L’Encyclopédie/1re édition/MÉLODIE
MÉLODIE, s. f. en Musique, est l’arrangement successif de plusieurs sons, qui constituent ensemble un chant régulier. La perfection de la mélodie dépend des regles & du goût. Le goût fait trouver de beaux chants ; les regles apprennent à bien moduler : il n’en faut pas davantage pour faire une bonne mélodie.
Les anciens resserroient plus que nous le sens de ce mot : la mélodie n’étoit chez eux que l’exécution du chant ; sa composition s’appelloit mélopée : l’une & l’autre s’appelle chez nous mélodie. Mais comme la constitution de nos chants dépend entierement de l’harmonie, la mélodie ne fait pas une partie considérable de notre musique. Voyez Harmonie, Melopée, &c. Voyez aussi l’article Fondamentale sur cette question, si la mélodie vient de l’harmonie. (S)
Mélodie oratoire, (Art oratoire.) accord successif des sons, dont il n’existe à la fois qu’une partie, mais partie liée par ses rapports avec les sons qui précédent & qui suivent ; comme dans le chant musical, où les sons sont placés à des intervalles aisés à saisir : c’est le ruisseau qui coule.
La mélodie du discours consiste dans la maniere dont les sons simples ou composés sont assortis & liés entr’eux pour former des syllabes ; dans la maniere dont les syllabes sont liées entr’elles pour former un mot ; les mots entr’eux pour former un membre de période, ainsi de suite.
Toutes les langues sont formées de voyelles, de consonnes & de diphthongues, qui sont des combinaisons de voyelles seulement. On a fait ensuite les syllabes, qui sont des combinaisons des voyelles avec les consonnes. De ces combinaisons primordiales du langage, les peuples ont formé leurs mots, qu’ils ont figuré au gré de certaines lois, que l’usage, l’habitude, l’exemple, le besoin, l’art, l’imagination, les occasions, le hasard ont introduits chez eux. C’est ainsi que de sept notes, les Musiciens ont composé non-seulement différens airs, mais différentes especes, différens genres de musique.
Ceux qui ont traité de la mélodie, nous disent que les lettres doivent se joindre entr’elles d’une maniere aisée ; qu’il faut éviter le concours trop fréquent des voyelles, parce qu’elles rendent le discours mou & flottant ; celui des consonnes, parce qu’elles le rendent dur & scabreux ; le grand nombre des monosyllabes, parce qu’elles lui ôtent sa consistance ; celui des mots longs, parce qu’ils le rendent lâche & traînant ; il faut varier les chûtes, éviter les rimes, mettre d’abord les plus petites phrases, ensuite les grandes ; enfin il faut, dit-on, que les consonnes & les voyelles soient tellement mêlées & assorties, qu’elles sa donnent par retour les unes aux autres, la consistence & la douceur ; que les consonnes appuient, soutiennent les voyelles ; & que les voyelles à leur tour, lient & polissent les consonnes ; mais tous ces préceptes demandent une oreille faite à l’harmonie. Ils ne doivent pas être toujours observés avec bien du scrupule ; c’est au goût à en décider. Il suffit presque que le goût soit averti qu’il y a là dessus des lois générales, afin qu’il soit plus attentif sur lui-même. (D. J.)