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Krishna et sa doctrine (Pavie)/LXXXVIII

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LXXXVIII.

Louanges de Hari célébrées par les anciens richis.

Le roi Parikchit, ayant réfléchi avec attention, dit à Çoukadéva : « Ô saint homme ! raconte-moi de nouveau cette histoire, — qui m’apprenne comment jadis méditait le dieu exempt des qualités (inhérentes à la nature humaine) ! » — Alors Çoukadéva reprit la suite du récit des actions de Hari : — Comment définir le seigneur qui est exempt des qualités humaines ? Il n’a aucun des traits qui déterminent une forme créée, — le seigneur, et en son esprit il fixa ce désir : Je créerai (des êtres) une création qui sera sortie de moi tout entière. — Il créa les sens, le corps, le souffle vital, l’âme, qui (dans leur ensemble) ont la pensée (la force intellectuelle) pour énergie suprême ; il créa des êtres de bien des espèces, lui, le souverain maître[1] ! — En une occasion, Nârada vint là où étaient assis (et occupés à pratiquer des austérités) Sanaka et les autres fils de Brahma, compagnons de Vichnou ; — et là il se tint des discours sur ce sujet (que je viens d’exposer), tandis qu’ils offraient un sacrifice incomparable en compagnie de Svayambhoû (le premier des six Manous), — et Sanandana (l’un des fils de Brahma), qui écoutait la conversation, dit cette parole : « Lorsque (les mondes détruits) redevinrent des eaux, ce fut le seigneur qui créa.

— « Là où se tenait le maître du monde, là il se mit à méditer ; et comme des esclaves qui servent leur maître, les Védas (sortis de sa bouche) vinrent tous auprès du seigneur qui méditait (et dirent) :

— De chacun de ceux qui adorent, l’esprit attentif, de tous ceux-là tu es l’âme, Ô toi le saint par excellence ! — Plus qu’aucun autre tu es le dieu du monde, celui qui se livre à la méditation a pour but de méditer sur la manière de le servir ! — À beaucoup de récits tu es mêlé, ô saint personnage ! tes actions sont ce qui cause la joie des êtres ; — tu es, ô seigneur ! la purification des trois mondes, l’Océan dans sa profondeur, une preuve éclatante de tes actes ! — La récitation de tes noms et de tes attributs, ô seigneur ! est ce qui cause la prospérité des êtres doués de vie ; la science et la méditation sont ce qui conduit à connaître la nature ! — L’homme, dans la création, est pareil au fer ; dans l’océan du monde, il sombre, au lieu de rester à la surface ; — ce morceau de fer, sur quelle barque montera-t-il pour moins s’enfoncer dans l’eau ? Sur celle qui n’est point entraînée par le tourbillon de l’erreur. »

— « Ils célèbrent la grandeur de tes mérites, ceux qui connaissent la dévotion envers toi ; ceux que poursuit la crainte de la mort, ceux-là invoquent sans cesse le dieu qui tient en main l’arc de Vichnou.

— « L’homme même enveloppé de beaucoup de péchés est délivré de toute crainte s’il passe la nuit à méditer sur toi ; — le seigneur est l’illusion qui fascine la vie de tous, ceux qui habitent dans la maison (qui ne se sont point retirés des choses de la vie) ne connaissent pas la joie (de son service). — Ses pieds sont comme un étang plein de lotus sur lequel nagent sous la forme de cygnes[2] Brahma, Nârada et les autres divinités ! — Ceux qui, de bon cœur, méditent beaucoup sur l’adoration de Hari, ceux-là n’auront rien à craindre de la part de la douleur. — Toi qui te répands dans toutes les classes d’êtres, tu ne rebutes jamais tes adorateurs. — Les divers objets fabriqués avec de l’or, bien qu’ils prennent des noms divers, sont toujours une même substance ; — ainsi est l’illusion qui émane de loi ; répandue dans les trois mondes comme cet or, elle se retrouve une et toujours la même sous ses diverses modifications ! — Par ton culte, le péché s’efface ; par l’invocation répétée de ton nom, l’intelligence s’accroît abondamment. — Les êtres, comme s’ils n’étaient qu’une goutte d’eau, tu les crées et tu les détruis ; — et celui à qui tu daignes faire miséricorde, celui-là demeure à jamais dévot envers toi. »

— Vous, hommes vertueux et justes qui méditez sur Hari, apprenez qu’il est le dieu des trois mondes ; adorez le seigneur de Lâlatch, car le Véda vous l’enseigne[3].

Ceci est dans le dixième livre de l’histoire du bienheureux Hari, la quatre-vingt-huitième lecture qui a pour titre : L’Explication des louanges.

  1. Il est à la fois privé de qualités en tant que dieu à l’état simple de puissance créatrice, et doué de qualités (visibles et sensibles) en tant que créateur manifesté par et dans sa propre création.
  2. Il y a ici un jeu de mots sur hansa, qui signifie à la fois cygne, Brahma en tant qu’âme universelle, Vichnou, etc., en un mot le dieu qui flottait sur les eaux à la manière d’un cygne, et aussi Civa, le Soleil, etc.
  3. Le Véda semblerait plutôt attribuer à Brahme, à l’âme universelle, les qualités que Lâlatch et les autres vichnaïstes réclament pour Vichnou.