L’Amitié (Nemo)/VIII

La bibliothèque libre.
Nemo
Petrot-Garnier (p. 21-22).


CHAPITRE VIII

Indivisibilité de l’Amitié.


Le vieux Plutarque a dit :

« L’amitié est bête de compagnie, non pas en troupe, comme les étourneaux et les geais. »

En effet, on peut avoir un cercle de connaissances étendu ; on peut avoir de l’estime pour plusieurs, pour beaucoup ; mais avoir beaucoup d’amis est fort difficile, pour ne pas dire impossible.

Un ami est un autre soi-même, un être fait comme exprès. Or, en un monde d’étonnantes diversités, ne serait-ce pas une merveille d’étrangeté ? Non, pas plus qu’aimer plusieurs parfaitement, être parfaitement aimé de plusieurs ou de beaucoup est introuvable.

Une rivière à déversoirs multiples n’est que faible et basse. De même, l’amitié divisée.

Ceux qui disent aimer beaucoup de monde n’aiment pas ou que fort peu chaque personne.

Les Scythes n’en voulaient-ils jamais admettre, dans la glorieuse alliance de l’amitié, plus de trois.

Un ancien est plus sévère :

Plutôt que plusieurs, un !

En vain, tout un siècle abusé, sans virilité, sans caractère, nourri dans le faux, nageant dans la sottise, incapable d’abaisser son cœur pour connaître la prudence, osera opposer son contrôle négatif.

Mais les contempteurs seront de son côté.