L’École des biches/Cinquième entretien

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J. P. Blanche (p. 81-118).

CINQUIÈME ENTRETIEN.

Le salon chez Caroline.
caroline, marie, adrien, antonia.


(Plusieurs semaines se sont écoulées depuis la séance que nous connaissons. La visite de l’artiste à Caroline a été faite ; Adrien a été trouvé bien de tout point et digne des destinées qu’on lui prépare. Présenté par Caroline au comte, il a aussi de ce côté parfaitement réussi. Le gentilhomme le voit avec assez de plaisir, et en a fait presque un commensal du logis. Pour cela, ses amours n’en sont pas plus avancés. Marie s’étant engagée de bonne foi avec sa cousine à ne rien laisser tenter de sérieux que sous ses auspices. Le comte a quitté Paris : Caroline peut donc se donner le petit divertissement promis ; aussi la nouvelle en est aussitôt envoyée à notre soupirant, avec invitation de se rendre chez elle le jour même en compagnie de Marie. Ils doivent prendre leur part d’un dîner qu’elle a fait préparer pour mieux les disposer aux joies de la soirée qu’elle présidera, et dont elle se promet aussi quelques jouissances. Le dîner a eu lieu. La maîtresse de la maison n’a pas ménagé ses hôtes. Caroline, très-animée, a cependant conservé toute sa tête, tandis que ses convives, moins habitués qu’elle à son régime de table, n’ont plus guère la conscience de ce qu’ils disent ni de ce qu’ils font. En se levant de table, le joyeux trio passe au salon, toutes portes fermées. Dès leur entrée, Adrien, les yeux brillants et le teint animé, ne se possède plus. On ne peut reconnaître ce jeune homme si doux, si réservé : il est devenu d’une grande audace. Bouche, gorge, con, cul, tout est baisé, tout est peloté.)

caroline (à Marie).

Mais il est enragé ! ma chère ; retiens-le donc !

marie.

Dame ! c’est bien un peu toi qui l’a mis dans cet état ; ne vas-tu pas en avoir peur à présent !

caroline.

Il ne m’effraie pas, mais il est d’une brutalité qui passe les bornes.

marie (bas à l’oreille de caroline).

Vois donc le sillon que fait sur son pantalon ce qu’un soir il m’avait fait sentir.

caroline.

Parbleu ! je ne suis pas aveugle !

(Marie s’est instinctivement rapprochée d’Adrien, emportée qu’elle est par ses désirs, et sans savoir au juste ce qu’il en adviendra. Elle fait vivement sauter les boutons de la culotte ; aussitôt le prisonnier, mis en liberté, se présente fièrement aux yeux de nos deux belles.)

caroline.

Quel gaillard !

marie.

C’est un monstre ! Mais, ma chère, il est impossible qu’un semblable objet puisse entrer dans un lieu si étroit sans qu’on en soit estropiée.

caroline.

N’aie pas cette crainte ; en s’y prêtant un peu, ça passera : on n’en meurt pas ; tu feras comme les autres.

(Marie, que la vue de ce boute-joie a d’abord tant effrayée, parce qu’elle n’a jamais vu un objet pareil qu’aux statues et à l’état de repos, poussée par la curiosité et surtout par les désirs qui la brûlent, ne peut se retenir ; elle s’en empare, elle le caresse ; elle va même jusqu’à en découvrir le bout, et avec ses doigts délicats elle en fait baisser et hausser la peau ; à ce jeu, une crise est bientôt inévitable ; aussi Caroline, qui voit le danger, s’empresse-t-elle d’arrêter ce badinage, qui ne remplit pas le but qu’elle s’est proposé en les réunissant chez elle.)

caroline.

Mais, maladroite, tu vas lui faire tirer sa poudre aux moineaux ! Il a ce soir bien meilleure occasion de l’employer.

marie.

Eh bien ! puisqu’il le faut, qu’on en finisse donc ! qu’il me le prenne, ce fameux pucelage ! Qu’il me fasse souffrir ! ça m’est égal ; mais qu’on éteigne les feux qui me consument ! Je ne veux plus attendre.

caroline.

Si tu es bien décidée, alors, vite donc, en tenue de combat ; tu vois, je te donne l’exemple ?

(Marie s’empresse d’imiter sa cousine, et nos deux belles, s’aidant mutuellement, se trouvent bientôt dans l’état des trois déesses devant le berger Pâris. Notre artiste, qui n’a jusqu’à présent laissé voir à ces dames que les représentants de sa virilité, est bientôt aussi débarrassé par elles de tout ce qui peut s’opposer à leurs regards libertins. Ce déshabillement général n’a pu s’obtenir sans beaucoup d’attouchements de part et d’autre, ce qui ne peut manquer d’activer la circulation du sang, d’augmenter les désirs, et de précipiter la scène principale attendue avec impatience par chacun des acteurs. Caroline, toujours à son rôle, n’oublie pas les détails et les précautions nécessaires. Aussi, elle leur laisse un instant de liberté, pour préparer la lice que devront occuper les combattants. Tout est prêt ; il n’y a plus qu’à engager l’action.)

caroline.

Attendez, mes enfants ; avant de procéder au sacrifice, et comme grande-prêtresse, je demande à en régler toutes les scènes et tous les actes.

marie.

C’est ton droit, j’y consens ; mais, de grâce ! dépêche-toi.

adrien.

Ne me faites pas trop attendre, ou je ne respecte plus rien !

caroline.

Allons, mes amis, encore un peu de patience. Je vais d’abord m’établir dans ce fauteuil, cuisse de ci, cuisse de là. Maintenant, Marie, viens ici ; mets-toi à genoux devant moi, entre mes jambes. Prends mes fesses avec tes deux mains. Bien, c’est cela. Penche ta tête sur ma motte ; que ta bouche touche les lèvres de mon con, et que ta langue soit prête à tout… Comme tu comprends !… À vous maintenant, monsieur le pourfendeur. J’espère que cette position est à vos souhaits. Quelle perspective je vous ai préparée ! Quelle chute de reins, quel cul ferme et rebondi ! Surtout, pas d’erreur ! J’ai choisi cette posture comme la plus commode à votre entreprise, comme celle qui, sans trop de douleur, doit vous livrer cette fleur que Marie vous a conservée. Maintenant, que chacun de vous remplisse son devoir avec ardeur et avec adresse. Avec un tel gaillard, je réponds de la réussite.

(Le groupe s’arrange. Les choses d’abord vont au mieux. Le bout du vigoureux priape, préalablement enduit d’une huile odorante, et poussé avec ménagement, pénètre sans trop de difficulté, et le plaisir extrême que Marie ressent des caresses de Caroline lui faisant mépriser toute douleur, elle donne un coup de cul si violent, que le membre redouté enfonce jusqu’aux poils. Malgré sa volonté, un cri s’échappe de la poitrine de Marie.)

marie.

Oh ! oh ! quelle douleur ! Enfin, y est-il ? Je suis sûre qu’il est entré.

(Caroline, avec son expérience habituelle, supposant que l’ex-pucelle peut compromettre le dénoûment d’une scène si bien commencée, glisse aussitôt sa main vers la partie voisine de la blessure, et par un chatouillement de ses doigts exercés elle neutralise facilement l’effet de la douleur. Aussi des élancements précipités, des serrements de cul réitérés et de très-gros soupirs annoncent que la crise est prochaine. En effet, à cet état convulsif succède une sorte d’agonie voluptueuse. La tête de Marie penchée se détourne, ses bras se détendent, le sacrifice est accompli !… Caroline, qui par la vue et le toucher a éprouvé la première tout ce que l’imagination la plus ardente peut désirer, vient elle-même de terminer sa crise. Ayant mieux conservé sa raison que ses compagnons, elle voit de suite le danger que peut courir sa chère Marie, si elle reçoit sans précaution la chaude offrande de son vainqueur. S’arrachant aux étreintes amoureuses de sa compagne, qu’elle laisse glisser sur le coussin du fauteuil, elle s’attache aux flancs du bienheureux fouteur, et par un mouvement brusque et imprévu elle le déloge du gîte où il s’escrimait si bien. La semence qui bouillonne, et que jusqu’à présent il a volontairement retenue, excitée par la main habile de Caroline, s’échappe avec furie et vient, comme la lave d’un volcan, se répandre sur la croupe de la nouvelle initiée.)

caroline.

Fichtre ! quel déluge ! Imprudent ! qu’alliez-vous faire ?

adrien.

Terminer la besogne à laquelle vous m’aviez convié, et dont je ne sais pour quel motif vous m’enlevez la plus grande et meilleure part.

marie.

Méchante cousine !

caroline.

Bien méchante, en effet, d’avoir prévu et empêché une action qui, pour un instant de plaisir, pouvait amener dans tes amours les plus grands embarras. Ma belle, la plus difficile besogne est faite : te voilà maintenant au rang des femmes ; mais il te faudra prendre un peu de patience et calmer tes désirs. Ton éducation n’est pas complète, et tu dois attendre, pour te livrer sans crainte et en toute liberté aux plus délicieux transports de l’amour, que je t’indique les moyens de te préserver des suites presque inévitables de cette passion.

adrien.

Ma belle Marie, Caroline a raison ; je me range à ses avis, et te prie d’attendre et suivre ses instructions.

marie.

J’y consens ; mais à la condition qu’on m’apprendra de suite ce moyen.

caroline.

Quelle impatience ! Allons d’abord nous rafraîchir.

(Cette proposition acceptée, on court au cabinet de toilette, et, sous prétexte de s’entr’aider dans les petits soins de propreté, les mains voltigent partout, s’arrêtant volontiers sur les parties qu’on sait les plus sensibles. Aussi les ablutions calment fort peu la chaleur des désirs : c’est de l’huile qu’on jette sur le feu. Marie, dont l’excitation par ce jeu a été portée à son comble, devient pourpre de plaisir. Ses yeux brillants dévorent le corps de son amant ; ses lèvres enflammées cherchent dans ses baisers à lui dérober son haleine. Ce n’est plus cette jeune fille que nous avons vue si timide, au maintien si décent : c’est une bacchante aux allures lubriques qui cherche, sent et veut sa proie. Bravant toute pudeur, elle enlace de ses bras amoureux ce corps qu’elle convoite ; elle-même de nouveau, et résolument, elle veut mettre le dard dans la plaie toute fraîche. Caroline, qui avait prévu cette reprise, s’est approchée de Marie et a introduit à l’insu d’Adrien une éponge très-fine[1] dans le bijou de sa compagne. Alors rassurée sur le dénoûment spermatique qui doit avoir lieu, elle continue ses ablutions. Nos deux amoureux, dont les feux sont inassouvis, laissent Caroline et retournent au salon où ils se remettent d’eux-mêmes en action. Marie, n’ayant plus besoin d’aide, a repris la place et la position qu’elle occupait au premier assaut. Les choses vont donc bon train au moment où Caroline rentre au salon.)

caroline.

Oh ! oh ! mademoiselle la débutante, comme vous allez ! Quels coups de cul ! Attendez-moi donc !

(Elle force les combattants à se séparer ; et reprend la place qu’elle occupait précédemment La position est à peu près la même pour chaque personnage. L’action recommence, et Marie éprouve tant de plaisir à cette reprise que, dans le désordre de ses sens, elle n’entend plus rien, et si notre fouteur, en quittant sa bouche pour la jolie gorge de sa partenaire, ne laissait sa tête libre, notre si complaisante Caroline n’aurait qu’une bien petite partie du festin préparé par elle. Profitant donc avec adresse de l’incident, elle prend délicatement la tête de Marie entre ses cuisses, de façon que la chaleur de ses charmes et le chatouillement que produisent les poils sur ses lèvres, lui rappellent l’endroit où elle est, et ce qu’en bonne camarade elle doit y faire. Marie comprend ce que l’on attend d’elle, et s’y prête de la meilleure grâce possible.)

caroline.

À la bonne heure ! Tu comprends et tu y viens, petite ingrate ! C’est cela… au moins ainsi je vais participer un peu à vos plaisirs, et je vais encore les augmenter. Qu’Adrien se confonde le plus possible avec toi. En me courbant, je pourrai étendre mes mains jusqu’au bas de ses fesses, et caresser la racine de son vit et ses dépendances, de manière à aider par le chatouillement de mes doigts les élans de sa virilité.

(Elle met à exécution ce qu’elle dit, et Adrien, ne pouvant résister à l’agilité de ses doigts, décharge aussitôt)

caroline.

Eh bien ! monsieur, quoi ! déjà ?

adrien.

Comment voulez-vous que je résiste à tant de volupté à la fois ?

caroline (à adrien qui s’est arrêté).

Mais, allez donc toujours ! ne voyez-vous pas que cette pauvre enfant n’est pas encore arrivée ?

(Adrien reprend avec une nouvelle ardeur, et bientôt deux ou trois vigoureux mouvements de reins, suivis d’une douce extase, annoncent que Marie est parvenue au comble de la jouissance.)

marie.

Je n’en puis plus !… Assez !… assez !…

(À peine Marie a-t-elle repris ses sens, que son premier mouvement est de se jeter dans les bras de ses compagnons. Elle les accable de caresses, tant sont grandes sa joie et sa reconnaissance des plaisirs qu’on lui a donné.)

marie.

Je suis brisée, anéantie ! Quelles sensations inconnues ! Je n’aurais jamais pensé un tel bonheur ! C’est ainsi que doivent être les joies du paradis.

adrien.

Maintenant, mes belles amies, j’espère que vous ne laisserez pas mon admiration sans être satisfaite, et que vous me laisserez voir et contempler à loisir et en détail toutes vos beautés, ces chefs-d’œuvre de la nature, qu’auraient enviés pour modèles les plus grands artistes d’Athènes et de Rome, et que vous ne m’avez laissé que le temps d’entrevoir.

(Notre amateur saisit nos deux beautés et dévore des yeux, en caressant de ses mains et de ses lèvres, les parties les plus secrètes de leur corps.)

caroline (avec des demi-façons).

Quel feu ! quelle chaleur, monsieur l’enthousiaste ! Vous avez une singulière façon d’admirer la nature ! (À Marie.) Mais, arrête-le donc, ma chère, il ne respecte plus rien !

marie.

Bah ! laisse-le faire, puisqu’il y trouve tant de plaisir.

caroline.

Mais tu ne vois donc pas où il a la main et ce qu’il veut y mettre ? Oh ! pour cela, non, monsieur ; cela ne sera pas, je ne veux pas ! Après tout, ce n’est pas votre bien.

adrien.

Pourquoi me refuser ce plaisir après celui que vous m’avez procuré avec Marie. Craignez-vous qu’elle s’en offense ! Pensez-vous qu’après les deux sacrifices que je viens de faire, il ne me soit plus possible de vous faire pareille offrande. Détrompez-vous. Venez, je vais vous donner les preuves du contraire.

marie.

Laisse-toi faire, Caroline ; que crains-tu ? une indiscrétion ? Il serait un peu tard. Crains-tu de me déplaire ? Non, Caroline, je vous aime tendrement tous les deux. Pourquoi serais-je jalouse d’un moment de plaisir auquel les sens seuls participent ? Adrien est aussi beau que tu es belle : j’ai permis votre rencontre et votre intimité, je ne dois pas être surprise que mon amant ait produit sur toi l’effet auquel je n’ai pu échapper ; ne sois donc pas étonnée de me voir me prêter à ta fantaisie. Sois franche, tu grilles de te voir dans ses bras ? Eh bien, je t’y mettrai si cela est nécessaire ; Adrien serait un égoïste et ne mériterait pas mon amour si cette tolérance de ma part pouvait altérer en rien son sentiment. Viens donc, chère amie, viens, sans hésitation, recevoir la preuve de sa reconnaissance.

caroline.

Non, ma chère, non, jamais je ne consentirai à recevoir par là l’offrande de ton amant Ce n’est ni par dédain ni par indifférence : ces deux sentiments sont loin de ma pensée. Mais soit préjugé, soit caprice, je me suis fait la loi de ne jamais laisser pénétrer par là un autre que le comte. C’est son bien, et tant que notre liaison durera, cette résolution sera scrupuleusement respectée. Voyez, mes amis, dans quel état m’ont mis vos différents jeux. Je ne vous cache pas les désirs et les feux qu’ils ont allumés, — les preuves en sont palpables, — mais ma résolution est inébranlable, et il faut s’y résigner.

marie.

Je t’aime bien avec ton par là ! par là ! N’est-il pas quelque moyen de capituler avec ce par là ? par ici, par exemple ?

(En disant cela, Marie, qui avait appris dans ses entrevues précédentes qu’une jolie femme n’a pas qu’un endroit pour le plaisir, introduit son doigt dans le trou mignon de son amie.)

caroline.

Mais, petite libertine, sais-tu que c’est abominable ce que tu me proposes ?

marie.

Ne m’as-tu pas dit qu’une femme était belle n’importe de quel côté, et que tout était permis, pourvu qu’on ne nuisît ni à sa considération, ni à sa santé, ni à son prochain ? Adrien est d’une discrétion à toute épreuve, d’une santé parfaite. Quant au prochain, je ne vois pas trop le tort qu’il peut éprouver dans cette affaire.

adrien.

Marie a raison, divine amie : partout chez vous séjourne la volupté. Et pourquoi aurais-je moins de satisfaction à cueillir cette fleur, d’autant plus précieuse pour moi qu’elle ne se donne qu’aux élus de l’amour ? Rendez-vous donc à mes désirs, et soyez assurée que le plus inviolable secret en sera gardé.

(Pendant cette supplique amoureuse, Marie, devenue par les leçons de Caroline très-savante dans l’art de faire des caresses irrésistibles, veut essayer ses forces sur sa propre maîtresse, et pour vaincre son hésitation, elle attise par les attouchements les plus lubriques le feu qui déjà la brûle.)

caroline.

Petite endiablée, comment résister à de tels arguments ? Je n’y tiens plus. Va, fais ce que tu voudras !

(Nos deux tentateurs s’empressent de profiter de ce moment de délire. Marie ne lâche pas son amie, et, courbant sur un fauteuil la victime qui ne fait plus aucune résistance, elle présente au sacrificateur agenouillé une mappemonde irréprochable. Elle même, à genoux près du groupe, ne dédaigne pas d’aider au sacrifice en mouillant l’entrée de la voûte indiquée. La tête de ce superbe boute-joie est restée d’une raideur à prouver qu’il peut facilement percer cette fleur qu’on veut bien lui abandonner. Non contente de ce soin, dans la crainte de la douleur des premières difficultés, (suivant en cela l’exemple de Caroline), elle a passé son autre main entre les cuisses de la patiente, prête à porter secours si cela devient nécessaire.

caroline.

Doucement donc, affreux homme ! Il est trop gros, il n’entrera jamais ! vous allez me blesser !

marie (surveillant l’opération).

Patience, ma chère ; tiens, voilà la tête déjà entrée !

caroline.

Ah ! il me fait mal ! Arrêtez un peu. Allez maintenant… encore !… Je le sens qui pénètre plus avant, cousine. (Caroline, qui sent le frottement des poils contre ses fesses, ne peut douter de l’introduction complète ; aussi s’écrie-t-elle :) Ah ! le gredin ! l’y voilà en entier ! Toi, chère Marie, introduis ton doigt dans mon bijou ; enfonce, enfonce… Ah ! mes amis, maintenant, allez bien ensemble ; poussez… Arrive qui plante, je me moque de tout !… Ah ! foutre, il inonde mon derrière ; ma foi ! je n’y résiste plus, je pars aussi. Tiens ! cher Adrien ; ah !… je décharge !

marie.

Très-bien, madame la puritaine ; il paraît que, quelque abominable que soit la chose, elle a aussi son bon côté.

caroline (un peu apaisée).

Que veux-tu ? Il faut bien que j’en convienne. Voilà un exemple de la fragilité humaine. Il prouve que si avec une bonne nature on peut toujours répondre des sentiments de son cœur, il n’en est pas de même de son tempérament. Par imprudence, par curiosité, nous laissons parfois germer dans notre imagination des désirs violents ; puis, ne pouvant plus les maîtriser, nous sommes entraînées au delà des limites de la raison.

marie.

Voilà de grands mots pour une bien petite chose. Tu as été entraînée au delà des limites de la raison ! Pourquoi cela ? parce que tu as bien voulu permettre à un beau garçon de te mettre par derrière ce que ton amant te met chaque jour par devant ? Tu n’as pas à compter avec ta conscience ; tu ne fais tort à personne, pas même au comte, puisque tu n’as abandonné qu’une chose dont il ne se sert jamais. Tu ne dois compte qu’à toi-même de ton action : à quoi bon des scrupules ? Je ne sais pourquoi, ta curiosité éveillée, tu n’aurais pas satisfait ton envie de connaître ce plaisir nouveau qui t’était inconnu. Si, comme je le pense, tu n’as pas été déçue dans ton espoir, sois en repos. Plus de réflexions ! Viens nous embrasser, et instruis-nous sur ce genre de jouissance que je veux aussi connaître.

caroline.

J’ai éprouvé, je vous l’avoue, des sensations infinies, quelque chose de piquant dont je ne puis exprimer les délices, et qui ne ressemblait à rien de ce que j’ai ressenti jusqu’à présent ; mais je crois bien ; mes amis, que votre présence et les caresses de mignonne ont bien aidé un peu à ma jouissance. Aussi je pense que cette débauche de l’amour perdrait beaucoup de sa vivacité pour notre sexe, si elle n’avait pas pour auxiliaire une aussi jolie compagne que toi. Je comprends ce moyen employé par les femmes qui, par suites de couches, ont avec un ventre plissé l’entrée de la matrice très-élargie. Il y a pour celles-là tout avantage. Elles peuvent, en présentant le combat de cette façon, dissimuler sûrement les ravages de leur personne. C’est pour elles une grande ressource. Par ce moyen elles réveillent et entretiennent l’appétit de leurs maris ou de leurs amants. Pour nous, cela ne peut être qu’une variété de nos jouissances, que nous pouvons chercher quelquefois par caprice, mais dont pour mon compte je ne ferai jamais habitude.

marie.

Je pense comme toi certainement, mais je n’en ai pas moins une terrible envie d’en essayer un peu.

adrien.

De suite, si tu le veux !

caroline.

Ce ne serait toujours pas en ce moment, monsieur le présomptueux. Offrir et tenir, vouloir et pouvoir sont choses bien différentes. Vois, Marie, dans quel état d’humilité est son boute-joie, et c’est avec cela que monsieur prétend exécuter une nouvelle prouesse !

adrien.

Il suffirait d’une seule caresse de vos douces mains, mes syrènes ; vous verriez immédiatement qu’un peu de repos n’est pas l’impuissance, et que je n’avance que ce que je puis tenir. Essayez !

marie.

Soyons bonnes filles, Caroline. Si tu refuses, moi je risque l’aventure !

caroline.

Tu vas devenir enragée si cela continue.

(Les deux femmes, dont la bonne volonté ne peut faire défaut, s’emparent résolument du suppliant engin, qui dans ce moment fait piteuse mine. L’une s’amuse à coiffer et décoiffer sa tête, l’autre à chatouiller ses dépendances, et cela si gentiment, qu’en un instant il se relève fièrement et par sa fermeté démontre parfaitement qu’il peut tenir ce qu’Adrien a promis.)

marie.

Tu vois ! Ce que femme veut…

caroline.

Le diable le permet, nous savons cela.

(Caroline, qui tient à se débarrasser de la copieuse décharge qui est restée dans son derrière, convie ses joyeux compagnons, avant de passer à de nouveaux ébats, à venir se purifier des résultats des plaisirs passés. Chacun cette fois procède vivement à ses ablutions, désireux qu’ils sont d’arriver promptement à quelque chose de nouveau. Marie, qui voit que le membre de son amant, malgré la fraîcheur de l’eau, n’a rien perdu de sa fermeté, ne peut s’empêcher d’y porter les lèvres, d’en baiser le bout vermeil et de l’introduire même dans sa bouche.)

caroline.

Ne t’amuse donc pas ainsi à la bagatelle !

marie.

Mais regarde-le : c’est du fer !

caroline.

Je le vois bien. Aussi ne perdez pas votre temps. Venez dans ma chambre à coucher pour mettre votre projet à exécution. Mon lit présentera bien plus de commodités que mes meubles du salon.

(Ceci dit et fait, Caroline se précipite sur le lit et s’y étale de tout son long, couchée sur le dos et la tête aux pieds.)

Viens, mignonne ; mets-toi à cheval sur ma tête, tes cuisses très-écartées, de manière que mes yeux puissent voir facilement ce qui se passera au-dessus d’eux, et que ma langue soit à portée de rendre service à ton affamé minon. Te voilà placée on ne peut mieux ! Penche-toi maintenant en avant Avec tes mains empoigne ferme mes fesses. Petite pressée, attends donc… pas encore… et vous, monsieur le sodomite, à genoux entre les jambes de Marie, votre vit en main, pointé sur le trou à perforer… Marie, tiens donc bien ton derrière levé !… Pas là, maladroit ! Vous êtes trop bas ; vous glissez chez le voisin… Plus haut… tenez, laissez-moi vous diriger… Vous y êtes enfin ! À la rescousse à présent ! que chacun fasse son devoir, et Vénus pour tous !

(Marie, en fervente et vaillante sectatrice du culte de Paphos, reçoit les premiers assauts avec tant d’intrépidité, que l’introduction d’un si gros membre dans son cul se fait sans le plus petit mouvement de sa part, et que, si Caroline ne suivait des yeux le mouvement de l’opération, elle ne pourrait croire à la prise si subite d’un passage aussi étroit. Malgré l’âpreté de ses sensations, Marie n’a pas un instant interrompu sur son amie le service de sa langue et de ses doigts. Les plaisirs qu’elle donne, comme ceux qu’elle reçoit, ne font que stimuler davantage les mouvements de son derrière. Quant à Caroline, placée comme elle est, elle voit aller et venir ce superbe vit dans le trou mignon de sa cousine. Elle sent parfois frôler sur son front les deux compagnons qui se balancent au-dessus de sa tête ; aussi l’excitation est si forte, que malgré sa volonté de retenir sa jouissance, elle atteint la première le but ; mais, en bonne fille, elle n’en continue pas moins à augmenter de tout son pouvoir le plaisir de ses amis. Un frisson général, suivi de la cessation de tout mouvement, annonce qu’aussi au-dessus d’elle la crise sublime est arrivée. La voluptueuse spectatrice n’a pas encore quitté sa place ; elle veut tout voir jusqu’à la fin, même la retraite de l’assiégeant ; ce qui fait qu’elle reçoit sur les yeux, par le fait même de cette retraite, quelques gouttes de sperme.)

caroline (se débarrassant d’entre les cuisses
de marie).

Fichtre ! voyez le maladroit ! me voilà aveuglée !

marie.

Je ne sais si c’est un baume excellent pour éclaircir la vue, mais je ne l’emploierai pas pour rafraîchir les intestins ; car j’ai le derrière tout en feu.

(Cette quatrième reprise terminée, le repos est devenu absolument nécessaire. D’ailleurs, Caroline, fidèle à son système, dans la crainte de la satiété évitant de pousser le plaisir jusqu’à l’excès, juge qu’il est prudent d’arrêter ces ébats. Elle engage donc ses hôtes, après qu’ils ont fait de nouvelles ablutions, à repasser au salon ; et craignant que l’état de pure nature où ils sont restés ne rallume des feux plutôt apaisés qu’éteints, elle donne elle-même l’exemple en reprenant ses vêtements.)

caroline.

Voyons, je ne puis renvoyer ainsi de si bons travailleurs ; je ne veux pas les quitter sans que leurs forces soient un peu réparées. Je vais faire descendre Antonia, qui seule peut trouver ce qui nous est nécessaire.

marie.

Comment ! tu vas te livrer à la discrétion de ta femme de chambre ?

caroline.

Pourquoi pas ? Tous mes gens sont couchés, personne à l’office ; Antonia seule veille encore, et je suis sûre d’elle. Et d’ailleurs, j’espère que, rassasiés de volupté et dans l’état décent où nous voilà, Antonia ne pourrait que témoigner contre tout mauvais rapport.

(Antonia, arrivée à l’appel de la sonnette de sa maîtresse, s’empresse d’exécuter ses ordres. Le buffet, mis à contribution, fournit amplement l’encas d’une collation. Antonia, quoique habituée aux excentricités de sa maîtresse, ne peut cette fois se défendre d’une certaine contrariété. Son visage, ordinairement si plein de bonne humeur, est triste et résigné ; son service se fait avec intelligence, mais sans entrain. Cette manière d’être d’Antonia ne peut échapper à la clairvoyante Caroline, qui, connaissant à fond le caractère de sa camériste, ne veut pas la pousser à bout. D’ailleurs, maintenant que son caprice est contenté, elle a hâte de se débarrasser de ses hôtes, ce qui s’exécute avec force protestations de reconnaissance et surtout avec l’assurance du plus inviolable secret. Antonia est chargée de les conduire jusqu’à la porte de l’appartement ; cela fait, elle retourne à la chambre de sa maîtresse pour son service du coucher ; elle s’apprête à faire la couverture, lorsque, apercevant le lit en désordre.)

antonia.

Madame ou quelqu’un de la société a donc été indisposée ce soir ?

caroline.

Voilà, mademoiselle Antonia, une question qui ressemble furieusement à une indiscrétion.

antonia.

Madame pourrait supposer…

caroline.

Je ne fais point de suppositions, mais je crois ce que je vois. Que voulait dire cet air maussade pendant le souper ? Tu sais cependant très-bien, ma fille, que je n’aime ni la bouderie, ni la curiosité. As-tu à te plaindre de ta condition ? Tu as toujours été traitée ici par moi moins en domestique qu’en enfant gâté, mais ce n’est pas une raison pour que tu en abuses. Après tout, qu’as-tu ? Je veux savoir la cause de ce chagrin. Voyons, parle.

antonia.

Je n’ai rien !

caroline.

Eh bien ! puisque toi, d’ordinaire si franche, si confiante, tu ne veux rien dire, je dois parler pour toi : mademoiselle est jalouse comme un vieux chat de toute nouvelle figure qui vient ici. Ne faudrait-il pas que je demandasse à mademoiselle Antonia la permission de recevoir mes amis !

antonia (ne pouvant retenir ses larmes).

Ah ! ma bonne maîtresse, excusez-moi. Que voulez-vous ? c’est plus fort que ma volonté ; vous êtes si indulgente, vous m’avez toujours montré tant de bienveillance, que chaque fois que je vois ici un nouveau visage, je crains toujours qu’on ne vienne m’enlever une part de votre…

caroline.

Affection, n’est-ce pas ? c’est cela que tu veux et que tu n’oses dire ?

antonia.

Le respect que je dois à madame…

caroline.

Parbleu ! après ce que je te permets quand nous sommes entre nous, je me moque parfaitement de ton respect ! Ce que j’exige de toi, si tu veux que nous restions bien ensemble, c’est que devant des étrangers, quoique tu voies, quoique tu entendes, tes yeux et tes oreilles soient fermés ; et surtout de ne jamais, comme ce soir, rien faire paraître qui puisse donner le moindre soupçon de nos relations. À cette condition, tout est oublié.

antonia.

Ah ! que vous êtes bonne !

caroline.

Ne t’y fie pas trop cependant. Ces enfantillages de jalousie pourraient me fatiguer. Est-ce que je t’empêche de voir à ton aise ton amant ? Est-ce que je ne ferme pas les yeux quand le comte te fait des agaceries ? Imite-moi donc, et sois plus calme à l’endroit de mes caprices.

antonia.

Mademoiselle Marie est si jolie !

caroline.

Eh bien, après ! Cela t’ôte-t-il de la valeur, et crois-tu que je ne puisse, sans te faire tort, lui donner un peu de mon affection ? Marie est ma parente, c’est une brave fille ; elle avait besoin de mon appui, devais-je le lui refuser ? Et quant à toi, j’espère bien qu’à l’avenir, si tu veux m’être agréable et conserver mon attachement, tu seras aussi gentille avec elle que tu as été réchignée jusqu’à présent. Je te promets que tu n’auras pas à t’en repentir.

(Sans répondre à cette proposition, Antonia termine son service, ce qui n’est pas une petite affaire, Caroline, avant de se mettre au lit ayant pour habitude de faire une toilette aussi complète qu’à son lever ; les dents, les cheveux, les pieds, rien n’est oublié ; en un mot, tout le corps est de nouveau lavé, nettoyé avec le plus grand soin.)

caroline.

Bien, voilà qui est fait. Tu ! peux aller te coucher, et n’oublie pas mes recommandations.

(Antonia se retire tristement et sans rien dire.)

caroline.

Antonia !

antonia.

Madame ?

caroline.

Tu as donc bien du chagrin de ce que je t’ai dit ? Tu m’en veux, n’est-ce pas ?

antonia.

Je n’ai pas ce droit, madame. Je ne dois qu’obéir, et madame sera obéie.

caroline.

Tu m’agaces avec tes semblants d’obéissance ! Je ne te demande qu’une chose : aime-moi moins.

antonia.

Est-ce possible ?

caroline.

Certes, ma fille ; d’ailleurs, l’excès dans tout est un défaut, et ton attachement devient fatigant. Allons, voilà encore que tu recommences à pleurer !

antonia.

Excusez-moi, madame ; donnez-moi le temps de m’habituer à ce langage, et vous serez satisfaite.

caroline.

Eh bien, pour te donner le temps de calmer ton chagrin, je désire et j’espère que, cette fois, tu voudras bien m’obéir : tu passeras cette nuit près de moi !

(À cette proposition inattendue, le visage de notre camériste change subitement d’aspect ; de triste et soucieux qu’il était, il devient rayonnant de joie ; aussi le premier mouvement de la consolée est de se jeter sur les mains de sa maîtresse, qu’elle baise avec passion.)

caroline.

Cela te rend donc bien heureuse ?

antonia.

Vous savez bien qu’être toute une nuit la compagne de ma maîtresse, c’est pour moi le suprême bonheur !

caroline.

Viens donc alors ; mais nous serons sages, car je suis fatiguée et tombe de sommeil.

(Après cette autorisation, Antonia s’empresse de faire aussi sa toilette de nuit ; puis elle se glisse près de sa maîtresse, qui ne peut s’empêcher de lui donner un bonsoir à la florentine ; mais ces avances en restent là, et bientôt le sommeil vient la surprendre dans les bras de sa fidèle et dévouée Antonia.)


  1. Voir Instruction libertine.