L’Encyclopédie/1re édition/REBELLION

La bibliothèque libre.

REBELLION a justice, (Jurisprud.) est la résistance que quelqu’un apporte à l’exécution d’un jugement, ou à quelque exploit ou autre acte de justice, & en général à tout ce qui est émané de la justice ou de ses ministres, en vertu du pouvoir qu’ils tiennent d’elle, à l’exécution des mandemens émanés du roi ou de ses officiers préposés pour l’administration de la justice.

Les ordonnances mettent ce crime au nombre des cas royaux.

Il se commet principalement lorsque l’on outrage & excede les magistrats & autres officiers de judicature, & les huissiers & sergens exerçant quelque acte de justice ; dans ce cas la rebellion est punie de mort sans espérance d’aucune grace. Telle est la disposition de l’ordonnance de Moulins, art. 34, & de celle de Blois, art. 190, renouvellée par l’art. 4 du tit. 16 de l’ordonnance de 1670 ; & s’il arrive que le coupable soit tué en faisant rébellion à force ouverte, le procès doit être fait à son cadavre ou à sa mémoire, suivant l’art. 1 du tit. 22 de l’ordonnance de 1670.

Ceux qui se louent ou s’engagent pour retirer des mains de la justice un prisonnier pour crime, commettent une autre espece de rébellion, pour laquelle l’ordonnance de 1670, tit. 16, art. 4, défend aussi d’accorder des lettres de grace.

Il y a d’autres cas où la rebellion à justice n’est pas punie si séverement : ce qui dépend des circonstances. Ces cas sont ;

1°. Lorsque quelqu’un refuse d’ouvrir les portes à un commissaire ou autre personne chargée de l’exécution d’un jugement, & qu’il se tient fort dans sa maison ou château, pour résister à celui qui est porteur des pieces. La peine de ce délit est seulement corporelle ou pécuniaire, selon les circonstances ; il emporte aussi la démolition de la maison ou château, & la confiscation des fiefs & justices. C’est la disposition de l’art. 2 de l’édit de Charles IX. donné à Amboise en Janvier 1572.

2°. Ceux qui s’emparent par violence des fruits & revenus des biens saisis par autorité de justice, ne doivent aussi être punis que d’une peine corporelle ou pécuniaire, à l’arbitrage du juge, suivant l’art. 5 du même édit ; il ordonne à la vérité dans ce cas la confiscation des biens saisis, mais on ne prononce plus cette peine.

3°. Celui qui donne retraite à ceux que la justice poursuit pour les arrêter, doit, suivant l’art. 193 de l’ordonnance de Blois, être puni de la même peine que méritoit l’accusé ; mais cela ne s’observe pas à la rigueur, & la peine est modérée, suivant les circonstances du crime, & le motif qui y a donné lieu, comme si c’est par commisération, ou qu’il y ait parenté entre l’accusé fugitif & celui qui lui a donné retraite.

Enfin ceux qui favorisent l’évasion des accusés des mains de la justice ou des prisons, doivent, suivant l’édit de François I. du mois d’Août 1525, art. 15, être punis aussi séverement que s’ils avoient rompu les prisons, & ôté les prisonniers des mains de la justice ; mais présentement on distingue : si celui qui a favorisé l’évasion, avoit le prisonnier à sa garde, comme un geolier, un guichetier ou sentinelle, en ce cas, la peine est des galeres, suivant l’art. 19 du tit. 13 de l’ordonnance de 1670 ; à l’égard des autres personnes, on modere la peine, suivant les circonstances, comme on l’a dit ci-devant.

Quoiqu’un huissier ou autre officier de justice excede son pouvoir, il n’est pas permis de lui faire résistance à cause du respect dû à la justice même, dont il exécute les mandemens ; on a seulement la voie de se plaindre, & d’appeller de ce qui a été fait.

En cas de rébellion, les huissiers ou autres officiers chargés de mettre à exécution quelque ordonnance de justice, doivent en dresser leur procès-verbal signé d’eux & de leurs recors, & des voisins & autres assistans, si faire se peut, & remettre ce procès-verbal entre les mains du juge, pour y être pourvu,