L’Encyclopédie/1re édition/AS

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Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 1p. 746-747).

AS, s. m. chez les Antiquaires, signifie quelquefois un poids particulier, auquel sens l’as romain est la même chose que la livre romaine, libra. Voyez Poids, Livre, &c.

Quelques-uns dérivent ce mot du Grec αἷς, qui est usité dans la dialecte dorique pour εἷς, un, c’est-à-dire, une chose totale ou entiere : quoique d’autres prétendent qu’il est ainsi nommé as, comme qui diroit æs, airain, à cause qu’il est fait d’airain. Budé a écrit neuf livres de asse & ejus partibus, de l’as & de ses parties.

L’as avoit différentes divisions : les principales étoient l’once, uncia, qui étoit la douzieme partie de l’as ; le sextant, sextans, la sixieme partie de l’as ou deux onces ; le quadrant, quadrans, la quatrieme partie de l’as ou trois onces ; le trient, triens, la troisieme partie de l’as ou quatre onces ; le quinconce, quincunx, ou cinq onces ; le semis ou demi-as, moitié de l’as, qui est six onces ; le septunx, sept onces ; le bes, les deux tiers de l’as ou huit onces ; le dodrans, les trois quarts de l’as ou neuf onces ; le dextans ou dix onces ; & le deunx, c’est-à-dire, onze onces. Voyez Once, Quincunx, &c.

L’as étoit aussi le nom d’une monnoie romaine, composée de différentes matieres, & qui fut de différent poids dans les différens tems de la république. Voyez Monnoie, & la suite de cet article.

Sous Numa Pompilius, selon Eusebe, la monnoie romaine étoit de bois, de cuir ou de coquilles. Du tems de Tullus Hostilius elle étoit de cuivre ou d’airain, & on l’appelloit as, libra, libella, ou pondo, à cause qu’elle pesoit actuellement une livre ou douze onces.

Quatre cents vingt ans après, le thrésor public ayant été épuisé par la premiere guerre Punique, l’as fut réduit à deux onces. Dans la seconde guerre Punique Annibal opprimant les Romains, les as furent encore réduits à une once la piece ; enfin par la loi Papyrienne on ôta encore à l’as la moitié d’une once, ce qui le réduisit à la valeur d’une seule demi-once ; & l’on croit généralement que l’as conserva cette valeur durant tout le tems de la république, & même jusqu’au regne de Vespasien. Ce dernier fut appellé l’as Papyrien, à cause de la loi dont nous venons de parler, qui fut passée l’an de Rome 563 par Caius Papyrius Carbo, alors tribun du peuple ; ainsi il y eut quatre as différens durant le tems de la république. La figure marquée sur l’as étoit d’abord un mouton, un bœuf ou une truie Plutarq. Poplic. Plin. XVIII. iij. Du tems des rois cette marque étoit un Janus à deux faces, & d’un côté & de l’autre ou sur le revers étoit un rostrum ou la proue d’un vaisseau.

Le trient, triens, & le quadrant, quadrans, de cuivre, avoient sur le revers la figure d’un petit vaisseau appellé rates ; ainsi Pline dit, nota æris, c’est-à-dire assis, fuit ex altera parte Janus geminus, ex altera rostrum navis ; in triente verò & quadrante rates. Hist. nat. liv. XXXIII. c. iij. d’où ces pieces furent appellées quelquefois ratiti.

On se sert aussi du mot as, pour désigner une chose entiere ou un tout, d’où est venu le mot Anglois ace, & sans doute le mot François as, au jeu de cartes. Ainsi as signifie un héritage entier, d’où est venue cette phrase, hoeres ex asse ou legatarius ex asse, l’héritier de tout le bien. Ainsi le jugerum ou l’acre de terre romaine, quand on la prenoit en entier, étoit appellée as, & divisée pareillement en douze onces. Voyez ou Acre.

Voici l’as, ses parties ou ses divisions.

Onces. Onces.
1 as 12. semis 6.
deunx 11 quincunx 5.
dextans. 10 triens. 4.
dodrans. 9 quadrans 3.
bes. 8 sextans 2.
septunx. 7 uncia. 1.

As, s. m. (Commerce.) c’est à Amsterdam une des divisions de la livre poids de marc : 32 as font un angel, 10 angels font un loot, & 32 loots font la livre. Voyez Livre. (G)

As, au jeu de Trictrac, se dit du seul point qui est marqué sur une des faces du dez que l’on joue ; & aux jeux de cartes, de celles qui n’ont qu’une seule figure placée dans le milieu. L’as vaut aux cartes un, ou dix, ou même onze, selon le jeu qu’on joue.