L’Encyclopédie/1re édition/PARTITIF, ve

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PARTITIF, ve, adj. ce terme est usité en Grammaire pour caractériser les adjectifs, qui désignent une partie des individus compris dans l’étendue de la signification des noms auxquels ils sont joints ; comme quelque, plusieurs, &c. Les Grammairiens latins regardent encore comme partitifs, les adjectifs comparatifs & superlatifs, les adjectifs numéraux, soit cardinaux, comme un, deux, trois, &c. soit cardinaux, comme premier, second, troisieme, &c. parce qu’en effet tous ces mots désignent des objets extraits de la totalité, au moyen de la qualification comparative, superlative, ou numérique, désignée par ces adjectifs. Plusieurs de nos anciens auteurs, il ne s’agit pas ici de tous nos anciens auteurs, mais d’une partie indéterminée qui est désignée par l’adjectif plusieurs, qui par cette raison est partitif. Deux de mes amis ; il s’agit ici, non de la totalité de mes amis, mais d’une partie précise déterminée numériquement par l’adjectif cardinal ou collectif deux, qui est partitif.

Il me semble, que ce qui a déterminé les Grammairiens à introduire le nom & l’idée des adjectifs partitifs, c’est le besoin d’exprimer d’une maniere précise une regle que l’on jugeoit nécessaire à la composition des thèmes. Ger. Vossius dans sa syntaxe latine à l’usages des écoles de Hollande & de West-Frise, s’explique ainsi, pag. 194. edit. Lugd. Bat. 1645. Adjectiva partitiva… & omnia partitivè posita regunt genitivum pluralem, vel collectivi nominis singularem : ut, quis nostrûm… sapientum octavus… o major juvenum. … optimus populi romani… sequimur te sancte Deorum. Mais cette regle-là même est fausse, puisqu’il est certain que le génitif n’est jamais que le complément d’un nom appellatif, exprimé ou sousentendu : voyez Génitif. Et il y a bien plus de vérité dans le principe de Sanctius : (Miner. II. 3.) ubi partitio significatur, genitivus ab alio nomine sub intellecto pendet. Il indique ailleurs ce qu’il y a communément de sous-entendu après ces adjectifs partitifs ; c’est ex ou de numero (Ib. IV. 3.)  : on pourroit dire encore in numero. Ainsi les exemples allégués par Vossius s’expliqueront en cette maniere : quis de numero nostrûm ; in numero sapientum octavus ; ô major in numero juvenum ; optimus ex numero hominum populi romani ; sequimur te sancte in numero Deorum, & peut-être encore mieux, sancte supra cæteram turbam Deorum. Voyez Superlatif.

Des modernes ont introduit le mot de partitif dans la Grammaire françoise, & y ont imaginé un article partitif. La Touche, le P. Buffier, M. Restaut ont adopté cette opinion ; & il est vrai qu’il y a partition dans les phrases où ils prétendent voir l’article partitif, comme du pain, de l’eau, de l’honneur, de bon pain, de bonne eau, &c. Mais ces locutions ont déja été appréciées & analysées ailleurs, voyez Article ; & ce qu’elles ont de réellement partitif, c’est la préposition de qui est extractive. Pour ce qui est du prétendu article de ses phrases, ces Grammairiens sont encore dans l’erreur, & je crois l’avoir démontré. Voyez Indéfini. (B. E. R. M.)