L’Année républicaine/Brumaire

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Alphonse Lemerre, éditeur (p. 37-38).
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BRUMAIRE.


La séve descend aux racines,
La force abandonne les cœurs,
— Sur les vieilles tours en ruines,
Les geais poussent des cris moqueurs.

La force abandonne les cœurs,
Les bras tombent de lassitude.
— Les geais poussent des cris moqueurs,
Enhardis par leur solitude,

Les bras tombent de lassitude,
Les lendemains viennent boiteux,
— Enhardis par leur solitude,
C’est l’heure des trafics honteux

Les lendemains viennent boiteux
Après l’élan de la bataille.
— C’est l’heure des trafics honteux,
L’on se trahit & l’on se raille.

Après l’élan de la bataille,
Sur les sinistres tumuli,
— L’on se trahit & l’on se raille
Malheur aux vaincus de l’oubli !

Sur les sinistres tumuli
On met les tréteaux de la foire.
— Malheur aux vaincus de l’oubli !
Sombre est la nuit, lente est l’histoire.

On met les tréteaux de la foire,
Car les histrions sont vainqueurs.
— Sombre est la nuit, lente est l’histoire,
La force abandonne les cœurs.

Car les histrions sont vainqueurs.
Quand Brumaire dort aux ravines,
La force abandonne les cœurs,
La séve descend aux racines.