L’Encyclopédie/1re édition/RÉDEMPTION

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RÉDEMPTION, redemptio ; l’action de racheter. Parmi les Chrétiens le mystere de la rédemption est la mort de Jesus-Christ mis en croix, & qui s’est offert à son pere comme victime pour nous, afin de nous délivrer de l’esclavage du péché & du démon, auquel le péché d’Adam nous avoit assujettis. Cette rédemption a non-seulement été suffisante, mais encore surabondante. Dieu nous en applique les mérites par les sacremens, & principalement par le baptême. Elle est offerte à tous, mais tous n’en retirent pas également le fruit. Voyez Prédestination, Réprobation, Volonté en Dieu.

Rédemption, (Théologie.) quand on lit avec attention les écrits des Peres, on ne peut douter qu’ils n’aient cru que l’Etre suprême veut en général le salut de tous les hommes ; qu’il n’y en a aucun qui par la mort de Jesus-Christ ne puisse être reconcilié avec Dieu, & qu’il fait offrir à certaines conditions le salut à tous.

Clément Alexandrin étoit grand universaliste : on trouve à chaque page de ses écrits des traits qui l’indiquent.

« Dieu se propose, dit-il in protreptico, p. 72, de sauver le genre humain ; c’est pour cela que ce Dieu tout bon, a envoyé le bon pasteur ». Il dit dans ses stromates, l. VII. p. 702. que Dieu est le sauveur de tous, non de ceux-ci, & point de ceux-là : Σωτὴρ γάρ ἐστιν, οὐχὶ τῶν μέν, τῶν δ’οὔ. Et peu après il ajoute : « comment est-il sauveur & seigneur, s’il n’est pas seigneur & sauveur de tous ?… Jamais donc le sauveur n’a en haine les hommes, lui qui par un effet de sa charité, n’ayant point dédaigné de prendre une chair infirme, est venu en chair pour le salut commun de tous ».

Irénée, liv. V. c. xvij. dit que « dans les derniers tems Notre Seigneur établi médiateur entre Dieu & les hommes, a appaisé pour tous le pere contre qui nous avions péché, ayant réparé notre desobéissance par son obéissance ».

Origene pensoit de la même façon ; il dit, l. I. in Jobum, « que Jesus-Christ étant venu sur la terre, a souffert en son corps pour le salut de tous les hommes ». Il insiste sur cette doctrine en divers endroits. Dans son traité contre Celse, il dit l. IV. p. 135, « qu’il ne tient pas à Jesus-Christ que sa vertu ne se fasse sentir par-tout, puisqu’il est venu pour être le sauveur de tout le genre humain ».

Les docteurs dont nous exposons les sentimens, n’étoient pas moins universalistes sur l’article de l’offre que Dieu fait de sa grace à tous les hommes. Clément d’Alexandrie tient encore ici un rang distingué. Il dit, in protreptico, p. 55. « que comme Dieu aime les hommes, il les appelle tous à la connoissance de la vérité, ayant envoyé le Paraclet. Ecoutez, dit-il, vous qui êtes loin ; écoutez aussi, vous qui êtes près ; la parole n’est cachée à personne ; c’est une lumiere commune ; elle brille pour tous les hommes, &c. »

Origene est dans les mêmes idées, comme on le voit en divers endroits de son traité contre Celse. « Que les savans, dit-il dans cet ouvrage, l. III. p. 116. de la traduction de Bouhereau, que les sages, que les prudens approchent s’ils veulent ; mais que les ignorans, les fous, les étourdis & les simples, ne laissent pas d’approcher hardiment aussi, car notre doctrine promet de guérir ceux qui sont dans ce mauvais état, & de les rendre tous dignes de Dieu. C’est une fausseté d’avancer que les prédicateurs de cette sainte doctrine ne veulent gagner que des personnes sans esprit, sans jugement & sans vertu, des femmes, des enfans & des esclaves. Il est vrai qu’elle invite toutes ces personnes à la suivre, afin de les corriger de leurs défauts ; mais elle y invite aussi ceux qui ont d’autres qualités meilleures ; car Jesus-Christ est le sauveur de tous les hommes, & principalement des fideles, sans avoir égard soit à leur sagesse, soit à leur simplicité ; il est la victime de propitiation offerte au pere pour nos péchés, & non-seulement pour les nôtres, mais aussi pour ceux de tout le monde ».

Les curieux trouveront un grand nombre de passages semblables dans Vossius, hist. Pelag. l. VII. part. I. thesi 2. 3. 4.

Enfin il est constant que la plûpart des Peres ont été universalistes, & S. Augustin paroît avoir embrassé ce sentiment dans son exposition de ces paroles de S. Paul : Dieu veut que tous les hommes soient sauvés. En premier lieu, dit-il, il veut que tous soient sauvés en tant qu’il n’y en a aucun de sauvé que Dieu n’ait dessein de sauver, à peu-près comme l’on dit d’un maître qu’il enseigne telle ou telle science à tout le monde, parce qu’il n’y a personne de ceux qui l’étudient, qui ne l’apprenne de ce maître. En second lieu il veut que tous soient sauvés, c’est-à-dire des personnes de toute nation, de tout sexe, de tout âge, de toute condition. En troisieme lieu, l’apôtre parle d’une volonté de Dieu antécédente & conditionnelle, de la même maniere qu’on peut dire d’un juge, qu’en général il veut la vie de tous les hommes en les considérant exempts de crimes, & par une volonté conséquente, il veut que tel ou tel soit puni de mort, en tant que coupable de meurtre, ou d’autre crime. Voyez Prédestination, Hist. ecclés. (D. J.)

Rédemption des Captifs, ou Notre-Dame de la Mercy, (Hist. ecclésiast.) ordre militaire, & ensuite religieux, fondé par S. Pierre Nolasque, par S. Raimond de Rochefort, & par Pierre, roi d’Arragon. Les religieux de cet institut, outre les trois vœux ordinaires, de la religion, de chasteté, de pauvreté & d’obéissance, en font un quatrieme de s’employer pour la délivrance des esclaves chrétiens, détenus par les Barbares, & même d’entrer en servitude pour la liberté des fideles. Les papes ont approuvé cet ordre, & lui ont accordé divers privileges.