L’Encyclopédie/1re édition/ÉQUIPAGE

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ÉQUIPAGE, s. m. (Gramm.) il se dit en plusieurs occasions de toutes les choses nécessaires pour commencer, continuer, & finir avec facilité & succès, certaines opérations, ou agréables, ou utiles, ou périlleuses, &c. Ainsi on dit, équipage de guerre. Voy. l’article suiv. Equipage de Chasse, Equipage de Pêche, &c.

Équipage de Guerre, se dit en France des différentes choses utiles à la guerre, c’est-à-dire des chevaux, des harnois, des tentes, & autres ustensiles que les officiers, tant généraux que particuliers, font porter avec eux. L’artillerie & ce qui concerne les vivres forment aussi des parties essentielles des équipages de l’armée. Les équipages de l’artillerie sont composés du canon, des mortiers, & de toutes les especes d’armes & de munitions nécessaires à leur service. Pour les vivres, ses équipages consistent en caissons ou chariots couverts pour voiturer le pain des troupes, les farines, &c.

Les équipages de guerre des officiers doivent être le moins nombreux, & le plus simple qu’il est possible. Nous avons sur ce sujet de très-bonnes ordonnances pour limiter & fixer le nombre des équipages, mais qui ne sont pas toûjours observées rigoureusement. Une trop grande quantité d’équipages est fort incommode & embarrassante dans les marches ; le nombre des chevaux & mulets augmente aussi la consommation du fourrage dans les camps ; ce qui oblige le général d’envoyer promptement fourrager au loin, au grand préjudice de sa cavalerie, & ce qui l’oblige aussi souvent à quitter un camp avantageux, parce que la disette & l’éloignement des fourrages ne lui permettent plus d’y subsister.

Les équipages de guerre se divisent en gros & en petits. Les gros comprennent les chariots & les charrettes ; & les petits, les chevaux de bât & les mulets. Lorsque le général a dessein de combattre, il débarrasse son armée des gros équipages. On les envoye avec une escorte sous le canon de quelque ville des environs ou de quelque poste fortifié. On s’en débarrasse encore dans les détachemens & dans les courses qu’on veut faire dans le pays ennemi, parce qu’ils retarderoient la marche, & qu’ils ne pourroient pas passer dans tous les chemins. On n’a donc dans ces sortes d’expéditions que les menus équipages, c’est-à-dire des mulets & des chevaux de bât. Les gros équipages, comme chariots & charrettes, sont plus commodes que les petits pour transporter beaucoup de bagages avec moins de chevaux, mais ils ont l’inconvénient de ne pas pouvoir aller dans toutes sortes de chemins. C’est pourquoi les Romains ne se servoient guere que de bêtes de charge pour porter les équipages de l’armée ; encore étoient-elles en petit nombre, parce qu’il n’y avoit que les personnes d’un rang distingué qui eussent des valets.

Dans nos armées, le général peut avoir, selon l’ordonnance du 20 Juillet 1741, tel nombre de gros équipages qu’il juge à-propos ; un lieutenant-général ne doit avoir que trente chevaux ou mulets, y compris ceux qui sont employés aux attelages de trois voitures à roues ; un maréchal de camp, vingt chevaux, y compris les attelages de deux voitures à roues ; & un brigadier, colonel ou mestre-de-camp, seize chevaux, y compris une voiture à roues seulement.

Il est défendu aux lieutenans-colonels, capitaines, & autres officiers subalternes, d’avoir aucune voiture à roues, & un plus grand nombre de chevaux de monture ou de bât, que celui pour lequel ils reçoivent du fourrage.

Les officiers, qui, à cause de leurs infirmités, ne peuvent se tenir à cheval ou en supporter la fatigue, obtiennent une permission du général pour avoir une chaise roulante. Chaque bataillon peut avoir un chariot ou une charrette pour un vivandier, qui campe avec le bataillon. Il en est de même pour un régiment de cavalerie de deux ou trois escadrons.

Les régimens de cavalerie, dragons, & infanterie, peuvent aussi avoir une charrette pour un boulanger. Il est défendu aux colonels d’avoir ces charrettes à la place des vivandiers & des boulangers, auxquels elles sont permises pour les besoins du régiment ; elles doivent être attélées de quatre bons chevaux. Voyez sur ce sujet le code militaire de Briquet, ou l’abregé qu’en a donné M. d’Hericourt dans le livre intitulé élémens de l’art militaire.

Il est du devoir du général de veiller à la conservation des équipages de son armée, parce que leur enlevement met les officiers qui les ont perdus dans de grands embarras, & qu’il leur ôte d’ailleurs la confiance qu’ils peuvent avoir au général ; attendu que cet inconvénient ne peut arriver, selon M. de Feuquiere, que par la faute du commandant, au moins les enlevemens généraux ; car il en arrive tous les jours de particuliers par la faute des valets qui s’écartent de la colonne des équipages, & dont le général ne peut être responsable.

Les équipages de guerre de Charles XII. roi de Suede, ne devoient point être fort considérables : « son lit, dit M. de Folard, qui l’avoit vû en Scanie, consistoit en deux bottes de paille, & une peau d’ours par-dessus. Il couchoit tout habillé comme le moindre de ses soldats. Le comte de la Marck ambassadeur de France, que ce prince estimoit infiniment, lui persuada de coucher dans un lit pour la premiere fois depuis la guerre ; mais quel étoit ce lit ! un seul matelas, des draps, & une couverture, sans rideaux.... Toute sa vaisselle étoit de fer battu, jusqu’à son gobelet ». Note sur Polybe, tome V. p. 484.

L’usage de la vaisselle d’argent pour les généraux n’est pas ancien dans nos armées. On prétend que le comte d’Harcourt (Henri de Lorraine mort le 25 Juillet 1666), qui commandoit les armées du tems de Louis XIII. & dans la minorité de Louis XIV. est le premier qui s’en soit servi. Suivant l’ordonnance du 8 Avril 1735, les colonels, capitaines, officiers subalternes ou volontaires, ne peuvent avoir dans leur équipage d’autre vaisselle d’argent que des cuilleres, des fourchettes, & des gobelets. M. le marquis de Sancta-Crux ayant prouvé dans ses réflexions militaires, tom. I. p. 417. & suiv. les inconvéniens des équipages trop nombreux, observe que leur excès vient de la diversité des mets, que de cette diversité naît l’intempérance, & que de l’intempérance viennent les maladies. « Les trop grands équipages, dit ce savant & illustre officier, sont des suites des soins honteux qu’on se donne pour contenter sa bouche. Peut-on sans indignation, ajoûte-t-il, entendre des généraux de certaines nations, qui ne parlent jamais que de sausses & de ragoûts, & font de leurs entretiens une conversation de cuisiniers ? Combien de fois arrive-t-il qu’un général occupe son imagination des plats qu’on doit servir sur sa table, quand il ne devroit penser qu’aux devoirs importans du service de son prince » ? (Q)

Equipage d’un Vaisseau, (Marine.) On entend par ce mot le nombre des officiers, soldats & matelots qui sont embarqués sur un vaisseau, pour son service & sa manœuvre pendant le cours de la campagne. Les vaisseaux de guerre ont un équipage bien plus fort & plus nombreux que les vaisseaux marchands : un vaisseau de 80 pieces de canon en a davantage qu’un vaisseau de 50.

L’ordonnance de la Marine, de 1689, regle le nombre d’hommes qui composent l’équipage d’un vaisseau, selon son rang. Ceux du premier rang, premier, second & troisieme ordre, ont 800, 700 & 600 hommes d’équipage.

Ceux du second rang, premier, second & troisieme ordre, ont 500, 450 & 400 hommes.

Ceux du troisieme & quatrieme rang ont 350 & 300 hommes.

Aujourd’hui les équipages sont plus forts que dans ces tems-là ; cependant en 1704, au combat de Malaga, le vaisseau le Foudroyant, de 104 canons, avoit 950 hommes d’équipage. Le vaisseau du Roi, l’Espérance, de 78 pieces de canon, armé en 1740, avoit 660 hommes d’équipage. On comprend dans l’équipage l’état-major, les officiers-mariniers, les matelots, les soldats, & les mousses.

Dans un vaisseau où il y a 8 à 900 hommes d’équipage, l’état-major est à-peu-près de 15 à 20 personnes. Les officiers-mariniers montent au moins à 100, canonniers environ 50, matelots 450, soldats 250 ; mais ceci est susceptible de beaucoup de variétés, suivant les circonstances & la destination de l’armement. (Z)

Equipage d’Attelier, (Marine.) se dit dans le port, de toutes les machines & outils qui servent pour la construction. (Z)

Equipage de Pompe, (Mar). Il se dit de toutes les pieces & garnitures qui sont nécessaires pour la mettre en état de servir. (Z)

Equipage, (Hydraul.) On dit l’équipage d’une pompe, ce qui renferme seulement les corps, les pistons, les fourches, les tringles, & les moises qui les attachent à des chassis qui sont à coulisses, & qui se peuvent glisser dans les rainures des dormans ou bâtis de charpente scellés dans les puits & citernes où on construit des pompes. (K)

Equipage : on nomme ainsi, dans le Commerce de terre, tout ce qui sert à conduire les charrettes, chariots & autres voitures par terre ; ce qui comprend les chevaux, leurs selles, traits & attelages : on le dit aussi des chevaux, mulets & autres animaux de charge des messagers & voituriers.

Les chevaux & équipages des voituriers & autres personnes qui veulent faire entrer ou sortir des marchandises en fraude des droits du roi, ou celles qui sont censées de contrebande, sont sujets à confiscation par les ordonnances du roi pour les cinq grosses fermes, aides & gabelles. Dictionn. de Commerce, de Trévoux, & Chambers.

Equipage, (Architecture.) se dit dans un attelier, tant des grues, grüans, chevres, vindas, chariots & autres machines, que des échelles, baliveaux, dosses, cordages, & tout ce qui sert pour la construction & pour le transport des matériaux. (P)