L’Arc d’Ulysse/À Favone, vent printanier

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L’Arc d’UlysseÉditions Georges Crès et Co (p. 135-136).

À FAVONE

Vent printanier,
POUR LE RETOUR DE FERNAND FLEURET
Imitation de l’Ode à Sextius.


Solvitur acris byems gratâ vice veris et Favoni

L’hiver qui durcit le cœur, qui durcit les mares,
Décampe avec ses tambours crevés par Favone,
Les Éoles printaniers des bois jouent aux barres,
Et l’Océan vert savonne.

Trahunique siccas machinae carinas

Sur le sable on tire à l’eau la barque camuse.
Un petit zéphyr joufflu chante en ses poulies.
De révérences sans fin Favone l’abuse,
L’amuse une heure et l’oublie ;

Ac neque jam gaudet arator igni

Puis des laitières sans bas va brusquer les jambes,
Qui de leurs mollets dorés aux prés font l’aumône,
Hier frileuses devant l’âtre où le fagot flambe
Comme un coq de cuivre jaune.

Jam Cytherea choros ducit Venus, imminente lunâ.

Il mène le branle au chœur sacré des Charites,
Que Phoebé jalouse éteint avec sa topaze,
Jusqu’à l’heure où vient brouter, comme marguerites,
Les prés célestes, Pégase.

Nunc decet aut viridi nitidum caput impedire myrto,
Nunc decet immolare, seu poscat, agnum…

Qu’on égorge un chevreau noir ; qu’à mon front d’augure
Favone, qui dans la feuille odorante lutte,
Favorise ton retour des rives Ligures,
Ami savant sur la flûte.


11 avril 1915.