L’Encyclopédie/1re édition/INFAILLIBILITÉ
INFAILLIBILITE, s. f. (Théolog.) don d’être infaillible, c’est-à-dire de ne pouvoir ni se tromper ni être trompé. Voyez Infaillible.
Les Théologiens catholiques conviennent tous que l’Eglise a reçû de Jesus-Christ le don d’infaillibilité lorsqu’elle est assemblée dans un concile écuménique ; & ceux qui dans ces derniers tems ont contesté cette prérogative à l’Eglise dispersée, semblent n’avoir pas assez fait attention à la promesse que Jesus-Christ a faite à son Eglise d’être avec elle, c’est-à-dire de l’assister de ses lumieres & de son esprit tous les jours jusqu’à la consommation des siecles. Les Protestans contestent à l’Eglise même assemblée son infaillibilité.
On distingue deux sortes d’infaillibilités, l’une passive, qui fait que toute la société des Fideles ne peut jamais succomber à l’erreur ; l’autre active, accordée seulement à tous les pasteurs de l’Eglise pris collectivement, & en vertu de laquelle ils décident sans pouvoir se tromper, tous les points qui concernent la foi & la morale. Les Protestans reconnoissent la premiere sorte d’infaillibilité & rejettent la seconde, sur des prétextes qu’eux-mêmes combattent tous les jours dans la pratique, puisqu’ils déferent à l’autorité de leurs synodes & consistoires.
Les Théologiens ajoutent encore que l’infaillibilité de l’Eglise s’étend aux faits dogmatiques non révélés, c’est-à-dire à l’attribution de tel ou tel sens à telle ou telle doctrine. Ce point a donné lieu à de vives disputes dans ces derniers tems au sujet du livre de Jansenius.
Les principales raisons qu’on allegue en faveur de l’infaillibilité active de l’Eglise, sont tirées 1°. des promesses de Jesus-Christ & de la doctrine des Apôtres, sur-tout de saint Paul : 2°. de l’obscurité des écritures : 3°. de l’insuffisance du jugement privé & de la difficulté de la méthode de discussion pour les simples en matiere de religion, & par conséquent de la nécessité où l’on est d’avoir un juge infaillible pour la décision des controverses.
L’infaillibilité du pape est une opinion particuliere de quelques Théologiens, rejettée par le plus grand nombre, & sur-tout par l’Eglise gallicane.