Initiation musicale (Widor)/ch14
CHAPITRE XIV
ACCORDS CONSONANTS
es intervalles passons aux groupes de plus de deux sons, aux accords.
Accord parfait. ↔ Le premier, celui qui donne à la fois l’idée du ton et l’idée du mode, s’appelle accord partait. Il se compose d’une quinte et d’une tierce, c’est-à-dire d’une consonance parfaite et d’une consonance imparfaite.
Tout ce qui s’est dit sur la quinte, sur sa valeur tonale se reporte sur cet accord : la quinte reste immuable ; quant à la tierce, elle est plus haute où plus basse d’un demi-ton suivant que nous sommes en majeur ou en mineur.
Renverser un intervalle, an accord, c’est substituer à la basse fondamentale une des notes de cet accord. Un groupe de trois sons a donc deux renversements :
Le premier, avec la tierce pour basse, s’appelle accord de sixte (on omet la mention de la tierce, chaque fois qu’elle n’est pas indispensable).
Le second, accord de quarte et sixte. La dominante devient sa basse.
L’harmonie consonante n’use que de groupes de trois sons ; les compositions pour quatre voix doivent donc réunir sur le même degré tantôt l’une, tantôt l’autre de ces quatre voix. Est-il un choix à faire parmi ces degrés ? Assurément. Il faut doubler les degrés les plus solides, préférer les termes de la consonance parfaite à la tierce.
Une surprise toutefois : à l’orchestre, c’est de cette tierce que dépend la sonorité. Étouffoirs levés, frappez les sept quintes du piano ; il suffira d’y ajouter une tierce dans le médium pour obtenir la plus pleine, la plus riche sonorité. À l’orchestre, au contraire, il faut multiplier les tierces.
Nous sommes toujours choqués, au piano, de la lourdeur d’une tierce dans le grave. Nos pères l’étaient moins. Pourquoi ?
Produite par les ondes sonores 4 et 5, la tierce évoque une fondamentale sise a deux octaves au-dessous, l’ut3, le son le plus grave de l’échelle. Sur les instruments d’autrefois, grâce à la maigreur du son, moins pâteux était l’effet.
Ce que nous écrivons ainsi aujourd’hui :
s’écrivait :
En effet, il y a proportion entre le volume du son et le cube d’air dans lequel il se propage.
Un orgue dont les tuyaux sont enfermés dans un buffet trop exigu « sonne » mal.
Cent choristes entassés sur la scène de l’Opéra n’obtiendraient pas l’effet de trois solistes justement distancés les uns des autres. L’admirable sonorité de l’orchestre de Weber résulte de l’espace que l’auteur ménage à ses groupes des bois et des cuivres. En vertu de ce principe, depuis Palestrina, Vittoria, Roland de Lassus, s’efforce-t-on de disposer les voix dans un idéal de souplesse et de liberté. Ce qui est vrai pour l’orchestre l’est aussi pour les chœurs.
Remarque : Il faut se garder de confondre dispositions avec renversements.
Quel que soit l’ordre des sons d’un accord, tant que la basse ne change pas, c’est toujours le même accord :
Remarquons la profonde différence de ces trois premiers accords : le troisième, en absolue contradiction avec le premier, en équilibre instable sur la dominante, vent descendre, se reposer sur la tonique.
Accord de quinte mineure. ↔ Par l’adjonction de la tierce, l’intervalle de quinte est devenu l’accord parfait ; ainsi celui de quinte mineure deviant l’accord de quinte mineure.
C’est la même attraction des deux termes de la quinte mineure ; quant à la tierce, elle reste libre de ses mouvements soit sur le premier, soit sur le troisiéme degré.
Comme l’accord parfait, la quinte mineure a deux renversements.
Le prochain chapitre nous montrera cet accord incorporé dans celui de neuvième.
Suivant la loi qui oblige toute dissonance, le fa se heurtant contre un sol descendra d’un degré. Quant à la note sensible, moins rigoureuse est l’obligation ; aussi la traiterons-nous sur pied d’égalité, dans une série de sixtes, sans souci de ses velléités vers la tonique :
La gamme majeure a, pour relatif, le sixième degré mineur, parfois même le troisième majeur, ainsi que Beethoven le démontre dans la Sonate en ut (dite l’Aurore) ut-mi, sans doute en souvenir de ce ton phrygien si superbement ensoleillé, celui du Te Deum.
La gamme mineure à pour relatif le troisième degré majeur (ut mineur, mi ♭ majeur).
On peut appeler relatifs, d’ailleurs, les tons à notes communes :
En majeur :
Deux notes communes.
Une note commune.
En mineur :
Une note commune.
Deux notes communes.