Joyeusetés galantes et autres/Découverte

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Joyeusetés galantes et autresA l’Enseigne du Beau Triorchis (Mlle Doucé) (p. 156-158).

DÉCOUVERTE

Un vieux rentier, dans les Champs-Élysées
Se promenait au tomber de la nuit ;
Il regardait dans les branches croisées,
Les reflets roux qu’a le jour qui s’enfuit,
Quand sur un banc il rencontre une gueuse :
« Ho ! ho ! fait-il, livrons-nous à l’amour ;
La nuit déjà s’étale ténébreuse,
Guiguitte va prendre l’air à son tour… »

Sur le dossier du banc il se renverse,
Et met son nœud dans une main que gerce
L’âpre travail du branlage en plein air.
Les yeux fermés, plein d’une molle ivresse,
Il laisse errer son esprit dans l’éther,
En savourant la mouvante caresse
De cette main aux doigts arachnéens ;
Il était bien aux Champs-Élyséens ! ! !

Mais cependant qu’il se pâme et godille,
Il s’aperçoit que de son autre main
La garce fait érecter un voisin.

« Vous plairait-il, monsieur, que cette fille
Précipitât moins fort son mouvement,
Dit-il, et qu’elle allât plus doucement ?
« Avec plaisir, monsieur, » répond dans l’ombre
Une voix mâle.

Alors, nos deux michés
Du même train se trouvant dépêchés,
En même temps déchargent sans encombre.

La fille étant payée, elle s’en va
Chercher ailleurs une nouvelle proie.

Lors le vieux : « Je crois que cette enfant-là,
Bien que souvent notre esprit se fourvoie,
Était, monsieur, une fille de joie. »