L’Âme nue/Temps des Fées

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G. Charpentier et Cie, éditeurs (p. 258-259).
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LE SOIR








TEMPS DES FÉES


 


Aux temps jadis, aux temps rêveurs, aux temps des Fées,
Il aurait fallu vivre aux bois, chez les muguets,
Sous des branches, parmi les rumeurs étouffées.

Sans rien savoir, sans croire à rien, libres et gais,
Nourris de clairs de lune et buvant les rosées,
Il aurait fallu vivre aux bois, chez les muguets,

Nous aurions su dormir sous deux feuilles croisées,
Chanter avec la source et rire avec le vent,
Nourris de clairs de lune et buvant les rosées.

— Le monde est faux, la chair vile, l’art décevant…
Oh ! se bercer au fond des palais d’émeraude,
Chanter avec la source et rire avec le vent !

Suivre la libellule et la brise en maraude !…
Peut-être Mab un jour nous eût changés en fleurs ;
Oh ! se bercer au fond des palais d’émeraude !

C’est si bon d’oublier sa joie et ses douleurs !
Viens nous rouler dans les mousses ébouriffées…
Peut-être Mab un jour nous eût changés en fleurs,

Aux temps jadis, aux temps rêveurs, aux temps des Fées.