérait chaque jour plus de notoriété, mille disciples étaient réunis autour de lui ; il proclama qu’il allait faire une expédition. Il prétendait avoir des révélations divines et le don des miracles. On accourait auprès de lui de Boukhara et d’autres contrées. Son influence grandissait et s’étendait au loin. L’Émir Hayder fit partir un corps de troupes pour le combattre. Il y eut des deux côtés beaucoup de monde de tué dans une première action et les deux partis battirent en retraite. Les disciples du cheikh se rallièrent et celui-ci, pour les encourager, proclama qu’une inspiration divine lui avait révélé que la victoire lui appartiendrait, qu’il allait envahir le monde et en faire la conquête. Il prodigua les promesses à ses disciples ; ses discours se répandirent dans les populalions et tout le monde y ajouta foi. Le gouverneur de Cheheri Sebz se repentit alors de sa tolérance envers le cheikh et il fit tous ses efforts pour l’éloigner. De nouvelles troupes furent expédiées de Boukhara ; elles livrèrent au cheikh un combat sanglant ; un grand nombre de ses partisans fut massacré ; lui-même prit la fuite et ses soldats se dispersèrent et disparurent ; il changea de vêtement pour ne pas être reconnu, se jeta dans le Miankal avec deux de ses disciples et se dirigea du côté de Samarqand. Son couvent et sa demeure furent détruits.

On perdit ses traces ; les uns disaient qu’il avait été tué, les autres, qu’il s’était réfugié dans les montagnes. Pendant quelque temps, on ignora son existence ; le cheikh et ses deux disciples cheminaient par des endroits écartés, logeant dans les tombeaux, allant de village en village, s’arrêlant la nuit dans un lieu, le jour dans un autre. Un de ses disciples réussit à le conduire près de Boukhara. Un jour celui-ci lui dit ; « Entrons dans la ville, nous passerons deux ou trois jours à visiter les médressèhs, puis nous irons à Ourguendj. La prédestination avait saisi le pan de la robe du cheikh, il aquiesça donc à cette proposition et ils entrèrent au milieu du jour à Boukhara par la porte de l’imam Hafs Kebir ; le disciple proposa au cheikh de loger dans le médressèh de Dar ouch Chefa, sur la place de Righistan, à proximité du palais royal de Boukhara. Le cheikh entra dans une des cellules du médressèh avec l’un de ses disciples ; l’autre, auquel il avait confié son cachet, leur dit : « Prenez un peu de repos : je vais aller acheter du pain, des melons et du raisin. » Bref, le cheikh et son disciple s’établirent dans la chambre ; l’autre ferma sur eux la porte à clef et, marchant lentement, il se dirigea vers le palais de l’Émir Hayder Khan. Il demanda une audience secrète au prince des croyants l’Émir Hayder ; elle lui fut accordée, « Ce cheikh, dit-il au prince, qui a été la cause de l’effusion de tant de sang musulman et dont la déloyauté a causé la mort de mon jeune fils, j’ai réussi, par mille ruses et par mille expédients, à l’amener, lui, cet infâme, jusqu’à vos pieds ; je l’ai fait s’arrêter à l’abattoir, pour venger le sang de mon fils ; j’ai l’espoir que le prince des fidèles voudra bien me traiter généreusement, moi qui suis son pauvre serviteur. » L’Émir lui fit compter à l’instant même cent tillas de Boukhara, et le fit revêtir d’un vêtement complet. Le dénonciateur demanda que l’on graciât l’autre disciple qui accompagnait le cheikh, puis il montra le cachet du cheikh qu’il avait en garde ; il donna tous les détails, indiqua le lieu où se trouvaient ses compagnons et, assisté par plusieurs agents de police vigoureux, il se dirigea vers le médressèh du Dar ouch Chefa. On tira le cheikh de la chambre qu’il occupait, comme on tire un renard de son terrier, et on le traîna en présence de l’Émir. Il opposa des dénégations aux questions qui lui furent adressées, jusqu’à ce que deux habitants de la ville de Cheheri Sebz eurent affirmé son identité et celle du disciple qui était le dépositaire de son cachet. On entraîna le cheikh au pied de la potence et on le pendit. Les peuples furent délivrés de ses intrigues.

La ville d’Endkhou est située entre Hérât et Boukhara ; elle compte parmi les villes du Khorassan et elle n’est point éloignée de Balkh, de Chibregan et de Kerki. Cette ville n’a point de villages sous sa dépendance, mais il y a dans ses alentours de nombreuses tribus d’Arabes nomades ; elle obéit au souverain des Afghans, et on y récite la khoutbèh en son nom ; elle eut pour gouverneur Rhamet oullah Khan Efchar. On y suivait autrefois le rite chiite, mais sous la domination des Afghans, les habitants devinrent sunnites. Rahmet oullah Khan gouvernait au nom de Timour Châh. Il vint à sa rencontre jusqu’à Balkh ; il fit la guerre à Châh Murad Bi ; s’étant porté en avant dans un combat, il fut tué par les soldats de Boukhara. Son fils Yldouz Khan lui a succédé ; il entretient un corps de troupes de mille hommes tant cavaliers que fantassins. Aujourd’hui, il ne paye à personne ni tribut ni impôt. Endkhou est entouré par le désert ; c’est ce qui fait sa force ; les habitants sont d’un caractère généreux et hospitalier. Leur richesse consiste en moutons et en chameaux ; on trouve près de cette ville des gisements de soufre et de sel. Endkhou entretient avec Hérât et Boukhara des relations pacifiques. Dans cette ville se trouve le tombeau de l’Émir Berekèh, qui fat le guide spirituel de l’Émir Timour Gouregan. Timour fit enlever de son tombeau le corps de ce saint personnage, pour le transporter à Samarqand et le faire enterrer dans le mausolée où il repose lui-même. On voit encore à Endkhou les ruines du premier tombeau. On raconte aussi que Timour fit exhumer les restes de Saad, fils de Waqqas[21], et les fit transporter à Cheheri Sebz ; cette circonstance rend la ville imprenable.

Quant à la ville de Hérât, les descendants de Djenghiz Khan, les princes de la famille de Timour Gouregan et les rois Uzbeks y avaient élevé des monuments ; ces superbes édifices furent détruits, quand la ville tomba au pouvoir des Persans.

La ville ayant été de nouveau conquise par les Uzbeks, ceux-ci renversèrent à leur tour les édifices construits par les Persans. Quelques-uns d’entre eux subsistent cependant encore aujourd’hui ; ainsi les Persans ont respecté le moussalla, le médressèh et les neuf minarets que le sultan Hussein Mirza Baïqara fit construire au tombeau de l’imam Riza.

Le mousalla est en bon état[22]. Sa coupole est, pour la grandeur et l’élévation semblable à celle de la mosquée d’Osmanièh à Constantinople[23] ; mais la voûte est couverte d’arabesques et de dessins en or et en azur, elle est revêtue de plaques en faïence de Perse. Aux quatre coins de la construction s’élèvent quatre minarets recouverts de plaques de faïence. On ne trouve aucun monument aussi beau ni dans le Turkestan ni dans le Khorassan, ni en Perse. On ne trouve pas non plus à Constantinople d’édifice d’un travail aussi délicat ni d’aussi belles arabesques en or et en azur. On remarque aussi le pont de Malan jeté sur la rivière de Hérât, au sud de la ville, à une distance d’une fersakh sur la route de Qandahâr ; il a été construit par une dame appelée Bibi Nour. Il est composé de vingt-sept arches dont chacune est assez haute pour donner passage à un éléphant avec sa tour et son cornac. Ce pont est couvert de sculptures ; sa largeur est de vingt pas. Au printemps, lorsque les eaux du fleuve sont hautes, on peut contempler du haut de ce pont un spectacle curieux. Au nord de Hérât se trouve la montagne appelée Keïtou[24] ; on y voit une source de laquelle jaillit une eau rouge comme du sang. Quand elle a coulé l’espace de dix pas, elle devient limpide ; quand on puise avec un verre de l’eau à la source, elle a, dans le verre l’apparence d’un lingot d’argent sans alliage. Dans cette même montagne se trouve un puits d’où s’échappe un vent qui souffle du côté de Hérât. Si l’on y jette une pierre du poids de cent ocques, la violence du vent la rejette au dehors. En arrière de ce puits, on ne sent pas le souffle du vent.

La province de Hérât renferme des mines de plomb et de fer ; on y trouve en abondance le soufre, le minerai de ferbet le salpêtre. Le cuivre est apporté d’Erzerouni. On en exporte aussi de Russie à destination de Boukhâra et de Hérât. On fabrique à Hérât de la poudre et des fusils ; on y fond des canons ; toutes les industries y sont exercées ; la vie y est à fort bon marché et le sol est fertile. Les productions naturelles sont le riz, le coton et la soie. Les tombeaux de saints personnages y sont nombreux.

Ghourian, Goursan, Khâf, Bakherz, le Kouhistan, le Zaboulistan, Isfezâr, Ferâh, le Seïstan, toutes les tribus Ouïmaq, le Gardjistan, Meïmenèh, Endkhou, Merv, Badghis, Rouzabâd, Serakhs, Obèh, Chakilan, etc., sont placés sous la dépendance de Hérât ; tous ces pays sont bien cultivés et bien peuplés ; on y voit des choses merveilleuses et dignes de toute attention. Mais j’abrège, car tous ces récits ne peuvent être consignés sur le papier. Dieu est celui qui connaît le mieux la vérité sur toutes choses (1246-1830.)

  1. Voir la note (3) de la page 210.
  2. Le Tchitrar ou Tchitral est un État indépendant qui comprend la partie supérieure de la vallée de Kouner. Le Tchitral est divisé en Kachkarri Bala et Kachkarri Païn. La population se compose de musulmans sunnites et chiites et de Kafirs.
    Les habitants parlent un dialecte du Dardou, mais ils emploient aussi le persan, le turc et l’afghan. Les sunnites habitent la partie méridionale, les chiites la partie nord et nord-ouest du pays. Les Kafirs sont fixés sur la frontière qui longe le Kafiristan.
    La partie haute du Tchitrar est gouvernée par une dynastie nommée Khoch Vaqty, la partie basse par les Keçour. Ils descendent les uns et les autres de Châh Keçour, aïeul d’Aman oul Moulk. Les princes du Tchitral vendent leurs sujets chiites et kafirs, et cet horrible commerce constitue la branche la plus importante de leurs revenus. Les esclaves du Tchitrar sont recherchés dans toute l’Asie centrale pour leur beauté et leur fidélité.
  3. Le district de Dervaz, situé sur l’Oxus, au nord de Badakhchan, est gouverné par un chef tadjik indépendant. Le sol est extrêmement montagneux et les sentiers qui y sont tracés ne peuvent être franchis que par des piétons. Le Dervaz produit du coton qui est mis en œuvre par les habitants et échangé par eux contre des céréales et de la poudre. On recueille un peu d’or que l’on obtient en lavant le sable de l’Oxus. Les habitants de Dervaz sont musulmans sunnites et leur langue est le persan. Moorcroft rapporte que le chef du Dervaz prétend descendre d’Alexandre-le-Grand et qu’il possède un arbre généalogique qui justifie cette assertion.
    « Dervaz, dit Seïfy dans son Histoire de l’Asie centrale, est un petit pays. On n’en trouve pas d’aussi abrupte dans le monde entier. Il se compose de montagnes auxquelles un défilé fort étroit donne seul accès ; à l’entrée de ce défilé on a placé une porte en fer semblable à la porte d’une citadelle. On la ferme à l’entrée de la nuit et on l’ouvre le matin. »
  4. Le texte persan porte la religion de Many. Many est la corruption du mot Chekamouny, qui désigne Bouddha dans les auteurs persans.
  5. Le qouthas est le yak ou bœuf grognant de Tartarie. Le mâle s’appelle yak, la femelle dhè. Turner a donné les détails les plus complets sur le yak du Tibet. Account of an embassy to the court of Teshoo Lama, pages 185 et suivantes.
    M. Vigne lui a consacré quelques lignes dans son Voyage au petit Tibet, page 277.
  6. Je crois qu’il faut lire 1204 ou 1214. En 1224, Mir Abdoul Kerim se trouvait à Constantinople.
  7. Le zédoaire de Chine (Killingea monocephala). C’est, d’après Piddingston (Index plantarum), la plante connue en Perse sous le nom de djidvari khithay, dont la véritable est considérée comme une panacée divine. Elle est souvent payée en Perse au prix quadruple de l’or fin.
    Schlimmer, Terminologie médico-pharmaceutique et anthropologique française-persane. Téhéran, 1874, page 335.
  8. Je donne ici les titres des principaux ouvrages auxquels le lecteur pourra recourir pour la géographie et l’histoire si peu connues du Tibet :
    Description du Tibet, traduite partiellement du chinois en russe par le P. Hyacinthe Bitchourin, complétée et accompagnée de notes par J. Klaproth. Paris, 1831 ;
    Description du Tibet, d’après la relation des Lamas Tangoutes établis parmi les Mongols, traduit de l’allemand avec des notes par J. Reuilly. Paris, 1808 ;
    An account of an embassy to the court of the Teshoo Lama in Tibet, containing a narrative of a journey trough the Bootan and part of Tibet, by captain Samuel Turner. Londres, 1800.
    Essays on the languages, literature and religion of the Nepal and Tibet ; togetherwith further paper on the geography, ethnology and commerce of those countrees, by Hodgson. Serampore, 1841.
    Histoire de ce qui s’est passé au royaume du Tibet, tirée des lettres écrites en l’année 1626 (par le P. d’Andrade), adressées au R. P. Mutio Vitelleschi, général de la Compagnie de Jésus. Paris, Sébastien Cramoisy, 1629, 104 pages.
    Missio apostolica thibetano-seraphica. Das ist neue durch pæbstlichen Gewall in das Thibetanische Reich von denen Capucinern aufgerichtete Mission. Munchen, 1740.
    Carta familiar de un Sacerdote, respuesta a un colegial amigo, suyo en que le da cuenta de la admirable Conquista espiritual del vasto Imperio del Gran Thibet, Mexico, 1765, 48 pages. L’abbé Hue, Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-1845-1846. Paris, 1853. M. Clements R. Markham C. B. vient de publier à Londres le récit des missions de George Boyle et de Thomas Manning au Tibet. M. Markham a mis en tête de ces deux relations une savante introduction qui renferme les détails les plus intéressants sur la géographie et l’histoire du Tibet. Il a placé à la fin de ce volume les relations du jésuite J. Grüber, la lettre du P. Hippolyte Desideri, et la courte description du royaume du Tibet par le frère Orazio della Penna, qui avait déjà été publiée par J. Klaproth.
    Les dix-septième et dix-huitième siècles ont vu paraître aussi quelques opuscules sur le Tibet tels que : Relation de la nouvelle découverte du grand Catay, ou bien du Royaume de Tibet, faite par le P. Antoine d’Andrade, Portuguez, de la Compagnie de Jésus, l’an 1624. Paris, Sébastien Chappelet, 1628, 55 pp.
    Advis certain d’une plus ample descouverte du Royaume de Catai, tiré des lettres des Pères de la Compagnie de Jésus, de l’année 1626. Paris, S. Chappelet, 1628, 28 pages.
  9. Lambèh est la ville de Lombou sur laquelle on trouve quelques détails dans la Description du Tibet par le P. H. Bitchourin, page 252, et dans la Relation de l’ambassade de Turner, pages 230 et suiv.
  10. Je suppose que le tombeau de Many n’est autre que le mausolée de Techou Lama dont Turner a donné le dessin dans son ouvrage, page 265. Il a été reproduit par M. Clements R. Markham dans le Tibet. Londres, 1876, page 208.
  11. La Turquie.
  12. Le mois de juin.
  13. Le mamiran est la grande chélidoine (chelidonium majus L.) ou herbe aux hirondelles.
    « Les Persans en retirent la racine du khorassany et la recommandent, sèche et pulvérisée, contre les taches de la cornée et la faiblesse de la vue : sa mastication détruirait l’odonlalgie ; mêlée au vinaigre, on recommande sa poudre en embrocation contre la gale. » Joh. L. Schlimmer, Terminologie médico-pharmaceutique et anthropologique française-persane. Téhéran, 1874, page 126.
    Le mamiran, selon les lexicographes orientaux, est une racine d’une couleur jaunâtre tirant sur le vert, grêle et pleine de nodosités. Elle est chaude et sèche au quatrième degré. Elle est efficace pour l’ictère. On prétend que lorsque l’hirondelle a un petit aveugle, elle apporte dans son nid une branche de mamiran et que le petit recouvre la vue. Le nom arabe du mamiran est « baqlat oul khathathif. » Bernier mentionne le mamiran comme un des produits que les caravanes rapportaient du Tibet : « Ces caravanes rapportaient du musc, du bois de Chine, de la rhubarbe et du mamiran, qui est une petite racine très-bonne pour le mal des yeux.» Voyage de Kachemire, etc. Amsterdam, 1723, page 311.
  14. L’ocque de Constantinople représente un poids de 1,250 grammes.
  15. Bernier a le premier donné quelques détails sur la fabrication des châles de Kachmir.
    Moorcroft a consacré à ce sujet dans son Voyage à Kachmir un chapitre tout entier que l’on peut considérer comme un mémoire spécial. Il donne les détails les plus complets et les plus minutieux sur cette industrie. Travels, pages 164-218.
    On peut aussi consulter G. T. Vigne, Travels in Kachmir, tome II, pages 124 et suivantes.
  16. Le Kachmir a été l’objet de nombreuses descriptions. Il faut citer en première ligne : Bernier : Voyages contenant la description des États du Grand-Mogol, de l’Indoustan, du royaume de Kachemire, etc. Amsterdam, 1723, tome II, pages 206-353.
    Jacquemont : Correspondance avec sa famille et plusieurs de ses amis pendant son voyage dans l’Inde. Paris, 1835.
    Carl Freiherr von Hügel : Kaschmir und das Reich der Siekh. Stuttgard, 1840.
    Vigne : Travels in Kashmir, Ladak, Iskardo, etc. Londres, 1842.
    Bellew : Kashmir and Kashghar. Londres, 1875.
    Frédéric Drew : Jummoo and Kashmir territories. A geographical account, Londres, 1875.
    Parmi les ouvrages orientaux, je me bornerai à citer le Tarikhi Rechidy de Mirza Hayder Doughlât : l’Ayini Ekbery d’Aboul Fazl, et l’histoire des souverains de Kachmir, par le Seyid Qouthb oud Din Mohammed.
    Divan Kirpâ Râm a publié en 1871 à Lahore une histoire et une description complète de Kachmir, sous le titre de Gulzari Kachmir (le bosquet de Roses de Kachmir). Ferichtèh, dans son histoire de l’Inde, donne sur Kachmir et les princes qui y ont régné des détails qu’il a empruntés à l’ouvrage de Mirza Hayder Doughlât. Cf. Tarikhi Ferichtèh, édition de Bombay, 1247 (1832), tome II, pages 640 et suivantes.
  17. Mir Izzet Oullah confirme le récit d’Abdoul Kerim.
    « La colline de Maran, dit-il, était autrefois entourée de fortifications dont la plus grande partie est en ruines, et qui avaient été élevées par l’empereur Ekber Châh. Au-dessus de l’une des portes des vieilles murailles se trouve une inscription constatant que l’empereur dépensa pour la construction du château un kourour de roupies et qu’il y employa deux cents habiles ouvriers de l’Hindoustan. »
    Meer Izzut Oollah Travels, page 3.
  18. Nassir oud Din Mehemmed Houmaïoun Châh, fils du Sultan Baber, monta sur le trône en 937 (1530) et mourut à Delhi au mois de Rebi oui Akhir 963 (1555). Son fils Djelal oud Din Ekber lui succéda et mourut à Agra en 1015 (1605), à l’âge de soixante-cinq ans. Il eut pour successeur son fils Mehemmed Selim qui reçut les surnoms de Nour oud Din et de Djihanguir Châh et mourut en 1040 (1636). Après les règnes courts et troublés de Mehemmed Cheheriar et de Baysongor, Mehemmed Khourrem Châh Djihan monta sur le trône en 1042 (1632) et il dut en 1067 (1656), abandonner le pouvoir à son second fils, Mehemmed Aureng Zib.
  19. Le poisson et le croissant figuraient parmi les emblèmes des souverains de la dynastie des Mogols et indiquaient que leur toute-puissance s’étendait depuis le poisson, sur lequel, d’après les croyances orientales, repose le taureau qui supporte la terre, jusqu’au firmament où brille la lune. Le mot persan « chast » signifie à la fois « hameçon » et « soixante » et il indique ainsi l’âge atteint par Ekber Châh au moment de sa mort. En additionnant, dans les mots « Faouti Ekber Châh, » les lettres selon leur valeur numérique, on obtient le nombre 1015, marquant l’année de l’Hégire qui vit mourir Ekber.
    Dans la pièce de vers qui précède les lettres des mots « Bedjâyi Ekber Châh Padichâhzadèh Selim » donnent également le nombre 1015.
  20. Timour naquit à Kech, aujourd’hui Cheheri Sebz, la nuit du mardi 27 Chaaban 736 (1335). Sa mère se nommait Tekièh Khatoun.
  21. Saad, fils d’Abou Waqqas, l’habile général qui vainquit les Persans à Qadesièh, fonda Koufa et ouvrit aux Arabes l’Asie centrale, mourut l’an 55 de l’Hégire (675), sous le règne de Mouawièh.
  22. Le mousalla et le médressèh d’Hérât sont deux monuments dont la construction fut commencée en 588 (1192), par Ghias oud Din Mohammed et achevée par son frère Chehab oud Din Mahmoud. Ils furent réparés à la fin du XVe siècle par Sultan Husseïn, petit-fils de Timour.
    M. Ferrier a donné de ces monuments une description intéressante dans son Voyage en Perse, dans l’Afghanistan, etc., tome I, pages 338 et suivantes.
  23. Cette mosquée est celle de Nouri Osmanièh, dont la construction fut commencée en 1162 (1748) par Sultan Mahmoud Ier et qui fut livrée au culte par Sultan Osman le 1er Rebi oul ewwel 1169 (5 décembre 1755). Elle est située près du bazar de Constantinople. Cet édifice, surmonté d’une coupole, présente un carré ayant soisante-seize pas sur chaque côté.
  24. Le mont Keïtou s’élève à quinze milles anglais au nord-est de Hérât.
    Abbot, Narrative of a journey from Heraut to Khiva, tome I, page 8.