Histoires des Canadiens-français, 1608-1880, tome I/Chapitre VI

La bibliothèque libre.
Wilson & Cie (Ip. 109-120).


CHAPITRE VI

1608 — 13


Acadie. — Poutrincourt. — Port-Royal. — Messire Jessé Flèché. — Souriquois baptisés. — Premiers censitaires. — Compagnie Robin-Biencourt. — Les Pères Jésuites. — Madame de Guercheville. — Port-Royal en 1611. — Défrichements et cultures. — La traite. — Louis Hébert. — Saint-Sauveur. — Argall. — La Saussaye. — Destruction de la colonie acadienne.



P
outrincourt jouissait encore de certains priviléges en Acadie, car, dès l’automne de 1607, de Monts avait donné à son fils, Jean de Biencourt, âgé de seize ans, la seigneurie de Port-Royal. Dans le présent chapitre, ces deux hommes joueront le principal rôle.

Les Biencourt, écrit M. Rameau, sortaient d’une bonne et vieille famille féodale de Picardie, dont plusieurs membres avaient figuré dans les croisades.

Jean de Biencourt, baron de Poutrincourt, né en 1557, était baron de Saint-Just, en Champagne, chevalier des ordres du roi, gentilhomme de sa chambre, maître-de-camp de six compagnies d’hommes à pied, et grand ami de Henri iv, dont il avait embrassé le parti vers 1590. « Bien qu’il fût bon catholique, il était personnellement dévoué à la cause monarchique et au roi lui-même ; il le suivit dans toutes ses guerres, et se distingua dans maintes affaires par sa bravoure, et le Béarnais prisait tout particulièrement son dévouement et sa sagacité. » (Rameau.)

La date de son mariage avec Jeanne de Salazar n’est pas connue, mais elle ne doit point être postérieure à 1590. C’est d’elle que venait la baronnie de Saint-Just. Les trois garçons que nous leur connaissons se nommaient : Jean de Biencourt[1], né en 1591 ; Charles de Saint-Just, et Jacques de Salazar.

Poutrincourt était de haute taille, homme de guerre, la main prompte et le cœur généreux. Il tirait l’épée pour le roi, ou s’embarquait pour fonder une colonie avec le même entrain et le même courage. Il avait résolu de se créer en Amérique une position indépendante et d’y faire conduire sa famille, espérant y trouver plus de tranquillité qu’en Europe. Son fils aîné, Jean de Biencourt, « jeune seigneur de grande vertu et fort recommandable, » écrit en 1612 le Père Biard, quoiqu’à peine sorti de l’enfance, le secondait, et fournit une carrière fort remarquable, comme on le verra. C’est à lui que de Monts avait donné Port-Royal ; dès l’année 1608, il s’y rendit, laissant son père en France, vécut en bons termes avec les pêcheurs basques et rochelois qui fréquentaient les côtes, apprit la langue des Sauvages à la perfection, et se forma au dur régime que lui imposait cette nouvelle vie.

Il avait été fait mention que le confesseur du roi désignerait quelques prêtres de la compagnie de Jésus pour commencer à évangéliser les indigènes ; le roi promettait deux mille livres pour leur entretien. Le Révérend Père Biard reçut ordre de se rendre à Bordeaux sur la fin de 1608 ; mais il y attendit vainement des nouvelles de Port-Royal.

Les associés de Poutrincourt, deux entre autres, nous dit Lescarbot, le trompèrent. Il perdit les sommes déboursées pour son équipement, lequel avait dû être préparé vers le printemps de 1609. Très tard dans l’automne de cette année, il arriva à Paris, n’ayant encore fait que peu ou point de préparatifs pour se mettre en route. Le roi le réprimanda vertement de ce qu’il n’était pas parti, et de ce que, sur deux ans qu’on lui avait accordés pour transporter plusieurs familles et cultiver les terres de son domaine d’Acadie, la majeure portion, sinon le tout, s’était écoulé sans résultat. Le fait est que Poutrincourt était ruiné et cherchait, depuis plus de vingt mois, des bailleurs de fonds. Force lui était, cependant, de se mettre à l’œuvre sur l’heure ou d’abandonner ses projets. Il annonça que son fils, Jean de Biencourt, reviendrait, en 1610, chercher les Pères Jésuites, et que, en attendant, lui, Poutrincourt, allait se rendre au Port-Royal. Là-dessus, le Père Coton lui fit observer qu’il serait à propos d’amener, dès ce prochain voyage, un ou deux Pères ; mais Poutrincourt ne goûta point cet avis, qu’il éluda en remettant l’affaire à l’année suivante.

Au commencement de février 1610, dit M. Rameau, il partit de son manoir de Saint-Just, en Champagne, et s’embarqua sur un bateau qu’il avait rempli de vivres, de meubles et de munitions de guerre ; il descendit ainsi l’Aube, puis la Seine jusqu’à son embouchure, et arriva à Dieppe à la fin de février. Il emmenait avec lui son fils aîné[2], Charles de Biencourt, et Jacques de Salazar, son second fils, qui continua la lignée des Poutrincourt ; plus les sieurs de Coulogne, René Maheu, Belot de Montfort, de Jouy, et Bertrand, natif de Sezanne.

Louis Hébert voulait revoir les lieux où il avait espéré s’établir pour jamais et qui lui étaient ouverts de nouveau. Claude de Latour, ou simplement Latour (car les uns en font un gentilhomme, et les autres un simple maçon, observe M. Rameau), qui devait prendre une part active au développement de l’Acadie, était du voyage et amenait son fils, Charles, âgé de quatorze ans. Il y avait aussi Thomas Robin de Coulogne, plus haut mentionné, fils du gouverneur de Dieppe, lequel avait fortement contribué de ses deniers et de sa personne. (Rameau)

Le navire mit à la voile, à Dieppe, le 25 février 1610, et arriva au Port-Royal au commencement de juin, ayant failli tomber aux mains, non de pirates ordinaires, mais des hommes de son propre équipage, qui avaient conspiré pour s’en rendre maîtres et le vendre à leur bénéfice.

Dans ce voyage, Poutrincourt avait amené un prêtre du diocèse de Langres, nommé Josué ou Jessé Fleche ou Fléché, envoyé par Ubaldini, nonce du pape à Paris, et dont on cite la réputation de science et de vertu. Les Souriquois lui donnèrent le surnom de « patriarche, » qui s’est transmis aux missionnaires de toute la Nouvelle-France. Les Sauvages prononcent « patliasse, » et, jusqu’à ces années dernières, ils appelaient « petits patliasses » les élèves de nos séminaires.

M. Fléché baptisa, le 24 juin 1610, jour de Saint-Jean-Baptiste, vingt et un Souriquois. D’après les récits du temps, il en baptisa une soixantaine d’autres durant les mois qui suivirent ; mais les Pères Jésuites reconnurent que ces pauvres gens ignoraient tout-à-fait les vérités religieuses. Poutrincourt, voulant faire pièce aux Pères Jésuites, se hâtait de « convertir » les indigènes de cette façon. Le Père Biard avait parfaitement raison lorsqu’il écrivait : « Nous résolûmes, dès notre arrivée, de ne point baptiser aucun adulte sans que, préalablement, il ne fût bien catéchisé… Il n’y a point d’apparence de jamais pouvoir convertir ni aider solidement à salut ces nations, si l’on n’y fonde une peuplade chrétienne et catholique, ayant suffisance de moyens pour vivre et de laquelle toutes ces contrées dépendent, mêmes quant aux provisions et nécessités du temporel… Avant cette époque (1610), les Français ne se sont presque jamais occupés de la conversion des Sauvages. Bien des obstacles s’y opposaient. Les Français ne venaient pas ici pour se fixer, et ceux qui voulaient s’y établir éprouvèrent tant de malheurs, qu’ils ne purent guère s’en occuper. Cependant, de temps en temps, on transportait quelques-uns de ces Sauvages en France, et là ils recevaient le baptême ; mais, sans instruction, et privés de pasteurs, ils n’étaient pas plus tôt revenus ici (à Port-Royal), qu’ils retournaient immédiatement à leurs anciennes pratiques… Dans l’enclos de la grande rivière, dès les Terres-Neuves jusqu’à Chouacoët, on ne saurait trouver plus de neuf ou dix mille âmes. » Il ajoute : « Tous les Souriquois, 3,000 ou 3,500, les Etchemins jusqu’à Pentegoët, 2,500, de Pentegoët jusqu’à Kinibequi, et de Kinibequi jusqu’à Chouacoët, 3,000, les Montagnais, 1,000. »

« Il n’y avait encore aucune famille à Port-Royal ; mais Poutrincourt résolut d’en préparer l’installation, en formant dès lors les cadres de la seigneurie qu’il se proposait d’établir ; il rassembla ses hommes, et leur ayant demandé s’ils étaient dans l’intention de rester avec lui en ce pays comme vassaux censitaires, ils répondirent affirmativement. « S’il en est ainsi, dit-il, il faudra que ceux qui sont mariés amènent ici leurs femmes et leurs enfants, et que les garçons aillent en France chercher femme ; car ainsi ferai-je moi-même avec Mme de Poutrincourt, et tous mes autres enfants, et veux dès aujourd’hui vous marquer les terres que vous tiendrez à cens et à rentes, afin que vous puissiez entre temps préparer déjà la demeure et le foyer de vos ménages, travaillant ainsi pour vous-mêmes et vos enfants. »

« Ce fut de la sorte, sans doute, que dut parler le bon sire en procédant au lotissement qui nous est relaté par Cadillac et par M. de Meulles, et ce fut probablement alors qu’il distribua ces billets terriens signés de sa main, que l’on retrouva encore quatre-vingts ans plus tard, et qui ont été les premiers actes et la première ébauche de l’organisation féodale des tenanciers européens dans le Nouveau-Monde. » (Rameau.)

Poutrincourt n’oublia pas sa promesse. Il se hâta d’envoyer (8 juillet 1610) son fils, Jean de Biencourt, âgé d’environ dix-neuf ans, porter ces nouvelles en France et se procurer des vivres dont il était mal pourvu.

« Le moyen de pouvoir trouver secours était une association qu’il avait contractée avec le sieur Thomas Robin dit de Coloignes[3], fils de famille, et en puissance de père, par laquelle association ils convenaient entre eux que le dit de Coloignes fournirait l’habitation de Port-Royal durant cinq ans de toutes choses nécessaires, et foncerait abondamment pour pouvoir troquer avec les Sauvages ; et moyennant ce, il aurait les émoluments qu’il serait ici trop ennuyeux de raconter. » (Le Père Biard.) Ils arrivèrent tous deux à Paris, au mois d’août (1610). Henri IV avait été assassiné le 14 mai précédent, et bien des choses étaient changées à la cour. Madame la marquise de Guercheville demanda au Père Coton si les Pères Jésuites se préparaient à suivre Biencourt ; il lui fut répondu que les lettres reçues de Poutrincourt n’en parlaient point. Alors elle s’adressa au sieur Robin, qui était chargé de tout ce qui concernait l’embarquement. Celui-ci n’hésita pas, quoique ce fût une condition nouvelle pour lui ; il offrit de se charger de la dépense. Madame de Guercheville lui annonça que le roi s’était engagé à cela, et, sur sa prière, Robin se rendit auprès du Père Christophe Balthazar, provincial des Pères Jésuites, lequel désigna pour les missions les Pères Biard (alors à Poitiers) et Énemond Massé. Le roi Louis XIII, âgé de neuf ans, et qui était confié à la direction de sa mère, Marie de Médicis, affecta cinq cents écus, somme promise par son père, à l’entretien des religieux ; mesdames de Guercheville, de Verneuil et de Sourdis firent cadeau de riches ornements. Arrivés à Dieppe, le 24 octobre (1610), où était fixé le lieu de l’embarquement, les Pères eurent contestation avec ceux qui étaient en devoir de faire radouber le navire, deux marchands huguenots, Duchesne[4] et Dujardin, et ils se retirèrent à leur collége d’Eu.

À cette nouvelle, madame de Guercheville fit une collecte en cour, racheta les droits de ces deux marchands (quatre mille livres), et comme, après cela, il lui restait une certaine somme en main, elle en composa un fonds pour empêcher que les Pères ne fûssent à charge à Poutrincourt, laissant à celui-ci l’ordre de consacrer tout le revenu de ses pêcheries et du commerce de fourrures au maintien de Port-Royal, dont les administrateurs seraient les sieurs Robin et de Biencourt, et même que les missionnaires recevraient leur part de cet argent. Ce contrat d’association (20 janvier 1611) témoigne de l’énergie et de l’habileté de cette femme chrétienne, quoi que les parties évincées aient pu dire à l’encontre du droit qu’il lui arrogeait. Mieux valait un monopole de cette nature que d’être à la merci des entrepreneurs


LA DUCHESSE D’AIGUILLON.

de colonisation qui ne colonisaient point. D’ailleurs, les marchands s’étaient déclarés prêts à céder leurs droits, argent comptant, et madame de Guercheville les avait pris au mot.

Le texte du contrat, que Lescarbot nous fournit, montre que les Jésuites étaient mis sur le pied d’associés dans l’entreprise : « Daniel de Quenteville, bourgeois, conseiller-échevin de la ville de Dieppe… par devant Thomas Le Vasseur, tabellion… furent présents Thomas Robin, écuyer, sieur de Collognes… et Charles[5] de Biencourt, écuyer, sieur de Saint-Just[6]… confessèrent avoir associé avec eux… Pierre Biard, supérieur de la mission de la Nouvelle-France, et Énemond Massé, de la compagnie de Jésus. » L’argent donné par la marquise de Guercheville devenait « un bon fonds pour y perpétuellement entretenir les Jésuites, sans qu’ils fussent à charge au sieur Poutrincourt, et que pour ainsi le profit des pelleteries et pêche que ce navire rapporterait ne reviendrait point en France pour se perdre entre les mains des marchands. »

Le Père Biard, né à Grenoble en 1565, enseignait la théologie à Lyon depuis neuf ans, lorsqu’il fut désigné aux missions de l’Acadie. Il s’était offert pour le même objet en 1608. « C’est un homme fort savant, Gascon de nation, duquel monsieur le premier président de Bordeaux m’a fait bon récit, » raconte Lescarbot.

Le Père Énemond Massé, né à Lyon vers 1574, entrait, à l’âge de vingt ans, dans la compagnie de Jésus. Il était devenu assistant du célèbre Père Coton, prédicateur du roi ; mais, en entendant parler du Nouveau-Monde, sa vocation de missionnaire se révéla ; il quitta la cour avec joie pour suivre les fondateurs de l’Acadie.

Les Pères Biard et Massé s’embarquèrent, à Dieppe, sur la Grâce-de-Dieu, d’une soixantaine de tonneaux, capitaine Jean Daune, pilote David, de Bruges, tous deux protestants, avec le sieur de Biencourt, le 26 janvier 1611. Le navire était mal équipé, et monté par des matelots la plupart hérétiques, dit le Père Biard. Comme les finances du jeune chef de l’expédition n’étaient pas florissantes, les religieux lui aidèrent de leur bourse ; ils arrivèrent à Port-Royal le 22 mai, jour de la Pentecôte, après avoir souffert la famine durant cette longue traversée.

En route, vers la fin d’avril, ils avaient rencontré Champlain, qui se dirigeait vers Québec, au milieu des banquises.

Sur la Grâce-de-Dieu devait se trouver aussi madame de Poutrincourt, l’une des premières Françaises qui soient passées dans la Nouvelle-France. En tous cas, elle était à Port-Royal cette année (1611). Madame Hébert paraît y être allée dès 1606. Il est naturel aussi de croire que madame de Poutrincourt dût s’efforcer d’engager d’autres personnes de son sexe à la suivre dans ce pays. Le Père Biard, écrivant de Port-Royal, au mois de janvier 1612, dit : « Nous sommes vingt, sans compter les femmes. »

L’hiver de 1610-11 avait été très dur à Port-Royal. Poutrincourt, s’étant vu avec vingt-trois personnes sans provisions suffisantes, avait été obligé d’en congédier plusieurs qui allèrent vivre parmi les Sauvages. « Aux autres, le pain avait manqué six ou sept semaines durant, dit le Père Biard, et, sans l’assistance des mêmes Sauvages, je ne sais si tout ne leur eut misérablement failli. Or, le secours que nous leur apportions n’était quasi qu’un verre d’eau à un bien altéré : premièrement, parce que nous étions trente-six en équipage, lesquels ajoutez à vingt-trois hommes qu’il y avait, cinquante-neuf bouches se retrouvaient, tous les jours, à table (à Port-Royal), et Membertou, le Sauvage, par dessus, avec sa fille et sa sequelle. »

Au milieu de juin 1611, Poutrincourt repassa en France dans les intérêts de sa colonie, que les changements survenus à la suite de la mort du roi pouvaient compromettre. On se tromperait en assimilant ce gentilhomme aux vulgaires entrepreneurs d’établissements qui n’avaient pour tout principe que d’édifier leur fortune sur les priviléges dont la cour les dotait. Ses vues étaient plus élevées, et quoique, en somme, il n’ait pas laissé derrière lui une colonie très florissante, il mérite tous ces égards que l’historien doit au fondateur dont l’esprit était droit et désintéressé.

Avec lui, retourna en France M. Fléché, « selon le désir qu’il avait depuis longtemps, » écrit le Père Biard. Il ramenait aussi autant de monde que possible, n’ayant pas de quoi les nourrir. Son fils, Jean de Biencourt, restait à Port-Royal avec les Pères Biard et Massé et dix-neuf autres personnes. À la fin d’août, Poutrincourt était rendu à destination.

« Les hommes étaient, d’ailleurs, habitués désormais au pays et déterminés à rester ; Poutrincourt avait mesuré et distribué à chacun des terres dont le lotissement fut si bien conservé, qu’en 1685, on montra encore à M. de Meulles les titres signés de sa main. Il manquait encore, cependant, dans la colonie, une chose essentielle : la famille n’était pas constituée ; il ne paraît pas, en effet, que, jusqu’à ce moment, il eût été amené aucune femme ni enfant, sauf la famille elle-même de Poutrincourt, qui était alors à Port-Royal, comme l’affirme positivement le Père Biard, dans sa lettre du 31 janvier 1612. Quant à tous les autres colons, ils étaient tous des engagés célibataires, et un des motifs du bon seigneur, dans son voyage en France, était précisément de ramener quelques hommes mariés avec leur ménage, afin de donner ainsi à la colonie le dernier caractère d’une fondation durable et définitive ; malheureusement, les circonstances ne devaient pas lui permettre d’accomplir lui-même ce sage dessein. » (Rameau.)

Madame de Guercheville continuait de recueillir des offrandes destinées au secours des missions de la Nouvelle-France. Poutrincourt la trouva donc toute préparée à se joindre à sa société, qui, disait-il, aurait pour but d’activer ce mouvement. Elle était disposée à donner mille écus pour l’armement d’un navire, moyennant quoi elle partagerait dans les profits que ce navire rapporterait, et aussi dans les terres que le roi concéderait, plus tard, à Poutrincourt ; mais celui-ci se prétendait déjà seigneur et maître d’un vaste territoire qu’il voulait garder pour lui seul. Appelé à exhiber ses titres, il n’en put rien faire, et madame de Guercheville se retourna du coup vers le sieur de Monts[7], qui consentit à lui céder tous ses droits en la Nouvelle-France, car il tenait de Henri IV une patente qui était encore en vigueur. Le moins qu’on puisse dire, c’est que Poutrincourt s’était enferré. Les lettres royales qui confirment cet arrangement accordent à madame de Guercheville toutes les terres de la Nouvelle-France, depuis le fleuve Saint-Laurent jusqu’à la Floride, ne réservant à Poutrincourt que le seul Port-Royal.

Antoinette de Pons, pieuse et belle, disent les chroniques du temps, s’était fait remarquer par son mérite et sa piété, au milieu de la cour dissolue de Henri III. Le marquis de Guercheville, son mari, étant mort, le roi Henri IV avait eu pour la jolie veuve une passion assez prononcée. Il comptait bien emporter la place aussi lestement qu’il prenait les villes ; mais, cette fois, la vertu et la dignité de la sujette firent échec au roi. « Sire, lui dit-elle, mon rang ne me permet pas d’être votre femme ; j’ai trop de cœur pour devenir votre maîtresse, » réponse d’autant plus belle que la noblesse se faisait souvent une gloire de ce honteux commerce. Et, sans plus de paroles, la marquise se retira à son château de La Roche-Guyon, sur la Seine, à dix lieues de Paris, où elle menait un train princier. Henri IV poussa, un jour, une partie de chasse de ce côté, et, sur la fin de la journée, il envoya un gentilhomme demander le couvert pour lui et quelques-uns des siens, prétextant qu’il était trop loin de la capitale pour y retourner sans avoir pris du repos. Madame de Guercheville l’accueillit avec empressement, fit illuminer le château, commanda un souper somptueux, se rendit aimable et prévenante comme une bonne et fidèle amie, lui déclara qu’il commandait absolument chez elle, etc., et monta en voiture pour aller coucher, à deux lieues de là, chez une personne de sa connaissance. L’aventure fit du bruit. Plus tard (1594), la marquise épousa, en secondes noces, Charles du Plessis, seigneur de la Rochefoucauld, comte de Beaumont, chevalier des ordres du roi, premier écuyer de Henri IV, et, en cette occasion, elle joua au roi une nouvelle pièce en refusant de prendre un nom qui avait appartenu à la célèbre Gabrielle. Gabrielle d’Estrée avait été fiancée, d’autres disent mariée avec Nicolas d’Armeval, seigneur de la Rochefoucauld-Liancourt. En 1599, Gabrielle mourut. L’année suivante, Henri divorça avec Marguerite de Valois (la reine Margot), et épousa Marie de Médicis. En mémoire de la conduite de madame de Guercheville (elle ne portait que ce nom), il voulut que celle-ci, dont l’époux était gouverneur de Paris, occupât l’un des tabourets placés autour de la reine dans les réunions d’éclat. Ce fut la première dame qu’il présenta à Marie de Médicis, lui disant : « Je vous présente une dame d’honneur qui est en vérité une dame pleine d’honneur. »

À quelque temps de là, madame la connétable de Lesdiguière, une coquine fieffée, fut introduite à la cour ; le rang de son mari lui donnait un tabouret : un tabouret d’un ou deux degrés au-dessus de celui de madame de Guercheville. Or, Malherbe, le poète, qui ne manquait pas les occasions de placer une épigramme, se trouva, un jour, dans une fête où la reine figurait.

— Voyez-vous, M. de Malherbe, lui dit quelqu’un, voyez-vous cette dame assise près de la duchesse de Chose ? c’est madame de Guercheville, c’est « la vertu récompensée. »

— Oui, reprit Malherbe, mais je vois aussi le vice encore mieux traité ! Il montrait la connétable de Lesdiguière.

Madame de Guercheville devint première dame de la reine. Elle mourut à Paris en 1632.

Toutes choses entendues, elle versa les mille écus au Frère Gilbert du Thet, Jésuite, qui partait pour l’Acadie et devait les remettre à quelque marchand de Dieppe. Le Père Biard nous fait entendre que non-seulement Poutrincourt eut l’adresse de tirer quatre cents écus de cette somme, mais encore qu’il plaça au commandement du navire un de ses employés, nommé Simon Imbert, cendrier et ancien tavernier de Paris, à qui il avait fait la langue. Le 31 décembre 1611, ce vaisseau partit de Dieppe et arriva à Port-Royal le 23 janvier.

C’est à ce voyage, si nous ne nous trompons, que furent amenés les chevaux que les Anglais enlevèrent du Port-Royal, en 1613, et qu’ils mangèrent quelque temps plus tard, faute de nourriture. « Nous savons en effet, dit M. Rameau, par des documents authentiques, que chaque année, depuis 1609, il y eut une suite toujours croissante de cultures et de défrichements dans le haut de la rivière, vers le lieu, probablement, qui fut plus tard appelé la Prée-Ronde ; non-seulement la colonie possédait du bétail, mais on élevait des poulains, des veaux et des pourceaux ; de plus, il paraîtrait, d’après une lettre mentionnée par Lescarbot, que Poutrincourt serait parvenu à expédier de la Rochelle à Port-Royal, en mai 1613, un mois et demi après le départ de La Saussaye, un navire chargé de provisions ; mais ce fait n’est pas très certain, car il n’est mentionné que dans l’édition de 1617. »

Jean de Biencourt était occupé de disputes de commerce avec Robert Gravé, fils de Pontgravé. Les Pères Biard et Massé finirent par amener une réconciliation. Les Malouins, qui pêchaient ou trafiquaient avec les Sauvages, étaient très mécontents de la taxe que Biencourt prélevait sur leurs marchandises. Toutes ces scènes désagréables, racontées par le Père Biard, jettent beaucoup de lumière sur les mœurs du temps.

« Cette absence de Poutrincourt devint l’origine de funestes désordres : Biencourt avait les qualités et les défauts de la jeunesse ; instrument utile entre les mains de son père, il se laissa dominer, quand il fut seul, par cette ardeur inexpérimentée qui se résout malaisément à ménager les hommes et les circonstances ; pourvu de peu d’instruction, et imbu des préjugés qu’une partie de la noblesse nourrissait alors contre les Jésuites, il subissait en outre l’influence des marchands de Dieppe, que ceux-ci avaient supplantés dans l’entreprise ; il accueillait donc assez froidement ces associés, que la nécessité lui avait imposés, bien plus que son propre gré ; les deux Pères Jésuites se sentirent piqués au jeu par le mauvais vouloir qu’ils rencontrèrent, et, parfois, ils cherchèrent trop à montrer qu’ils étaient non-seulement des auxiliaires, mais des co-intéressés ; ils en avaient incontestablement le droit, mais peut-être eût-il été désirable, pour la bonne direction de l’entreprise, de les voir un peu modérer la rigueur du droit, afin de conserver l’union et l’unité d’action dans la colonie.

« Quoi qu’il en soit, les deux partis ne tardèrent point à être aux prises, et lorsque, le 23 janvier 1612, arriva le navire que Poutrincourt expédiait à Port-Royal de concert avec madame de Guercheville, il s’éleva une violente discussion à propos de l’inventaire de ce bâtiment. Les Pères Biard et Massé voulurent y intervenir à titre d’associés ; Biencourt se refusait à leur désir à titre de gouverneur ; les choses en vinrent à ce point que les Pères prétendirent quitter la colonie et retourner en France ; Biencourt, qui peut-être craignait plus encore ce retour que leur séjour en Acadie, les retint de force et renvoya le navire ; ce fut sans doute en ce moment que retournèrent en France madame de Poutrincourt et ses enfants, qui, jusque-là, étaient toujours restés à Port-Royal.

« La dissension persista donc plus âpre que jamais en Acadie, et ses résultats furent déplorables ; car madame de Guercheville, apprenant le mauvais accueil fait aux missionnaires, ainsi que les désagréments qui leur étaient suscités, se refroidit beaucoup, et commença à concevoir l’idée de fonder, en son particulier, une colonie qui répondît exclusivement à ses propres desseins.

« Assurément, Biencourt eut de grands torts en tout ceci, on ne saurait en disconvenir, quelle que soit l’opinion que l’on professe au sujet des Jésuites : c’était madame de Guercheville qui subventionnait l’entreprise ; rien dès lors n’était plus juste et plus utile que de tenir compte de ses intentions et de respecter ses mandataires ; il eût fallu avoir assez de raison pour sacrifier un peu de ses sentiments personnels au succès de l’œuvre commune ; c’est ce que Biencourt ne sut pas faire, et si l’on doit critiquer les Jésuites pour s’être montrés trop peu conciliants, on doit encore bien plus le blâmer pour avoir voulu tout subordonner à l’arbitraire de ses sentiments. Tel fut le résultat de la bigoterie fanatique des huguenots de Dieppe, qui avaient semé le germe de ces divisions, en surexcitant, sans utilité et sans raison, l’esprit de ce jeune homme ; ils ne voulaient point faire de sacrifices pour la colonie, et ils faisaient tout au monde pour empêcher qu’elle ne réussît dans d’autres mains.

« Quelle fut la conséquence de toutes ces discordes ? La colonie souffrit bientôt d’une extrême pénurie, puis se divisa, s’affaiblit, et fournit aux ennemis de la France toute facilité pour ruiner son développement. Poutrincourt, en effet, n’étant plus soutenu par madame de Guercheville, demeura hors d’état d’équiper aucun autre navire durant l’année 1612 ; à l’entrée de l’hiver, Port-Royal se trouva presque sans approvisionnements, et, quoique Biencourt eût fait avec les Sauvages un commerce considérable de troque, ses profits restaient inutiles pour son père, faute de moyens de transport.

« Les Jésuites, mieux pourvus ou plus économes, avaient mis en réserve quatorze barils de provisions, qui aidèrent la colonie à vivre pendant deux mois ; ce temps fut employé à recueillir toutes les ressources que pouvait fournir la contrée : on ramassa des glands et une sorte de racine appelée chiben ou chiquebi, qui fut ensuite importée en France sous le nom de Topinambour ; la pêche à l’éperlan fournit aussi quelques subsides ; la chasse vint en aide de temps à autre ; c’est ainsi que, combinant toutes ces ressources avec les produits encore bien restreints de leurs cultures, nos colons suppléèrent, tant bien que mal, aux provisions défaillantes, et parvinrent à passer sans trop d’encombre ce misérable hiver. Ils étaient soutenus comme toujours par un courage intelligent et par cette gaîté fertile en expédients dont Lescarbot nous a si bien dépeint l’influence ; la colonie était pauvre, mais non pas énervée et maladive, parce que les hommes étaient énergiques et industrieux. » (Rameau)

Le Frère Du Thet repassa en France au milieu de l’été 1612, après l’appaisement des dissensions ci-dessus, et il induisit madame de Guercheville à fonder un poste séparé. En conséquence, elle équipa un navire de cent tonneaux, capitaine Charles Flory, de Hableville, qui partit de Honfleur, le 12 mars 1613, sous le commandement du capitaine La Saussaye, et arriva à la Hève, en Acadie, le 16 mai, d’où il se rendit à Port-Royal. La reine avait contribué à l’achat des armes et de quelques munitions. À part les matelots, au nombre d’une quinzaine, il y avait vingt-sept personnes qui se proposaient d’hiverner dans le futur établissement, dit Champlain, ce qui ne nous renseigne que médiocrement sur la classe à laquelle appartenaient ces braves gens. Le Père Jacques Quentin et le Frère Gilbert Du Thet, qui en était à son second voyage au Port-Royal, accompagnaient l’expédition, avec le dessein de retourner en France dans le même navire.

Des chevaux et des chèvres, des approvisionnements pour une année, quatre tentes ou pavillons et autres effets étaient transportés en même temps.

La Saussaye ne trouva au Port-Royal que cinq personnes : les deux Pères Jésuites, Hébert, apothicaire, qui tenait la place du sieur de Biencourt pendant que celui-ci était allé bien loin chercher de quoi vivre ; Valentin Pageau, domestique des Pères, et un engagé. « Ce fut à lui (Hébert) qu’on présenta les lettres de la reine pour relâcher les Jésuites et leur permettre d’aller où bon leur semblerait ; ce qu’il fit : et ces Pères retirèrent leurs commodités du pays (Port-Royal), et laissèrent quelques vivres au dit Hébert, afin qu’il n’en eut nécessité ; » et, ajoute le Père Biard, « tant ce jour que le suivant, on fit bonne chère à Hébert et à son compagnon (l’autre homme était serviteur des Pères), afin que cette venue ne leur fut pas triste. »

Une île, située dans la rade de Port-Royal, et une petite rivière qui coule non loin de là, ont reçu, dès 1605 ou 1606, le nom d’Hébert, lequel a été corrompu en Imbert par les cartographes ; finalement, les Anglais leur ont imposé les appellations de Bear Island et de Bear River.

Hébert était retourné en Acadie l’année 1610. Comme il est certain qu’il repassa en France trois ans après (1613), et qu’il alla s’établir à Québec avec sa famille en 1617, nous ne saurions rattacher à sa descendance les Hébert d’Acadie qui ont maintenant parmi les divers groupes acadiens plusieurs milliers de représentants ; mais il peut y avoir eu parenté entre les deux souches.

Les Pères Jésuites suivirent La Saussaye, qui les conduisait aux monts Déserts, à l’entrée de la rivière Pentagoët, sur une île qu’ils nommèrent Saint-Sauveur, et où La Saussaye débarqua trente hommes.

À la mi-juin, on fit les semailles, qui consistaient en grains, pois, fèves, « et toutes sortes d’herbages de jardinage. »

Les Anglais de la Virginie pêchaient, d’habitude, à quinze ou seize lieues de l’île des monts Déserts. Ils eurent bientôt connaissance du poste français. Leur capitaine, Samuel Argall, résolut de le surprendre. La Motte le Vilin, lieutenant de la Saussaye, alla au devant d’eux, et, après un combat durant lequel le Frère Du Thet fut tué, il lui fallut céder au nombre ; car les Anglais avaient soixante soldats et quatorze pièces de canon.

La Saussaye était à terre. Voyant ce désastre, il s’enfuit dans les bois, mais le lendemain il crut devoir se montrer. Argall le reçut avec politesse, et lui demanda de produire sa commission, qu’il avait enlevée la veille du vaisseau de La Motte. Naturellement, elle fut introuvable. Dès lors, les Anglais le traitèrent de forban, et pillèrent ce qui appartenait aux Français. Après des pourparlers, voyant qu’il était à peu près impossible de renvoyer ces prisonniers en France, Argall leur proposa de les amener à la Virginie, ce qui fut accepté par quatre personnes, « sous promesse qu’on ne les forcerait point au fait de la religion, et qu’après un an de service on les ferait repasser en France. » Finalement, trente hommes (y compris le Père Massé) furent embarqués pour la Hève, où le navire de Pontgravé et un autre les reçurent pour les repatrier, et quinze, avec les Pères Biard et Quentin, furent transportés à la Virginie. Le commandant de cette colonie, Thomas Dale, voulut les faire mourir ; mais Argall sortit alors de ses bagages la commission de La Saussaye et leur sauva la vie. Une expédition fut ordonnée sur le champ pour détruire Port-Royal, ce qui n’était pas difficile ; Argall s’en chargea. La Saussaye s’était échappé de Saint-Sauveur, et avait probablement répandu l’alarme à Sainte-Croix et à Port-Royal, car les Anglais trouvèrent ces deux établissements abandonnés et les brûlèrent tout à leur aise. Le 9 novembre (1613), Argall se remit en route pour la Virginie. Il resta aux environs de Port-Royal quelques Français occupés aux champs et qui se réfugièrent chez leurs amis, les Sauvages.

En trois années (1610-13), écrit le Père Biard, il ne mourut de maladie, à Port-Royal et à Saint-Sauveur, que deux hommes, l’un de Saint-Malo et un autre Breton.

Des Français retenus en Virginie, trois moururent bientôt, et quatre y étaient encore en 1615. On ne dit pas ce que devinrent les autres.

Les Pères Biard et Quentin furent ramenés en Europe, après plusieurs mois d’une navigation accidentée. Aux îles Açores, ils surent rendre un service important au capitaine anglais qui les conduisait, et qui, à partir de ce moment, se comporta amicalement à leur égard, voulant leur témoigner sa gratitude. Rendus en Angleterre, les autorités françaises intervinrent en leur faveur ; on les laissa retourner en France vers la fin d’avril 1614, et ils se réfugièrent au couvent des Jésuites d’Amiens. Le Père Biard a écrit des lettres datées de l’Acadie et de France, et une intéressante relation qui fut imprimée en janvier 1616 ; il mourut à Avignon, le 19 novembre 1622.

La Motte le Vilin réussit à se rendre en Angleterre vers le même temps où les Pères y débarquaient. Madame de Guercheville envoya La Saussaye à Londres solliciter la restitution de son navire ; mais ce fut tout ce qu’elle obtint pour le moment.

« Voilà comment, dit Champlain, les entreprises qui se font à la hâte et sans fondement, et faites sans regarder au fond de l’affaire, réussissent toujours mal. »

Ce jugement est peut-être trop sévère. Poutrincourt avait accompli, à la date de 1613, plus que Champlain lui-même n’avait pu faire à Québec, et, sans l’acte de piraterie d’Argall, son établissement était en voie de prospérer, nonobstant la division des forces des Français en deux seigneuries ou colonies.

Nous aurons occasion de revoir Poutrincourt et son fils à l’œuvre.


  1. Son père et lui signaient « Jean de Biencourt. » Il était donc l’aîné des garçons de Poutrincourt.
  2. Nous croyons que la liste des enfants de Poutrincourt, telle que nous l’avons dressée un peu plus haut, est exacte. Jean était alors en Acadie. Les deux autres ici nommés devaient être très jeunes.
  3. Demeurant à Paris. Il était fils de M. de Sicoine, gouverneur de la ville de Dieppe, « catholique plein de zèle et de piété », dit le Père Biard.
  4. D’autres le nomment Duquesne, et disent qu’il fut le père du fameux marin de ce nom.
  5. Charles, et son frère, Jacques, s’embarquèrent, à Dieppe, le 25 février 1610, comme il a été dit plus haut. Ils allaient en Acadie, où leur frère, Jean, était rendu depuis 1608. Ils étaient donc trois frères.
  6. La terre ou domaine de Saint-Just, en Champagne, passa à Charles, après le décès de madame de Poutrincourt, vers 1616. On voit ici qu’il portait le nom de cette terre dès 1611.
  7. Peu auparavant, elle avait refusé de placer de l’argent dans l’entreprise de de Monts et Champlain au Canada.