L’Encyclopédie/1re édition/HIRPES

La bibliothèque libre.
Briasson, David l’aîné, Le Breton, Durand (Tome 8p. 220).
◄  HIRONDELLE
HIRPINIENS  ►

HIRPES, s. m. pl. (Littérat.) familles particulieres d’Italie, qui habitoient le territoire des Falisques. Ces familles en petit nombre, avoient en leur faveur un decret perpétuel du sénat qui les exemptoit d’aller à la guerre, & de toutes autres charges, parce qu’elles fournissoient des prêtres, qui dans un sacrifice qu’on faisoit toutes les années à Apollon, au mont Soracte, marchoient nuds piés en présence de tout le peuple sur des charbons ardens, sans souffrir aucun mal ; c’est pour cette raison qu’Arons, qui étoit du nombre des prêtres de ces familles, parle ainsi dans l’Enéide, liv. XI. v. 785.

Summe deûm, sancti custos Soractis Apollo
Quem primi colimus, cui pineus arbor acervo
Pascitur, & medium freti pietate per ignem
Cultores, multa premimus vestigia prima.

Virgile est admirable ; il savoit aussi-bien que Servius son commentateur, aussi bien que Pline & Varron, que ces prêtres ne marchoient impunément sur des brasiers, qu’après s’être frottés les piés avec quelque préparation ; mais le prince des poëtes latins respectoit la religion & les préjugés de son pays, & ne s’en servoit que pour l’embellissement de son ouvrage.

Strabon assure que le sacrifice dont j’ai parlé, étoit en l’honneur de Féronie, voyez Féronie. Vous y trouverez l’explication de tout cela, & même l’interprétation des vers de Virgile, en faveur de ceux qui ne sont pas familiarisés avec la langue de ce poëte.

J’ajoûte ici qu’il y avoit encore plus anciennement d’autres lieux où se donnoit le même spectacle ; & c’est toûjours Strabon qui me l’apprend. Diane, surnommée Pérasia, avoit un temple à Castabala dans la Cappadoce, où les prêtresses de ce temple marchoient piés nuds sur la braise sans se brûler, ubi aiunt, dit notre géographe, lib. XII. p. 370, sacrificas mulieres illæsis pedibus, per prunas ambulare. Nous ne recherchons point les artifices qu’on pouvoit pratiquer dans cette occasion pour tromper les spectateurs ; c’est assez de dire que nos bateleurs font des choses bien plus surprenantes que tout ce que les anciens content des hirpes & des prêtresses de Castabala, & cependant ce ne sont que de simples tours d’escamotage. (D. J.)