Histoire du prince Soly/Avertissement

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AVERTISSEMENT
DE L’ÉDITEUR
DES VOYAGES IMAGINAIRES, &c.


Ce volume termine la claſſe nombreuſe & intéreſſante des voyages merveilleux, & nous en aurions porté la collection à un nombre de volumes bien plus conſidérable, ſi nous euſſions voulu n’offrir à nos lecteurs que des fictions ingénieuſes, dignes d’occuper leurs loiſirs.

Les deux ouvrages qui compoſent ce volume approchent du genre de la féerie, par la nature des fictions qu’ils renferment par le merveilleux, qui y règne ; ils appartiennent néanmoins aux voyages imaginaires.

Le premier, l’hiſtoire du prince Soly, contient l’hiſtoire agréable & plaiſante des deux royaumes d’Amazonie & de Solinie. Les Soliniens ſont un peuple austère, adorateurs du ſoleil, non comme donnant la vie aux animaux & aux plantes, mais comme produisant dans le ſein de la terre l’or & les richeſſes, véritable objet de leur culte. On conçoit que cette triſte nation eſt ſous la domination de l’avarice ; elle contraſte plaiſamment avec l’Amazonie, peuplée de femmes vives, légères, aimables, qui ne reſpirent que le plaiſir & la gaîté. Leur divinité eſt la lune ; elles n’agiſſent que par ſes impulsions.

Ces deux peuples, voiſins & ennemis, ſont toujours en guerre. L’armure des Amazones est plaisante c’est celle d’une coquette sous les armes : c’est une critique ingénieuse de l’habillement des femmes de ce temps.

Le prince Soly est né chez les Soliniens enlevé par les Amazones & nourri dans leur sein il y devient amoureux de la princesse Fêlée fille de la reine des Amazones ; leur amour traversé par les inimitiés des deux nations, & la rivalité du prince Solocule, fils d’une Amazone, forment l’intrigue de cet agréable roman.

L’auteur est M. Pajon, avocat connu par des féeries très-ingénieuses ; entre autres l’Histoire des trois fils d’Hali, bassa de la mer, & des filles de Siroco d’Eritzine & Parelin ; & de l’Enchanteur ou la bague de puissance, imprimés dans le 33e vol. du Cabinet des Fées[1].

Le second ouvrage est le Voyage & les aventures des trois princes de Sarendip. Cet ouvrage, digne de figurer à côté des Mille & une Nuits & des Mille & un jours, pour la richesse de l’imagination, est une traduction du roman italien, intitulé : Peregrinaggio di tre giovanni figlivoli del re di Sarendippo, da M. Cristoforo Armeno. Le Traducteur est le chevalier de Mailly.

M. Gueulette en a tiré le plus grand parti dans ses Soirées bretonnes[2]. Avant lui, Beroalde de Verville en avoit composé son voyage des princes fortunés. Mais l’ouvrage de M. Gueulette est une invitation plus heureuse ; cependant ce n’est qu’une imitation. M. Gueulette s’est tellement rendu maître de sa matière, qu’il en a fait un ouvrage nouveau, & qui ne Présente qu’une idée incomplète de l’ouvrage italien. Nous croyons que l’on en trouvera ici avec plaisir une traduction exacte.




  1. Voy. ces trois contes vol. 33 du Cabinet des Fées, & dans l’avertissement qui précède, une notice sur M. Pajon.
  2. Les Soirées bretonnes, tom. 31 du Cabinet des Fées.