L’Encyclopédie/1re édition/MOUFFLE
MOUFFLE, s. f. (Méch.) est une machine qui consiste en un assemblage de plusieurs poulies, dont on se sert pour élever des poids énormes en peu de tems.
La multiplication des poulies dans la mouffle est fort bien imaginée, car l’on démontre en Méchanique, que la force nécessaire pour soutenir un poids par le moyen d’une mouffle est au poids lui-même comme l’unité est au nombre des poulies ; en supposant que les cordes soient paralleles entre elles. Voyez Poulie.
D’où il suit que le nombre des poulies & la puissance étant donnés, on trouve aisément le poids qu’elles pourront soutenir en multipliant la puissance par le nombre des poulies. Par exemple, supposons que la puissance = 50 livres, & le nombre des poulies = 5, elles pourront être en équilibre avec un poids de 250 livres.
De même le nombre des poulies étant donné avec le poids qu’elles doivent soutenir, on trouve la puissance en divisant le poids par le nombre des poulies : par conséquent, si le poids = 900 livres, & le nombre des poulies = 6, la puissance sera 150 livres.
De Chales observe que l’on trouve par expérience, qu’un homme ordinaire peut élever avec sa seule force 150 livres ; c’est pourquoi le même homme, avec une mouffle à 6 poulies pourra soutenir un poids de 900 livres.
En joignant ensemole plusieurs mouffies on augmentera la puissance des poulies.
Pour trouver le nombre des poulies que doit avoir une mouffle, afin d’élever un poids donne avec une puissance donnce, divisez le poids par la puissance, le quotient est le nombre cherche.
Supposez, par exemple, que le poids = 600 livres & la puissance 150, il doit y avoir 4 poulies à la mouffle. Voyez la fig. 50. machine qui represente une mouffle à 4 poulies. Voyez aussi l’article Poulie.
Remarquez que nous faisons ici abstraction de la résistance & du poids des cordes qui doit augmenter la puissance & la rendre plus grande que nous ne l’avons faite dans les calculs précédens. Voyez Corde & Frottement. Il peut même arriver que les poulies soient si fort multipliées, que la mouffle au-lieu d’être utile soit embarrassante, à cause de la quantité considérable des frottemens & de l’embarras que produit la multiplicité des cordes. Au reste, la maniere la plus avantageuse dont les cordes puissent être disposées, c’est d’être toujours dans une situation parallele, car alors la puissance est la plus petite qu’il est possible par rapport au poids ; ainsi il faut que la mouffle soit faite de façon que les cordes y puissent conserver toujours à-peu-près cette situation. (O)
Mouffle, (Chimie.) partie essentielle du fourneau d’essai ou de coupelle, voyez à l’article Fourneau, dont on ne peut donner une meilleure idée que celle d’un petit four mobile, dont le sol & la voûte sont en tout d’une seule piece, ou chacun d’une seule piece, dont la forme est ordinairement celle d’un demi-cylindre creux, fermé par l’un de ses bouts, & ouvert par l’autre, qui est formé par une table très-mince de terre cuite, & qui est destiné à être chauffé par le dehors, c’est-à-dire à concevoir la chaleur qu’on veut exciter dans son sein, par l’application d’une foible chaleur extérieure. La porte de ce petit four, qui est très-considérable, par rapport à sa capacité, & qui n’est autre chose que le bout entierement ouvert du demi-cylindre, s’ajuste exactement à une porte de pareille grandeur ou à-peu-près, pratiquée à ce dessein dans la face antérieure du fourneau d’essai Voyez les planches de Chimie.
On trouve dans la premiere partie du Schulter de M. Hellot, les considérations suivantes sur la qualité, la construction & l’emploi des mouffles. « Les mouffles doivent être de la meilleure terre qu’on puisse trouver, & qui résiste le mieux au feu. Au Hartz, on se sert de celles qui se font dans le pays de Hesse ; elles sont excellentes & durent très-long-tems : on les fait de la même terre que le creuset qu’on emploie aux essais des mines de plomb, de cuivre, même de fer.
« Les fournalistes de Paris en font aussi de très bonnes ; ils les forment de trois parties de terre glaise des environs d’Arcueil & d’Issi, dont ils ont ôté exactement les pyrites, & qu’ils ont mêlée avec deux parties de pot-à-beurre de Normandie réduit en poudre modérément fine.
« Schulter choisit pour les faire, une bonne terre glaise : il la mêle avec du sable & du verre pilé, parce que cette terre se fendroit si on l’employoit seule. Il prend deux tiers de cette terre bien triée & nettoyée : il y ajoute un sixieme de verre pilé & un sixieme de bon sable pur, il fait paîtrir le tout pendant plusieurs heures, afin que le mélange soit par-tout le plus égal qu’il est possible. Il préfere cependant les creusets de Hesse réduits en poudre, au verre & au sable. La capacité d’une mouffle se regle sur la grandeur du fourneau : elle doit avoir de long huit de ses parties sur cinq de large, & trois & demie de hauteur. Borrichius & plusieurs essayeurs d’Allemagne les demandent de deux pieces ; l’une est une espece de voûte représentant à-peu-près la coupe d’un demi-cylindre creux, ferme à son fond : les côtés & le fond sont percés de plusieurs trous pour donner passage à quelques jets de flamme : le bas de ces côtés doit être un peu recourbé pour recevoir une planchette de terre bien cuite, composée comme celle de la voute. Cette planchette mobile est le sol ou tablette sur laquelle on place les coupelles.
« Que ces mouffles soient d’une seule ou de deux pieces, il faut que les trous des côtés & du fond soient percés très-près de la tablette, & fort petits, sans quoi le charbon qui petille, fait aller jusque sur les coupelles de petits éclats qui retardent les essais, en ressuscitant le plomb, à mesure qu’il se convertit en litharge. Cependant, dans quelques endroits de l’Allemagne, on est dans l’usage de faire ces trous des côtés & du fond de la mouffle beaucoup plus grands & en arc : mais alors on est obligé de gouverner le feu, ou la chaleur du dedans de la mouffle, par de petites pieces de terre cuite que l’on nomme instrumens, ce qui devient une difficulté pour ceux qui ne sont pas dans l’habitude de s’en servir. Ainsi j’estime mieux une mouffle percée de petits trous d’une ligne ou d’une ligne & demie de diametre ; les essais y passent aisément ; & au cas que la chaleur n’y soit pas assez forte pour quelques épreuves, comme pour rafiner un bouton de cuivre noir en cuivre rosette, on y remédie en mettant du charbon allumé dans l’intérieur de cette mouffle ». Voyez Instrumens Docim. (b)
Mouffle, terme de Gantier, espece de gant fourré dont les doigts ne sont point séparés, & qu’on appelle aussi des mitaines. Voyez Mitaine.
Moufle, s. f. (Serrurerie.) barres de fer à l’extrémité desquelles on a pratiqué des yeux. On contient ces barres par des clavettes qui passent dans les yeux. Les pieces auxquelles on applique des mouffles sont contenues dans l’état qu’on leur veut. C’est par cette raison qu’on moufle les cuves, & les murs, lorsqu’ils tendent à s’écarter. Il faut distinguer trois parties dans la moufle double, deux yeux l’un au-dessus de l’autre, entre lesquels il y a un espace suffisant pour recevoir l’autre extrémité de la moufle, qui est par cette raison en fourche ; la partie qui n’a qu’un œil & qui se place dans la fourche, & la clavette qui lie le tout & forme la moufle complette. Pour faire une moufle on prend une barre de fer plat que l’on coupe de la longueur convenable ; on la fend où l’ouvrier pratique l’œil ; on plie la partie fendue en deux, & l’on soude le bout plié avec le reste de la barre, observant de donner à l’œil autant d’espace qu’en exige la clavette, & d’ouvrir la fourche assez pour recevoir l’autre partie de la moufle. Cela fait, on prend une autre barre, on l’étrécit par le bout ; on lui donne, en l’étrécissant, la figure qui convient à l’ouverture de la moufle ; on place cette partie comme la premiere ; on la soude avec la premiere barre : cela fait on forge la clavette, & la moufle est finie.