L’Œuvre d’Hugues Van der Goes/3

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Les Œuvres d’Hughes Van der Goes[1].

L’intéressant problème soulevé par M. Sander Pierron continue à faire du bruit. Voici les renseignements que nous adresse à ce sujet M. l’abbé Moeller, directeur de l’excellente et très littéraire revue Durendal :

Les Vies des Saints du Brabant de J. Gielemans contiennent trois miniatures. La première a pour légende ce texte : Hace figura repraesentat S. Karolum Magnum, imperatorem Romanorum, regem Francorum ac ducem Brabantinoram et onmes sanctos et sanctas, qui prodierunt de stirpe ipsius ante et post. En effet, cette miniature représente Charlemagne ; les franges extrêmes de son manteau sont tenues d’un côté par saint Albert, l’évèque-martyr de Liège, de l’autre par saint Louis, évêque de Toulouse. Sous les plis du manteau s’abritent, d’une part saint Louis, roi de France, saint Arnould, évêque de Metz, et saint Guillaume, ermite, et d’autre part sainte Gertrude, sainte Begge, sainte Gudule et sainte Amelberge.

La seconde miniature représente un arbre au tronc élancé ; de ses fleurs émergent les images des saints suivants, clairement désignés par leurs noms écrits en toutes lettres : S. Oda virgo, S. Rumoldus, S. Gummarus Confessor, S. Wivina abbatissa, S. Luytgardis monialis, S. Theodardus episcopus et martyr, S. Lambertus episcopus et martyr. Près du tronc de l’arbre, qu’elle enserre du bras, se dresse sainte Hélène saisie par deux bourreaux. Sous la miniature, on lit l’inscription : Haec figura repraesentat sanctos et sanctas in Brabantia natos seu Conversatos, qui non prodierunt de stirpe ducum Brabantiae, sed aliunde.

La troisième miniature représente une vue de Jérusalem.

Ces miniatures sont-elles de Van der Goes ? Pour résoudre cette question il ne suffit pas d’affirmer, comme le fait Sander Pierron, que de 1476 à 1482 Van der Goes et Gielemans ont vécu ensemble à Rouge-Cloître. Il faut examiner soigneusement la date des manuscrits.

La troisième enluminure n’est certainement pas de Van der Goes. Car l’Historiologium qui la contient a été écrit de 1486 à 1481, cinq ans après la mort de Van der Goes.,

Pour la date de l’Hagiologium, qui renferme les deux autres miniatures, on n’est pas fixé d’une façon certaine. Tout ce qu’on sait, c’est qu’il a été écrit après 1476 et avant 1484. Comme d’autre part cependant nous savons qu’en 1479 Gielemans était encore occupé au Sanctilogium et que le Novale Sanctorum semble avoir été commencé en 1483, il s’ensuit que l’Hagiologium a été écrit entre 1479 et 1482, les trois dernières années de la vie d’Hugo Van der Goes.

Reste à voir si l’état de santé du malheureux artiste lui permettait encore, à cette époque, l’enluminer les manuscrits. Car, on le sait, il était atteint d’aliénation mentale dans les derniers temps de sa vie.

Consulter, sur la question, l’ouvrage des Bollandistes : De codicibus Hagiographicis Johannis Gielemans, canonici regularis in rubea valle prope Bruxellas adjectis anecdotis. Bruxelles 1895. Voir surtout pp. 8-14 et 42-43.,


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