Histoire des doctrines économiques/2-2-2

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II

ADAM SMITH

Né en 1723 à Kirkcaldy, dans le comté de Fife en Écosse, fils d’un modeste contrôleur des douanes, Adam Smith fit ses études, d’abord à l’Université de Glascow, de 1737 à 1740, puis à celle d’Oxford, de 1740 à 1747. Il était destiné à la carrière ecclésiastique : mais sa liaison avec Hume et d’autres philosophes donna une direction plus indépendante à ses pensées. Smith revint en Écosse et ouvrit à Edimbourg, en 1748, des cours libres de littérature, qui commencèrent à fixer heureusement l’attention sur lui.

En 1751, il était nommé professeur à l’Université de Glascow, pour y enseigner d’abord la logique et ensuite, à partir de 1752, la philosophie morale. Sa Théorie des sentiments moraux, qui parut en 1759, le rangea parmi les philosophes les plus en vue de l’école écossaise. Ce livre devait rester son œuvre préférée : elle eut cinq éditions de son vivant, et lui-même ne cessa jamais de la mettre au dessus de sa Richesse des nations, bien que ce dernier ouvrage soit demeuré son véritable et unique titre de gloire.

Déjà en écrivant sa Theory of moral sentiments, Adam Smith laissait présager quelque grande œuvre de sociologie ou d’économie politique — « description, disait-il, des principes généraux, de lois et de gouvernement, ainsi que des différentes révolutions qu’ils ont subies dans les différentes époques et les différentes périodes de la société, non seulement en ce qui concerne la justice, mais encore en ce qui concerne la police, les revenus, les armes et tout ce qui touche à la loi ». — La découverte et la publication de toute cette partie de son cours de philosophie morale — Lectures on justice, police, revenue and arms — d’après les notes qu’un de ses élèves avait prises, viennent tout récemment de montrer la manière dont ces divers sujets étaient déjà envisagés par le futur auteur de la Richesse des nations[1].

En 1763, Adam Smith accompagne en France le jeune duc de Bucleugh et y passe une année. C’est Toulouse qui lui sert alors de résidence. Il fait un nouveau voyage en France en 1765. Cette fois ci, il séjourne à Paris ; il s’y lie d’une part avec les économistes, notamment Turgot et Quesnay, d’autre part avec les philosophes de l’Encyclopédie et particulièrement avec Helvétius. On s’est demandé si les idées philosophiques de Smith s’étaient modifiées à ce contact et si, de déiste comme il avait été dans sa Théorie des sentiments moraux, il n’était pas ensuite devenu matérialiste. Rien ne permet de croire qu’il en ait été ainsi, bien que le sens général de la Richesse des nations s’accorde indifféremment avec l’une ou l’autre de ces deux hypothèses. Mais Smith avait pu d’autant mieux garder ses premières opinions, que les encyclopédistes n’étaient point unanimes entre eux et qu’ils ne rattachaient aucunement leurs conceptions économiques à leurs systèmes philosophiques sur Dieu et le monde. Ce qui est certain, en tout cas, c’est que Smith, en 1790 et par conséquent quelques semaines seulement avant sa mort, revisa sa Théorie des sentiments moraux pour une sixième édition, sans rien enlever de la profession de foi déiste qu’il y avait insérée trente ans auparavant[2].

Adam Smith se retira ensuite à Kirkcaldy auprès de sa mère. C’est là qu’il prépara ses Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations[3], qui parurent en 1776. Il passa les dernières années de sa vie à Edimbourg, où il remplit les fonctions de commissaire des douanes de 1778 à 1790, et il y mourut, après avoir vu quatre éditions successives de sa Wealth of nations.

Ses meilleurs amis et ses admirateurs les plus sincères ont reconnu que cet ouvrage, d’une si vaste portée didactique, manque d’ordre à un très haut degré. J.-B. Say l’appelait « un vaste chaos d’idées justes ». Il est donc peut-être nécessaire d’en donner ici le sommaire, pour expliquer la marche, bizarre sans doute, mais certainement fort étudiée, que Smith a voulu suivre.

La Richesse des nations s’ouvre solennellement par une définition que tout le monde connaît : « Le travail annuel d’une nation, dit Smith, est le fonds primitif qui fournit à sa consommation toutes les choses nécessaires et commodes à la vie, et ces choses sont toujours ou le produit immédiat de ce travail, ou achetées des autres nations avec ce produit[4]. » C’est déjà une protestation contre le principe essentiel de l’école physiocratique.

Mais cette quantité des produits va dépendre : 1° de l’habileté et de la dextérité des travailleurs ; 2° de la « proportion entre le nombre de ceux qui sont occupés à un travail utile et de ceux qui ne le sont pas ». Ici perce déjà citez Adam Smith la tendance à ne voir l’utilité que dans la matière et dans les transformations physiques qu’elle peut subir, avec un dédain peut-être exagéré pour les efforts de l’esprit, fussent-ils dirigés vers la production des biens économiques. On aurait pu lui demander, ce semble, et avant toutes choses, à quoi se reconnaît l’utilité d’un travail[5].

Smith annonce ensuite le plan de son ouvrage. Un premier livre sera consacré aux « causes qui perfectionnent le pouvoir productif du travail » et à « l’ordre suivant lequel ses produits se distribuent naturellement » (il y aura donc là tout à la fois de la production, de la répartition et de la circulation). Puis il remarque — sans beaucoup de raison — que la proportion des travailleurs utiles et productifs par rapport aux non-travailleurs « est partout en proportion de la quantité du capital employé à les mettre en œuvre et de la manière particulière dont ce capital est employé[6] ». Voilà le mot « capital » qui intervient : il faut l’expliquer, et ce sera le sujet du deuxième livre. Ce sont ces deux premiers livres qui renferment vraiment le système économique de Smith ; Le livre III parlera du développement inégal et non proportionnel des industries aux différents âges et particulièrement des villes et des campagnes ; le livre IV, des différentes théories d’économie politique déjà constituées ; le livre V, du revenu du souverain et par conséquent de l’impôt.

Tel est le plan, et nous allons voir, avec quelques détails de plus, comment il a été suivi.

Smith entre brutalement en matière par la division du travail, sans donner aucune définition, pas même celle des richesses. C’est la division du travail qui a réalisé les plus grandes améliorations dans la puissance productive de ce travail[7] ; car les machines naissent à peine, et Smith ne peut encore ni connaître, ni deviner les conséquences industrielles des inventions scientifiques[8]. Ensuite les échanges sont d’autant plus nécessaires que le travail est plus divisé. La nécessité des échanges implique à son tour la nécessite de la monnaie. Donc théorie de la monnaie[9] : et l’étude qui en est faite se termine par le passage bien connu, mais obscur ou inexact, sur la distinction de la valeur en usage et de la valeur en échange[10].

De la monnaie nous passons au prix[11]. On distingue le « prix réel », exprimé en travail, et le « prix nominal », exprimé en argent. Là se placera théorie du travail considéré comme étalon de la valeur en ce sens que « la valeur d’une denrée quelconque (pour celui qui l’échange) est égale à la quantité de travail que cette denrée le met en état d’acheter ou de commander[12] ». Smith veut alors décomposer ce prix en ses parties constituantes[13], ce qui l’entraîne dans une matière tout à fait différente, celle de la répartition. On pourrait trouver, dans les pages qui suivent, la base de la distinction du travail simple et du travail qualifié, laquelle jouera un rôle important dans le Capital de Karl Marx[14] ; on y voit aussi la notion de la rente, que Smith, toutefois, ne sépare pas du fermage[15] ; enfin, on y rencontre la confusion entre le loyer ou intérêt d’une part et le profit de l’autre, autrement dit entre le capitaliste et l’entrepreneur[16], confusion qui se perpétuera, surtout chez les économistes anglais, pendant plusieurs générations après Smith. Ce chapitre est un de ceux où les divisions et les définitions peuvent paraître le moins nettes et le moins exactes[17]. Vient ensuite la théorie du « prix naturel », que J.-B. Say va appeler les « frais de production » : ce prix naturel, pour Adam Smith, est « le plus bas qu’on puisse accepter pour un temps considérable de suite[18] ». En termes différents, c’est donc la formule du « producteur le moins favorisé » de Ricardo[19].

Ainsi amené, et pour ainsi dire d’une manière incidente, sur le terrain de la répartition, Smith va épuiser les sujets qui s’y rattachent, avec sa division tripartite des salaires, des profits et de la rente[20].

Sur les salaires, Smith débute en étudiant la situation du travailleur autonome, la seule qui existât, dit-il, « dans cet état primitif qui précède l’appropriation des terres et l’accumulation des capitaux… ; mais cet état ne put pas durer…, et dans tous les pays de l’Europe, pour un ouvrier indépendant, il y en a vingt qui servent sous un maître[21] ». Sans manifester ici de particulières sympathies pour la classe ouvrière, Smith attribue la dépression des salaires à un manque de liberté, parce que « nous n’avons point, dit-il, d’actes du Parlement contre les ligues qui tendent à abaisser le prix du travail ; nous en avons beaucoup contre celles qui tendent à le faire hausser[22] ». Il terminera cependant cette étude des salaires par des vœux en faveur de l’amélioration du sort des classes pauvres, amélioration qu’il rattachera à l’application de la loi sous-entendue du Wage-fund. « La demande de ceux qui vivent de salaires, dit-il, ne peut augmenter qu’à proportion de l’accroissement des fonds destinés à payer des salaires[23]… Elle augmente nécessairement avec l’accroissement des revenus et, des capitaux de chaque pays, et il n’est pas possible qu’elle augmente sans cela[24]. » Toutefois cette formule du wage-fund ne tarde pas à recevoir une restriction très sensible, puisque, aux pages suivantes, Smith revient à rattacher la hausse des salaires, « non pas à l’étendue actuelle de la richesse nationale, mais à son progrès continuel[25] », progrès dont la marque est « l’augmentation du nombre des habitants[26] » : pourtant cette dernière opinion, c’est-à-dire l’idée d’un rapport qui existerait entre la richesse et l’accroissement de la population, fait assez difficilement corps avec la doctrine d’ensemble de Smith et avec tout le système purement chrématistique de ses successeurs et disciples. En finissant, signalons dans ce chapitre une bonne et fine analyse des causes de l’inégalité des divers salaires comparés les uns aux autres.

Les deux chapitres qui suivent, « des profits du capital » et « des salaires et des profits dans les divers emplois du travail et du capital », sont inférieurs au précédent. Le terme « profits du capital » est un de ceux que les économistes plus récents ont le plus justement répudiés ; et Smith, qui a tant ajouté à Turgot, aurait pu, au contraire, trouver dans celui-ci le germe assez visible de la distinction entre le loyer ou intérêt du capital et le profit de l’entreprise[27].

Vient ensuite l’étude de la rente, que Smith, comme nous savons déjà, confond avec le fermage, quoiqu’il admette qu’une certaine partie de ce fermage puisse être accidentellement du profit ou intérêt de capital. Mais pour lui la rente, c’est-à-dire le fermage, est avant tout et essentiellement le prix de monopole que le propriétaire se fait donner pour la jouissance de la terre, prix aussi élevé que possible et le plus fort que le propriétaire puisse percevoir sans mettre en perte le fermier[28]. Ailleurs, pourtant, Smith trace fort heureusement la voie à Ricardo, en remarquant que la facilité des communications donne une rente[29] ; en notant que la nourriture de l’homme paraît être le seul des produits de la terre qui fournisse toujours et nécessairement de quoi payer une rente quelconque au propriétaire[30] » (Ricardo, on le sait, raisonnera toujours avec le blé) ; enfin, en observant que ce sont les frais de production du producteur le moins favorisé qui règlent le prix du marché[31].

Au point de vue social, la conclusion de ce chapitre va être que « toute amélioration qui se fait dans l’état de la société, tend… à faire hausser la rente réelle de la terre, à augmenter la richesse réelle du propriétaire, c’est-à-dire son pouvoir d’acheter le travail d’autrui ou le produit du travail d’autrui ». Il en est ainsi, tout particulièrement, de « l’amélioration des terres et de la culture » et de « tous les progrès, dans la puissance productive du travail, qui tendent à réduire le prix réel des ouvrages de manufacture[32] ». Le salaire lui-même, par conséquent, haussera, grâce à une demande plus active de travail ou de produits. Les intérêts des trois classes de la société, c’est-à-dire des propriétaires, des salariés et des industriels, sont donc présentés comme étant harmoniques, bien qu’il faille se défier des marchands, qui réclameront toujours la satisfaction de leurs intérêts propres et qui solliciteront à ce titre un régime de fiscalité et d’entraves[33]. Ce chapitre sur la rente est fâcheusement interrompu par une interminable digression sur les variations historiques du pouvoir de la monnaie et du pouvoir réciproque des deux métaux, ce qui fait qu’à lui seul il forme plus de la moitié de ce premier livre.

Passons au livre II, intitulé « De la nature des fonds ». Ces « fonds », c’est le capital et les approvisionnements, approvisionnements que Ricardo, un peu plus tard, rangera très nettement parmi le capital.

Smith fait ici des distinctions aussi heureuses que nouvelles, et il introduit dans la science des concepts vraiment féconds.

Les produits du travail, selon lui, peuvent être destinés, soit à une consommation immédiate, soit à quelque autre usage : dans ce dernier cas, ils constituent un fonds ou « stock »[34]. Puis, un peu plus nettement encore, il oppose le capital à « la portion (du produit) réservée pour servir immédiatement à la consommation et dont le caractère distinctif est de ne point rapporter de revenu ou de profit[35] ». Il met dans cette dernière catégorie les maisons, qui, donnant un revenu à leur propriétaire sans donner de nouvelles richesses à la société, ont été, depuis lors, classées très justement dans le capital lucratif ou privé, par opposition au capital productif ou social.

Le capital proprement dit — maisons non comprises — se subdivise en capital fixe et capital circulant. De chacun des deux, Adam Smith cite quatre catégories différentes, en comprenant, il est vrai, parmi le capital fixe, les qualités personnelles acquises par le travail[36]. Ce chapitre est un des plus nets et des plus originaux de tout l’ouvrage : il est trop souvent cité et trop présent à toutes les mémoires pour que nous entrions dans de nouveaux détails à son sujet[37]. Mais on trouvera peut-être étrange que Smith eût déjà expliqué au livre I les profits du capitaliste, avant d’avoir défini le capital et énuméré les diverses sortes de capitaux. Il y a là un défaut de logique dans l’arrangement des parties.

La suite de ce livre II n’a pas la même valeur, malgré des pages fort instructives. Adam Smith y traite de l’argent considéré comme capital et des papiers de crédit, chapitre long et lourd, où se trouve, cependant, la belle comparaison, fréquemment citée, entre les papiers de crédit et les routes en l’air, lesquelles rendraient autant de services que les routes sur terre, en ayant sur elles l’avantage de ne point enlever de terrain à la culture ; il y traite de la distinction du travail productif et du travail non productif, distinction qu’il n’aurait point faite s’il n’avait pas matérialisé avec un certain excès les idées d’utilité et de richesse[38] ; il y traite encore des fonds prêtés à intérêt et enfin des différents emplois des capitaux.

Mais des passages fort remarquables disséminés çà et là ne laissent pas de captiver l’attention. Nous citons les vues sur la formation du capital[39], les critiques de la prodigalité des gouvernements comparée à celle des particuliers[40] et l’exposition des causes qui font baisser le taux de l’intérêt. Est-ce l’augmentation de la quantité du métal ou des instruments de paiement ? Non ; et Smith, qui combat fort judicieusement Locke, Law et Montesquieu, conclut que ce qui fait baisser le taux de l’intérêt, c’est « la portion du produit annuel[41] qui est destinée à remplacer un capital que le producteur ne se soucie pas de prendre la peine d’employer lui-même[42] ».

Là s’arrête ou plutôt s’interrompt la partie vraiment didactique de l’œuvre.

Le livre III, qui décrit « la marche différente des progrès de l’opulence chez différentes nations », est un exposé de vues historiques, gâté par des théories métaphysiques préconçues, mais intéressant encore par les aperçus qui s’y trouvent sur la solidarité naturelle des intérêts entre les villes et les campagnes.

Le livre IV, consacré « aux systèmes d’économie politique », s’ouvre par une sorte de définition, très critiquée, de l’économie politique. Au lieu d’y voir une science qui préexiste logiquement à l’art pour contribuer à l’inspirer, Smith se borne à assigner à l’économie un but purement pratique. D’après lui, elle « se propose deux objets distincts : 1° procurer au peuple un revenu ou une subsistance abondante ; 2° fournir à l’État ou à la communauté un revenu suffisant pour le service public[43]. » Dans l’esprit d’Adam Smith elle ne serait donc qu’une des branches de la politique.

Après cela Smith ramène à deux les systèmes qui ont été soutenus avant lui : 1° le système mercantile (c’est lui qui a introduit ce mot) ; 2° le système agricole (ou physiocratique)[44].

Il commence par le système mercantile, qui, dit-il, est « moderne et le plus connu dans le pays et le siècle où j’écris[45] ». Smith, ici, avait pleinement raison, puisque l’Angleterre en était restée généralement à Mun et à Child, malgré tout l’ascendant que la physiocratie avait pris en France. Il est judicieux quand il classe les deux périodes successives du mercantilisme, la première caractérisée par la prohibition directe de la sortie du numéraire, et la seconde (qu’on appelle parfois le néo-mercantilisme) caractérisée par la théorie de la balance du commerce[46] ; il est surtout intéressant quand il fait la critique des «  entraves extraordinaires apportées à l’importation de presque toutes espèces de marchandises des pays avec lesquels on suppose la balance du commerce défavorable[47] ». Mais quelque adversaire qu’il soit des formules mercantilistes, Adam Smith n’en fait pas moins de très larges concessions à ce qu’on appellerait aujourd’hui le protectionnisme national. Nous n’en voulons pour preuves que son éloge des actes de navigation de Cromwell et de Charles II[48], sa thèse sur l’utilité des droits éducateurs[49], ses justes observations sur la nécessité de ne passer que lentement d’un régime d’entraves à un régime de liberté commerciale[50], enfin ses réserves en faveur de la protection, même permanente, des industries qui seraient nécessaires à la sécurité du pays[51].

Le système agricole ou physiocratique est réfuté plus faiblement. Tout en n’acceptant pas l’idée de la productivité exclusive et unique de l’agriculture, Smith s’attarde dans une idée encore beaucoup trop matérielle de la production. Ce qu’il voit et ce qu’il recherche, c’est moins la satisfaction des besoins, préparée peut-être ou procurée par des efforts de l’esprit aussi bien que du corps ; c’est plutôt un objet matériel façonné par l’ouvrier avec un apport plus ou moins direct de la nature, objet dans lequel se sont incarnées la productivité du travail et la valeur[52].

On peut même se demander si Smith a été juste pour les physiocrates. Il avait passé dix mois à Paris entre 1764 et 1766 ; il y avait été en relations assez intimes avec Quesnay et ses disciples, surtout avec Turgot, à qui Hume l’avait recommandé particulièrement : aussi, publiant sa Richesse des nations en 1776 et surtout la revisant d’une manière très attentive en 1784 pour la troisième édition, c’est-à-dire bien des années après l’élévation de Turgot au ministère en 1774, on ne comprend guère qu’il ait écrit et maintenu dédaigneusement ces quelques lignes, non exemples à coup sûr d’une erreur historique : « Le système qui représente le produit de la terre comme la seule source du revenu et de la richesse d’un pays, n’a jamais, autant que je sache, été adopté par aucune nation et n’existe à présent que dans les spéculations d’un petit nombre d’hommes en France… Ce n’est sûrement pas la peine de discuter fort au long les erreurs d’une théorie qui n’a jamais fait et qui vraisemblablement ne fera jamais de mal en aucun lieu du monde[53] ». Il altère également la vérité, quand il dit des physiocrates qu’ils « affectent de dégrader la classe des artisans, manufacturiers et marchands, en la désignant par la dénomination humiliante de classe stérile ou non productive ». On peut souscrire à ce jugement récent de M. Oncken — neutre d’ailleurs entre Anglais et Français — quand il ose dire que « la critique dirigée par Smith contre le système des économistes français n’est pas à la hauteur de ce que l’on était raisonnablement en droit d’attendre de lui[54] ». Adam Smith se trompait aussi en s’imaginant que « les écrivains de cette secte suivaient tous dans le fond et sans variation sensible la doctrine de M. Quesnay », et en appelant « petit livre » les deux volumes de Mercier de la Rivière sur l’Ordre naturel et essentiel des sociétés politiques[55].

Smith conclut que, « en écartant tous ces systèmes ou de préférences ou d’entraves (c’est-à-dire le système agricole et le système mercantile), le système simple et facile de la liberté naturelle vient se présenter de lui-même et se trouve tout établi[56] ». Il est injuste, ici, pour les physiocrates : car le sentiment des lois naturelles était chez eux beaucoup plus intense et surtout beaucoup plus philosophique que chez Adam Smith ; et la liberté qu’ils eussent voulu dans le régime du travail, du commerce intérieur et jusque dans les échanges internationaux — ici au moins avec Turgot — aurait été plus complète encore et plus humanitaire qu’avec Adam Smith.

Le dernier livre, « du revenu du souverain ou de la République », ne comprend que trois chapitres : 1° des dépenses ; 2° des sources du revenu ; 3° des dettes publiques.

Sur le caractère et le rôle de l’État, les principes que pose Adam Smith n’ont pas besoin d’être rappelés. Tout le monde connaît sa classification des trois devoirs du souverain, dont le premier est de « protéger la société contre la violence et l’invasion d’autres sociétés indépendantes » ; le second, de « protéger autant que possible chaque membre de la société contre l’oppression ou l’injustice de tout autre membre, ou bien d’établir une administration exacte de la justice » ; le troisième, enfin, d’ « élever et entretenir certains ouvrages publics et certaines institutions, que l’intérêt d’un particulier ou de quelques particuliers ne pourrait les porter à ériger ou à entretenir, parce que jamais le profit n’en rembourserait la dépense à un particulier ou à quelques particuliers, quoique, à l’égard d’une grande société, ce profit fasse beaucoup plus que rembourser la dépense[57] ».

On sait que depuis lors l’école de la liberté naturelle a elle-même sensiblement élargi le rôle de l’État. Tel que le dessine Adam Smith, il peut suffire, rigoureusement parlant, à la mission de « gardien du juste » dont l’État est investi. Mais la troisième partie de la tâche du souverain est trop circonscrite ; car l’État ne doit pas évaluer seulement en argent le résultat des diverses œuvres auxquelles il applique ses efforts ; celles qui le sollicitent peuvent à bien d’autres titres se recommander à ses encouragements et à ses faveurs, tout aussi bien, en sens inverse, que des mobiles désintéressés et non pécuniaires peuvent pousser des initiatives privées vers quelques-unes de ces œuvres ou de ces institutions qui préoccupent Adam Smith et qu’il veut confier tout entières au seul souverain[58].

Le revenu de l’État, c’est : 1° le revenu de son domaine ; 2° l’impôt, avec de judicieuses observations sur la tendance de l’impôt à prendre une importance relative toujours plus considérable à mesure que l’on s’éloigne de la féodalité pour avancer dans les temps modernes[59]. Les quatre maximes fiscales de Smith sont restées justement célèbres ; elles consistent : 1° dans la proportionnalité de l’impôt ; 2° dans sa détermination précise et non arbitraire ; 3° dans son adaptation aux plus grandes commodités du contribuable ; enfin, 4° dans l’économie de sa perception[60].

Le dernier chapitre, sur les dettes publiques, est relativement fort peu étendu, moins que ne l’eût permis le développement avancé où la science financière était déjà parvenue chez les Anglais.

— Telle est cette œuvre immense, demeurée universellement célèbre. Elle a plus de lacunes que d’erreurs ; mais ceux qui cèdent à la tentation de lui reprocher les unes ou les autres, oublient trop le progrès immense qu’elle a réalisé. On voit trop volontiers ce qui y manque : on est souvent injuste pour ce qui s’y trouve. La postérité a peu ajouté à la notion du capital ; elle n’a pas corrigé beaucoup dans la théorie de la répartition. Et tout cela jaillissait pour ainsi dire du premier jet, après le système des physiocrates, défectueux à tant d’égards, après quelques exposés épars des véritables principes, et après l’œuvre, didactique déjà, mais fausse à tant de points de vue, de James Denham Steuart.

Quelle est la méthode philosophique qu’Adam Smith a suivie ? Il aurait hésité lui-même à répondre à cette question si on la lui avait posée ; mais il suffit de le lire pour apprécier quelle large part il a faite à l’observation et à l’analyse des faits. C’est de la méthode inductive, croyons-nous, qu’il s’inspire le plus ordinairement ; et la démarcation profonde qui le sépare des physiocrates en est encore plus nette et mieux tranchée. En cela, du reste, il demeure ce qu’il s’était montré dans sa Théorie des sentiments moraux : car, d’après Smith moraliste, si la raison intervient dans le discernement du bien et du mal, ce n’est pas en acceptant ou en démontrant des principes de métaphysique, ni des concepts généraux, c’est tout simplement en généralisant les données empiriques qui naissent des sentiments, soit de sympathie, soit de répugnance, provoqués en nous par la vue répétée des actes moraux de nos semblables.

Les critiques dirigées contre Adam Smith peuvent être ramenées aux suivantes :

1° Le manque d’ordre. Nous n’avons pas la prétention de l’en justifier. L’œuvre est parsemée ça et là de digressions qui n’ont aucun rapport avec les sujets traités ; et le comte Garnier lui-même ne s’est pas fait scrupule d’en signaler les principales[61]. Citons les suivantes : à propos de la rente, une étude sur la variation de la valeur des métaux précieux pendant les quatre derniers siècles[62] ; à propos du capital et de l’argent considéré comme capital, une discussion sur les banques de circulation et le papier-monnaie[63] ; à propos du système mercantile, une dissertation sur les banques de dépôts et particulièrement sur la banque d’Amsterdam[64] ; enfin, à propos des traités de commerce, une dissertation sur les avantages du droit de seigneuriage[65] ;

2° Le caractère cosmopolite et universel que Smith donne à l’économie politique, n’accordant pas une attention suffisante aux diversités de temps et de pays, c’est-à-dire, en général, aux circonstances et aux faits concrets. Ce grief est formulé également contre tous les grands écrivains de cette période, et c’est l’école historique allemande qui s’en est faite le principal interprète : nous le discuterons pour tous en même temps[66] ;

3° L’optimisme basé sur le libre jeu de la liberté individuelle. Cette disposition particulière d’Adam Smith se conçoit mieux lorsque l’on réfléchit aux entraves dans lesquelles le commerce extérieur et l’industrie de l’Angleterre se débattaient encore de son temps et qui, par le maximum légal du salaire ouvrier, n’épargnaient pas même le régime du travail[67] ;

4° La restriction excessive des fonctions de l’État.

Ces deux derniers griefs ont été articulés à diverses reprises, notamment par Raymond et par List, au nom de l’économie politique nationale[68], et par tous les groupes divers de prétendus interventionnistes et de socialistes. Nous n’osons pas dire que les critiques sûr la trop grande restriction des fonctions de l’État n’aient pas quelque chose de fondé. Tout en sachant, quand il convient, s’inspirer des intérêts particuliers de l’Angleterre, Adam Smith a paru proclamer d’une manière un peu trop absolue l’accord permanent de l’intérêt privé et de l’intérêt général[69]. Cependant, si nous n’acquiesçons en aucune manière à son système de morale, nous ne croyons pas, quoi qu’on en ait dit[70], que cette morale de la sympathie qui est la sienne, ait exercé aucune influence appréciable sur l’orientation générale de la Richesse des nations.

Entre les physiocrates et lui, c’est cependant un point de dissemblance qu’il est bon de noter ; car Quesnay professe à l’égard des intérêts particuliers une défiance que Smith ne partage pas, pas plus du reste que Say et Ricardo ne la partageront après lui.

En tous cas il est très heureux pour la mémoire d’Adam Smith que dans son grand ouvrage et le seul qui lui ait survécu, il ait eu le bon sens de ne pas faire de philosophie, ce qui l’a sauvé d’en faire de la mauvaise.

  1. Sur la publication de ce cours d’Adam Smith par Edwin Cannan, en 1896, voyez supra, p. 237.
  2. On peut voir à cet égard un très long résumé de la discussion dans les Philosophischen Grundlagen des œkonomischen Liberalismus du R. P. Pesch (Op. cit., Freiburg, 1899, pp. 112 et s. et p. 159). — Oncken croit à une évolution d’Adam Smith vers le matérialisme.
  3. Inquiry into the nature and causes of the wealth of nations.
  4. T. I, p. 1 (Nous citerons toujours Adam Smith d’après l’édition Guillaumin, 1843).
  5. List sera un de ceux qui tireront le plus avantage de cette tendance à n’envisager que le côté matériel du travail et les œuvres seulement du corps. Voyez plus bas, même livre, ch. VII.
  6. T. I, p. 3.
  7. Livre I, ch. I-III.
  8. « Smith, dit Ingram, parut juste au commencement d’une grande révolution industrielle. L’époque productive et commerciale où il vivait, était, comme dit Cliffe Leslie, très productive et comparativement étroite : la seule machine à vapeur à laquelle il fait allusion est celle de Newcomen ; il ne mentionne le commerce du coton qu’une fois, et cela incidemment » (Ingram, Histoire de l’économie politique, trad. fr., p. 160).
  9. Ibid., ch. iv.
  10. T. I, p.35. — Voir nos Éléments d’économie politique, 2e édit., p. 26.
  11. L. I, ch. V-VII.
  12. Ibid., p. 38. — Voyez nos Éléments d’économie politique, 2e édition p. 254.
  13. Ch. VI : « Des parties constituantes du prix des marchandises ».
  14. Loc. cit., p. 65. — Voyez sur Marx, infra, 1. IV, ch. VI, § 2.
  15. Loc. cit., p. 68.
  16. Ibid., p. 66.
  17. Voici, par exemple, la répartition du prix du blé et l’ordre dans lequel Smith la propose : « Dans le prix du blé, dit-il, une partie paie la rente du propriétaire ; une autre paie les salaires ou l’entretien des ouvriers, ainsi que des bêtes de labour et de charroi employées à produire le blé, et la troisième paie le profit du fermier » (Loc. cit., p. 68). — Aujourd’hui nous ferions les parts suivantes et nous les ferions dans l’ordre suivant : 1° amortissement du capital circulant (semences) et du capital fixe (usure du matériel et du bétail), par le motif qu’il n’y a produit que par l’excédent des richesses nouvelles sur les richesses nécessairement consommées dans l’œuvre de la production ; 2° salaire des manœuvres ; 3° loyer net du capital fixe qui est fourni par le propriétaire foncier ; 4° rente foncière du propriétaire, si l’on admet en droit ce titre de répartition et si le prix de ferme n’est pas déjà absorbé en entier par le 3° qui précède ; 5°loyer net et intérêt des capitaux fixes et circulants que le fermier peut avoir consacrés ; 5° profit pour le fermier, en comprenant dans ce profit son salaire implicite ou de direction. Nous plaçons ces paris dans cet ordre, parce que c’est celui où elles défailliront si le produit brut total est insuffisant à les toutes satisfaire. Cependant, pour que le fermier eût un loyer et intérêt de ses capitaux et un profit d’entreprise, le propriétaire pourrait avoir consenti un prix de ferme qui exclût toute rente foncière : c’est même ce que nous croyons actuellement le plus probable et de beaucoup le plus général.
  18. Loc. cit., p. 81.
  19. Voyez nos Éléments d’économie politique, 2e édit., p. 493.
  20. Ch. VIII ; — ch. IX-X ; — ch. XI.
  21. Ch. VIII, (t. I. p. 84).
  22. Loc. cit., p. 86.
  23. C’est-à-dire la demande de travail par les patrons.
  24. Loc. cit., pp. 90-91.
  25. Loc. cit., p. 92.
  26. Loc. cit., p. 94.
  27. Turgot, Réflexions sur la formation et la distribution des richesses, § 86.
  28. « Cette part (c’est-à-dire celle que le propriétaire laisse au fermier pour remplacer le capital qui fournit là semence ; paie le travail, etc.) est évidemment la plus petite dont le fermier puisse se contenter sans être en perte… On pourrait se figurer que la rente de la terre n’est autre chose, souvent, qu’un profit ou un intérêt raisonnable du capital que le propriétaire a employé à l’amélioration de la terre. Sans doute il y a des circonstances où le fermage pourrait être regardé en partie comme tel ; car il ne peut presque jamais arriver que cela ait lieu pour plus que pour une partie. Le propriétaire exige une rente même pour la terre non améliorée (et Smith en donne un peu plus bas un exemple tiré de la récolte d’une plante sauvage dite salicorne) ; et ce qu’on pourrait supposer être intérêt ou profit des dépenses d’amélioration, n’est en général qu’une addition à une rente primitive. D’ailleurs, ces améliorations ne sont pas toujours faites avec les fonds du propriétaire, mais quelquefois avec ceux des fermiers » (Richesse des nations, 1. I, ch. IX, t. I, pp. 187-188). — Sur cette question, voyez nos Éléments d’économie politique, 2e éd. ; pp. 504 et s.
  29. Ibid., p. 191.
  30. Ibid., p. 207.
  31. Ainsi en est-il pour le charbon, op. cit., p. 214.
  32. Op. cit., 1. I, ch. XI, pp. 319-320.
  33. Ibid., p. 323.
  34. Ibid., 1. I, ch. I, p. 336.
  35. Ibid., pp. 338 et s.
  36. Ibid., pp. 340 et 341.
  37. Voir nos Éléments d’économie politique, 2e édit., pp. 152 et s.
  38. List a vivement critiqué cette distinction qui, à tout prendre, sent peut-être encore un peu trop chez Adam Smith l’influence de ses relations avec les physiocrates. — Voir à ce propos l’excellente discussion que M. Maurice Block a faite de cette théorie un peu étroite, dans ses Progrès de la science économique depuis Adam Smith, 2e édition, t. I, p. 388. — J.-B. Say, dans le Discours préliminaire de son Traité (2e édition, 1814, p. LIV), critique aussi fort bien Smith sur ce point.
  39. Loc. cit., I, II, ch. III, pp. 422 et s.
  40. Ibid., pp. 428 et s.
  41. Pourquoi « annuel » seulement ?
  42. Ibid., 1. Il, ch. iv, pp. 440-444.
  43. Voyez la discussion et la réfutation de cette thèse dans Maurice Block, Progrès de la science économique depuis Adam Smith, 2e édition, t.1, p. 6.
  44. La réfutation du système mercantile remplit les chapitres i-viii ; celle du système agricole, le chapitre ix seulement.
  45. L. IV, intr., t. II, p. 2.
  46. Ibid., ch. i, t. II, pp.4 et 5.
  47. Ibid., ch. iii, t. II, pp. 63 et s.
  48. L. IV, ch. ii, t. II, pp. 47 et 49. — Adam Smith l’appelle « le plus sage de tous les règlements de commerce de l’Angleterre ». — Bastable (Théorie du commerce international, tr. fr., 1900, p. 197 en note), désireux de pouvoir faire de Smith un champion du libre-échange immédiat et universel, pense que cet éloge de sagesse ne signifie rien, puisque Smith « regardait les autres règlements comme suprêmement insensés ». Une telle interprétation est cependant inconciliable avec le contexte et l’œuvre tout entière de Smith.
  49. L. IV, ch. ii, t.II, p. 37.
  50. Ibid., p. 56.
  51. Ibid., p. 37. — Voir sur ces diverses opinions nos Éléments d’économie politique, 2e édit., pp. 402, 403, etc.
  52. « L’ouvrage du domestique, dit-il, consiste en services qui, en général, périssent et disparaissent à l’instant même où ils sont rendus, qui ne se fixent ni ne se réalisent en aucune marchandise qui puisse se vendre et remplacer la valeur de la subsistance et du salaire. » — Les domestiques sont rangés parmi « les ouvriers stériles et improductifs » (L. IV, ch. x, t. II, p. 324). Nous préférerions une distinction basée sur la nature du besoin à satisfaire:dans l’ordre de l’alimentation, par exemple, en quoi le cuisinier est-il moins un « ouvrier productif » que le cultivateur, le meunier et le boulanger ? dans l’ordre des jouissances de l’art, en quoi le luthier est-il moins un « ouvrier improductif » que le professeur de violon et l’artiste exécutant ? (voyez sur ce point Maurice Block, Progrès de la science économique depuis Adam Smith, 1.1, pp. 105 et s. ; et nos Éléments d’économie politique, 2e édit., p. 115).
  53. Richesse des nations, 1. III, ch. IX, t. II, p. 309.
  54. Oncken, Œuvres économiques et philosophiques de Quesnay, introd., p. xix.
  55. Richesse des nations, loc. cit., p. 329.
  56. Ibid., p. 338.
  57. Richesse des nations, 1. IV, ch. i, t. II, pp, 340, 362, 375.
  58. Voyez en ce sens P. Leroy-Beaulieu, l’État moderne et ses fonctions, pp. 34 et s., et nos Éléments d’économie politique, 2e édition, p. 83.
  59. L. V, ch i, t. II, p. 489.
  60. Ibid., pp. 496-497. — Voyez nos Éléments d’économie politique, 2e édition, pp. 706, 720-721.
  61. Préface du comte Garnier, p. lix de l’édition Guillaumin.
  62. L. I, ch. xi.
  63. L. II, ch. ii.
  64. L. IV, ch. iii.
  65. L. IV, ch. vi.
  66. Voyez plus bas, même chapitre, § vi.
  67. Voyez Richard Schüller, Die Wirthschaftspolitik der historischen Schule, pp. 8 et s.
  68. Voyez plus bas, même livre, ch. vii. — Voyez aussi infra.
  69. « Tout système qui cherche, ou par des encouragements extraordinaires à diriger vers une espèce particulière d’industrie une plus forte portion du capital de la société que celle qui s’y porterait naturellement, ou, par des entravés extraordinaires à détourner forcément une partie de ce capital d’une espèce particulière d’industrie vers laquelle elle irait sans cela chercher un emploi, est un système réellement subversif de l’objet même qu’il se propose comme son principal et dernier terme. Bien loin de les accélérer, il retarde les progrès de la société vers l’opulence et l’agrandissement réels ; bien loin de l’accroître, il diminue la valeur réelle du produit annuel des terres et du travail de la société » (L. III, ch. ix, in fine, t. II, p. 338).
  70. Voyez dans le R. P. Pesch, Die philosophischen Grundlagendes œkonomischen Liberalismus, tous les §§ 2 et 3 du ch. ii, pp. 104-163.