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L’électricité dans la ferme/Avant-propos

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Librairie agricole de la Maison Rustique (p. 5-6).

AVANT-PROPOS

Le mot électricité est aujourd’hui une expression populaire ; mais si beaucoup de personnes parlent souvent de l’électricité et de ses diverses applications industrielles, bien peu connaissent les principes généraux qui règlent l’emploi du fluide électrique dans chaque cas particulier (chimie industrielle, métallurgie, éclairage, transport de l’énergie, etc., etc.). Nul doute que si ces principes étaient mieux connus, il y aurait de plus nombreuses applications de la part des personnes susceptibles de les utiliser.

Au point de vue agricole, le fluide électrique peut être employé pour la production de la lumière, et surtout pour la transmission de la puissance à distance. Dans beaucoup de circonstances, les agriculteurs peuvent trouver à louer à bas prix des moulins à eau ; avec une installation relativement peu coûteuse, ils pourraient transmettre la puissance de la roue hydraulique à la ferme et se procurer ainsi un travail mécanique disponible qui remplacerait avantageusement celui de la machine à vapeur. Dans un autre cas, l’industrie annexée à la ferme comporte une machine à vapeur dont on pourrait utiliser une partie de la puissance pour la production de l’électricité nécessaire à l’éclairage.

Il est incontestable que dans un avenir assez rapproché, les machines électriques prendront rang dans le matériel agricole déjà si complexe. Nous croyons donc utile de vulgariser les données que l’on possède aujourd’hui sur l’électricité.

Quoique les anciens (du temps de Thalès) avaient notion de certains effets de l’électricité, que le médecin anglais Gilbert résuma en 1600 dans son livre de Magnete, l’électricité est une science toute moderne. Nous ne ferons pas ici l’historique, même succinct, des travaux des Otto de Guerike, des Newton, des Grey, Franklin, Volta, Galvani et tant d’autres qui s’illustrèrent dans cette branche de la physique. Nous dirons seulement que l’invention de la pile électrique en 1800, de l’électro-magnétisme en 1820 et de l’induction en 1833 contribuèrent pour beaucoup aux applications de l’électricité.

« Lorsqu’il fut démontré, a dit M. Ed. Becquerel, qu’au moyen des effets d’induction on pouvait développer de l’électricité dans des circuits conducteurs par l’influence d’aimants dont les positions relatives avec celles des conducteurs venaient à changer dans des conditions déterminées, on songea à utiliser cette nouvelle source d’électricité dans laquelle l’action mécanique seule est en jeu. MM. Pixii, Saxton et Clarke, peu après la découverte de Faraday, construisirent des appareils qui portent le nom de ces ingénieurs ; mais ce n’est que lorsqu’on chercha à produire économiquement la lumière électrique en utilisant l’intensité lumineuse de l’arc voltaïque, comme dans l’expérience de Davy, que l’on fit des machines d’induction capables de donner une quantité d’électricité que les actions mécaniques peuvent seules fournir à bas prix. Nous ne pouvons indiquer toutes les machines de ce genre aujourd’hui en usage, mais nous devons dire que celle dont le principe a été donné par M. Gramme en 1871, en raison des effets puissants qu’elle présente sous des dimensions relativement restreintes, a constitué un progrès réel dans la production de l’électricité à l’aide des forces mécaniques[1]. »

Avant l’établissement de ces machines, il fallait consommer du zinc dans des piles pour se procurer le courant électrique ; aujourd’hui on arrive au même résultat en consommant de la houille, qui coûte infiniment moins cher que le zinc.

À l’Exposition universelle de 1867, on remarquait déjà plusieurs tentatives de l’emploi industriel de l’électricité (machine de Ladd) ; en 1873, à l’Exposition de Vienne (machines Gramme) et en 1878, à l’Exposition universelle de Paris. Mais la grande impulsion donnée au développement industriel de cette partie de la physique date de l’exposition d’électricité de Paris (1881), et en 1889 la question avait acquis une telle extension qu’il a fallu consacrer à l’électricité une classe toute spéciale à l’Exposition universelle (classe 6), qui comprenait près de quatre cents exposants.

Nous adopterons dans la suite de ce travail la méthode suivante : Après l’examen des notions préliminaires, unités électriques et mécaniques (chapitre Ier), nous examinerons successivement la production de l’énergie électrique (chapitre II), la ligne électrique (chapitre III) chargée de transmettre le courant de la machine génératrice aux différents récepteurs : lampes pour l’éclairage électrique (chapitre IV), ou dynamos pour la transmission de la puissance (chapitre V), et enfin les appareils et procédés employés pour emmagasiner l’énergie électrique, c’est-à-dire les accumulateurs (chapitre VI).

Le chapitre VII et dernier (Résumé et conclusions) sera, en quelque sorte, la synthèse de l’ensemble précédent.

  1. Exposition internationale d’électricité 1881.