Histoire de la ville de Saint-Brieuc/9

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CHAPITRE IX.
DE 1815 A 1830.


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I. Époque de la seconde Restauration. — État des esprits et manifestations publiques. — Lois d’intérêt communal. — Travaux à Saint-Brieuc, de 1818 à 1820. — Influence des événements de 1820 sur la vie municipale. — Retour des fêtes en 1823. — Discussions au sujet de l’octroi (1826-30). — II. Institutions diverses : L’hôpital et le bureau de bienfaisance. — Statistique. — M. de La Mennais et l’instruction populaire. — Société d’agriculture. — Courses. — Le Légué. — Presse locale. — Personnes notables. — Résumé.

I. — ÉPOQUE DE LA SECONDE RESTAURATION.


Le drapeau blanc et la cocarde blanche ne furent arborés que le 17 juillet 1815 à Saint-Brieuc, et encore y eut-il pendant quelque temps de l’indécision dans les esprits. Un témoin bien placé pour voir et pour juger, M. Jean-Marie de La Mennais, écrivait en effet à l’un de ses amis[1] que toutes les autorités civiles n’avaient point assisté au Te Deum, célébré le 23 juillet en l’honneur du roi, qu’on avait défendu d’illuminer et qu’on avait encore joué la Marseillaise. Le Journal des Côtes-du-Nord, en constatant, au contraire, que le Te Deum avait été célébré au milieu de l’allégresse, ne pouvait s’empêcher d’ajouter que ce n’était ni l’élan, ni l’enthousiasme de l’année précédente, et que la diversité des opinions allait perpétuer les dissensions.

On vit bientôt ces opinions se traduire, de la manière la plus opposée, dans le conseil municipal et dans les élections au Corps législatif. Le conseil municipal, renouvelé en partie par le gouvernement et placé sous la direction d’un nouveau maire, M. Guynot-Boismenu, fut installé le 8 août 1815. Il exprima en termes chaleureux, dans une adresse au roi, ses regrets au sujet des Cent-Jours et son plus entier dévouement. En même temps, la bourgeoisie s’occupait des élections législatives. « Les Jacobins ne s’abandonnent pas, écrit l’auteur déjà cité ; on les attaque trop faiblement pour les inquiéter ». Et ailleurs il ajoute, en annonçant le résultat des élections : « On est très fier d’avoir exclu Le Gorrec. Nous envoyons au roi cinq des députés que nous avions envoyés à Bonaparte. Ce sont des hommes comme il n’y en avait point autrefois... » Les électeurs, en nommant MM. Rupérou, Carré Pierre, Ch. Beslay, Cl. Rouxel, Gourlay (de Nantes), Ch. Néel et Gouyon Thaumatz, semblaient, en majorité, favorables aux idées de 1789 et opposés au mouvement réactionnaire que dirigea bientôt contre ces idées la Chambre introuvable. La réaction fut tellement vive qu’elle dépassa le but et que le roi fut obligé de dissoudre la Chambre, le 5 septembre 1816. La nouvelle loi électorale ayant réduit à quatre le nombre des députés des Côtes-du-Nord, MM. Ruperou, Carré, Beslay et Néel furent élus de nouveau. Le département, ou plutôt la bourgeoisie qui dirigeait les élections, appartenait donc à l’opposition, au début de la Restauration.

Cet état de choses fut sensiblement modifié, de 1816 à 1820. Pendant cette seconde période, il se fit, dans les institutions municipales, un mouvement un peu lent, mais sérieux cependant, dans le sens de la liberté. Le gouvernement de la Restauration avait gardé, comme celui de l’Empire, la nomination des conseillers municipaux. À Saint-Brieuc, le nombre en fut d’abord insuffisant pour délibérer. Ce n’est qu’après l’ordonnance du 18 janvier 1816 que le conseil « fut recréé en quelque sorte, » suivant ses propres expressions. Les travaux ne furent pas considérables au début. De 1816 à 1818, pendant l’administration de M. Prud’homme, on ne s’occupa guère que du pavage et de l’élargissement des rues, d’une meilleure installation des marchés et de la fondation d’un atelier de 60 garçons au bureau de bienfaisance. En apparence, il n’y avait donc pas de progrès ; mais, dans une sphère plus élevée, ces années furent fécondes par les mesures que prit le gouvernement dans l’intérêt des villes. La loi du 20 mars 1813 sur l’abandon des biens des communes à la caisse d’amortissement fut rapportée ; le 10e du produit des octrois fut conservé à l’État, mais les villes restèrent libres de reprendre la gestion de leurs octrois, ou de traiter à cet effet avec les contributions indirectes, et aussi de payer un abonnement à cette administration pour les droits de détail et de circulation. Afin d’augmenter les ressources des communes, le gouvernement leur permit d’excéder, avec l’autorisation de la Chambre, leurs cinq centimes ordinaires, et au besoin d’y ajouter des centimes extraordinaires. C’était donner aux communes une plus grande liberté, sous le contrôle nécessaire des pouvoirs publics. En même temps, le gouvernement passait aux mains des modérés et la paix favorisait le retour de la prospérité publique.

Profitant de ces bonnes conditions, le nouveau maire, M. Haouisée de La Ville au Comte, et le conseil municipal préparèrent, en 1818, un ensemble de travaux, dont les terrains du collège, c’est-à-dire de l’ancien couvent des Cordeliers, devaient faire tous les frais. Cet enclos avait été abandonné par l’État à la ville, avec ses 43,608 mètres 75 centimètres de superficie. Tout en réservant au collège des dépendances convenables, on se promettait d’y établir un champ de foire, une balle aux toiles, une école mutuelle pour les garçons, un lavoir, un abreuvoir, de percer une rue vis-à-vis le Champ-de-Mars et de vendre avantageusement 17 lots pour maisons et jardins, le long de cette rue. Sur ces entrefaites, le gouvernement réclama, suivant d’anciennes conventions, une caserne plus vaste pour une garnison plus nombreuse. La nécessité de couvrir cette dépense fit modifier le programme précédent. On n’en retint que l’établissement de l’école mutuelle, celui du champ de foire, autorisé par l’État dans le champ de manœuvres (ancien jardin des Ursulines), et une vente de 16,000 mètres environ de terrain dans l’enclos des Cordeliers, au prix de 10,400 francs !

Le vote relatif à l’école mutuelle des garçons mérite d’être remarqué en raison des circonstances. Les frères des écoles chrétiennes avaient été rappelés, en 1817, sur la demande de la commission administrative des écoles primaires, mais la majorité du conseil voulait que les pères de famille fussent libres de choisir les instituteurs de leurs enfants. On voulait aussi appliquer le système encore nouveau de l’enseignement mutuel. C’est ainsi que l’école laïque des garçons fut bâtie, dans l’emplacement qu’elle occupe, d’après un devis d’environ 16,000 francs.

Tout cela se faisait au commencement de l’année 1820 et on pouvait déjà constater un progrès dans la situation de la ville. Un quartier s’ouvrait dans les enclos des Cordeliers et des Ursulines, la population augmentait et les ressources du budget variaient de 60 à 70,000 fr. La paix ramenait l’activité dans les affaires et par suite les fêtes publiques. Les courses de chevaux, suspendues depuis 1815, à cause du malheur des temps, et rétablies en 1819, avaient causé une satisfaction d’autant plus vive que ces courses étaient peu répandues.

Dans l’ordre religieux et charitable, c’est encore de 1815 à 1820 qu’on vit naître, à Saint-Brieuc, plusieurs institutions populaires, dues à l’initiative ou au concours de M. Jean-Marie de La Mennais : les frères de l’instruction chrétienne, la Providence et l’orphelinat de Mlle Bagot. Ces fondations furent la suite d’une mission célèbre, donnée par les Jésuites à Saint-Brieuc, au mois d’octobre 1816. Elles inaugurèrent le mouvement religieux inspiré en grande partie par M. de La Mennais, pendant qu’il administra le diocèse, en qualité de vicaire-général capitulaire, de 1815 à 1819. Au moment où ce bon prêtre s’essayait aux œuvres charitables, son frère Félix vint se reposer auprès de lui de ses premières agitations. C’est à Saint-Brieuc qu’il fut ordonné diacre, dans la première semaine du carème de 1816, et qu’il écrivit, suivant quelques-uns, le premier volume de l’Essai sur l’indifférence.

La correspondance des deux frères est remplie de curieux détails sur l’esprit qui régnait à Saint-Brieuc, sur les deux courants qui se heurtaient dans le mouvement politique et religieux. M. Jean-Marie de La Mennais, que nous avons vu si inquiet en 1815, commençait à se rassurer : « Le courage des honnêtes gens, dit-il, se relève ; les méchants montrent déjà moins d’audace ». M. Félix, au contraire, voyait partout le triomphe de la Révolution, et frappant, avec une énergie qui allait jusqu’à la violence, sur les hommes et sur les gouvernements, il ne craignait pas de dire: « On insulte le roi publiquement et il le trouve bon. La haine contre les prêtres est à son comble. Tout s’en va. L’Europe tombe en dissolution ».

L’ébranlement général qui eut lieu en 1820 dans la plupart des états européens, fit croire que ces prévisions allaient se réaliser. La lutte entre les monarchies absolues et la Révolution devint générale. La France, travaillée depuis longtemps par les sociétés secrètes, ne put échapper à cette crise et, le 13 février 1820, le duc de Berry périt assassiné. Ce fut un coup bien funeste pour la politique libérale qui gouvernait alors, et le prétexte des mesures de réaction que prit le duc de Richelieu, à son retour au ministère. Les élections de 1820 se firent sous l’influence de la loi du double vote, d’après laquelle un grand propriétaire pouvait voter à la fois dans un collège électoral d’arrondissement et dans celui de département. La députation des Côtes-du-Nord fut composée de six membres : MM. Beslay, comte de Kergariou, marquis de La Moussaye, baron de Saint-Aignan, comte Conen de Saint-Luc, Haouisée de La Ville au Comte. Le premier représentait l’ancien parti libéral ; les autres, la politique de résistance, dans ses diverses nuances. Les conséquences de cette évolution se firent sentir non seulement dans l’ordre politique, mais aussi dans la vie municipale, dont le développement fut sensiblement retardé.

Les années suivantes, l’affaire des casernes amena de longs pourparlers entre le ministère de la guerre et la municipalité. L’ancien hospice, abandonné à la ville, en 1810, pour servir au logement des troupes, avait été converti par elle en atelier des enfants du bureau de bienfaisance. L’État avait ratifié cet emploi en 1816, à la condition que la caserne des Ursulines fût agrandie de manière à recevoir l’effectif annoncé. Après trois ans de discussions, la garnison fut réduite à 800 hommes, sans cavalerie, et la quote-part de la ville dans la dépense, à 60,000 francs sur un devis de 178,000. Jusqu’alors, grâce à l’économie de ses administrateurs, la ville n’avait pas eu de dettes. Il lui fallut se résigner à faire un emprunt de 60,000 francs. Le conseil et les plus imposés votèrent, en 1822, pour le rembourser, la levée, pendant douze ans, d’une imposition de 5 centimes sur le principal du foncier, du personnel et du mobilier, et une augmentation de 30 centimes par stère de bois de chauffage.

Est-ce à cause de cet emprunt que le conseil supprima, d’accord avec le ministre de l’intérieur, l’école mutuelle des garçons ? L’économie, minime d’ailleurs, n’aurait pas été, en tout cas, une raison suffisante. Si donc nous avons aimé à reconnaître que les conseils de 1817 et de 1820 avaient été bien inspirés en laissant aux pères de famille le choix des instituteurs de leurs enfants, il ne nous en coûte pas d’ajouter que celui de 1823 fut moins libéral, en supprimant l’une des deux écoles rivales.

Le collège n’avait pas non plus à se louer des libéralités de la ville, bien qu’il comptât de 300 à 350 élèves et qu’il fût placé sous une direction ecclésiastique. Le principal nommé par la commission supérieure de l’instruction publique fut en effet, de 1815 à 1823, M. l’abbé Souchet ; de 1823 à 1830, M. l’abbé Botrel. Le personnel ne fut plus composé que de dix professeurs, cinq laïques et cinq ecclésiastiques, car on crut devoir supprimer deux chaires et réduire la subvention communale de 8,000 à 3,500 fr. Il en résultait, chaque année, un déficit que la ville était obligée de combler, sans avoir le mérite d’encourager un service important.

La situation financière cependant n’avait rien d’alarmant, et les fêtes, qui reprenaient dans notre ville, témoignaient bien, cette fois, de la prospérité publique. La mairie, restée vacante quelque temps, était occupée depuis 1823 par M. Geslin de Bourgogne, qui la conserva jusqu’à la Révolution de 1830. À l’occasion des fêtes des courses de 1823, la statue de Duguesclin fut inaugurée, le 20 juillet, en grande pompe, sur la petite promenade, qui a gardé le nom du héros breton. Des discours furent prononcés en son honneur par le préfet Frottier de Bagneux et le maréchal de camp de La Boëssière, commandant le département. Saint-Brieuc n’a pas vu naître Duguesclin, mais il appartenait bien au chef-lieu des Côtes-du-Nord de revendiquer celui qui est la gloire du département tout entier. Au mois de novembre de la même année, Saint-Brieuc fit une brillante réception à deux bataillons de la garde royale qui avaient débarqué à Brest, en revenant d’Espagne, et se rendaient à Paris.

Don Miguel, fuyant le Portugal, traversa Saint-Brieuc, le 9 juin 1824, et de nombreux exilés portugais y reçurent après lui une généreuse hospitalité.

En préparant le budget de l’année suivante, l’administration municipale constatait, avec une fierté qui mérite bien l’indulgence, que Saint-Brieuc avait des promenades soignées et de belles casernes, et elle ajoutait, avec une sagesse qu’il serait bon d’imiter : « on doit tâcher de se procurer les établissements utiles, mais il faut de l’économie et du temps ».

Dans ces dispositions, la ville de Saint-Brieuc vit passer avec calme les élections de 1824 et, la même année, la transmission du pouvoir, de Louis XVIII à Charles X. Habile et modéré, le premier de ces deux princes avait triomphé de grandes difficultés, et commencé à réconcilier l’ancienne société et la nouvelle, sans se faire le serviteur d’aucun parti. Le règne de Charles X s’ouvrit donc sous des auspices favorables, au milieu de la renaissance de l’industrie, du commerce, des lettres et des arts ; aussi le jour du sacre, le 29 mai 1825, fut-il célébré à Saint-Brieuc non seulement à la préfecture, par la société officielle, mais encore par un bal à l’Hôtel de Ville et des danses publiques où se rencontrèrent toutes les classes de la population.

La politique les divisa de nouveau, et le gouvernement, rencontrant de toutes parts la plus vive opposition à ses projets, se résolut à dissoudre la Chambre des députés. Les élections de 1827 ayant donné plus de force à l’élément libéral, le ministère Villèle fît place au ministère Martignac, qui rentra dans la voie des réformes. Il présenta plusieurs projets de loi sur l’organisation départementale et communale, notamment pour faire élire les conseils et les officiers municipaux ; mais d’un autre côté le roi, tout en laissant déposer dans les esprits, à certaines heures, des germes de liberté, semblait craindre de les voir lever. Il profita de la résistance faite à M. de Martignac par les partis extrêmes pour prendre, suivant ses goûts, un ministère tout à fait opposé à la Révolution et, au mois d’août 1829, il confia la direction des affaires à M. de Polignac. À Saint-Brieuc comme ailleurs, la bourgeoisie s’organisa pour la lutte et s’enrôla dans les sociétés secrètes, ou même, au grand jour, dans la fameuse société : Aide-toi, le ciel t’aidera.

L’opposition fut servie à souhait par une discussion d’ordre administratif qui agitait depuis quelque temps le conseil municipal, et qui finit par indisposer contre le gouvernement plusieurs hommes dont le dévouement n’était pas contesté. Il s’agissait de l’octroi, c’est-à-dire de la source la plus importante des recettes municipales. La ville avait repris la gestion de son octroi, mais l’administration supérieure lui rappelait sans cesse les dispositions de la loi du 28 avril 1816, d’après lesquelles les droits d’octroi sur les boissons ne pouvaient excéder ceux qu’on percevait au profit du Trésor, à moins que l’exception ne fût consacrée par une loi. La lutte à ce sujet devint particulièrement vive à partir de 1826. Le ministre exigeait que la ville diminuât l’octroi sur les boissons et frappât des droits compensateurs sur les comestibles et surtout sur la viande. Le conseil répondit qu’appelé à émettre son opinion, il regardait comme un devoir de la donner telle que sa conviction la dictait ; que l’octroi sur le cidre, qui représentait les deux tiers du revenu, étant de 1 fr. 75 par hectolitre et le droit d’entrée de 0 fr. 65 seulement, il en résulterait une perte de 30,000 fr. si l’on ramenait le premier au second, et qu’il serait impossible de se procurer cette somme en frappant les comestibles, et par suite de solder l’emprunt. En agissant ainsi, le conseil était l’organe de la population, car la taxe exigée était onéreuse et impopulaire. Le gouvernement, ne pouvant vaincre cette résistance opiniâtre, établit d’office un nouveau tarif, d’après lequel les recettes de 1820 devaient diminuer de 50,000 francs. En présence d’un pareil acte, le conseil décida de s’en rapporter à l’autorité supérieure pour la fixation des dépenses, et presque tous les membres s’abstinrent de signer au registre. L’administration était devenue impossible. En vain fit-on intervenir à Paris le préfet, les députés, M. de Kergariou, pair de France, M. de La Moussaye, ambassadeur ; en vain lit-on remettre un mémoire aux députés chargés de poursuivre le rapport de la loi sur les boissons, il fallut, par nécessité, céder sur l’admission des comestibles au tarif et se borner à transiger sur quelques autres points. La réduction opérée sur l’octroi, en bouleversant les finances de la ville, ne tourna pas au profit des consommateurs, mais seulement des aubergistes. Le moment n’était guère favorable pour tenter une pareille innovation, car l’hiver rigoureux de 1829 avait fait suspendre le travail pendant un mois et réduit à la misère près de 700 familles ; aussi la perception de la nouvelle taxe provoqua-t-elle des troubles sérieux, peu de temps avant la Révolution de 1830.

L’indépendance si nettement affirmée d’un conseil nommé par le pouvoir, prouve bien que le pays commençait à s’habituer à la libre discussion des affaires locales, et à plus forte raison des affaires politiques, sur lesquelles l’opinion publique agissait alors plus efficacement. Il ne faut donc pas être étonné si, après une année du gouvernement de M. de Polignac et la dissolution de la Chambre des députés, les élections de 1830 ne furent pas tout à fait semblables à celles de 1824 et de 1827 dans les Côtes-du-Nord. Trois des anciens députés furent conservés : MM. Frottier de Bagneux et de Quélen, par le collège électoral du département, et M. Bizien du Lézard, par celui de l’arrondissement de Dinan. Le collège de Saint-Brieuc, en choisissant M. Le Corgne de Bonabry, ne se sépara pas de la politique du gouvernement ; mais l’opposition fit nommer, à Lannion, M. Bernard, et à Guingamp, M. Beslay. Ce dernier, ancien agent national pendant la Révolution, avait siégé, six fois, au nom de ses compatriotes de Dinan, dans les assemblées législatives du Consulat, de l’Empire et de la Restauration, et se présentait comme le plus vieux champion du parti libéral dans les Côtes-du-Nord. Il venait de signaler sa rentrée dans la vie politique en proposant d’organiser, en Bretagne, une association dont les membres devaient s’engager à refuser l’impôt, si le ministère violait la constitution. Cette menace eut un grand retentissement et, tout en restant à l’état de projet, elle alarma le gouvernement et donna un regain de popularité à Charles Beslay, qui fut élu député par plusieurs collèges. La session annoncée n’eut lieu qu’après la révolution de juillet.

II. — INSTITUTIONS DIVERSES.


Au premier rang des travaux dont s’enorgueillissait le conseil municipal en 1825, nous avons cité « des promenades soignées et de belles casernes ». Il faut y ajouter l’école mutuelle des garçons, dans la rue aux Chèvres, et le bâtiment du poids public et des pompes, qui fut adossé à la cathédrale malgré les protestations de l’évêque. Par ailleurs, il n’y eut que des projets pour l’établissement d’un abreuvoir, de lavoirs et de halles. On procédait avec tant de prudence et d’économie que, tout en reconnaissant la nécessité d’éclairer les rues, une délibération, du mois d’avril 1817, ordonna seulement de placer dans les principaux quartiers douze anciens réverbères, et de les tenir allumés jusqu’à onze heures du soir.

Les établissements d’instruction publique furent soutenus, mais avec une telle économie qu’on supprima l’une des écoles primaires et qu’on réduisit la subvention du collège, tout en parlant de la reconstruire. Les établissements de bienfaisance reçurent quelques subventions. À l’hôpital, on put continuer d’approprier l’ancien couvent à sa nouvelle destination et construire, en 1829, un édifice destiné dans le principe aux fous des deux sexes. Toutefois, l’exiguïté du local ne permit d’y installer que les folles, et un certain nombre d’hommes restèrent déposés à la prison de Saint-Brieuc, en attendant qu’on trouvât pour eux un lieu plus convenable. Le bureau de bienfaisance, installé récemment dans l’ancien hôpital de la Madeleine par le conseil municipal, fut encouragé par le même conseil, en 1817, à créer un atelier de 60 jeunes garçons, sur le modèle de celui des jeunes filles, qui était, depuis plusieurs années, en pleine voie de prospérité. Malheureusement, ces dépenses n’étant pas couvertes par des recettes permanentes, mirent le trouble pour longtemps dans les finances de l’hôpital et du bureau. Il en fut de même pour les finances municipales, à la fin de la Restauration. Jusqu’à 1828, le produit de plus en plus fort de l’octroi avait permis de couvrir les dépenses ordinaires, qui s’élevèrent, avec les extraordinaires, en 1816, à 64,035 fr. ; en 1819, à 70,626 ; en 1821, à 90,960 ; en 1825, à 142,893 ; en 1828, à 99,661 fr. Cette situation fut gravement compromise quand le gouvernement, en imposant le système d’octroi dont nous avons parlé, diminua sensiblement les recettes, sans alléger le fardeau des dépenses.

L’administration municipale, de 1815 à 1830, a généralement fait preuve d’ordre et d’économie. Nous nous plaisons à le rappeler, en citant les noms de ses principaux membres :

Maires.

1815. Guysot-Boismenu. 1818. De La Ville au Comte.
1816. Prud’homme. 1823. Geslin de Bourgogne.

Parmi les notables de cette époque, nous remarquons : MM. Thierry, Sébert, Cartel, Latimier du Clésieux, Bourel-Roncière, Charner, Guimart, de La Tribonnière, Deszille, Puis, Delaunay, Brangolo, Legal-Lasalle, Bonamy, Cl. Rouxel, de Kerautem, Le Cor, Le Nepvou de Carfort. Cinq ou six d’entre eux étaient à la tête d’administrations publiques. Ce sont donc des bourgeois et des fonctionnaires que le pouvoir monarchique choisissait de préférence, pour leur confier la direction des affaires municipales.

Les officiers municipaux et les conseillers étaient, comme au temps de l’Empire, nommés par le gouvernement. Les députés au Corps législatif étaient seuls élus par les collèges électoraux pour cinq ans. Ceux des Côtes-du-Nord furent d’abord au nombre de 7, en 1815 ; de 4, en 1816 ; puis de 6, en 1820, en 1824, 1827 et 1830. Parmi les élus, nous n’avons remarqué que M. Haouisée de La Ville au Comte qui soit sorti de Saint-Brieuc dans la réélection de 1820, et M. Le Corgne de Bonabry, dans celle du mois de juin 1830. Au lieu d’élargir le système électif dans l’ordre politique, on le restreignit à partir de 1820, en donnant la prépondérance aux grands propriétaires, ce qui n’empêcha pas la Chambre ainsi nommée de se mettre, dans la session de 1830, du côté de la Révolution.

Il est étonnant que, dans une période de paix de quinze années, la population de Saint-Brieuc n’ait guère augmenté que de 2,000 personnes environ, et encore doit-on les ranger dans la partie flottante. Voici en effet les chiffres fournis par les documents officiels :

Dénombrement.
1816 à 1820. ― 8,090 habitants
1820 à 1826. ― 9,936    ―
1826 à 1831. ― 9,963    ―
Relevé de l’état civil.
1816. Nais. 333. Mar. 69. Décès, 351. | 1825. Nais. 366. Mar. 69. Décès, 295
1817. 350. 62. 351. | 1826. 344. 87. 319.
1818. 336. 59. 356. | 1827. 362. 80. 361.
1819. 331. 84. 322. | 1828. 355. 74. 338.
1820. 330. 61. 326. | 1829. 367. 90. 303.
1821. 349. 58. 281. | 1830. 372. 85. 451.
1822. 347. 63. 312. |
1823. 339. 69. 267. | Totaux. 5.200. 1.081. 4.952.
1824. 319. 71. 319. | Moyenne. 346. 72. 330.

D’après le second tableau, les naissances ne l’auraient emporté sur les décès que de 248. Ce chiffre accuse un état stationnaire, ou peu s’en faut, dans la population indigène, et semble prouver que la différence constatée plus haut dans le dénombrement provient de relevés mal faits, ou de l’introduction parmi les habitants d’un élément étranger.

La comparaison des mercuriales, dressées par les soins de l’administration, donne lieu aussi à quelques curieuses observations, qui résultent du tableau suivant :


Années Froment Seigle Avoine Pain blanc Viande Bois
l’hect. l’hect. l’hect. le kil. le kil. le stère.
1816 18.30 à 32.67 12.78 à 24.83 5.31 à 10.92 0.36 à 0.52 0.70 8 à 9
1817 21.37 41.87 14.82 30.76 5.28 16.10 0.32 0.70 » »
1818 19.40 30.15 15.20 23.37 5.55 9.75 0.27 0.50 » »
1820 17.05 23.86 11.45 14.32 6   » 9.38 0.26 0.35 » »
1822 13.14 17.10 7.60 10.40 4.13 6   » 0.22 0.26 » 9 »
1826 13.55 18.70 8.57 12.30 4.35 7.84 0.24 0.29 » 9 »
1828 16.15 22.95 9   » 15.26 5.96 9.13 0.24 0.36 » 9 à 10
1830 17.66 20.20 11.45 13.73 5.99 8.12 0.30 0.32 » 10 à 11


On voit que, de 1816 à 1820, le prix des grains a été beaucoup plus élevé que de 1820 à 1830 et qu’il y a eu, surtout pendant la première période, des variations considérables dans la même année. C’est l’année 1817 qui a vu les cours plus hauts, assez rapprochés de ceux de 1812, sous l’Empire, de même que les prix les plus bas ont été cotés on 1822 et en 1807. Dans la seconde période de la Restauration, les cours se sont maintenus dans une moyenne convenable pour le producteur et pour le consommateur, et la population n’a pas eu à souffrir de ces crises alimentaires, si fréquentes dans les époques précédentes.

En dehors des faits sur lesquels la municipalité était appelée à exercer directement son action, il est juste de rappeler quelques fondations dues à l’initiative d’associations ou de particuliers. Au premier rang de ces derniers, nous avons déjà cité M. Jean-Marie de La Mennais, et c’est son œuvre de prédilection, l’instruction populaire, qu’il nous reste à faire connaître.

Après avoir contribué, en 1817, à rappeler les frères de Saint-Yon ou de Lasalle et les avoir aidés à s’établir, M. de La Mennais s’occupa de fonder un autre institut, pour donner plus spécialement l’instruction aux enfants des campagnes. Dans ce but, il réunit autour de lui, au mois de septembre 1817, dans sa maison de la rue Notre-Dame, quelques jeunes gens auxquels il enseigna l’arithmétique et l’orthographe. Cette réunion fut le berceau des frères de l’instruction chrétienne, qui s’organisèrent à Auray en 1820 et eurent bientôt leur maison-mère à Ploërmel.

En même temps, l’ordre de la Providence se formait, sous la direction de M. de La Mennais, pour l’instruction des jeunes filles pauvres. Ce fut d’abord une congrégation laïque qui, à la suite de la célèbre mission de 1816, recueillit plusieurs petites filles, dont quatre mendiantes. Une partie de la congrégation ouvrit une école dans la rue Fardel et s’établit bientôt dans une dépendance de l’ancien couvent des Ursulines. Elle garda le nom de Providence et reçut sa règle de M. de La Mennais, en 1821. Cet établissement prospéra rapidement et compta, dès 1830, de 3 à 400 élèves. Mlle Julie Bagot, fille de l’ancien maire de Saint-Brieuc, avait pris part aux débuts de l’œuvre et s’était chargée des petites mendiantes. Sa modeste fortune fut consacrée à fonder un orphelinat, près de la chapelle Notre-Dame et de l’oratoire de saint Brieuc. Bientôt elle n’eut d’autres ressources que le faible travail de ces enfants et le produit d’une loterie dont les dames de Saint-Brieuc faisaient tous les frais. Mlle Bagot n’en persista pas moins à donner l’exemple du plus admirable dévouement.

Nous venons de mentionner les dames de Saint-Brieuc comme auxiliaires des œuvres charitables. Dans un autre genre, elles se distinguèrent par une création assez rare, qui leur permit d’exercer sur la société de Saint-Brieuc l’influence qu’on accorde à l’esprit et à la grâce : c’était la Chambre des dames. Cette réunion, ouverte aux hommes. mais dirigée et présidée par des dames, avait des réceptions extrêmement recherchées par les familles de la bourgeoisie, qui s’y groupèrent, sinon pour l’action, du moins pour le plaisir. De là, une animation joyeuse qui se répandit de proche en proche dans toutes les classes de la population, on donnant à la vieille cité un air de jeunesse et de vie.

Le théâtre, élevé à grands frais sous l’Empire, ne fut pour rien dans cette renaissance. L’organisation en était au contraire si défectueuse, au dire de l’auteur des Notions historiques, qu’à la fin de la Restauration, « il était devenu de mauvais ton d’y paraître, surtout pour les dames ». Ce fut donc un événement que l’arrivée de Mlle Georges à Saint-Brieuc, le 21 février 1829. Elle était accompagnée d’une troupe choisie. Bien qu’elle eût déjà perdu de son talent et de sa beauté, la célèbre tragédienne excita cependant l’enthousiasme des nombreux spectateurs accourus pour la voir des villes voisines et, chaque soir, la salle fut comble, par exception.

Une société plus grave que la Chambre des dames fut fondée pour renouveler les traditions du bureau d’agriculture, des arts et du commerce, établi dans chaque diocèse par les États de Bretagne. Elle fut solennellement installée à Saint-Brieuc, le 7 septembre 1817, sous le nom de Société d’agriculture, des arts et du commerce, et favorisa surtout, au début, le progrès agricole, en distribuant des primes et des graines et en faisant quelques publications utiles.

Nous y rattachons les observations météorologiques, commencées par M. Marée, professeur de physique au collège, et continuées par lui, avec beaucoup de constance, jusqu’à 1860. En attendant que nous ayons recours à ses travaux d’ensemble, notons que le thermomètre de Réaumur marqua, le 20 juillet 1825, à midi, 34 degrés au soleil et 24, à l’ombre ; qu’il descendit, le 2 février 1830, à 15 degrés au-dessous de zéro. Il n’y avait pas eu à Saint-Brieuc d’hiver aussi rigoureux depuis 1788 et 1795.

Les courses de chevaux, dont nous avons annoncé le rétablissement, en 1819, sur les grèves de Cesson, prirent un plus grand développement, lorsque le règlement du 16 mars 1825 eut fait de Saint-Brieuc le chef-lieu du 4e arrondissement de courses, comprenant les cinq départements bretons et ceux de Maine-et-Loire, de la Vendée, des Deux-Sèvres et de la Mayenne. Le nombre des concurrents augmenta naturellement et s’éleva de 17 à 46 en 1825, à 68, en 1828 ; mais comme la supériorité appartenait dans ces courses aux chevaux de Maine-et-Loire, le conseil général fut obligé, en 1828, de fonder des prix spéciaux pour ceux du département. Les courses de cette dernière année, commencées de la manière la plus brillante, eurent à souffrir, le second jour, 7 juillet, d’un orage épouvantable qui bouleversa la grève, si belle ordinairement, et en fit un océan de boue, d’où se retirèrent avec peine piétons et cavaliers.

L’industrie locale se développa un peu, sous la Restauration, dans le cercle des branches déjà exploitées. À côté de l’imprimerie Prud’homme, restée seule à Saint-Brieuc depuis la fermeture des maisons Beauchemin et Bourel, M. Guyon vint fonder, vers 1819, un autre établissement, très modeste au début. Un savant estimé, M. Le Maout, se fit connaître comme industriel en fabriquant la moutarde dite celtique, qui eut une mention honorable, en 1816, à l’exposition des produits de l’industrie française. Célébrée par les gourmets les plus renommés, portée sur la carte gastronomique de France, cette moutarde fut bientôt expédiée dans toute l’Europe et même en Amérique, et eut un débit annuel d’environ 15,000 pots à 1 franc le pot, en moyenne.

En 1825, le gouvernement fonda l’enseignement industriel, pour venir en aide aux efforts individuels. Dans tous les ports, militaires ou marchands, les professeurs d’hydrographie reçurent ordre de faire des cours de géométrie et de mécanique appliquées aux arts et métiers. Ces cours furent fixés, à Saint-Brieuc, au mardi et au vendredi soir, et confiés à un savant professeur d’hydrographie, M. Dubus. L’inauguration en fut faite avec une grande pompe, le 16 octobre, en présence du préfet, de l’évêque et de nombreux auditeurs.

Le commerce maritime vit commencer une nouvelle époque de prospérité, grâce aux travaux importants qu’on entrepris au Légué. On se préoccupait depuis longtemps d’établir au port Favigo, à la place de la passerelle submersible, un pont roulant, de manière à ne pas empêcher plus tard le prolongement du canal jusqu’au pont de Gouët. La première pierre du nouveau pont fut posée en 1819 et les travaux, terminés en 1821, coûtèrent environ 36,000 fr. Ils donnèrent lieu à de vives réclamations de la part de la ville de Saint-Brieuc, car l’administration supérieure s’était décidée, en cours d’exécution, à faire un pont fixe. Ce fut ce dernier projet qui l’emporta. Immédiatement après, le gouvernement ordonna de compléter le système des quais, qui n’avait été abordé que par parties. On construisit, de 1821 à 1829, sur les plans de l’ingénieur en chef Lecor, 395 mètres de murs de quais sur la rive droite et 350, sur la rive gauche ; on établit deux grils de carénage avec cales de service et un chantier de construction. La dépense fut de 300,000 francs.

L’achèvement des travaux fut suivi de l’établissement d’un entrepôt réel au Légué. Cette faveur, accordée déjà en 1776 et ajournée par suite de la guerre d’Amérique et de la Révolution, fut renouvelée par la loi, du 17 mai 1826 et rendit nécessaire la construction d’un bâtiment pour la douane. Malgré l’opposition de la commune de Plérin, il fut construit sur la rive droite. La ville de Saint-Brieuc fut encore obligée, à cette occasion, de faire valoir ses anciens sacrifices et ses droits sur le port.

La pêche de la morue avait pris un grand développement dans la baie de Saint-Brieuc, car il fut constaté qu’en 1829, les seuls ports du Légué, de Binic et du Portrieux envoyaient à Terre-Neuve 41 navires, montés par 3,000 marins environ, et représentant une valeur de 3 millions, que garantissait l’assurance mutuelle des armateurs de la baie.

Le mouvement que nous avons signalé dans l’agriculture, l’industrie et le commerce, n’est constaté que dans de rares documents administratifs. La presse locale, un peu plus libre cependant, n’était représentée par aucun organe important. À titre de curiosité, on peut mentionner une Feuille du jour, dont quelques numéros furent publiés, de 1815 à 1816, par Beauchemin. M. Kerviler, dans son récent Essai de bibliographie, en cite un exemplaire du 22 avril 1816 , contenant « une histoire de Napoléon Bonaparte, suivie de sa vente après ses mauvaises affaires, sa confession générale et sa mort civile ». Le Journal des Côtes-du-Nord existait toujours, ainsi que la Feuille d’annonces. Celle-ci, restée seule en 1821, subit plusieurs transformations. En la réorganisant, le 10 janvier 1829, dans sa 19e année, sous le titre : « Feuille d’annonces littéraire, agricole, industrielle et commerciale des Côtes-du-Nord », M. Chevalier déclara qu’un journal politique était impossible à Saint-Brieuc, tant à cause du chiffre élevé du cautionnement que du goût du public. « Ce qu’on veut, disait-il, c’est de la politique départementale, c’est-à-dire des attaques contre les actes de l’autorité. On ne veut voir que des abus ». Le moment n’était pas encore venu d’éveiller l’esprit public, et la feuille d’annonces se borna, outre les faits divers, à insérer un plus grand nombre d’articles d’économie rurale.

Les hommes distingués fournis par la ville de Saint-Brieuc à cette époque étaient surtout des administrateurs. Quant aux écrivains, nous les avons vus déjà figurer sous l’Empire. Trois d’entre eux sont morts pendant la Restauration : Allaire et les deux Catineau. Leur rôle a été modeste et leur vie presque tout entière s’est passée en dehors de Saint-Brieuc.

Allaire, Julien, naquit à Saint-Brieuc, le 18 janvier 1742. Receveur-général des domaines de la généralité de Limoges avant la Révolution, il était administrateur général en 1789. Nommé, à l’époque de la réorganisation, l’un des administrateurs des forêts, il fut chargé du contentieux et dureboisement. Il mourut en 1816, laissant en manuscrit le récit d’un voyage fait, en 1814, dans les forêts des bords du Rhin

Catineau, Etienne, naquit à Saint-Brieuc, le 19 octobre 1769. Il devint imprimeur et éditeur d’un journal à Poitiers, fut poursuivi et condamné sous la Restauration et mourut en 1825. Il a composé un Annuaire de la Vienne et un Dictionnaire français-italien et italien-français.

Catineau-Laroche, Pierre Marie, frère du précédent, naquit à Saint-Brieuc, le 25 mars 1772. Après avoir voyagé très jeune à Saint-Domingue, aux États-Unis et en Angleterre, il revint en France, en 1797, fonda une imprimerie et publia un Dictionnaire de poche de la langue française, des Réflexions et un Projet de décret sur la librairie. Sous l’Empire, il fut chargé de missions en Allemagne et en Italie ; sous la Restauration, en Guyane. À son retour, il composa une Notice sur la Guyane française et occupa de hautes positions aux ministères des finances et du commerce. Il mourut en 1828[2].

En résumé, le gouvernement de la Restauration nous semble avoir procuré à la ville de Saint-Brieuc plutôt le bon ordre et l’économie dans les affaires que le développement des libertés et des institutions municipales. Les administrateurs y ont fait preuve cependant d’une certaine initiative, qu’ils ont puisée dans une pratique plus large de la vie politique. On peut donc considérer la période de 1815 à 1830 comme la transition du régime de l’autorité à celui de la liberté.



  1. Lettres inédites de MM. Jean-Marie et Félix de La Mennais à M. l’abbé Bruté.
  2. Nous avons consulté, souvent avec fruit, la Biographie bretonne, publiée par Levot.