Ingres d’après une correspondance inédite/LXXIX

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LXXIX
À Armand Cambon.
Dimanche 7 avril 1862.

Mon cher ami, je réponds avec plaisir. Mais ma femme, qui est à mon atelier, à recevoir pour moi la foule qui veut, (que je le dise) admirer mon dernier ouvrage auquel ma vieillesse doit sa part… Mais est-il possible que, le même jour et à la même heure pour ainsi dire, vous m’accusiez réception de ma caisse d’envoi ! C’est fabuleux et j’en suis doublement heureux, puisque cela vous contente tous.

Quant à mon élève [1] et ses premiers talents dans le genre, j’ai vécu longtemps avec lui, à Rome. Il est l’auteur de cette belle copie qu’il m’a faite de ce beau Christ digne de Sébastian del Piombo, qui orne mon atelier. Je vous prie donc de le remercier de tout ce qu’il est pour moi, et je vous prie de le recevoir comme le mérite un homme du premier talent et lui donner toutes les facilités qu’il désire. Et vous, mon très cher ; que d’obligations je vous ai pour tous les soins que vous prenez pour moi et ma gloire montalbanaise que je prise au-dessus de bien d’autres !

Je remercie Mme Montet. C’est un prix inestimable que nous devons à la mémoire de notre cher et regretté ami [2]. Pourquoi n’est-il pas là ?

Je ne veux pas oublier de vous dire et de vous réclamer votre beau portrait, pour qu’il tienne à cette Exposition la même honorable place que vos autres ouvrages. Faites part à mes très aimables concitoyens de tous mes regrets de ne pouvoir jouir de leur patriotique fête, et exprimez-leur les vifs regrets que cela nous cause… Enfin, cela est ainsi et c’est déplorable pour moi et ma chère femme.

Je vous aimerais bien ici, vous le savez bien ; mais vous ne pouvez vous dispenser d’être un des premiers assistants à cette belle fête de famille. Vous m’y représenterez honorablement, et c’est pour moi un adoucissement et une cruelle privation. Je présente à votre digne et aimable famille tous mes souvenirs les plus affectueux. Je vous prie de me croire, toute ma vie, le plus attaché et le plus dévoué de vos amis.

J. Ingres.

Je suis ravi de savoir que le Louis XIII est placé au même endroit où je l’avais placé moi-même et où il faisait bien.

Je pense de donner la plus belle place au portrait de Gilibert.

Vous serez assez bon pour me tenir au courant, je vous en serai bien obligé.

J’ai fait tout ce que j’ai pu pour déterminer les artistes à y concourir. MM. Flandrin et Desgoffes, je ne sais s’ils ont envoyé.

  1. Desgoffes ou Hippotyte Flandrin ?
  2. Gilibert.