L’Encyclopédie/1re édition/CONSISTOIRE
CONSISTOIRE, s. m. (Hist. anc. & mod. & Jurisprud.) ce terme a trois significations différentes ; il y avoit autrefois le consistoire des empereurs, il y a encore le consistoire du pape, enfin il y avoit aussi le consistoire des religionnaires.
Consistoire des Empereurs Romains, étoit leur conseil intime & secret. Le mot consistorium, qui vient de sistere, signifioit proprement le lieu où s’assembloit ce conseil ; ensuite on a pris le nom du lieu où il se tenoit pour le conseil même, & on a appellé de-là comites consistoriani ceux qui étoient de ce conseil ; ils étoient qualifiés du titre de viri spectabiles, qui étoit le second degré dans l’ordre de la noblesse, ceux qui avoient ce titre étant au-dessus de ceux que l’on qualifioit clarissimi, & précédés seulement par ceux qui avoient le titre d’illustres ou superillustres, qui n’étoit accordé qu’aux premiers officiers de l’empire. Ces comtes ou conseillers du consistoire étoient égaux en tout aux proconsuls pour les honneurs & priviléges. Ces mêmes officiers, leurs femmes, enfans, serviteurs, & fermiers, joüissoient aussi des mêmes priviléges en plaidant, soit en demandant ou en défendant, que l’empereur Zénon avoit accordé aux clarissimes princes de l’école. Voyez au cod. liv. XII. tit. x. (A)
Consistoire du Pape, est l’assemblée des cardinaux convoqués par le pape qui y préside ; c’est proprement le conseil du pape : il a été nommé consistoire, à l’exemple de celui des empereurs Romains & des autres princes, dont les conseillers d’état sont appellés comites consistoriani. Le pape tient deux sortes de consistoires ou conseils avec les cardinaux, savoir le consistoire public & le consistoire secret : le consistoire public est celui dans lequel il reçoit les princes, & donne audience aux ambassadeurs ; le pape y est assis sur un throne fort élevé couvert d’écarlate ; son siége est de drap d’or ; à sa droite sont les cardinaux prêtres & évêques ; à gauche les cardinaux diacres : le consistoire secret est le conseil où le pape pourvoit aux églises vacantes, telles que les évêchés & certaines abbayes consistoriales. Ce consistoire se tient dans une chambre plus secrete, qu’on appelle la chambre du pape gai : le siége du pape n’y est élevé que de deux degrés ; il n’y reste avec lui que deux cardinaux dont il prend les avis, que l’on qualifie de sentences.
Les bénéfices consistoriaux sont les archevêchés & évêchés, comme aussi les abbayes qui sont taxées dans les livres de la chambre apostolique au-dessus de 66 florins . On appelle ces bénéfices consistoriaux, parce que les nominations faites par le Roi sont proposées en plein consistoire ; ce qui s’entend néanmoins du consistoire secret.
La cédule consistoriale est un abregé du rapport qui a été fait en consistoire par le cardinal proposant.
Ceux qui sont nommés aux bénéfices consistoriaux, sont proposés au pape en plein consistoire par le cardinal protecteur des affaires de France, en présence des cardinaux qui sont alors à Rome, auxquels il est obligé de donner des mémoires la veille du jour qu’ils doivent entrer au consistoire. On explique dans ces mémoires le genre de vacance du bénéfice, le nom, surnom, qualité, & capacité de celui qui est nommé par le Roi.
Les bénéfices consistoriaux sont à la nomination du Roi. Le pourvû doit obtenir des bulles, & pour cela paye un droit d’annate. Ces bénéfices se donnent en forme gracieuse, c’est-à-dire sans être obligé de se présenter à l’ordinaire, & sans être examiné. Ils ne peuvent être conférés par dévolution. Si l’incapacité du pourvû les fait vaquer, on ne peut les impétrer que du Roi. Ils ne sont point sujets aux regles de chancellerie, à la prévention, aux gradués, ni autres expectatives.
Quoique régulierement les abbayes consistoriales doivent être proposées au consistoire, cependant le pape s’en dispense souvent, sur-tout lorsque ceux qui en doivent être pourvûs ont quelque défaut d’âge, ou d’autre qualité & capacité requise, qui obligeroit les cardinaux à refuser la grace demandée : en ce cas le pape donne au pourvû des provisions par daterie & par chambre, avec dérogation expresse à la consistorialité ; & il accorde les dispenses nécessaires.
Il faut donc, pour expédier par consistoire, que le pourvû ait toutes les qualités requises ; car le consistoire ne souffre même aucune expression douteuse ni conditionnelle dans les provisions.
Quand les expéditions sont faites hors consistoire & par la daterie, la supplique est signée du pape seul, & les provisions sont expédiées en la forme des bénéfices inférieurs.
On prend souvent la voie de la daterie plûtôt que celle du consistoire, soit pour obvier au défaut de quelque qualité nécessaire, soit parce que l’on trouve de cette maniere plus de facilité pour l’expédition des provisions ; car elle se peut faire tous les jours par la daterie, au lieu que la voie du consistoire est plus longue, le consistoire ne se tenant que dans certains tems ; mais il en coûte un tiers de plus pour faire expédier par la chambre. Voyez le traité de l’usage & pratique de la cour de Rome de Castel, tome I. pag. 54. & tome II. pag. 107. & suiv. (A)
Consistoire : on donnoit aussi ce nom aux assemblées que les Religionnaires tenoient pour le reglement de la discipline de leur religion, & aux lieux destinés à tenir ces sortes d’assemblées.
Ayant cessé d’être permises au moyen de la révocation de l’édit de Nantes, il y a eu une déclaration du Roi du 21 Août 1684, portant que les biens immeubles, rentes, & pensions données ou léguées aux pauvres de la religion Prétendue Réformée, ou aux consistoires pour leur être distribués, lesquels se trouvoient possédés par lesdits consistoires, ou aliénés depuis le mois de Juin 1662, seroient délaissés aux hôpitaux des lieux où étoient lesdits consistoires ; & en cas qu’il n’y en eût point, à l’hôpital le plus prochain. Voyez la déclaration du 19 Octobre 1623, & autres postérieures, concernant la religion Prétendue Réformée. (A)
Consistoire de la Bourse, (Comm.) c’est à Toulouse le bureau où s’assemblent les prieur & consuls des marchands de cette ville, pour y tenir leur jurisdiction, juger les affaires des particuliers, ou y traiter de ce qui concerne celles de la bourse même. Voyez Bourse, & les dictionn. du Com. & de Dish. (G)