L’École des mères (La Chaussée)/Acte IV
ACTE IV
Scène I.
Il s’en mêle encor à son âge !
Eh ! que ferons-nous donc, nous autres jeunes gens,
Si la vieillesse n’est pas sage ?
Jugeons un peu moins vîte, ou soyons indulgens.
Supposé que l’amour ait part à ce mystere,
Il me semble qu’un fils devroit, avec raison,
Ignorer ou cacher les foiblesses d’un pere.
Est-ce ma faute, à moi, si toute la maison
En parle ? Mais cela ne m’embarrasse guere.
N’est-il venu personne apporter un billet ?
Il doit en venir un ; j’en suis fort inquiet.
Je n’ai rien vû.
Tant pis.
Mais à propos, j’espere…
Eh ! bien, voyons, qu’espéres-tu ?
Qu’enfin nous allons prendre un autre train de vie.
Et par quelle raison ?
Parce qu’on vous marie.
Qu’y fait le mariage ?
D’amender les gens de votre âge.
La raison les attend au fond de leur ménage.
L’hymen est ordinairement
Le tombeau du libertinage,
À moins qu’on n’ait le diable au corps.
Oui, l’exemple me rendra sage.
Vous vivrez comme auparavant ?
Au contraire. Je vais m’enterrer tout vivant,
Renoncer au plaisir qui convient à mon âge,
Consacrer à l’ennui le cours de mes beaux ans,
Commencer mon hyver au fort de mon printems,
M’enfoncer, m’abîmer au fond de mon ménage,
Pour y végéter comme un sot.
Ah ! pauvre malheureuse !
Hem !
Moi, je ne dis mot.
(seul.)
Va donc voir ce qu’on veut. L’attente est un supplice.
Ah ! si ce pouvoit être un billet d’Arthénice !
Tenez, c’est un billet joliment tortillé.
« Mes résolutions sont prises.
» Venez où vous savez à huit heures précises. »
Comme il a l’air émoustillé !
« Malgré tous mes parens… la maudite cohorte !…
» Pour vous suivre ce soir, je les tromperai tous.
» Je sens que mon devoir en murmure… Qu’importe ?
» Mais l’on n’est plus à soi, lorsque l’on est à vous. »
Ah ! pour moi quel bonheur, ou plutôt quelle gloire !
Ne perdons point de tems.
Quelle est donc cette histoire ?
Avec ces diamans va faire de l’argent ;
Cours emprunter dessus à l’un de nos Corsaires
Les deux mille louis qui me sont nécessaires.
Viens me les apporter : sur-tout, sois diligent.
J’ai des ordres encore à te donner ensuite.
Voici Madame Argant, sauve-toi, prends la fuite.
Scène II.
Où va-t-il porter ces écrins ?
Chez un metteur en œuvre.
Eh ! pourquoi donc ?
Pour quelques diamans, qui, du moins à ma vûe,
Paraissent en danger. Pour ne rien hasarder,
J’envoie en faire la revue.
Il s’en perd bien souvent, faute d’y regarder.
C’est bien fait. Ce présent n’est il pas fort honnête ?
Honnête ! Ah ! pour le moins ; & j’en suis très-content.
Je brûle de le voir orner votre conquête.
Votre pere obstiné m’embarrasse pourtant ;
Il paroît opposer la même résistance.
En vain j’ai de sa niece employé l’assistance.
Ce refus me paroît d’autant plus surprenant
Qu’elle a sur mon époux un empire étonnant ;
Et que, pour ainsi dire, elle en est adorée.
Vous souriez ?
Qui ? moi !
Peut-on sçavoir pourquoi ?
Ce n’est rien.
De votre confiance a droit d’être honorée.
De grace, dites-moi…
Daignez me dispenser…
Non ; vous m’inquiétez. Plus vous voulez vous taire,
Plus vous me donnez à penser ;
Je veux absolument entrer dans ce mystere.
Il ne falloit pas moins que cet ordre absolu
Pour vous sacrifier toute ma répugnance.
Si je me détermine à rompre le silence,
Daignez vous souvenir que vous l’avez voulu.
Mais cependant, Madame, il faudroit me promettre…
Eh ! quoi ?
De ne me point commettre.
Je m’en garderai bien.
D’ailleurs, quoi qu’il en soit de cette confidence,
Croyez que je n’en tire aucune conséquence.
Le fait en question est assez singulier.
Marianne, entre nous, vous est-elle connue ?
Oui, lorsqu’avec mon pere elle est ici venue,
Sçaviez-vous, comme un fait bien sûr & bien constant,
Qu’il existoit encore en France
Une autre Demoiselle Argant ?
Sans doute.
En aviez-vous une entiere assurance ?
Mon mari le disoit.
J’entends.
Oui, je crois, dans mon jeune tems,
Avoir oüi parler du pere & de la fille.
D’ailleurs, nous habitions des lieux trop différens
Pour être bien au fait du sort de vos parens.
Je n’ai pas autrement connu votre famille.
Il y paroît.
En quoi ?
Sur-tout point de courroux.
Je n’entends rien à ce mystere.
Ni moi non plus. Mais, entre nous,
Marianne n’est point la niece de mon pere.
Elle ne seroit point sa niece ?
Et j’ignore à quel titre elle en a pris le nom.
Ah ! quelle découverte !
Il l’entend à merveille !
Mais avant que d’aller plus loin,
Qui peut vous avoir fait une histoire pareille ?
D’où la sçait-on ? Comment ? Quel en est le témoin ?
Un ancien Valet de feu votre beau-frere,
En bûvant chez le Suisse, a fort innocemment
Révélé tout ce beau mystere.
Il convient qu’effectivement
Son Maître eut une fille unique,
Qu’on nommoit Marianne.
Après ?
Qu’elle est morte avant lui, que rien n’est plus constant ;
Que c’est une histoire publique ;
Et qu’enfin cette niece auroit plus de vingt ans.
Mais vraiment je me le rappelle.
Tous deux sont morts depuis long-tems.
Il est sûr de son fait. Ce ne peut pas être elle.
Mais je vous jure encor que je pense trop bien
Pour oser en conclure rien.
Quoi ! chez moi ! sous mes yeux ! feignons de n’en rien croire,
Et ne dégradons point le pere aux yeux du fils.
(haut.)
Non ; plus je pense à cette histoire,
Plus je vois que ce sont autant de faux avis.
Je connois mon mari. Vingt ans d’expérience
Doivent, sur cet article, assurer mon repos.
Pouvez-vous honorer de la moindre croyance
Des rapports de Valets, toujours ivres ou sots ?
Qu’ils n’aillent pas plus loin. Imposez-leur silence ;
Et du premier d’entre eux qui ne se taira pas,
En le chassant d’ici, punissez l’insolence.
Madame…
Il le faut ; je le veux : la chose est expliquée.
Vous serez obéie.
(haut.)
Mon mari comblera mes vœux.
L’honneur de s’allier à des gens d’importance,
Quand il se verra devant eux,
Indubitablement vaincra sa résistance.
(à part.) (haut.)
Je sçaurai l’y forcer. Je viens de recevoir
Un billet d’assez bon augure.
Chez le comte d’Ausbourg on nous attend ce soir.
Il est oncle de la future.
C’est chez lui qu’on s’assemble ; & l’on y soupera.
Fort bien.
Vous savez sa demeure.
Mes gens la chercheront.
Arrivez de bonne heure.
Mais… au sortir de l’opéra.
Si vous veniez plûtôt ?
Et partout où l’on soupe, il faut arriver tard.
Oui ; mais l’occasion mérite quelque égard,
Quand il s’agit d’un mariage.
Je m’acheminerai, quand il en sera tems.
Faites donc pour le mieux.
Vous serez tous contens.
Scène III.
Rien n’est plus ravissant que cette conjoncture.
Deux rendez-vous ensemble ! un d’hymen, un d’amour.
Ceci veut de l’ordre… Oui… Chacun aura son tour ;
Et j’aurai mis à fin ma premiere aventure,
Quand… C’est La Fleur.
Scène IV.
Où sont mes deux mille louis ?
Dans votre cabinet.
Allons, preste, à cheval.
Quelle affaire nous presse ?
Va-t-en faire arranger la petite maison ;
Commande un souper propre, & suivant la saison ;
Fais-y porter d’ici du vin de chaque espece ;
Que tout soit à la glace, & qu’on fasse grand feu
Qu’on éclaire par-tout.
Et la future y sera-t-elle ?
Point de sotte demande.
Allons.
Que voulois-je dire ?… Ah !…
Ma surprise est extrême.
Que ma chaise de poste y soit, & des relais.
Fais-y porter aussi…
Voilà bien des apprêts !
Combien ? Deux habits d’homme & du linge de même.
Des habits & du linge ?
Oui. Fais ce qu’on te dit.
Est-ce que vous voulez y faire une retraite ?
Tout comme il me plaira. Que rien ne t’inquiette.
La curiosité te travaille l’esprit.
Mais, Monsieur, tout ceci… franchement, à vrai dire,
Un jour comme aujourd’hui, me donne du tintoin.
C’est bien à toi d’en prendre ! Ah ! parbleu, je t’admire !
Fait-il tout-à-fait nuit ?
Bon ! le jour est bien loin.
Qu’on mette les chevaux à la voiture grise.
Eh ! bien, va donc.
Je n’en serai jamais payé que par surprise.
Tu ne pars pas ?
Je m’en y vais.
(à part.)
Oui, risquons le paquet.
Qui diable te retarde ?
Vous allez me gronder.
Tu peux le mériter.
C’est qu’avec votre argent…
Quoi ?
Pour vous, en votre nom, une dette criarde.
Eh ! qui t’en a prié ?
La pitié, le besoin.
Je te trouve plaisant de prendre tant de soin !
Vous avez de l’argent.
Qu’importe ?
Emprunter pour payer, parbleu, rien n’est plus fou.
C’étoit un pauvre Here ; il n’avoit pas le sou :
Et puis six cens écus, la somme n’est pas forte.
Me le pardonnez-vous ?
Il faut bien.
Mais d’honneur ?
Oui. Quel est ce coquin de créancier ?
La Fleur.
Toi ?
Moi.
Va.
Et vîte & vîte, allons nous payer par nos mains.
Scène V.
D’où viennent tout-à-coup de si cruels dédains ?
D’abord, en me voyant, comme elle s’est aigrie !
Il faut absolument quitter cette maison.
Vous rêvez ?
Il est vrai.
Mais il faut vous laisser dans votre rêverie.
Vous avez besoin d’y penser.
Pourriez-vous m’éclaircir ?…
Ma chere petite cousine,
Tout ne réussit pas toujours selon nos vœux.
Il arrive par fois des contre-tems fâcheux ;
Pour y remédier, il faut être bien fine ;
Mais comme vous avez un esprit infini,
Vous vous en tirerez. C’est ce que je désire.
Scène VI.
Quoi ! tout le monde ici se trouve réuni
Pour me désespérer ! mais qu’a-t-il voulu dire ?
Quelqu’un adresse ici ses pas.
Scène VII.
Rosette, si tu peux, tire-moi d’embarras.
Ma tante est contre moi d’une colere extrême.
Qu’ai-je dit ? qu’ai-je fait ? que m’est-il arrivé ?
J’ai beau m’examiner moi-même ;
Dans le fond de mon cœur, hélas ! je n’ai trouvé
Que zele, que respect, que tendresse pour elle.
J’ignore à quel sujet cet accès de rigueur
La prend d’une façon si brusque & si cruelle ;
D’autant plus qu’une fois, d’abondance de cœur,
Elle disoit, j’oublie en quelle conjoncture :
« Il faudra s’en laisser charmer ;
» Cette petite créature
» Finira par se faire aimer. »
Il faut bien que le diable ait ici fait des siennes :
Je ne connois que lui pour jouer de ces tours.
Mais vos recherches & les miennes
Ne nous avancent pas ; il faut d’autres secours :
Vous ne savez pas tout. Je me suis évadée
Pour vous dire à quel point Madame est en courroux ;
En un mot, elle est dans l’idée
De vous faire enlever, de s’assurer de vous.
Qu’on me remene où l’on m’a prise.
Monsieur adresse ici ses pas.
Voyez si vous pourrez parer cette entreprise ;
Et sur-tout ne me nommez pas.
Scène VIII.
Marianne ! Et pourquoi te trouvé-je éplorée ?
Hélas ! mon oncle, au nom de la tendre amitié
Dont par vous seul ici je me trouve honorée,
De grace, dites-moi, par bonté, par pitié,
Qu’est-ce donc qui se passe à mon désavantage ?
Il doit m’être, en ce jour, arrivé des malheurs ;
Tout inconnus qu’ils sont, ils m’arrachent des pleurs.
Ne me les laissez pas ignorer davantage ;
Innocente, ou coupable, instruisez-moi de tout.
De quoi ?
Cette infortune est réelle & publique.
C’est une énigme obscure, ou plutôt chimérique,
Dont je ne puis venir à bout.
Je ne te connois point de nouvelle infortune.
Ah ! vous dissimulez.
Non, je n’en sçache aucune.
Pourquoi donc, à présent, attiré-je les yeux
De tout ce qui nous environne ?
D’où viennent ces regards furtifs & curieux
Qu’on attache en secret sur toute ma personne ?
Eh ! mais, tout cela vient du plaisir de te voir ;
C’est qu’ici tout le monde t’aime.
Quoi donc ! ai-je changé ? Ne suis-je plus la même ?
Ils ont d’autres motifs que je ne puis sçavoir.
Et par quelle aventure, à nulle autre pareille,
N’est-ce que d’aujourd’hui qu’on m’examine ainsi ;
Et qu’en me regardant tout le monde d’ici
Sourit avec malice, & se parle à l’oreille ?
Et ma tante elle-même, avec la dureté
La plus grande & la plus cruelle,
Vient de me chasser de chez elle.
Elle a poussé la cruauté
Jusques à me défendre à jamais sa présence.
D’où pourroit lui venir un courroux si soudain ?
Et moi, toute éperdue, examinant en vain
Ma triste & timide innocence,
Je suis venue ici ; j’ai trouvé votre fils,
Qui m’a dit quelques mots, où je n’ai rien compris.
À peine il m’a laissée incertaine & flottante,
Au milieu de mon trouble & du plus grand effroi,
Qu’alors on est venu m’avertir que ma tante,
Toujours de plus en plus en courroux contre moi,
Veut se débarrasser de ma vûe importune,
Et me faire enlever.
Un indiscret ami nous perd :
Elle sçait tout.
Quoi donc ?
Mon secret est trahi.
Quel est donc ce regret ?
Je vois que j’ai commis une imprudence extrême.
Daignez m’en éclaircir… Vous parlez de secret !
Il faut que je le cherche… Ah ! le voici lui-même.
Scène IX.
Cruel ! qu’avez-vous fait ?
Qui ? moi ! Qu’est-ce que c’est ?
Eh ! morbleu, l’on sçait tout.
Doucement, s’il vous plaît.
Je suis désespéré.
Quel courroux est le vôtre !
Votre indiscrétion…
Quoi ?
Vous aviez mon secret !
Il est encor entier.
Ma femme est furieuse.
Elle fait son métier.
Que la plaisanterie est ici mal placée !
Je vous dis que ma femme est si fort courroucée
Contre elle & contre moi, qu’elle est dans le dessein,
Comme je l’ai prévu, d’user de violence,
De me l’arracher de mon sein,
De la mettre en lieu sûr.
Parbleu, c’est qu’elle sçait, à n’en pouvoir douter,
Que ce n’est point là votre niece.
Votre femme croit vous ôter
Une jeune & tendre Maîtresse.
Qu’entends-je ? Que m’apprenez-vous ?
(à Monsieur Argant.)
Ce n’est pas sur la foi du lien le plus doux
Que je suis chez vous & chez elle ?
Eh ! pourquoi donc ici m’avez-vous fait venir ?…
Ciel ! je frémis de tout ce que je me rappelle.
Ah ! cessez de me retenir.
De toutes les horreurs j’éprouve la plus noire.
Ah ! Dieu ! peut-on former un si cruel projet ?
Du plus affreux roman je me vois le sujet.
Elle ne sçait donc pas sa véritable histoire ?
Eh ! non. Vous me jettez dans un autre embarras.
Je veux sçavoir de qui j’ai reçu la naissance.
Remettez-moi sous leur puissance ;
Quels que soient mes parens…
Dans peu tu le sçauras.
Parlez ; je ne veux plus languir dans cette attente.
Je vais m’aller jetter aux genoux de ma tante…
Quel nom m’échappe encor !
Elle vient de partir.
Attends.
La fin n’en peut être trop prompte.
Crains d’apprendre ton sort.
De nourrir plus long-tems l’opprobre où je me vois.
Modere donc un peu les accens de ta voix.
Non ; c’est au désespoir à rétablir ma gloire ;
Je ne puis faire trop d’éclat.
Je suis moins criminel que tu ne l’oses croire.
Sois instruite de ton état.
Cette vive amitié qui t’outrage & te blesse,
Trouvera dans ton ame un retour éternel ;
Apprends que toute ma tendresse
N’est que de l’amour paternel.
Ah !… ma fille…
Qui ! vous… mon pere ?
Eh ! pourquoi si long-tems me cacher mon bonheur ?
Peut-être ne vas-tu que changer de malheur.
J’entrevois à présent le fond de ce mystere.
Puisque j’ai le bonheur de vous appartenir,
Le sort peut, à son gré, régler mon avenir.
Il m’a plus fait de bien qu’il n’en sçauroit détruire.
Non ; j’ai pris mon parti, puisqu’on me pousse à bout
Mais pour toi, laisse-moi le soin de te conduire.
Argant n’envahira point tout.
Je m’en vais déclarer qu’il n’est point fils unique ;
Que nous avons encor une fille à pourvoir.
Je ne souffrirai point qu’un abus tyrannique,
Qu’un usage cruel, au gré de son pouvoir,
Me réduise à pleurer ma fille infortunée :
J’empêcherai plutôt cet injuste hyménée ;
Je comptois obtenir ce qu’il faut arracher.
Pour la premiere fois je vais parler en maître.
Quel malheur est le mien !
Quand il en sera tems, je te ferai paroître.
Eh ! pourquoi voulez-vous que je sois à jamais
Le fléau de ceux que j’adore ?
Joignez à vos bontés la grace que j’implore ;
Et souffrez qu’en partant je vous rende la paix.
On m’attend ; obéis. Et vous, ami fidele,
Ne m’abandonnez pas ; daignez prendre soin d’elle.
Restez ; je vous remets en main
Ce que j’ai de plus cher.
Partez ; mais en chemin…
Eh ! bien, quoi ?
N’allez pas user votre courage.
Oh ! j’en aurai de reste.
Le Ciel lui soit en aide ! il en a bien besoin.